A so long day without you

Parcourant les rues sombres de la ville, vêtu de mon costume noir et mes couteaux bien fixés sur mon ventre, je scrutais les environs à la recherche du moindre crime qui pourrait être commis dans les environs. Cette habitude avait quelque chose de rassurant et de réconfortant. Ce monde était tellement étrange et savoir que je pouvais me raccrocher à mon rôle de super-héros me faisait beaucoup de bien. C’était après tout ma passion, ma vocation. Nous avions été dressés pour le devenir par le paternel, mais je savais que dans mon cas ce n’était pas uniquement une étiquette. C’était la vérité et j’en avais eu conscience depuis que j’étais tout gosse. Bien sûr, il avait fallu beaucoup de temps pour que le petit latino bègue devienne l’homme que j’étais aujourd’hui.

La confiance n’était pas venue du jour au lendemain et j’avais eu besoin de mon entourage pour faire de moi un véritable super-héros. Bon je ne vais pas vous mentir, Réginald était plutôt avare en flatterie et en compliments. Jamais je n’avais reçu de reconnaissance de sa part. ll passait au contraire son temps à me rabaisser et me faire comprendre que je ne serais jamais un meilleur leader que Luther. Merci pour le père modèle ! Non moi ma force et mon assurance, je les avais puisées dans l’amour et l’admiration que je recevais des deux membres de ma famille qui n’avaient jamais cessés de croire en moi, pas une seule seconde. Deux personnes qui ne faisaient aujourd’hui plus partie de ma vie. Ma mère Grace et mon frère Klaus.

L’espace d’un instant, je levais les yeux vers le ciel et cette maudite lune rouge qui m’avait conduit jusqu’ici. Encore une réalité pourrie à laquelle nous nous retrouvions confrontés et qui nous échappaient complètement. Une chance pour moi, j’étais parvenu à retrouver Five. Ensemble nous tentions de démêler le fils de ce mystère dans nos vies. Quel était ce phénomène et pourquoi nous nous retrouvions aujourd’hui sans nos pouvoirs ? Et bien évidemment, la question la plus intime et poignante de toutes… où étaient passés nos frères et sœurs ? Avaient-ils fait ce bond depuis les années 60 avec nous ? Et si c’était le cas où pouvaient-ils bien se cacher ?

Bien sûr, ma préoccupation première s’était tournée vers Klaus. Je me faisais du souci pour lui… je m’étais toujours inquiété pour lui. Depuis notre enfance qui nous avait rapproché, je lui avais toujours promis que quoi qu’il puisse nous arriver je serais toujours à ses côtés pour veiller sur lui et le protéger. Oh bien sûr, c’étaient des serments de gamin un peu trop naïf, mais j’avais toujours fait de mon mieux pour respecter mes engagements. Tout du moins jusqu'à la première apocalypse que nous avions eu à affronter. Je connaissais Klaus. Je savais qu’il avait un don incroyable pour s’attirer des ennuis. Et désormais, le fantôme de Ben n’était plus là pour lui servir de garde-fou. Cela signifiait que la seule conscience sur laquelle il pouvait se reposer était la sienne ? Il y avait de quoi se faire du mouron vu à quel point son esprit était bordélique.

Durant des semaines, j’avais fouillé dans tous les recoins de la ville, poussés les portes de tous les endroits qu’il aurait pu fréquenter. J’avais franchi les portes de plus de bars, discothèques, night clubs, cabarets. squats, bordels que je n’en avais fréquentés durant toute mon existence. Mais rien… aucun signe de lui. A croire qu’il n’était tout simplement pas dans ce monde. J’avais alors décidé de poursuivre ma vie, orientant mes recherches vers nos autres frères et sœurs avec Five. Mais je ne pouvais pas m’enlever cette question de la tête. Klaus avait beau avoir le don de m’exaspérer avec ses extravagances et ses dépendances, je l’aimais malgré toutes ses conneries. C’est vrai. Je l’aurais clairement jamais dit à haute voix, même sous la torture, mais je l’aimais profondément. C’était mon bro et il me manquait énormément.

Soudain, j’entendis un vacarme assourdissant de l’autre côté d’une ruelle bien connue pour ces trafics illicites. Les bruits d’une bagarre et clairement, ça avait plus l’air d’un passage à tabac qu’une simple dispute entre potes bourrés. Je me précipitais vers le groupe et assistais à une scène qui semblait confirmer mes dires. Ils étaient 5 en dehors de la victime qui était au sol à ce moment-là. D’un geste je dégainais l’un de mes couteaux qui partit se figer dans le mur à quelques centimètres de la tête de l’un d’entre eux. Je n’avais certes plus mes pouvoirs mais je m’étais entraîné pour atteindre ce niveau de maîtrise. Ce n'était pas parfait mais j'étais au moins parvenu à attirer leur attention.

« Eh les gars, vous préfèreriez pas vous en prendre à quelqu’un de votre calibre. »

Le type à la joue tranchée se précipita vers moi.

« Je peux savoir de quoi tu te mêles, connard ? C’est pas ton problème ! »

Je regardais au loin ces potes qui nous observaient avec curiosité dès que leur chef leur en donnerait l’ordre.

« Vous vous y mettez à 5 contre un… quel courage ! Vraiment. Laissez-le partir. »

J’avais prononcé cette phrase sans me douter une seconde que le pauvre type qu’il était en train d’agresser n’était personne d’autre que mon frère.

« Ou sinon quoi ? »

Je m'avançais vers lui provocateur, le visage finissant à quelques centimètres du sien.

« Sinon t’auras à faire à moi mon pote. Et je t’assure que toi et ta bande de nazes vous passerez un sacré mauvais quart d’heure. »

Il me balança alors une droite bien sentie que je parvins tout juste à esquiver et toute la bande finis par me sauter dessus.

It's been a long day without you

feat. Diego

Si Klaus pouvait gagner un dollar chaque fois qu’il s’en mangeait une, croyez bien qu’il serait le putain de roi du pétrole à l’heure actuelle (et surtout qu’il aurait monté son petit business en conséquence). Qu’est-ce que vous voulez, il a une de ces gueules, de celles qui donnent envie aux plus crétins de lui refaire le portrait… Et pas forcément les meilleures fréquentations, pour couronner le tout. Quand on a un peu trop pour habitude de mener en bateau ses anciens dealers, y a bien un moment où ça doit se retourner contre vous, surtout quand on se montre aussi inconséquent que peut l’être Klaus Hargreeves à certains moments (tout le temps).

Bref, on en est là, et Klaus, armée seulement de son gabarit type crevette en fin de vie est loin de faire le poids contre les types qui ont décidé de le coincer à l’angle de cette ruelle sombre et mal famée. Cinq contre un, comment voulez-vous qu’il ait la moindre chance ? En se servant de ses pouvoirs ? Mouais… Il aurait fallu qu’il y pense avant de se manger un coup de genou en plein estomac qui l’a littéralement fait s’effondrer au sol.

Klaus fait ce qu’il estime être le mieux en la circonstance, c’est-à-dire hurler pour attirer l’attention, des flics ou de n’importe qui, du moment que ça peut faire bouger la situation et compenser la balance numérique qui n’est définitivement pas en sa faveur. Klaus mord au hasard (et bien profondément) une main qui veut se plaquer à ses lèvres pour le faire taire, et c’est alors que ce brave numéro quatre sent quelque chose fendre l’air : une lame aiguisée qui passe à ça (mais vraiment à ça) du visage de son agresseur qui, sous l’effet de la peur et de l’incompréhension, lâche prise dans un petit hoquet aigu et peu viril de stupeur avant de se reculer d’un pas.

Klaus tombe genoux au sol, et dans son dos, il entend une voix qu’il est plus heureux que jamais de reconnaître. Un large sourire vient illuminer son visage légèrement tuméfié : Diego ! Putain ! Depuis le temps qu’il espère le retrouver ! D’accord, dans l’idéal, il aurait clairement voulu que les choses se passent différemment, et que leurs retrouvailles soient un peu moins… Mouvementées ? Mais d’un autre côté, à quoi s’attendre d’autre quand on parle de nos deux énergumènes ? Evidemment que ça n'allait avoir ni queue ni tête, bien sûr que ça allait partir dans tous les sens !

« Diego ! Mon héros ! Plus beau que jamais ! Parfait le petit numéro d’intimidation ! » il s’exclame en même temps que son frère envoie une droite de toute beauté et bien brutale au premier gars qui aura voulu saper son autorité.

