Il a le sentiment de n’avoir jamais à ce point pleinement réalisé à quel point il aime Mutt. Ce n’est pas un sentiment qui le frappe tout à coup, ça fait quand même un moment maintenant qu’il a pris pleinement conscience de ce qu’il ressent pour son colocataire, mais là c’est… différent… parce qu’il a l’impression de ne rien avoir éprouvé réellement avant ce jour. Là, il redécouvre ce qui se passe en lui et hors de lui, et il en éprouve une impression de clarté tellement intense… Alors forcément, lui dire qu’il l’aime, dans ces circonstances, c’est évident, c’est nécessaire. Et ce n’est pas suffisant, en même temps. Il a l’impression qu’il devrait le lui dire des milliers de fois pour que ça puisse retranscrire ce qu’il éprouve… Ou alors, il faudrait un nouveau mot qui conviendrait davantage à exprimer tout ça, un langage universel, quelque chose qui transcenderait le langage… qui commencerait par un « h », ou un « w », quelque chose comme ça… En attendant de trouver les mots adéquats, ça lui va bien de juste… écouter Mutt lui répondre qu’il l’aime aussi. Et ça aussi, il a l’impression de jamais l’avoir ressenti ou entendu de cette manière si spécifique. Il se sent plus aimé, plus adoré que jamais.

Finalement, Mutt le résume parfaitement bien. C’est exactement ça… C’est comme s’ils pouvaient tout sentir l’un de l’autre, comme s’ils parvenaient à accéder à l’essence même de l’autre… c’est un truc absolument dingue. Même un regard de sa part brûle tout son être d’une chaleur si intense qu’il aurait presque l’impression de se consumer… Et il adore ressenti ça. Et il y a tout ce qu’ils n’ont pas ressenti encore, en plus du reste. L’esprit de Klaus fourmille d’un milliard d’idées, d’un milliard de pensées, il a envie de tout faire, de tout voir, de tout explorer, de tout vivre. Tout en même temps, sans leur laisser le temps de ne serait-ce que respirer, pour le seul plaisir de ne passer à côté d’aucune des opportunités vers lesquelles il se sent si violemment attiré, là, tout de suite.

Le rire de Mutt ainsi que ses paroles l’encouragent à pousser la connerie (parce que si on sort de la tête de Klaus cinq minutes pour regarder les faits objectivement, de l’extérieur, oui c’est une pure connerie)… Le coup du jacuzzi, non, c’est pas du génie, c’est stupide, mais rien ni personne ne saurait convaincre Klaus, en cet instant, de combien son idée est bonne. Le fait que Mutt approuve à cent pour cent n’arrange rien non plus, au demeurant. Alors que Klaus, fébrile, est déjà prêt à dévaliser le bar, il voit que Mutt galère à se redresser. Complètement à l’ouest, il ne comprend pas immédiatement qu’il est complètement à blâmer pour ça. Et à la place, pense juste que Mutt est juste trop défoncé pour tenir droit. Quand il découvre les lambeaux de latex où ils ne devraient pas être, Klaus n’éprouve pas de panique, pas plus qu’il n’a la finesse d’esprit d’admettre que c’est une chose dont ils devront éventuellement se préoccuper (ils verront ça demain – autant dire que les Mutt et Klaus du futur vont avoir du pain sur la planche, avec les conneries des Mutt et Klaus du présent, là). Non, plutôt que de se soucier de ça, il se marre à la remarque de Mutt comme si c’était la chose la plus drôle qu’il avait jamais entendue de toute sa vie.

« Tomber enceinte… putain t’es hilarant. »

Non, vraiment, ce n’est pas drôle à ce point-là. Peu importe, il rit au point qu’il s’en ferait presque mal aux côtes, un rire qui fait vibrer son être tout entier… ou du moins, le V lui en donne la très nette impression. Ça ne l’empêche cependant pas de courir à son secours dans tous les cas, tandis qu’il lui tend les bras pour l’aider à se redresser. La situation n’est pas spécialement drôle, mais Klaus continue de se marrer, tout en soutenant Mutt du mieux qu’il le peut. Mutt a pas l’air dans son assiette, mais pour Klaus, rien ne peut entacher cette soirée, il est absolument convaincu que le mal de Mutt est passager, et qu’il va revenir en force ensuite. A lui, de toute façon, ça le dérange pas de soutenir Mutt pour l’aider à marcher. De toute manière, il a pas envie de décoller sa peau de la sienne. La sensation que ça lui procure est beaucoup trop agréable, beaucoup trop intense.

« C’est comme si chacune de tes cellules faisait l’amour à chacune de mes cellules. Une immense partouze de cellules », résume Klaus à sa manière pour exprimer ce qu’il ressent en cet instant, un sourire goguenard aux lèvres.

Klaus l’entraîne jusqu’à l’extérieur, tout en pouffant légèrement en jetant un regard en arrière, au lit qu’ils ont totalement défoncé…

« Tu verras, une fois dans le jacuzzi, tu vas plus rien sentir », qu’il dit sans savoir le moins du monde quelle logique il pourrait y avoir à une affirmation telle que celle-ci. « Tu vas te buller tranquillement, et moi je vais chercher la boisson », affirme-t-il en exposant le plan du siècle.

Dorénavant à l’extérieur et complètement à poil, ils se les gèlent sévère, mais Klaus accueille chaque frisson sur sa peau comme une nouvelle expérience exaltante. Doucement, il invite Mutt à mettre un pied, puis l’autre, dans le jacuzzi, avant de reprendre.

« Je reviens. »

A l’intérieur, il cherche, fébrilement, tout l’alcool qu’il peut trouver, fouille chaque placard, trouve quelques bouteilles, achetées par Mutt sûrement, laissées dans un sac, puis tombe finalement sur le Saint Graal. Un minibar, évidemment fermé à clé, mais à ce stade, Klaus ne va pas s’arrêter à cette considération. Exalté, il éclate la vitre du minibar d’un coup de coude d’une force qu’il ne se pensait pas posséder. Son bras picote et saigne légèrement, mais il s’en fiche royal il balance TOUTES les bouteilles dans le cas de course, devenu excessivement lourd, qu’il traîne jusqu’au jacuzzi.