Ce que fait Klaus, le temps qu’il digère l’info et réduise au respect le dealer et sa bande ? Il se tasse à l’angle du mur et joue le soutien émotionnel de loin en attendant que Diego leur ait réglé leur compte. Allez quoi ? ça sera probablement pas bien long de toute manière !

A so long day without you

Obéissant à l’appel du devoir, ou dans ce cas aux hurlements qui raisonnaient dans tout le quartier, j’avais foncé pour sauver la victime sans réaliser une seconde son identité. Sauver des vies c’était ma vocation et qu’importe au fond qui était en mauvaise posture. Tout ce que je souhaitais faire c’était voler à sa rescousse. Et clairement, la situation à laquelle j’assistais me donnait clairement la gerbe. Tous les héros sont frères, tu parles ! Seul des lâches ont besoin d’assurer leurs arrières alors qu’ils s’en prennent eux-mêmes à des innocents.

Les habitudes ayant la vie dure, je balançais un couteau qui part se figer dans le mur d’en face après avoir trancher la joue du chef de la bande. Pas si mal comme coup. Bien sûr, il ne tarda pas à revenir vers moi dans la seconde pour sauver son honneur… des fois qu’il lui en resterait un peu caché quelque part. Après un échange verbal musclé, nous passion enfin aux choses sérieuses. Tout du moins, c’est ce que je pensais lorsqu’une voix raisonna derrière nous, appelant mon prénom. Non. Ce n’était pas possible. Je sens mon cœur manqué un battement au moment de me retourner dans sa direction. Je restais alors interdit quelques secondes, me demandant si je n’étais pas en train de rêver. Je déclarais alors à mi-voix.

« Klaus… »

Je sentis alors une douleur lancinante dans le bras, violente. Je ne pus m’empêcher de pousser un cri alors que je me retournais. Un de ses acolytes était venu lui prêter main forte et il ne m’avait pas manqué. Se battre contre 5 personnes avec un bras invalide c’était clairement pas la bonne idée. J’étais en fâcheuse posture. Mais les laisser s’en tirer à bon compte après ce qu’ils avaient fait… hors de question ! Je jetais un œil dans la direction de Klaus, puisant ma hargne dans la détresse de mon frangin préféré, je me tournais à nouveau vers eux les foudroyant du regard.

« Les gars… mauvaise nouvelle. Vous vous en êtes pris à la mauvaise personne. »

Je fonçais alors vers eux, décochant une bonne droite au type qui m’avait poignardé. Je sentis alors l’un d’entre eux se jeter dans mon dos et je me baissais pour le balancer de l’autre côté, le laissant finir sa course au sol. Le troisième, je m’en débarrassais en lui lançant un puissant coup de pied. Envoyé brutalement vers l’arrière, il amortit sa chute contre son copain qui se retrouvais à terre, la respiration coupée. J’avais beaucoup plus de mal avec leur chef. Après l’avoir frappé et esquivé plusieurs de coups, je me retrouvais finalement à terre, abattu d’un violent coup de poing. Le type se marrait en se rapprochant de moi, persuadé qu’il avait remporté la partie. Mais d’un croche patte, je renversais la situation. Sortant un couteau, je vins par une pirouette me glisser derrière lui. Je sors un de ces couteaux que je plantais sous sa gorge.

« Maintenant tu te barres avec tes potes, c’est compris ? Et si vous touchez encore ne serait-ce qu’à un cheveu de mon frère, vous êtes morts. ¿entiendes? »

Je me relevais alors, sans même jeter un regard derrière moi. Je préférais tourner mon attention vers la seule personne qui comptait en ce moment. Ignorant la douleur de mon bras, je me rapprochais de Klaus espérant de tout cœur qu’il n’avait pas trop morflé. Arrivé à sa hauteur, je m’agenouillais à ses côtés et demandais avec douceur.

« Eh Klaus… tu vas bien ? »

J’encadrais ses joues de mes mains tendrement, ramenant son visage dans ma direction. Ca paraissait idiot mais j’avais besoin de ce contact physique pour me prouver qu’il était bien là, présent à mes côtés. D’ailleurs ça n’allait pas le surprendre. S’il y avait bien un de mes frangins qui pouvait se vanter de n’avoir jamais été privé de mes câlins c’était bien lui. Klaus. Mon Klaus. Pendant quelques secondes je restais interdis, comme pour prendre conscience que ce n’était pas un rêve. Puis, sans prévenir, je lui tombais littéralement dans les bras. Je le serrais contre moi de mon bras valide et restais ainsi durant de longues secondes. Quelque chose en moi me disait que si jamais je venais à desserrer mon étreinte ne serait-ce qu’un tout petit peu, il s’évaporerait en fumée une fois de plus.

« Oh bon sang, cette fois-ci j'ai bien cru que tu avais disparu pour de bon. Ne me refais plus jamais une peur pareille. »

Bon OK je dramatisais peut-être un peu les choses. Mais qui sait ce qui aurait pu se passer dans le merdier dans lequel on se trouvait ? Même Five, qui se croyait toujours meilleur que nous tous, ne comprenait rien à ce monde. Je finis par me décoller, gardant malgré tout son visage entre mes mains. J’analysais alors ses blessures.

« Ils t’ont vraiment pas manqué ces connards. »

Je relâchais mon emprise tout en restant à ses côtés. Mon bras me faisait un mal de chien et maintenir cette position était douloureux. C'était sans compte que l'entaille ouverte commençait à colorer de rouge ma manche.

« Ils te voulaient quoi d’ailleurs, ces enfoirées ? Dans quel guêpier tu t’es encore fourré ? »

Ces dernières paroles étaient clairement plus vindicatives mais merde à la fin. Qu’est-ce qu’il se serait passer si j’avais pas été là pour le tirer d’affaire ?

It's been a long day without you

feat. Diego

Merde… Forcément, fallait s’attendre que la diversion et la surprise ne soient pas les meilleurs conseillers pour le pauvre Diego qui se retrouve à devoir affronter ses adversaires avec un bras sévèrement amoché suite à une rapide erreur d’inattention. Heureusement, notre sosie d’Antonio Banderas national a de l’énergie à revendre, et certainement pas l’intention de se laisser avoir si facilement… Non, ce brave Diego se battra corps et âme pour défendre son honneur, ce qui est juste, et aussi son frangin par la même occasion. Clairement, il a bien raison de l’affirmer : oui, ils s’en sont clairement pris à la mauvaise personne, et ils vont sévèrement le regretter, c’est sûr et certain.

Klaus n'est que le spectateur impuissant de la situation, mais il se montre particulièrement motivé au moment d’encourager autant que nécessaire son frère qui, malgré le surnombre en face, malgré son bras blessé, finit par réussir à tenir en respect ces saloperies de dealers vénères, qui lâchent alors l’affaire. Diego, ce héros. Pour le coup, le sort, le hasard, le destin (choisissez votre poison) a vraiment bien fait son coup : quelles étaient les chances pour que ce soit Diego qui tombe sur lui, au beau milieu de cette ruelle, et lui sauve la vie comme il vient de le faire ? Probablement proches de zéro, faut bien être honnête. Les gars courent comme si leur vie en dépendait, mais en même temps, y a de quoi, Klaus veut bien croire que leur vie en dépendrait bel et bien s’ils décidaient de ne pas respecter à la lettre les directives du numéro deux, pas commode et prêt à en découdre.

« Je pète la forme ! » affirme Klaus en souriant de toutes ses dents, indifférents aux quelques coups qu’il a lui-même reçu. Qu’est-ce qu’il en a à faire en même temps alors que Diego est à ses côtés et que, de son côté, il a l’air de péter la forme. Il le retrouve comme au bon vieux temps – en bref, y a des choses qui changent pas. Et ça, c’est quand même sacrément rassurant. « Et toi ? »

Non, parce qu’il a bien vu qu’il avait été amoché à un moment donné, et il voudrait pas qu’il s’amuse comme il sait si bien le faire à négliger son état au profit du sien. Mais sa remarque est étouffée par une étreinte plus que bienvenue, que Klaus referme avec soulagement. Vraiment, cette situation a beau être merdique au possible, savoir en retenir le positif a quelque chose de particulièrement rassurant. Quand Diego prend la peine de le regarder plus attentivement, Klaus se contente de hausser les épaules, il en a vu d’autres.

« C’est toi qui étais introuvable », qu’il réplique, alors que c’est surtout cette fichue ville qui ne les a pas autorisés à se voir plutôt. « Et c’est rien, je te dis », il ajoute en agitant mollement la main dans sa direction. « Ces gars peuvent pas se passer de moi, c’est mon charisme naturel, ça. » Il rit légèrement. « T’en fais pas, vraiment », il ajoute, plus sérieux. « Faudrait qu’on aille à l’hosto, non ? Pour ton bras… »

A so long day without you

Je devais bien admettre que j’étais loin de m’attendre à ça. Retrouver Klaus dans cette situation, après des mois et des mois de séparation. Je ne pouvais que me féliciter d’avoir été là au bon endroit et au bon moment même si je ne savais pas à quelle force mystérieuse je devais nos retrouvailles inattendues. Sans doute la même à qui je devais le fait de ne pas pouvoir l’avoir au à mes côtés durant tout ce temps. Les mystères de cette île pourrie ne semblaient pas être pressés d’être résolus. Ou on était juste trop cons pour comprendre le pourquoi du comment. Allez savoir !

Le combat n’était pas des plus évidents. Une chance pour moi, j’avais l’habitude des combats de rue et je savais comment agir dans les situations les plus délicates. Et il fallait bien admettre que pour le coup les encouragements de Klaus finirent à me donner des ailes dans ma victoire. C’est vrai que j’avais tendance à critiquer son manque d’action et d’implication dans nos missions. Mais comment est-ce que j’aurais pu lui reprocher quoi que se soit ou lui en demander plus alors que c’était lui la victime que je venais sauver ? Son comportement me suffisait déjà… au moins ça me rassurait sur son état.

Ce n’est que lorsque ses agresseurs s’enfuirent que je pus enfin profiter de nos retrouvailles si longtemps attendues. Klaus m’offrit son plus beau sourire et je lui souris en retour, si heureux à l’idée que je n’aurais désormais plus à m’inquiéter de son absence. Je ne repris la parole qu’au moment où il me demanda comment j’allais.

« Pas si mal que ça… enfin aussi bien qu’on peut aller alors qu’on est paumés sur une île pourrie à cause d’une saleté de lune rouge avec pratiquement aucun espoir de rentrer chez nous. »

J’aurais pu sans doute parler aussi de la perte de mes pouvoirs, mais je m’y refusais. J’avais déjà tellement de peine à vivre avec ça. Je ne voulais pas passer pour faible. Je secouais alors la tête pour chasser ces mauvaises pensées. Je préférais répondre à l’appel de ce câlin qui me démangeait depuis le premier regard que nous avions échangé. Tout n’était pas si pourri après tout dans ce monde et Klaus avait raison. Autant profiter des moments où notre vie bordélique nous offrait un peu de répit ou de belles surprises. Je m’offrais même le luxe d’une confession larmoyante pour lui faire comprendre à quel point il avait pu me manquer. Phrase qu’il reprit aussi tôt lorsque je m’écartais et me laissa perplexe, ne sachant pas vraiment s’il s’agissait ou non d’un reproche. Mais je le pris malgré tout comme tel.

« Je sais… je sais et je suis vraiment désolé. »

J’avais quoi à lui avancer comme excuses ? Que je trouvais plus urgent de retrouver Five ? Que j’avais d’autres obligations plus importantes à régler ? Un peu comme l’excuse pourrie que j’aurais pu lui sortir dans les années 60’ lorsque j'étais bien trop concentré sur mes obsessions liées à Kennedy ou Lila pour me souciet un instant de Klaus ? Non non il était hors de question que je continue à adopter le même comportement de merde avec lui. J'étais bien décidé à rattraper le temps perdu.  Je lui souris alors affectueusement et ajoutais.

« Mais je suis là maintenant. Et je suis navré de te l’apprendre mais tu pourras plus te débarrasser de moi aussi facilement. »

Je lui demandais alors de m’expliquer ce que ces gars lui voulaient avant de pousser un soupir et lever les yeux au ciel. Bien évidemment, j’aurais dû m’en douter vu la rue où nous étions. Coin préféré des dealers et des junkies. Je lui demandais alors d’un air plus sévère.

« T’as replongé, c’est ça ? »

En même temps à quoi est-ce que je pouvais m’attendre d’autre de sa part ? Ses périodes d’abstinence se comptant sur les doigts d’une main et la longévité à quelques semaines grand maximum.

« Quand est-ce que tu vas enfin commencer à prendre vraiment soin de toi au lieu de perdre ton temps à perfectionner tes numéros de demoiselle en détresse ? »

Je grinçais alors des dents alors que je sentais une douleur vive dans mon bras. Je baissais mon regard vers la manche pour voir qu’elle avait pris une couleur rouge carmin. Comprenant que je devais agir vite, je retirais ma veste du mieux que je pouvais et arrachais la manche de ma chemise pour me faire un garrot. Je tentais alors maladroitement de le passer autour de mon bras, sans y parvenir. Je répondis alors à mon frangin inquiet pour moi, lui dissimulant mon bras.

« Quoi tu plaisantes, j’espère ? Ce n’est qu’une égra… »

Je serrais à nouveau les dents, constatant la gravité de la situation. Bien sûr que j’aurais préféré jouer les gros durs mais c’était quoi l’alternative ? Saigner à blanc jusqu’à tomber dans les pommes devant mon frangin ? J’avais pas envie de lui filer une telle frousse et surtout pas maintenant. Pestant face à mon impuissance, je finis par pousser un grognement de frustration avant de lui tendre le tissu.

« Bon c’est bon t’as gagné. Tu veux bien me donner un coup de main ? »

It's been a long day without you

feat. Diego

Les Hargreeves sont chacun très différents, uniques, tous autant qu’ils sont, mais face à une situation aussi incompréhensible et chaotique que cette fichue lune rouge, il est surprenant de constater qu’ils ont tous tendance à réagir de la même manière. Leur vie avait eu beau être imparfaite et partir dans tous les sens… ils avaient eu, quelque part, tous envie de la retrouver. Ce qu’ils doivent comprendre maintenant, c’est qu’elle ne leur est pas inaccessible. Ici et maintenant, ils peuvent encore parvenir à leurs fins.

« Peut-être que maintenant, c’est ici, chez nous », il suggère avec un certain entrain, avant tout pour retourner à son interlocuteur son enthousiasme, devenu débordant à présent qu’il a retrouvé Diego, et que rien au monde ne serait susceptible d’entacher, c’est une certitude.

Chez eux, c’est là où le reste de la famille se trouve… et maintenant… Ils semblent s’être tous retrouvés. Mieux encore, même Ben est de la partie, alors à partir de là… autant rester ici, confortablement installés dans cette ville où, qui sait, peut-être bien qu’une apocalypse monstrueuse n’ira pas menacer l’extinction de l’humanité tout entière (et mieux encore, peut-être que Viktor n’y sera pour rien en plus du reste). C’était pas vraiment un reproche de sa part, que de lui faire remarquer qu’ils ne s’étaient pas retrouvés plus tôt… il pense que ce n’est de la faute de personne, en réalité… si ce n’est de cette ville, peut-être, qui a tendance à compliquer les retrouvailles de tout un chacun et de jouer avec les nerfs d’absolument tout le monde, au point que c’en soit même absolument insupportable, à vrai dire. Il veut pas se concentrer là-dessus, uniquement sur le positif, raison pour laquelle les réflexions de Diego le piquent et le vexent plus qu’il ne le voudrait.

« Non, non... », il se défend immédiatement, en s’efforçant de ne pas rebondir sur le coup de la « demoiselle en détresse ». « Enfin si, mais plus maintenant », se justifie-t-il un peu trop laborieusement. « Je suis sobre, d’accord ? Je te le promets », il affirme très honnêtement, parce que c’est le cas. Depuis son arrivée sur cette île, il y a eu des hauts, des bas… Sa fichue lutte contre ses addictions est un combat de tous les instants, et il ne pourra jamais prétendre en avoir fini avec ça. Mais à l’heure actuelle, oui, il ne consomme rien, et depuis un moment déjà… Mais ses dealers n’ont pas eu le temps de l’oublier pour autant. « C’est juste que je dois un paquet d’argent à un paquet de gens », il ajoute alors en détournant aussi vite qu’il le peut son attention sur le bras blessé de son interlocuteur.