« A la nôtre », crie-t-il beaucoup trop fort avant de lever une bouteille tirée du sac vers le ciel, avant d’honorer ladite bouteille d’un baiser de reconnaissance.

L’instant d’après, il s’applique à vider les bouteilles une à une dans le jacuzzi, absolument hilare.

A mesure qu’il déverse le contenu de toutes les bouteilles qui ont pu sous la main dans le jacuzzi, il voit ce dernier prendre une couleur… étonnante… Ou bien c’est l’obscurité ambiante qui lui donne cet effet… ou bien c’est encore lui qui délire, il s’en fiche. L’espace de quelques secondes, il songe qu’il est une sorcière qui préparerait une potion nec plus ultra dans un immense chaudron… bon, vu que Mutt se trouve dedans, ce serait plus une sorcière qui préparerait de la soupe d’humains. Dans un cas comme dans l’autre, ça le fait définitivement trop marrer, et il ne peut s’empêcher de rire comme un con. De toute manière, là, globalement, tout, absolument tout, est susceptible de le faire marrer. Il se sent tellement euphorique à l’heure actuelle qu’il a juste besoin d’exprimer sa joie, c’est tout. Il ne se rend pas compte d’à quel point Mutt est épuisé de son côté, lui, il a l’impression qu’il pourrait encore durer des heures et des heures, comme ça. Et il y a encore plein de choses qu’il a envie de faire… Genre… Courir sur la plage à poil et… et… tout un tas d’autres trucs, peu importe.

« Tout juste », affirme Klaus avec un immense sourire quand Mutt suggère qu’ils doivent boire tout le contenu du jacuzzi. Et il déconne pas avec ça. En qui d’illustration, il décide d’avaler une bonne gorgée d’eau, qu’il boit trop rapidement. Alors qu’il s’étouffe à moitié, il affiche une mine dégoutée. « Ça a un goût de vieux médicament. »

Mais une fois de plus, ça le fait rire, et abandonnant donc l’idée de boire encore l’imbuvable jacuzzi, il se laisse attirer dans le giron de Mutt, toujours aussi rayonnant, et se serre aussi fort qu’il le peut contre lui. Est-ce qu’ils peuvent rester comme ça très longtemps ? Il n’en sait rien, mais il ne peut qu’être d’accord avec Mutty. Lui aussi ne veux plus se détacher de lui, plus jamais. La sensation de sa peau contre la sienne lui est beaucoup trop essentielle. C’est comme s’il perdait une partie de lui quand il était loin. Et quand ils se prenaient la tête, c’était encore pire… c’était juste insupportable… Il ne le découvre pas là maintenant, mais c’est juste plus évident, parce que leur connexion semble elle aussi plus forte. Ou non, elle est toujours aussi forte, mais là, tout de suite, il arrive à comprendre réellement à quel point, comme s’il avait besoin d’atteindre cet espèce d’état transcendant pour véritablement le réaliser.

« Je te lâcherai jamais. Je peux pas te lâcher, j’y arriverai jamais même si je pouvais. Tu comprends ? On peu pas. Toi et moi, on est genre…. Des aimants ou… non, c’est nul comme comparaison. Un truc tu vois, qui aurait pas de sens si on le voit tout seul, mais si on se rassemble, tout de suite, ça devient juste évident. Genre les pièces d’un puzzle, tu vois. » Klaus serre Mutt encore plus fort contre lui, l’embrasse passionnément. « Je t’aime. Et t’inquiète pas, ce soir c’est rien, ce soir c’est un grain de poussière dans toute notre vie… On a demain, puis le jour d’après, puis le jour encore après. » Il l’embrasse de nouveau. « Si tu veux qu’on aille se coucher, on va se coucher. »

D’un point de vue extérieur (mais heureusement, il n’y a personne pour assister à cette scène), on pourrait peut-être affirmer qu’ils en font trop, tous les deux, alors qu’ils se lancent dans de grandes déclarations l’un vis-à-vis de l’autre, mais le fait est que chacun des mots que Klaus prononce à l’adresse de Mutt est un milliard de fois pensées. Certes, il ne les formulerait peut-être pas de cette manière dans son état normal (surtout pour la partouze de cellule), n’empêche que c’est vrai, et ainsi, totalement désinhibé, il ressent le besoin impérieux de faire comprendre à Mutt à quel point il l’aime, et à quel point cet amour le rend dingue, et combien il serait incapable de vivre sans lui, ce genre de choses. Le V, c’est bien, c’est même vachement, vachement bien, mais la sensation que lui procure Mutt depuis qu’il est entré dans sa vie, c’est sans comparaison possible. Un truc parfaitement dingue, et qui lui dévore les sens.

Quand la fatigue prend le dessus sur Mutt, Klaus, lui, se sentirait prêt à rester éveillé encore de nombreuses heures, mais il ne proteste pas, il n’insiste pas quand Mutt lui dit capituler. Il s’en fiche de rester allongé et de juste regarder Mutt dormir, si ça doit se passer comme ça, tout ce qu’il veut, c’est ne pas quitter ses bras. Et c’est ce qu’il fait, dans un premier temps. Combien de temps exactement ? Il serait bien incapable de le dire. Le temps n’a plus l’air de s’écouler de la même manière, dans tous les cas. Il se contente de savourer le grain de peau de celui qui partage son lit (toujours défoncé, le lit, au passage), comme s’il le voyait pour la première fois, et il le trouve tellement beau qu’il est convaincu qu’il pourrait se perdre dans la contemplation de tout ce qui le constitue pendant des heures et des heures. Malgré tout, le sommeil finit bel et bien par le gagner, il ne sait pas trop quand ni comment… et la drogue continue manifestement de faire effet dans son sommeil, parce qu’il fait définitivement les rêves les plus étranges et les plus enivrants qu’il ait faits de toute sa vie.