Et même si Diego joue les gros bras et fait comme si de rien n’était, il a quand même été sérieusement amoché, et non, ce n’est définitivement pas juste une égratignure…

« T’en fais pas, infirmière Klausy s’occupe de tout », plaisante Klaus en essayant d’improviser du mieux qu’il le peut un garrot avec le tissu arraché à la chemise de son frère. « T’as une caisse garée quelque part ? »

A so long day without you

Je souris légèrement aux premiers propos de Klaus, hochant la tête, pensif. Je ne le lui montre pas clairement mais son enthousiasme, sa vision optimiste des choses me fait tellement de bien. J’ai beau souvent critiqué les pitreries et l’insouciance de mon frangin, je ne sais pas ce que je serais sans cette bouffée d’oxygène et cette lueur dans l’obscurité que représentait Klaus à mes yeux. Une sorte de Bruce Wayne, renfermé dans sa grotte, totalement aigri et parano, dévoré par la colère et sa soif de vengeance. Cette pensée ne faisait que renforcer mon bonheur de l’avoir retrouvé.

« Tu n’as peut-être pas tort. »

J’aurais pu me contenter de cette réponse, mais accepter cette réalité était au-dessus de mes forces. Il y avait tellement de questions, de mystère dans cette ville.

« Mais quand même, ça ne te rend pas un minimum curieux ? On ne sait même pas ce qu’on fait ici ou ce qui nous a amené. Il n’y a rien de normal au fait qu’autant de personnes aient été arrachée de leurs monde d’origine pour se retrouver ici. Ca doit forcément cacher quelque chose. Je veux dire… tu as remarqué le nombre de super-héros qui traînent dans les rues ? Si ça se trouve c’est un complot de méchants qui voulaient se débarrasser des gentils pour prendre possession de leur monde. »

Bon OK d’accord j’allais peut-être un peu loin, mais il y avait de l’idée et j’étais persuadé qu’il y avait une explication rationnelle derrière tout ça.

« Je peux pas rester les bras croisés alors que notre monde est peut-être en danger et que certains d’entre nous ne sont pas ici… Pogo, Maman… je veux pas les abandonner. »

Je détournais un instant mon regard, estimant qu’il y avait plus urgent à penser en cet instant précis. Je cherchais donc à comprendre ce que ces types voulaient à Klaus. C’était un peu la moindre des choses après m’être fait planter par l’un d’entre eux, non ? J’écoutais mon junkie de frangin me parler de ses addictions qu’il semblait selon ses dires avoir vaincu pour un moment. Je hochais alors la tête avant d’ajouter

« D’accord, je veux bien te croire. »

Et si c’était ben le cas, je me chargerais personnellement que cette situation ne change pas. Je fronçais les sourcils au moment où il admit devoir de l’argent à beaucoup de monde. J’imaginais le tableau si tous ressemblaient à ceux que je venais d’affronter. Combien de fois s’était-il retrouvé dans cette situation ? Non, je refusais de lui poser cette question. Cela ne me ferait que culpabiliser à l’idée de ne pas avoir été là toutes les fois où il avait vraiment besoin de moi à ses côtés. Mais il fallait bien que je sache dans quelle galère il se trouvait, non ?

« Un paquet… qu’est-ce que tu veux dire par un paquet ? »

Bien sûr, il ne répondit pas à cette question, préférant se concentrer sur mon bras. Je souris légèrement en voyant sa volonté réjouie de pouvoir prendre soin de moi. C’était vraiment adorable.

« Merci. Mais ne crois pas t’en tirer à si bon compte. Je compte bien découvrir ce que tu me caches… et veiller à ce que tu rembourses tes dettes aussi. »

Non parce que je voulais bien jouer les héros et lui sauver la mise, mais passer à tabac tous les gens à qui il devait de l’argent, ne l’aiderait pas du tout à évoluer. Après tout, c’était lui qui avait fait des conneries. C’était à lui de les assumer. Je tendis ensuite mon bras dans sa direction, lui donnant quelques instructions pour m’assurer qu’il fasse les choses correctement. Ca serait trop bête que j’en vienne à perdre un bras à cause d’un garrot mal fait.

« T’as fait des progrès depuis la dernière fois. Pour la peine, je vous engage pour la soirée, infirmière Klausy. »

Je souris à mon tour, heureux de pouvoir partager ce moment de complicité avec lui. Même si les circonstances restaient étranges… famille Hargreeves oblige. J’ouvris alors de grands yeux ronds au moment où il suggéra qu’on aille en voiture.

« T’aurais passé ton permis depuis la dernière qu’on s’est vu ? Non parce que je tiens à arriver à l'hosto en un morceau.»

Je ne pourrais jamais oublier tous les moments où j’avais dû lui servir de chauffeur… tous ces moments que nous avions pu passer ensemble avant notre première apocalypse. En fait, la plupart des instants que nous avions partager à l’époque commençaient comme ça. J’avais même tendance à penser que ce n’était qu’un prétexte qu’il avait trouvé pour passer du temps avec moi. On sait jamais, peut-être que dans son esprit tordu, ça avait du sens.

« J’ai ma caisse garée à deux rues d’ici, on peut aller la prendre… ou on sautera dans le premier camion de glaces qui passe. »

Difficile d’oublier ce moment iconique de notre existence. Je souris alors et plaçait mon bras en bandoulière pour calmer un peu la douleur. Je pris un instant de pause, regardant mon frangin dans les yeux. Je posais une main attendrie sur son épaule.

« Tu m’as beaucoup manqué, tu sais ? »

Je finis par détourner le regard en soupirant. Non décidément, cette sensiblerie finirait par nuire à ma virilité.

« Et voilà, je commence à délirer, c’est mauvais signe. Allons-y avant que je finisse par dire des choses que je regretterais. »

It's been a long day without you

feat. Diego

Si, curieux, Klaus l’est, il l’est même sacrément, mais il doit bien admettre que la curiosité s’est légèrement estompée au fil du temps au profit de l’appréciation plus globale de cet endroit duquel, avec un peu de chance, ils ne repartiraient pas. De toutes les temporalités où il s’était retrouvé transbahuté, celle-ci est certainement l’une des plus confortables, alors si la condition sine qua non pour y vivre sereinement est d’en savoir le moins possible à son sujet… le jeu en vaut peut-être la chandelle, pas vrai ? Ou pas. C’est ça, le truc, quand on sait fichtrement rien d’une situation : elle peut vous réserver de bonnes surprises. Ou au contraire de très très mauvaises surprises, c’est au choix. Dans tous les cas, ce qui n’est pas un choix, c’est le fait qu’il leur faudra faire avec dans tous les cas. ?

« Tu sais y a un tas de trucs qui me rendent curieux », répond Klaus avec légèreté, « … la vie sexuelle d’Enrique Iglesias, le régime de Lady Gaga, le tour de taille de Leonardo DiCaprio… mais c’est important de garder une part de mystère dans la vie », décrète-t-il avec une fausse philosophie. Le tout dans l’intention de dérider son frère avant toute chose, parce que les questions, il y en aura encore un paquet… des réponses, en revanche… c’est moins certain… et à force, sans doute qu’ils devraient être habitués. « J’adore tes théories du complot, frangin, mais je crois surtout que tu perds beaucoup trop de sang, tu délires complètement », suggère-t-il avec un léger rire, incapable de souscrire à l’idée du complot de méchants… même si cette théorie a peut-être plus de valeur, en vérité, que celle qu’il veut bien accepter de lui donner.

Dans le fond, Klaus admire la volonté de fer de son frère, son besoin constant de rendre le meilleur, de rendre justice, sans jamais baisser les bras… Quand il l’entend s’exprimer de la sorte, Klaus est rassuré : son cher Diego n’a pas bougé d’un pouce, il est resté totalement fidèle à lui-même, et Klaus n’aurait définitivement pas voulu autre chose. Surtout, il aurait été particulièrement déçu dans le cas contraire. Certaines choses restent immuables, peu importe les situations particulièrement alambiquées dans lesquelles ils peuvent bien se retrouver… et ça, si c’est pas merveilleux, je sais pas ce que c’est !

« Bah… un paquet, quoi, je vais pas te faire un dessin », répond Klaus en se dérobant naturellement au sujet quand Diego veut avoir plus de précisions pour comprendre plus précisément à quoi il s’expose, mais Klaus préfère minimiser la situation… Dans tous les cas – et dans la situation présente, surtout –, il estime que ce n’est ni le plus important ni le plus urgent. Klaus le sait cependant, il a beau donner le change, il ne fera pas le poids face à l’insistance du numéro deux si ce dernier doit décider d’insister. Mais dans tous les cas, c’est pas totalement un mensonge que de dire qu’ils ont plus à gérer pour le moment. « Oui oui, on verra ça. » Pour ce qui est de rembourser ses dettes, il faudrait déjà qu’il se trouve un boulot honnête, et ça… comment dire…. C’est pas gagné. « Et oui, figure-toi que je conduis, maintenant. T’es fier de ton frangin, hein, hein, hein avoue ? » Ne pas parler du nombre de fois où il a conduit sans permis… même si c’est un peu tentant.

Ils se dirigent tous deux vers la voiture de Diego, et Klaus se marre franchement quand Diego évoque avec lui le fameux épisode du camion de glace.

« Evidemment que je le sais », répond Klaus avec un sourire en coin. « Tu m’as manqué aussi », ajoute-t-il, très sincèrement. « Presque autant que ton look à la Antonio Banderas. » Ils avancent encore de quelques mètres, laborieusement. « C’est celle-là, ta caisse ? ça paie pas de masses, on dirait, la vie de… Tu fais quoi d’ailleurs ? Je t’ai même pas demandé. »

Faut dire que l'ambiance n'était pas vraiment au rattrapage du temps perdu.

A so long day without you

En entendant la réponse de mon frangin, je ne peux m’empêcher de lever les yeux au ciel. Bon sang, est-ce qu’une fois au moins il pourrait prendre un sujet aussi important au sérieux ? C’était une question compliquée et un mystère sacrément difficile à démêler. La philosophie de notre numéro 4 était bien belle mais beaucoup trop optimiste à mon goût. Penser ainsi plutôt que de chercher des réponses n’aurait fait qu’endormir ma vigilance. Et c’est peut-être justement ce que les gars qui avaient organisés tout ce merdier recherchaient justement… à nous laisser profiter de ce monde qu’il nous avait fabriqués sans qu’on se pose la moindre question.

« Laisse tomber. De toutes façons, je me doutais bien que tu pourrais
pas comprendre. Le jour où la vérité éclatera au grand jour tu repenseras peut-être à ce que je viens de te dire… et tu verras que j’avais raison. »

Lorsqu’on aborda le sujet qui fâche Klaus fit tout son possible pour ne pas se perdre en explication. Ce n’était pas surprenant de sa part, il avait toujours tout fait pour fuir ses responsabilités et les discussions gênantes. Pourtant, il savait à quel point je pouvais être têtu. Même maintenant alors que mon bras était en charpie, je ne pouvais pas m’empêcher de me faire du souci pour lui. C’est que mes blessures ou ma disparition c’était une chose, mais celles de Klaus… non, je refusais même de songer à cette idée. Même si ça devait se faire dans la douleur et les larmes, il finirait par entendre raison et enfin apprendre le sens des mots travail et responsabilités. Je finis cependant par me ranger à son opinion. La case hôpital était inévitable. Il fallait que je sois raisonnable… même si la perspective de points de suture ne me plaisait qu’à moitié. Je souris à moitié lorsque Klaus me demanda si j’étais fier de lui. Ne sachant pas vraiment quoi répondre, je lui tendis mes clés de voiture.

« Je mets ma vie entre tes mains, bro. Tâche de t’en montrer digne. Pour la fierté, on verra comment tu t’en sortiras. »

Je marchais alors lentement à ses côtés, prenant appui sur son épaule pour m’aider à marcher. Il n’y avait pas que mon bras qui avait pris cher durant le combat. Je souris lorsqu’il me rendit ma déclaration. Mais il avait raison. Bien sûr que nous nous étions manqués mutuellement. Cela coulait de source. Tout comme cela ne servait à rien que je lui dise à quel point je tenais à lui. S’il y avait bien une personne au monde qui avait conscience que je l’aimais, c’était bien mon frangin. Et Maman naturellement... mais elle n'étais pas avec nous. C’était ce que sa référence à Antonio Banderas me rappelait. C’était difficile d’oublier, notre seul moment privilégié des années 60’. J’avais jamais compris pourquoi il m’avait sorti ça alors qu’il semblait persuadé que j’allais crever en tentant d’arrêter Vanya. Je pensais que c'était peut-être sa manière à lui de me témoigner son affection mais je le saurais jamais vraiment. Qui sait ce qui peut se passer dans la tête de Klaus ?

On arrivait à ma voiture et mon frère se permit d’insulter ma pauvre bagnole. Je lui jetais alors un regard noir.

« Au moins, j’ai les moyens de m’en acheter une.»

Je détournais la tête dans sa direction, désireux de laver son honneur.

« Et il faut pas se fier aux apparences. Elle est plus robuste et rapide qu’elle en a l’air. »

Je n’ajoutais rien vis-à-vis du job que je faisais. Tout du moins pas tant qu’on ne serait pas à bord. Comme prévu, Klaus s’installa au volant et je me plaçais à ses côtés. C’est alors que je lui répondis.

« Je me suis trouvé un job de coach sportif et j’ai aussi commencé une carrière de boxeur amateur. »

Soudain une pensée me fit soupirer. Et merde, le championnat régional ! J’avais bossé tellement dur pour me retrouver en final… et maintenant je pouvais faire une croix dessus. Mais est-ce que c’était vraiment si grave ? Retrouver Klaus était une des meilleures choses qui pouvait m’arriver. Tant pis… j’aurais l’occasion de me rattraper l’année d’après. Encouragé en plus par mon fan numéro 1. Ca n’avait pas de prix ! Je me tournais vers lui en souriant.

« Je sais pas si j’ose te retourner la question… La dernière fois qu’on s’est perdu de vue, c’était pour te retrouver gourou d’une secte. J'imagine même pas comment tu as fait cette fois-ci pour t'en sortir. »

It's been a long day without you

feat. Diego

« Oui oui, et ce jour-là je dresserai un autel en ton honneur pour brosser ton ego dans le sens du poil », dit-il d’un ton moqueur quand Diego se désole de son intention de ne pas comprendre.

De renoncer à comprendre, surtout, parce qu’il a suffisamment donné, et qu’il préfère se focaliser sur l’instant présent. S’il prend plaisir à avoir raison sur sa fratrie, surtout que ça n’arrive pas si souvent, il pourra bien concéder cette maigre victoire à Diego si jamais cette dernière doit advenir. En attendant, et s’il faut vraiment se focaliser sur l’instant présent, la chose la plus sûre, la plus évidente et la plus concrète à faire, c’est définitivement de soigner le bras malmené de Diego. Le reste aura bien le temps d’attendre. Un sourire ô combien fier étire les lèvres de Klaus quand Diego lui fait remarquer qu’il remet sa vie entre ses mains. Peut-être qu’il s’agirait de se montrer aussi mélodramatique.

« Ce qui est bien avec toi, c’est que t’en fais jamais des caisses », rétorque Klaus, goguenard en récupérant les clés de voiture de son frère.

L’hôpital… la charité… tout ça, vous voyez le truc ? Bah, Diego l’a cherché. Qu’est-ce que ça lui coûtait de juste lui répondre : « Oui, Klausy, je suis fier de toi. » Mais de telles paroles ont toujours eu l’air d’avoir la plus grande difficulté à traverser les lèvres des Hargreeves – allez savoir pourquoi, vraiment ! Encore un de ces grands mystères de l’existence.

« C’est ce qu’on va voir », répond Klaus avec une lueur de défi quand Diego affirme que sa caisse est plus robuste et rapide qu’elle en a l’air. Tous les deux s’installent à l’avant du véhicule, et il est évident que Klaus ne va pas laisser une telle information flotter au-dessus de lui, il va tout naturellement vouloir en faire quelque chose d’autre, ce serait mal le connaître que de s’imaginer quoi que ce soit. « On va voir ce qu’elle a dans le ventre. »

Diego a donc trouvé un travail en tant que coach sportif et en tant que boxeur amateur. Dans le fond, rien de tout ceci n’est autre chose que particulièrement attendu, et il est ravi de le savoir avoir trouvé une carrière pas si mal.

« Errrf… » Il réalise soudainement que sa carrière de boxeur amateur risque d’être clairement compromise par l’était de son bras. « Bah, t’es capable de les défoncer à une seule main, pas vrai ? » il ajoute dans un sourire encourageant, avant de démarrer le véhicule, pied au plancher.

Oui, Klaus a appris à conduire, mais on n’a jamais dit qu’il s’était décidé à conduire prudemment pour autant. S’il avait un véhicule attitré, il enquillerait les amandes. Une chance pour lui (pas pour les conducteurs des pauvres véhicules qu’il emprunte), ce n’est pas le cas.