Il est sur un petit nuage, parfaitement endormi, quand il entend la voix de Mutt, lointaine, quelque part près de lui… Calinant son oreiller, il n’est pas encore prêt à ouvrir les yeux, mais s’y voit contraint alors qu’il se prend un coup d’oreiller sur la tête. Klaus se redresse d’un bond, il a un sourire béat, naturel, sur le visage, mais on ne peut pas en dire autant de Mutt. Quand il parle de se lever, du fait qu’il va pas y arriver, Klaus se frotte les yeux, dans l’incompréhension la plus totale. Pas qu’il ait oublié les événements de la veille, mais il est encore dans le coltard, et loin, très loin d’avoir toutes ses idées en place. Et il voit le visage de Mutt se tordre, le regarde fondre en larmes… puis répéter qu’il le déteste… cette fois, Klaus se lève d’un bon, piqué à vif de bon matin, et toujours pas capable de comprendre ce qu’on lui reproche.

« C’est à cause du lit que tu te mets dans tous tes états ? C’est bon, t’inquiète, j’en paierai un autre ! »

Avec quel argent, ça, mais lui il a pas envie d’en faire tout un drame non plus, l’argent, il l’empruntera s’il faut, et puis ça va, il a bien fallu qu’ils soient deux pour le casser, le lit. Quand il y pense, ils y sont allés forts, quand même…
Et alors ça lui revient, tout doucement, le jacuzzi, le bar défoncé, la capote déchirée, et pas que la capote…

« Oh merde, merde, Mutty ! J’suis désolé, vraiment, je vais arranger ça, je vais… » mais il a aucune idée de comment il pourrait arranger ça. « Viens, je vais t’aider à te lever. Je vais te faire couler du café, te préparer un petit déj d’enfer, et ça va aller. »

D’accord, Klaus est complètement à côté de la plaque, mais en même temps, il ne voit tout simplement pas quoi faire ou quoi dire, c’est pas comme si tout à coup il pouvait revenir sur toutes les conneries qu’ils avaient faites la veille, tout ce qu’il peut faire, c’est essayer de se racheter, et ça lui laisse pas beaucoup d’option. Car oui, Mutt a raison, Klaus est fauché comme les blés, et c’est une situation qu’il n’a jamais cherché à réparer, au passage. Il n’a pas envie de s’emmerder avec du travail s’il n’a pas l’impérieuse nécessité de travailler, et même s’il a parfois des scrupules à laisser son colocataire tout payer, il n’a jamais vraiment cherché à résoudre cette situation pour autant… Égoïstement ? C’est bien possible, il n’a jamais eu l’impression que ça dérangeait Mutt tant que ça en fin de compte… Mais il ne peut pas se défendre du fait d’être sans le sou, un chômeur devant l’éternel (et encore, pour ça, il faudrait qu’il touche le chômage, en fait). Et il a pas envie de s’en défendre. C’est pas comme s’il avait caché le fait qu’il était un branleur fini au moment d’emménager chez Mutt… Il avait même fait plus d’une fois la blague de lui payer son loyer « en nature ». Mais ouais, forcément, cette situation et l’état où se trouve Mutt à l’heure actuelle ne va pas l’encourager à se montrer conciliant… Et lui, il ne peut rien dire qui arrondisse les angles.

A l’heure actuelle, il a vraiment le sentiment que quoi qu’il puisse dire ou faire, de toute manière, il se fera hurler dessus. Klaus essaie d’être patient, parce que voir Mutt aussi mal lui fait du mal, mais se laisser insulter et traiter comme une merde pour autant. Ils étaient deux à avoir merdé la veille au soir, et même si le cul de Klaus s’en tirait en un seul morceau, c’est pas pour autant qu’il doit accuser toute la responsabilité de leurs conneries à tous les deux. Ils ont merdé en duo, et même… est-ce qu’ils ont merdé… ? Oui, le résultat est là, d’accord, mais chaque souvenir qu’il associe à leur soirée reste… exceptionnel ? Il continue d’avoir le sentiment d’avoir passé la meilleure soirée de sa vie. Suffisamment exceptionnelle pour que le jeu en vaille la chandelle. Mais une fois de plus, c’est pas lui qui s’est retrouvé avec le cul défoncé. Forcément, ça doit un peu modifier les perspectives.

« OK… OK… » Il amorce le mouvement pour quitter la pièce et préparer le fameux café qui ne résoudra rien du tout, mais s’interrompt en plein mouvement. « Non, tu sais quoi, c’est trop facile. Je vais pas m’en manger plein la gueule parce que tu vas pas être fichu de reconnaître que t’as merdé, toi aussi. C’est toi qui as voulu qu’on prenne cette merde, là… »

S’il en parle en ces termes, ce n’est pas vraiment un terme qu’il trouve approprié… ceci dit, vu les circonstances oui, c’est le meilleur choix de vocabulaire qui lui vient à l’esprit.

« Ton cul va s’en remettre, pas la peine d’en faire une affaire d’État non plus. »

Enfin, il espère, surtout, que ce n’est pas trop grave, parce qu’à le voir si mal, il s’inquiète, et c’est aussi cette inquiétude qui fait qu’il se sent l’obligation de surréagir.