« La secte, c’était bien un moment, mais on se lasse vite. Ici, je tente un nouveau truc, ça s’appelle être un homme entretenu. » Il le dit pour la blague, mais ça dissimule un sujet bien plus sérieux, et qui pour le coup n’a rien d’une plaisanterie. « J’ai rencontré quelqu’un. Et c’est du sérieux. »

A so long day without you

En entendant les paroles de Klaus, j’hésite vraiment à lui répondre sur un ton égal. Finalement, je me ravise. Ce n’est pas le moment et si j’étais honnête avec moi-même, je devrais bien reconnaître que c’était moi qui avais commencé à le chercher. Mais c’était vrai au fond ! Klaus n’avait jamais été comme Five. Il se prenait rarement la tête pour des problèmes aussi importants. Tant que ce n’était pas pour améliorer son confort personnel immédiat. C’était bien là un point qui nous différenciait énormément et sur lequel on ne tomberait jamais d’accord.

Pourtant j’aurais aimé pouvoir le voir s’épanouir au sein de la Umbrella Academy. J’aurais rêvé de pouvoir le regarder avec admiration et ressentir une grande fierté à chaque fois que je parlais de ses exploits. Je ne le voyais pas devenir un super-héros… enfin pas vraiment. Mais j’aurais adoré le voir s’épanouir dans un milieu qui lui ressemblait, dans lequel il aurait rendre de grands services à la communauté. Je savais qu’il avait toutes les cartes en main pour y parvenir. Il fallait qu’il s’en rende un jour compte mais comment… oui comment est-ce que je pourrais faire pour lui ouvrir les yeux ? J’en n’avais pas la moindre idée. Alors oui j’en faisais des caisses mais c’était uniquement pour provoquer une réaction chez lui. Et le grand sourire empli de fierté qu’il m’adressa me prouvait que j’avais vu juste. Je le voyais tout excité à l’idée de pouvoir se montrer à la hauteur de mes attentes. Et c’est ça que je voulais. J’aimerais pouvoir penser que je pouvais avoir une bonne influence sur lui mais je n’en étais pas vraiment certain. Il faut dire que pour trouver un type plus instable que Klaus il faut se lever de bonne heure.

Je ne pouvais pas m’empêcher de le regarder au moment où il s’assit derrière le volant. Est-ce que j’étais en train de flipper ? Ouais carrément. Mais je m’étais promis de lui faire confiance et je ne voulais pas rétorquer quelque chose à chaque fois qu’il tentait de m’aider. Ça m’aurait donné l’impression d’être un grand connard voulant rivaliser avec le paternel. Et ça c’était hors de question. En plus, ça ne marcherait jamais sur mon frangin. Je préférais tenter la méthode douce et l’encourager quand il faisait des choses bien… enfin tant qu’il n’emboutirait pas ma voiture. Là si je m’énervais il pourrait s’en prendre qu’à lui-même. Je souris légèrement au moment où il évoqua le fait que je pourrais les battre avec une main.

« Tu plaisantes ? Je pourrais leur mettre la raclée de leur vie, les deux mains attachées dans le dos. Mais il y a des règles sur le ring et mon coach ne me laissera jamais me battre avec un seul bras valide. Il aurait peur de trop y perdre. »

J’avais peur qu’il finisse par culpabiliser d’avoir une part de responsabilité là-dedans. Je repris alors sur un ton beaucoup plus doux.

« Ne t’en fais pas d’accord… au pire on repoussera la finale de quelques semaines. Et ce jour-là j’espère bien que tu seras dans les tribunes pour m’encourager. »

Au moment où il m’annonça qu’il avait rencontré quelqu’un je restais quelques secondes silencieux, ne sachant pas vraiment comment réagir. Il était obligé de me balancer ça comme ça ? Il aurait pas pu choisir un autre moment pour aborder la discussion, bon sang. Je bredouillais alors plus que ce que je parlais

« Wouah eh ben… je t’avoue que je m’attendais à tout sauf à ça. »

Je tentais de me concentrer sur la route, la main crispée sur la poignée de ma portière pendant que je regardais en direct les exploits de mon frangin qui malgré la vitesse ne se débrouillait pas si mal que ça. Je repris donc sur un ton plus élevé.

« Et on peut savoir qui c’est ce grand malade dont t’es tombé amoureux ? »

Bon l’appellation de « grand malade » était peut-être un peu forte. Après tout, j’étais bien placé pour savoir à quel point c’était facile de s’attacher à Klaus. Mais la réponse à cette question pourrait être intéressante… il fallait bien que j’en prenne note pour aller fouiller ses antécédant judiciaires. Il était hors de question pour moi de laisser mon frangin se retrouve entre les griffes de n’importe quel tordu. Pour que ce type ait mon approbation, il fallait au moins la mériter. Et lorsqu’il s’agissait de Klaus, c'etait loin d'être gagner.

It's been a long day without you

feat. Diego

Klaus affiche un sourire amusé et goguenard, quand son frère lui réplique qu’il serait tout à fait capable de faire la misère à ses adversaires même privé de ses deux mains. Il n’en doute pas vraiment. Il n’en doute même pas le moins du monde, pour être honnête, parce qu’il connaît non seulement les capacités mais surtout l’esprit combattif de Diego, et il sait par conséquent que ce genre de choses ne l’arrêtent pas et ne l’arrêteront probablement jamais. Klaus fait mine de ne pas s’en faire, mais c’est faux. Bien sûr qu’il s’en fait, parce qu’il ne veut pas gâcher non plus lesbeaux projets de son frère par pur égoïsme. Egoïsme, il peut l’être sacrément, pourtant, même lui a ses limites malgré tout. Ce qui le rassure néanmoins, c’est le fait que Diago, quoi qu’il en soit, ne se laisse absolument jamais démonter, et il va forcément rebondir…

« Un peu que je serais dans les tribunes, je manquerai ça pour rien au monde. Ton meilleur supporter », il lui promet avec un sourire s’étirant d’une oreille à l’autre. Le pire, c’est qu’il n’exagère pas. Il serait probablement très bruyant et parfaitement intenable s’il décidait d’assister à l’in des combats de son fèrre… Mais en même temps, à quoi servent les frangins s’ins ne sont pas à la fois encourageants et embarrassants, pas vrai ?

Il passe finalement sur ce sujet au moment de décider d’en évoquer un autre, qu’il ne saurait qu’aborder rapidement tant il a pris d’importance dans sa vie. Klaus ne peut que tout naturellement vouloir évoquer ce qui le rend si heureux avec Diego dans l’espoir de lui faire partager son bonheur. Quitte à regarder un peu trop souvent dans sa direction et à agiter un peu trop souvent également ses mains au -dessus du volant sans prendre la peine de contrôler dignement son véhicule. Enfin… le véhicule de Diego, en l’occurrence.

« Dis tout de suite que tu t’attendais à ce que je finisse ma vie seul avec cinquante chats ! » Bon, pour les chats peut-être pas, mais il n’aurait pas été déconnant d’imaginer Klaus Hargreeves finir sa vie en éternel célibataire, lui qui avait été positivement ravagé par la seule histoire d’amour à laquelle il se soit jamais abandonné… Ou du moins… La seule avant Mutt. Quand Diego le rencontrera et comprendra à quel point Mutt est bien pour lui, alors il ne sera plus surpris, il sera juste heureux et soulagé de savoir qu’il a trouvé quelqu’un de bien, et qui ne demande qu’à prendre le plus grand soin de lui. « Mais t’as raison, c’est un grand malade pour réussir à me supporter, mais tu l’aimeras, tu verras. » Il sourit de plus belle, il ne peut pas s’en empêcher. « Il s’appelle Mutt – et avant que tu dises quoi que ce soit, je lui ai déjà dit cent fois qu’il aurait pu trouver mieux, comme nom. Il m’a hébergé quand j’avais nulle part où aller. Et une chose en entraînant une autre… » Il sourit, volontairement cryptique. « Il est super intelligent, très protecteur, le genre généreux, qui joue les gros durs mais qui est hypersensible en fait, enfin bref… » Il marque une pause. « Tu vas être obligé de l’aimer dans tous les cas… vu qu’on va se marier. »

A so long day without you

L’espace d’un instant, j’avais pu regretter cette idée de passer à côté de ma finale, c’était certain. Mais il y avait tellement plus important à ce moment-là. J’étais parvenu à retrouver Klaus après tout ce temps l’avoir cherché dans pratiquement tous les recoins de l’île. Qui avait-il de plus important, franchement ? C’est pour ça que je tentais très rapidement de le rassurer, exprimant même le souhait de pouvoir l’avoir à mes côtés pour les matchs. Souhait qu’il avait immédiatement accepté sans réserve. Bien sûr, je connaissais mon frère. Il avait toujours été mon plus grand supporter, le premier à me faire comprendre que je pouvais être un héros. Je savais à quel point son soutien était précieux et je ne doutais pas à instant qu’en le sachant près de moi, je gagnerais cette maudite finale.

« Et je compte sur toi pour être fidèle à toi-même, mec. »

J’imaginais tellement bien le tableau. Les cris de Klaus passant bien au-dessus de ceux des autres spectateurs et ses manières de m’encourager toutes personnelles. Mais c’est tout ce dont j’avais besoin et tout ce que j’espérais. Il n’y aurait peut-être que pour nous que ça semblerait normal mais cette idée aussi me plaisait. Celle que nul ne pourrait comprendre à quel point les excentricités de mon cher Numéro 4 étaient précieuses pour moi et que je n’aurais échangé mon frangin pour rien au monde.

Ce furent à ce moment-là que les choses se gâtèrent… un peu. Disons que parler de la vie sentimentale de Klaus n’était pas le sujet que je pensais le voir aborder. Et j’avouais avoir de la peine à concevoir qu’il puisse avoir une quelconque relation sérieuse. J’aurais voulu lui rétorquer ça mais la nouvelle m’avait clouée sur place. Je n’étais déjà pas très doué pour parler alors aborder un sujet pareil… et avec Klaus en plus ? Je ne savais même pas par quoi commencer. Peut-être par lui dire de faire attention à la route pour commencer ? Mais je n’avais pas le cœur à l’interrompre. Il était parti dans son discours et je savais que quand il était comme ça, c’était inutile d’insister. En plus, ça aurait pu lui donner l’impression que ses histoires de cœur ne m’intéressaient pas le moins du monde. Mais ce n’était pas vrai… elles m’intéressaient parce que c’était important pour lui. Et parce que je me devais de le protéger. J’avançais donc mon bras, prêt à saisir le volant s’il se mettait à faire n’importe quoi.

C’était également un bon prétexte pour moi de ne pas croiser son regard en ce moment. Le temps de faire le tri parmi toute ces informations. Les informations sur ce fameux Mutt qui semblait être la dixième merveille du monde pour mon frangin mais dont je n’avais jamais entendu parler. Mutt. C’était un prénom ça, sérieusement ? Bon la bonne nouvelle c’était qu’au moins il semblait vraiment avoir pris soin de lui. Enfin relativement puisque Klaus était toujours couvert de dettes et que son homme ne semblait pas faire grand cas du fait qu’il avait fréquenté des types peu recommandables. C’est ça qu’il appelait l’entretenir ? Et j’apprenais en plus qu’ils allaient se passer la bague au doigt ? Klaus marié… c’était deux informations tellement contradictoires dans ma tête.

« Et t’as une autre nouvelle du même genre à m’annoncer ? Non parce que parti comme t’es parti tu vas finir par m’annoncer que vous allez adopter d’adorables jumeaux que vous avez trouvés dans un orphelinat du coin. »

OK c’était peut-être pas le moment de faire des remarques déplacées. Si Klaus avait décidé de me faire la tête à ce moment-là j’aurais pu ne m’en prendre qu’à moi-même. Il fallait juste que je prenne quelques instants de calme et de silence pour ne pas sortir d’âneries plus grosses que moi… éviter de choisir le sarcasme comme moyen de défense. Je restais silencieux un instant et finis par reprendre.

« Ecoute je… je suis content pour toi de savoir que tu as réussis à tourner la page pour ton histoire avec Dave. Pour t’avoir soutenu dans ton deuil, je sais à quel point tu en as souffert. Alors si tu peux retrouver le bonheur auprès de ce Mutt, j’en suis ravi. Simplement j’aurais espéré que… »

Que je puisse garder égoïstement mon frangin pour moi quelques temps avant de voir son fiancé accaparer tout son temps ? Que Klaus ne s’engage pas si vite ? Que je puisse au moins avoir le temps de le connaître et donner mon avis avant qu’il ne fasse le grand saut ? Il y avait tellement de choses que j’aurais voulu dire et aucune qui ne convenaient véritablement. Les faits étaient là et je ne pouvais que les accepter. Je soupirais avant de reprendre.

« Laisse tomber… c’est pas important. »

Je ne pouvais cependant pas m’empêcher de froncer les sourcils au moment où il prétendait que je devrais forcément l’aimer… comme si c’était une obligation.

« Tu sauras que personne ne peut m’obliger à quoi que ce soit. Je pourrais le tolérer, accepter qu’il fasse partie de la famille… puisque c’est important pour toi ! Mais ne me demande pas l’impossible. »

Dans ma vie, il n’y avait que trois ou quatre personnes que je pouvais prétendre aimer véritablement. Et Mutt n’en ferait certainement pas partie. Je ne voulais cependant pas prendre le risque de décevoir Klaus. Et me tenir à l’écart ne ferait que m’éloigner de mon frère et ça c’était hors de question.

« Mais je ne suis pas contre l’idée de le rencontrer. Tu sais… histoire que je mette les points sur les i dès le départ et qu’il sache ce qu’il risque si jamais il s’avise un jour de te rendre malheureux ? »

Je souris à cette remarque… dans ma tête, je trouvais ça très drôle en réalité. J’avais bien le droit maintenir ma réputation de grand frère protecteur, non ?

« Tu crois que tu pourrais nous arranger ça ? »

It's been a long day without you

feat. Diego

Klaus se fend d’un grand sourire quand son frère lui dit compter sur lui pour rester fidèle à lui-même. Il ne fallait pas le lui demander deux fois. On n’étouffe pas la personnalité de Klaus Hargreeves – à la rigueur, c’est sa personnalité qui vous étouffe, au bout du compte. Bien sûr que Klaus sera fidèle à lui-même, bien sûr qu’il sera à la hauteur d’une réputation qui mériterait d’être plus grande. Ils y reviendront le moment venu, mais dans tous les cas, Klaus ne contrariera pas sa nature. Même s’il le voulait, il n’y parviendrait pas. Klaus ferait preuve d’un enthousiasme forcené, et après tout, ce serait amplement mérité, puisqu’il s’agirait de couvrir Diego d’encouragements, et personne ne mérite plus de l’être que lui. Il se contente de ça, d’un sourire qui en dit long, avant que la conversation ne dévie sur un autre sujet qui laisse littéralement Diego sur le cul. Logique, en même temps. C’est sûr qu’il devait pas s’y attendre, à celle-là. Mais c’est le cas, c’est un fait, Klaus reste fidèle à lui-même mais sa vie, elle, a changé.

« Non, t’inquiète, ça c’est pas prévu au programme », répond Klaus d’un ton léger, faisant mine de ne pas entendre le soupçon de cynisme qui vient assaisonner cette discussion, alors que Diego suggère que la prochaine étape, ce serait qu’il lui apprenne avoir adopter des gosses dans un orphelinat. « Par contre on a un chien, un Saint-Bernard, Indy. A la base il était… comme ça… Puis maintenant, t’imagines pas, il est coooomme ç… wouh ! » La voiture fait une légère embardée (c’est ce qui arrive quand on ne garde pas ses mains sur le volant, mais Klaus se rattrape bien vite et se reconcentre, en tout cas quelques secondes, sur la route.

Diego lui dit finalement qu’il est heureux pour lui. Qu’il est heureux de le voir avoir réussi à tourner la page, pour Dave. C’est le cas. Enfin… il a fait le deuil de ses sentiments, mais il ne pourra jamais oublier les traumatismes attachés à la perte de Dave. Klaus sait que c’est un sujet délicat, et il évite généralement de l’aborder. Dave et Mutt sont très différents, la place qu’ils ont dans son cœur est également distinctes, mais oui, à ce jour, il peut le dire et en être sûr et certain : Mutt est l’homme de sa vie, et il a eu une chance immense de croiser son chemin alors qu’il n’avait plus rien, ni personne.