« Je vais t’aider, mais seulement si tu arrêtes de te comporter en connard. Si t’as juste l’intention de m’envoyer chier non stop, je nous fais gagner du temps et je me casse. »

Si Klaus donne l’impression de s’en foutre, c’est en vérité loin d’être le cas, mais faute de pouvoir faire quoi que ce soit pour aider Mutt à souffrir moins, et faute d’avoir envie de s’en manger plein la gueule, il réagit comme il peut. Bien sûr qu’il sait que ça va pas juste passer comme ça, mais ça va passer… enfin, il suppose ? Pas dans la seconde mais… S’il dit ça, c’est d’expérience. C’est que bon… il s’en est passé, des choses, par la porte de derrière, et tout n’a pas été une partie de plaisir, vraiment pas (les décisions connes en matière de parties de jambes en l’air, il a pas attendu Mutt pour en prendre, ceci dit, ce dernier n’arrange pas du tout son cas, et ça n’a pas l’air près de s’améliorer). Non, il ne pense pas que Mutt joue la comédie, et c’est bien parce qu’il s’en rend compte qu’il se sent comme ça… Il est sur la défensive parce qu’il se sent fustigé, et qu’il n’a pas besoin de ça pour se sentir coupable, à mort…

Et puis, il sait pas quoi faire. La location est sens dessus dessous. Le jacuzzi a pris une couleur chelou, c’était pas juste dans son imagination, et en plus, ces cons avaient oublié d’éteindre les remous la veille. Le bar était complètement défoncé, le lit aussi… C’était l’apocalypse, tout autour d’eux. Bon, pas une apocalypse à la Vanya quand même, mais c’était pas franchement glorieux pour autant…. Et lui il sait pas par quel bout prendre tout ça. Et oui, il a un peu envie de se barrer en ignorant le problème, mais non. Et d’ailleurs, quand il parlait de se tirer en espérant que Mutt cesserait de s’en prendre à lui, il le pensait pas vraiment. Bon, ça lui était déjà arrivé de se barrer pour de vrai après une de leurs disputes (ils se disputaient vraiment beaucoup trop), mais il revenait toujours. Et là bah… il est inconscient oui, mais il est pas con. Il a pas l’intention de laisser Mutt seul alors que le pauvre souffre le martyre. Non, Klaus n’est pas un connard, même si Mutt a l’air de vraiment croire qu’il serait capable de se barrer, là, tout de suite.

Klaus, rapidement habillé, tente plusieurs mouvements dans la direction de Mutt pour aider ce dernier tandis qu’il lutte pour enfiler sa tenue, mais il se retient… déjà qu’en gardant une distance de sécurité, il s’en mange plein la gueule… Bon, tous les reproches de Mutt sont pas infondés… Il tente de se ressaisir. Il aurait presque les larmes aux yeux. Ça le soule de voir Mutt comme ça, ça lui fait mal de savoir qu’il a mal, et qu’il est en colère, et pire, qu’il est en colère contre lui.

« Je vais ranger, t’es pas en état », bougonne-t-il. « Je ferai sans doute de la merde puisque je suis bon qu’à ça, apparemment, hein, mais je te promets que je vais ranger, et oui, je vais trouver l’argent pour rembourses NOS conneries. »

Quoi, ça se trouve l’argent ? Il a des frères et sœurs, c’est pas supposé être là pour ça, les frangins ? Pour te filer du fric quand t’es en galère.

« Toi, tu vas r… »

Rentrer. Ouais, mais comment hein ? Ils sont venus à moto, pas besoin d’être Einstein pour comprendre que ça va pas être la même en sens inverse. Il pourrait appeler un taxi aussi, mais ce serait Mutt qui devrait taxer, dans l’immédiat. Du coup non.

« Je vais appeler quelqu’un pour qu’on vienne te chercher », dit-il alors simplement, d’un ton qui continuait de trahir sa mauvaise humeur.

Pas le choix… Il tente d’abord le numéro d’Allison. De toute sa fratrie retrouvée, c’est celle qu’il préfère impliquer dans tout ce bordel. Sauf qu’elle répond pas. La même pour Diego. Évidemment, il faut que Five soit le seul à répondre.

« Frangiiiin ! Mon frangin préféré ! Mon frangin d’amour ! Si je te file une adresse, tu peux venir s’il te plaît ? C’est trois fois rien hein, mais… OH AU FAIT BON ANNIVERSAIRE ! Allez viens steuplaît. »

Si Klaus veut bien prendre un peu de distance sur cette situation – mais c’est pas le plus facile quand on est en plein dedans –, il pourrait bien admettre que les paroles de Mutt dépassaient forcément sa pensée, dominées par la douleur, ni plus ni moins… Après tout, il s’excuse… Mais dans les reproches qu’il lui adresse, il y a forcément au moins un léger fond de vérité, et ça, bah ça reste, et il arrive pas à se l’ôter complètement de l’esprit, même s’il aime quand même entendre Mutt s’excuser. Parce qu’il les connaît, s’ils mettent pas un peu d’eau dans leur vin, tous les deux, ils peuvent clairement monter dans les tours. Là, le plus urgent, c’est d’essayer de juguler cette situation et, que ça leur plaise ou pas, ils vont avoir besoin d’aide. Ils s’en sortiront jamais comme ça.

Donc oui, même si Klaus n’en a vraiment pas la moindre envie, il ne voit pas d’autre solution que de se tourner vers Five, et clairement, ce dernier ne lui réserve pas l’accueil le plus charmant qui soit. Et c’est seulement au moment où Five lui parle de la soirée qu’il avait « organisée » pour les laisser en plan qu’il se rappelle qu’il avait parlé de ça il y a plusieurs semaines… Bon, la faute à la fratrie s’ils avaient vraiment cru que quand il disait qu’il allait tout prendre en charge, ça voulait dire qu’il allait tout prendre en charge.

« Roooo, ça va, j’ai juste oublié. » Il n’explique pas les raisons pour lesquelles il faut venir le chercher. Ni ce qui s’est passé, Five aura largement le temps de juger sur place, donc il le laisse râler, convaincu que Five viendra les chercher. « Super ! » dit-il donc sans écouter un traître mot des reproches de son frère. « On dit qu’on fait ça, je t’envoie l’adresse. Allez, bisous, à tout à l’heure. »

Il raccroche avant de laisser son frère lui adresser le moindre reproche supplémentaire. Bon, il était possible que Five les fasse mariner, mais au stade où ils en étaient, l’essentiel, c’était que quelqu’un vienne les chercher dans tous les cas. Et même s’ils n’avaient pas forcément tiré le meilleur numéro avec Five, c’était toujours mieux que rien, n’est-ce pas ?

« Bon ben ça c’est pas trop mal passé », dit-il après avoir raccroché, en tournant son regard vers Mutt, en espérant que ça détendra l’atmosphère (Klaus est convaincu que Mutt a pu entendre Five râler à travers le combiné).

Mais il constate rapidement que Mutt est en pleine panique. C’est trop tard, il a déjà envoyé l’adresse, et il ne comprend pas tout de suite. Du moins jusqu’à ce que Mutt explicite… Et là, le visage de Klaus se décompose immédiatement.

« Attends, t’es sérieux, là ? C’est vraiment ce qui te préoccupe, là, maintenant ? Qu’on nous voie ensemble ? Putain, Mutt ! »

Il prenait souvent sur lui quand il était question de Mutt et de son incapacité à reconnaître à la fois sa sexualité et la nature de leur relation. Il essaie d’être patient, mais parfois, il finit par se dire que Mutt ne sortira jamais du placard, et Klaus n’a franchement pas envie de s’y retrouver enfermé avec lui… Alors c’est pas le moment de discuter de ça, mais justement, que Mutt trouve encore le moment, là, tout de suite, de se soucier de ça… Quand il faut préserver sa réputation à la con, son mal de cul est tout à coup moins gênant. Alors que Mutt pose sa tête sur son épaule, Klaus résisteà l’envie de l’envoyer chier et passe doucement sa main dans son dos.

« C’est bon, c’est Five, il va pas s’amuser à le répéter. Et même, si tu veux, on inventera une excuse bidon, vu qu’apparemment je peux pas présenter mon mec à mon propre frère. »

Klaus sait que Mutt a ses raisons, et qu'elles ne sont pas totalement infondées, et même, quand il l'écoute, quand Mutt lui parle franchement de ce qu'il ressent, il se sent capable de l'entendre, et d'attendre tout le temps qu'il faudra. Sauf qu'il n'est pas patient le moins du monde, et il a très vite fait d'oublier ces raisons pour ne se rappeler que sa frustration, de plus en plus grande. Le problème, c'est qu'il pourra jamais garantir à Mutt qu'il y aura pas des cons pour venir les emmerder, et c'est tout un art d'ignorer les cons et de passer outre leurs remarques et leurs regards. Il comprend pas toutes ces histoires avec Monty, il sent qu'il lui manque quelques infos, qu'il faudra réclamer plus tard, mais il décide que c'est définitivement pas le moment... Il préfère profiter du fait que les choses aient l'air de s'être un peu apaisées entre eux...

"Je t'en veux pas", lui répond-il doucement en le serrant contre lui;

Ce qui est vrai, il ne lui en veut pas, pas réellement, mais il trouve cette situation de moins en moins tenable, et toute cette accumulation ne les aide pas à tirer le meilleur d'eux-mêmes. Y a plein de sujets qu'ils ont à peine effleurés et dont il faudrait qu'ils discutent plus concrètement. Klaus veut ajouter quelque chose, une blague peut-être, histoire de détendre l'atmosphère (même si ça pourrait avoir le don d'empirer les choses), mais il n'en a, heureusement, pas le temps. Klaus entend une voiture se garer à l'extérieur, et la portière claquer. Puis la douce et mélodieuse voix de Five à l'extérieur.

"Il a l'air de bonne humeur, c'est cool", remarque Klaus avec un sourire goguenard.

C'est pas comme s'il attendait une autre réaction de la part de son frère, mais après, ça, c'est son problème, et Klaus ne lui demande pas son opinion sur la soirée de la veille.

"Fivey mon frère adoré, merci d'être venu, t'es le meilleur !" s'exclame Klaus en ignorant, mais alors complètement, les réflexions de son interlocuteur. "Ouais, c'était un très bonne soirée", dit-il en ne sachant pas s'empêcher de se marrer à l'évocation de la soirée en question. "Toi aussi, c'était cool ?" demande-t-il, l'air de rien, à l'évocation de cette soirée d'anniversaire à laquelle il n'avait pas pris la peine de se planter (mais vraiment, sincèrement, c'est vrai qu'il avait oublié. "Tiens, je te présente Mutt, mon coloc", dit-il d'un ton détaché, comme si un milliard d'indices divers et variés ne trahissaient pas assez clairement leur relation (encore que pas totalement, car elle dit juste qu'ils ont passé une nuit agitée ensemble, pas que Mutt est à ce point important pour lui). "C'est lui qui m'a organisé l'anniv surprise... Trop bien, hein ? Fais pas gaffe au jacuzzi, il était comme ça quand on est arrivés", ajoute-t-il avec aplomb. "Bref, bref, mon pote Mutt il a... glissé. Bref, il est pas en état de conduire, faudrait que tu le ramènes chez nous."

Klaus se contenta d'un léger haussement d'épaules qu'on pourrait très certainement traduire par "Oups" quand Five lui fit le topo sur la soirée de la veille, cette soirée qu'il avait promis d'organiser, le tout pour totalement oublier, ne pas du tout s'en préoccuper et laisser ses frères et sa soeur en plan. Non mais ça partait d'une bonne intention, pourtant, et sur le moment,

Klaus avait été vraiment et fermement décidé à tenir ses engagements. C'est juste que... bah, quand il s'y prend trop à l'avance, ben il oublie. Et il a envie de dire que, quand même, Five et le reste de sa fratrie ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes pour s'être imaginé qu'il allait tenir parole. Quelque part, ça le touchait qu'ils aient été capables, malgré tout, d'une telle considération pour lui, mais d'un autre côté, ben... voilà, fallait pas s'attendre à autre chose de sa part. Au moins, ils avaient été ensemble, donc la soirée avait pas dû être complètement nulle, n'est-ce pas ?

Quand vient l'heure de présenter Mutt à Five, Klaus s'attend à tout. Lui, même s'il a pas plaisir à entendre les réflexions de son frère, il y est habitué, il encaisse sans problème, mais il a clairement pas envie que Mutt, de son côté, s'en mange plein la tronche... Ceci dit, il est agréablement surpris, ce n'est pas du tout ce qui se passe, et Five se montre assez conciliant avec Mutt, presque trop pour que ce soit complètement honnête, en fait. Il lui propose des antalgiques, et de se reposer dans la voiture le temps qu'ils réparent un peu tout ce bordel (bon, à la base, Klaus avait dans l'idée de se démerder tout seul et de juste demander à Five de ramener Mutt sans forcément attendre de lui qu'il l'aide à ranger - parce qu'il a autre chose à faire que d'entendre ses réflexions constamment, mais en même temps, vu l'ampleur du bordel, ce sera sans doute pas du luxe qu'ils s'y mettent à deux).

Bon, Klaus se sent un peu agacé que Mutt passe pour le plus intelligent sous prétexte que lui avait menti pour le couvrir, mais c'était pas le moment de laisser son égo fausser le truc... heureusement, il en a pas beaucoup, ou alors pas placé au même endroit que tout le monde, donc au final, c'est pas la fin du monde non plus.

"J'ai jamais dit que tu devais m'aider à faire le ménage, mais merci de ton aide précieuse, monseigneur Five, si j'avais du temps à perdre, je me mettrai à genoux pour me prosterner en ton honneur", rétorque simplement Klaus. "Mais ouais, t'as raison, je vais vidanger le jacuzzi, plutôt."

Ouais, enfin... Il a aucune idée de comment ça se vidange, un jacuzzi... Il adresse un regard à Mutt, il a envie de lui dire un truc, mais aucun mot ne sort, alors au final, il préfère se rendre dans la cuisine, ouvrir un placard dans lequel il déniche un grand sac-poubelle, et commencer à ramasser les bouteilles vides qui traînent un peu partout, et autres détritus laissés çà et là). Même opération dans la chambre. Klaus fait le tout d'un geste automatique. Généralement, il préfère laisser le bordel en l'état et donner à quelqu'un, n'importe qui, le soin de s'en charger, peu importe la nature du bordel qu'il aura engendré, mais là, c'est évidemment pas possible. Il se sent trop coupable pour ça, encore plus quand il découvre des morceaux de latex coincés dans les draps (draps qu'il retire rapidement pour les mettre dans le panier à linge)... en vrai, ce serait quand même malin de se rendre à l'hosto. Il pousse un soupire, laisse son bras glisser sous le lit, voire s'il y traîne quelque chose, jusqu'à ce que ses doigts entrent en contact avec...

La fiole. Il se redresse tout en agitant le liquide rouge d'un côté et de l'autre du flacon. Ses yeux passent de la fiole de V au sac-poubelle, du sac-poubelle à la fiole de V. Ouais, il faut vraiment qu'il se débarrasse de cette merde...
Pense-t-il en glissant la fiole dans sa poche.

« Sers-toi, fais comme chez toi », répond simplement Klaus avec un grand sourire quand Five jette son dévolu sur la machine à café.

Bon, en réalité, Klaus n’est pas du tout certain qu’il y ait vraiment de quoi préparer du café, vu qu’ils avaient eu mieux à faire, jusqu’ici, autant Mutt que lui, que de se blinder de caféine (vu leur état général, c’est sans doute pas plus mal, d’ailleurs). Il laisse donc Five se préparer une tasse, tout en continuant de son côté de ramasser ce qu’il peut. Il s’interrompt pour adresser un regard noir à Five quand il suggère qu’il pourrait tenter le coup avec lui. Ben tiens, il manquerait plus que Five se mette à baver sur Mutt. Le pire, c’est que la remarque l’aurait sans doute fait marrer, dans d’autres circonstances. Mais pas quand il s’agit de Mutt. On ne touche pas à Mutt, même pas avec les yeux. Eh bien oui, il semblerait qu’il soit plutôt possessif, avec lui.

« Du calme papy, il est trop jeune pour toi, ou trop vieux », dit-il aussitôt.

En guise de confirmation, donc. Oui, Mutt Jones est casse gardée, et il n’a pas forcément besoin d’en dire beaucoup pour qu’on remarque d’office à quel point il tient à lui… Y a pas grand-monde sur cette Terre (s’ils sont sur terre, mais ça ce sera un débat pour un autre jour) qui pourrait obtenir de lui – lui le mec qui pose un lapin à sa fratrie le jour de leur anniversaire commun pour aller s’envoyer brutalement en l’air avec son colocataire – qu’il se fasse autant de souci et fasse également autant d’efforts. Il faut vraiment qu’il l’aime, oui, pour se donner autant de mal, pour accepter sans broncher, notamment, de réparer ses conneries. Il avait raison. En temps normal, avec n’importe qui d’autre, il se serait sans doute barré sans demander son reste et n’aurait de toute manière jamais revu le type en question. Là c’est clairement pas la même chose. Et pas uniquement parce que Mutt et lui vivent sous le même toit et que donc il devra le revoir dans tous les cas.

Il répond pas quand Five demande si c’est sérieux, parce que la question n’appelle pas vraiment de réponse. Oui, ça l’est. Évidemment que ça l’est. Et il dit rien non plus quand Five évoque le souvenir de Dave, car en vérité, Klaus préfère, s’il le peut, ne tout simplement pas penser à lui. Il n’a pas oublié Dave, bien sûr, ce n’est pas si simple. Mais tout est différent, depuis que Mutt est entré dans sa vie, et ça, il ne peut pas le nier.

« Dans le jacuzzi » précise-t-il dans un haussement d’épaules. « J’ai tout vidé. » Il devrait pas être fier de dire ça, mais quand même, en prononçant ces mots, il ne peut pas s’empêcher de sourire. D’accord, c’était con. Mais c’était marrant, un peu, quand même. « Et tu diras à Diego que je l’embrasse, moi aussi », ajoute-t-il simplement.

Et à vrai dire, il lui sera éternellement redevable s’il doit effectivement se charger de racheter des bouteilles. Ce sera pas un moindre luxe.

« Je sais pas comment on vide un jacuzzi, je fais pas ça tous les quatre matins, figure-toi », réplique-t-il tout en continuant de errer avec le sac-poubelle histoire de jeter le moindre détritus restant. L’avantage, c’est que le bordel est plutôt localisé. Ils ont foutu la merde, mais ont à peine mis les pieds dans certaines pièces, c’est pas plus mal. « Pour que tu te rinces l’œil ? Certainement pas », réplique Klaus quand Five suggère qu’en compensation, il invite Mutt à chaque repas de famille. En soi, ça le dérangerait pas, sur le principe. Mais il voit bien que Five le provoque. Et l’air de rien, ça marche un peu trop bien sur lui quand il est question de Mutty. « T’as pas d’autres personnes sur qui lorgner ? Genre le petit jeune de la boîte ? T’as encore des nouvelles de lui ? » demande-t-il – pas du tout pour changer de sujet, pensez-vous.

Jaloux, oui, Klaus constate qu’il l’est bel et bien quand il est question de Mutt, et ça déconne pas d’ailleurs. Lui-même aurait bien du mal à mettre des mots là-dessus… De simples réflexions de la part de Five au sujet de Mutt suffisent déjà à le faire rager, et pourtant, il ne lui en faut pas tant d’ordinaire. Dans tous les cas, Five n’arrange rien en affirmant qu’il n’est pas très regardant sur l’âge dans tous les cas, et qu’il a du temps à rattraper. D’accord, Klaus connaît bien assez son frère pour savoir qu’en cet instant, il le provoque, purement et simplement, mais ça ne l’empêche pas de très clairement se rembrunir à ces propos. Finalement, il aurait dû insister et rappeler Allison encore et encore jusqu’à ce que celle-ci décroche, il s’en serait mieux tirée (même si elle n’aurait sans doute pas été infiniment indulgente non plus face au bordel ambiant). Bon, ceci dit, Five a quand même l’air d’assez bon poil, parce que lui-même, dans le fond, a l’air presque amusé de leurs conneries.

« Oh tu sais, un peu plus un peu moins », se contente de répliquer Klaus quand Five lui fait remarquer que la dette, déjà bien grande, qu’il a vis-à-vis de ses frères va augmentant. Ce qui est vrai. Mais en même temps, c’est pas comme s’il tenait encore des comptes, à ce stade, même s’il le devrait sûrement. « Ben notre soirée… C’est cette merde, là, le V… je sais pas si tu vois ce que c’est, c’est hyper-puissant, comme truc, vraiment, vraiment très puissant. On contrôlait rien, on était… on était sur une autre planète, tu vois. Bref, je vais pas te faire un dessin non plus. » Les preuves sont là, et surtout, il n’a pas envie de se vanter de ses exploits de la veille. Parce qu’il s’en veut vraiment terriblement d’avoir mis Mutt dans un tel état. « Donc t’as rencontré un mec hier soir ? Vas-y, raconte. »

Klaus accumule récupère peu à peu les bouteilles vides. Il s’était pas rendu compte que le bar était aussi plein et qu’il en avait vidées autant. Il ne peut s’empêcher de se marrer en imaginant Diego tenter de justifier l’achat d’autant de bouteilles à une caissière qui le jugerait sans doute lourdement. Oui, lui aussi, l’idée le fait quand même bien rire, il ne peut pas dire le contraire. Et effectivement, les remarques laissent définitivement penser à Klaus que Five n’est pas de si mauvaise humeur que ça, ce qui au passage lui convient très bien. Même s’il a aussi le don de poser là les sujets qui peuvent éventuellement prêter à pourrir l’ambiance.

« Non parce que vous aussi ? Si, y a des cinglés qui sont venus tout défoncer… » Et peut-être, oui, qu’il aurait pu en profiter pour en discuter avec Five, ça aurait été plutôt malin de sa part, effectivement, mais… tout s’était enchaîné si vite après ça… et au final bah… l’occasion s’était jamais présentée ? Pour un sujet aussi grave ? Oui, pour un sujet aussi grave… Klaus est un inconséquent, ce n’est pas nouveau. « Tu sais qui c’était, ces types ? »

« T’as l’intention de m’apprendre quelque chose que je sais pas déjà ou… ? » réplique Klaus, sur la défensive, quand Five lui fait remarquer qu’ils ont tellement plané qu’à cause de ça, Mutt se retrouve dans un sale état par sa faute.

Oui. Il sait, et il culpabilise assez comme ça pour qu’on soit pas obligé de le lui rappeler. Quoique… peut-être que si, parce que cet état de fait ne l’a pas dissuadé pour autant de glisser la fiole de V au creux de sa poche un peu plus tôt, et ne le dissuadera pas plus tard de s’en débarrasser non plus. Mais en même temps… faut pas gâcher, pas vrai ? Et puis c’est pas bien grave, il videra juste le contenu de celle-ci, puis ensuite il passera à autre chose, fin de l’histoire, vraiment pas de quoi en faire tout un drame. Oui, il essaye de se convaincre lui-même déjà maintenant. La vérité, c’est qu’il ne peut s’empêcher de repenser à l’état dans lequel il s’est senti, sur le moment… et c’était si fort, si bon, si incomparable qu’il ne se voit pas ne pas vouloir y regoûter au moins une fois. Ou deux. Ou trois.

Bon, mieux vaut s’attarder sur un autre sujet, et donc sur ce type, Winston, que Five a l’air de fréquenter assez assidument finalement… Klaus ne cherche même pas à se vexer quand son frère lui fait remarquer qu’il a préféré compter sur son plan cul plutôt que sur lui pour s’en sortir après s’être barré de l’orphelinat… C’était plutôt intelligent de sa part. Et puis… Five est un grand garçon, en vrai, un vieux garçon, même, il a pas vraiment besoin de lui.

« Oh, mais ça a l’air d’être la femme idéale, ça », remarque Klaus quand Five évoque cette fille qui ressemble à une adolescente mais est en réalité beaucoup plus vieille. Comme quoi, même les papys enfermés dans des corps d’ados pouvaient trouver chaussure à leur pied : c’est beau quand on y pense. « Comme quoi même les vieux ronchons de dix-huit ans peuvent trouver leur princesse charmante, c’est a-do-rable. »

Il aurait sans doute posé plus de questions sur cette jeune fille en question s’ils n’étaient pas passés ensuite à un sujet beaucoup plus sérieux. Ouais, ouais, d’accord, il aurait pu leur dire. Mais en même temps, il n’avait pas voulu les inquiéter, et aussi… oui, voilà, il était trop occuper à s’amuser. Et quoi ? C’est un mal de s’amuser, maintenant ? Cette situation est déjà bien assez merdique, c’est pas forcément la peine d’en rajouter une couche non plus avec des considérations à la con, pas vrai ? Bon, ceci dit, il est pas jouasse du tout d’apprendre que son attaque n’était pas isolé. Et Klaus affiche une tête de six pieds de long

« Fallait bien que tu te démerdes, c’est ça ton excuse ? Attends, tu veux me faire croire que tu penses que tu peux pas trouver mieux que de buter des gens sur commande ? Et après c’est moi l’inconscient ? C’est moi qui doit arrêter mes conneries ? et qui serait suffisamment cinglé pour t’envoyer tuer Al… »

Un raclement de gorge dans leur dos, Klaus se réduit légèrement. Il aurait préféré que Mutt ne soit pas témoin de cette conversation, même s’il aurait certainement fini par lui en faire le résumé, d’une manière ou d’une autre. Bon, au moins, s’il faut tirer du positif à tout ça, c’est que les antalgiques ont l’air de faire leur effet, et ça, déjà, c’est une bonne chose, mais pour le reste.

« C’est ça, va répondre », soupire Klaus. Quand il est parti, il lui en veut un peu de lui laisser le soin d’expliquer à Mutt ces histoires sordides au sujet de Five. « C’est compliqué. Tu sais, Five, il peut se téléporter. Dans l’espace, mais dans le temps aussi. Sauf que quand il a voulu se téléporter dans le temps, il a merdé, il s’est retrouvé coincé dans le futur, genre le futur après la fin du monde. Et là y a un genre d’organisation glauque et chelou qui l’a embauché comme tueur à gages, genre il allait tuer les gens dans différentes époques du passé… et visiblement il recommence ses conneries. » Klaus pousse un soupir… « Désolé, c’était pas exactement comme ça que j’aurais voulu te présenter mon frangin. »

Bon, d’accord, y avait de meilleures manières de lui exposer la situation, et Klaus aurait pu évoquer cette histoire avant. Pourtant, il lui a déjà parlé de tout un tas de choses, de ses pouvoirs, de la Umbrella, de Reginald. Mais ouais, dans tout ça, y a quand même des événements qu’il a pas pensé à évoquer, et qui ne sont pourtant pas négligeables. Klaus s’en veut un peu, il a aucune envie de mettre Mutt dans tous ses états alors que clairement, le pauvre n’est déjà pas bien, mais bon, après la conversation qu’il vient de capter, il avait pas trop le choix.

« Il devrait avoir le même âge que moi, techniquement, tu sais, l’histoire des quarante-deux bébés miraculés, tout ça… Mais comme il est resté plus de trente ans dans le futur, puis après quand il est revenu, il a retrouvé l’apparence de quand il était parti… Bref, ouais, le bordel quoi », essaie de résumer – très mal Klaus.

Il comprend que la fatigue n’aide pas dans ces circonstances, et que même quand ils sont tous confrontés à des situations inexplicables et absurdes, ça ne les empêche pas de se poser des questions et de vouloir en apprendre plus. C’est juste… pas forcément le bon moment ni le bon endroit, et puis c’est vrai aussi qu’ils n’ont pas fini de se faire des nœuds au cerveau s’ils veulent réussir à donner du sens à tout ce qu’ils découvrent. Rien que leur présence dessus, ça a de quoi vous bousiller les neurones, pour ce qu’il en reste. Klaus se promet de revenir sur tout ça avec Mutt à tête reposée, de combler les vides et de lui parler des choses qu’il n’a pas encore pris le temps ou la peine de lui expliquer au sujet de sa vie passée.

Klaus affiche un sourire quand Mutt lui dit espérer qu’il a passé un bon anniversaire, malgré tout. Ouais, c’est sûr que c’est parti dans tous les sens, et que ça a peut-être viré, au moins en partie, en fiasco, mais en même temps… Klaus l’a aimée, sa soirée. Quand il y repense, y a tout un tas de choses qu’il aurait très envie de revivre, d’ailleurs… C’était, objectivement, l’une des soirées les plus exceptionnelles qu’il ait jamais passé, et vu à quoi on pu ressembler ses soirées, ce n’est pas peu dire. Bon, pour ce qui est de pas s’en vouloir, faut pas exagérer non plus. Bien sûr qu’il s’en veut. Mais ça le rassure, quand même, que Mutt, lui, ne lui en veuille pas.

« C’était le meilleur anniversaire de toute ma vie, tu sais », lui assure-t-il, et il le pense quand il le dit.

Bon, en matière d’anniversaires, il est possible, aussi, on va le reconnaître, qu’il n’y ait pas eu beaucoup de concurrence, mais ça n’empêche pas, malgré tout, que oui, c’est le cas. Et même, l’une des meilleures nuit, point à la ligne. Et… bon… Il a quand même le sentiment de le devoir en grande partie au V. Quand Mutt l’avertit à ce sujet, lui dit de s’en débarrasser, lui parle des dangers, Klaus éprouve un fond de culpabilité, oui, mais il ne passe pas aux aveux pour autant. Ce serait très simple de vider ses poches maintenant, ou de se débarrasser de la fiole discrètement, mais il ne le fera pas, il ne le veut pas. Non, il n’a pas l’intention d’en abuser – promis – mais juste encore une fois. Ou deux. Ça ne peut pas faire de mal, pas vrai ?

« Non mais t’inquiète, j’ai tout jeté déjà, t’en fais pas pour ça. » Il dépose un rapide baiser sur les lèvres de Mutt. « Plus jamais je toucherai à cette merde. »

Ouuuh le menteur.

« Bon allez, je finis le ménage vite fait et on rentre. Je vais prendre soin de toi et de ton pauvre petit cul malmené. »