« Il est vraiment bien pour moi, tu sais. Quand tu le rencontreras, tu comprendras », il ajoute avant de se concentrer sur la silhouette de son frère à côté de lui (la route, Klaus, regarde la route !), les sourcils froncés. « T’avais espéré quoi ? »

Il n’aime pas l’idée qu’il se mette à juger Mutt d’entrée de jeu, sans même le connaître, sans même savoir ce qu’il vaut ou chercher à le comprendre. Mais au moins, il accepte de le rencontrer, et encore heureux ! Pour Klaus, il est primordial que Mutt recontre tous les membres de sa famille.

« Et évidemment que tu vas le rencontrer. Tu t’imaginais que j’allais le garder cacher ? A mon frère préféré ? – ou au moins dans le top 5 de mes frangins préférés ? » il ajoute en espérant détendre l’atmosphère.

A so long day without you

Gardant un œil vigilant sur la route, n’oubliant pas que c’était Klaus au volant, je tentais d’avaler les nouvelles de son histoire d’amour. Conscient que j’avais déjà loupé une chiée d’épisodes et cela m’avait totalement assommé. Comment est-ce que j’avais pu manquer tout ça ? Décidemment, cette saleté de lune rouge arrêtait pas de faire des siennes et cela m’agaçait énormément.

J’écoutais alors que difficilement Klaus, lui prêtant une oreille semi-attentive, toujours cloué sur place et peinant à trouver mes mots. Je ne les trouvais véritablement qu’au moment où Klaus fut à deux doigts de nous envoyer dans le décor.

« Klaaaus… Bon sang tu pourrais pas regarder où tu vas, mec ? Si tu pouvais éviter de nous envoyer directement au cimetière sans passer par la case hôpital, je t’avoue que ça m’arrangerait. »

J’allais lui parler de la fierté (manquée) qu’il aurait tellement voulu que je ressente pour lui. Mais je n’avais aucune envie de le blesser. Je choisis alors de me calmer, tentant un brin d’humour pour détendre l’atmosphère et revenir au sujet qui préoccupait tellement mon frère.

« Tu sais… c’est dommage. Je suis persuadé que j’aurais fait un parrain fantastique. »

J’adressais alors un sourire en demi-teinte à Klaus alors qu’il tentait de me rassurer sur sa moumoute… ouais je savais qu’il s’appelait Mutt. Mais je trouvais ce surnom trop tentant pour ne pas l’adopter. Bref, j’aurais bien voulu croire à ses paroles mais j’aurais toujours un doute. Bon, de toutes façons c’était Klaus. Jamais personne ne serait suffisamment digne de lui à mes yeux.

« J’espère que tu as raison… et il y a plutôt intérêt pour lui. Parce que je ne laisserais plus jamais qui que ce soit te blesser ou te faire du mal sans intervenir. »

Je ne pouvais plus les compter… le nombre de fois où j’avais dû consoler Klaus martyrisé par notre gros connard de père. Jamais plus je ne pourrais rester les bras croisés devant la souffrance de mon frangin adoré. Même si la personne en question était l’homme de sa vie… il subirait le même sort que les autres.

« Si un jour il finit par te rendre malheureux, il se retrouvera cloué sur un mur ! Je te le garantis. »

Lorsque Klaus me demanda d’éclaircir mes pensées, j’y renonçais pour commencer, gardant ce discours pour plus tard… au moment où on serait enfin arrêté.

« J’avais espéré que tu garderais les yeux sur la route… si c’est pas trop te demander. Tiens regarde le parking est juste là. On va bien finir par trouver une place. »

Je resterais silencieux alors que Klaus avançait, ne voulant pas risque de le déconcentrer pendant ces manœuvres particulièrement délicates. J’étais touchés par ses dernières paroles… même s’il aurait gagné plus de points en s’arrêtant au « frère préféré ». Quoi ? J’avais toujours le droit de prétendre à la place de Numéro 1 aux yeux de Klaus, non ?

« Je te promets que je me tiendrais bien… j’essayerais de ne pas le faire fuir avant qu’il t’amène devant l’autel. Mais ça va te coûter une place d’honneur à votre mariage. »

Je le dis également sur le ton de la plaisanterie attendant qu’il arrête correctement la voiture et la gare sur la place. Je restais quelques instants pensifs, avant de me décider à lui en parler. Après tout, il avait le droit de le savoir.

« En fait… tu sais ce que j’aurais vraiment voulu ? J’aurais espéré arriver à tes côtés sur cette île pourrie. Pouvoir être là pour vivre tout ça avec toi, continuer à veiller sur toi, à te protéger... rattraper le temps perdu. Et j’arrive là comme un con, et j'apprends que ta vie a changé du tout au tout sans que j'ai pu en être témoin et que t’as dû refiler mon rôle de protecteur à un autre. Je t'en veux pas. Il fallait bien que quelqu'un s'occupe de toi. Alors autant que ça soit l'homme de ta vie. Mais j'y peux rien... ça m'agace.»

C'était idiot mais entendre Klaus parler de son merveilleux compagnon et de comment il s'occupait bien de lui réveillait en moi des angoisses de gosse. Intérieurement, je ressentais la même frustration qu'à l'époque où notre père me faisait les louanges de Luther en me démontrant à quel point j'étais minable à ses yeux. Veiller sur Klaus ça avait donné un sens plus profond à ma vie durant mon enfance. Je savais qu'il n'y avait rien que je ne pouvais accomplir tant que je serais son héros. Même maintenant je ressentais toujours le besoin de prendre soin de lui... vivre avec cette certitude. J'avais peur qu'on finisse par m'en priver totalement. Que je sois remplacé, oublié... Je fermais les yeux un instant, avant de reprendre les yeux rivés sur le pare-brise.

« Je m'en veux, tu sais. J'ai pas su être à la hauteur et tenir mes engagements. Papa avait raison. Je suis qu’un moins que rien… un pseudo-hero qui se donne des grands airs mais qui assure pas des masses sur le terrain. J'ai pas réussis à sauver JFK et je suis même pas foutu d'être là pour mon frangin préféré quand il a besoin de moi.»

It's been a long day without you

feat. Diego

Bon, d’accord, Klaus a clairement oublié de faire attention à sa conduite, mais on ne se refait pas, il était trop concentré sur leur discussion pour se concentrer sur la route en même temps. Il se contente d’adresser à son frère un regard qui signifie « C’est bon, détends-toi », avant de consentir à mettre ses deux mains sur le volant et de poser une attention plus grande sur la route.

« On a une ribambelle de frères et sœur qui seront ravis de faire de toi le parrain de leur enfant, t’inquiète même pas pour ça. Et si tu veux être le parrain d’Indy le chien, on peut toujours s’arranger », se marre Klaus avec un immense sourire, sans prendre très au sérieux les propos de son frère. Même si c’est vrai, Diego ferait probablement un parrain d’exception – tout comme Klaus, d’ailleurs, qui estime qu’il serait le parrain-gâteau le plus exceptionnel que l’on puisse concevoir.

Klaus est touché par les paroles de son frère, il aime le savoir aussi prévenant et protecteur avec lui, même s’il estime que ce n’est pas une place qu’il a encore besoin de tenir, car il s’est trouvé un nouveau protecteur en la personne de son époux, qui sait veiller sur lui et faire de lui la meilleure version de lui-même.

« Il ne me rendra pas malheureux. Mais je note l’info », il ajoute en finissant par se garer sur le parking de l’hôpital. Il déboucle sa ceinture au moment de reprendre la parole. « Et t’as peut-être cru que j’allais te laisser dans un coin le jour de mon mariage, ça va pas la tête ? Evidemment que tu as une place d’honneur. »

Ce sera toujours le cas. Diego tient bien sûr une place privilégiée dans sa vie, et ce n’est certainement pas parce qu’il a trouvé l’homme de sa vie et qu’il va se marier que ça y changera quoi que ce soit, bien au contraire. Et d’ailleurs, Klaus ne peut que souhaiter la même chose à Diego, il veut que lui aussi trouve chaussure à son pied, parce que l’air de rien, il mérite plus que n’importe qui de trouver l’amour.

« Ouais… Je sais, moi aussi j’aurais voulu que tu sois là, et j’aurais voulu être là, mais c’est comme ça, c’est la vie », répond Klaus. « Maintenant, t’as deux options, soit tu restes à la gare et tu te lamentes sur ton sort, soit tu prends le train en marche et t’apprécies le reste du voyage. T’imagines ? On aurait pu mettre dix ans à se retrouver. Ou même ne pas se retrouver du tout. Alors on est chanceux au final, pas vrai ? » philosophe (de comptoir) Klaus afin de faire voir le meilleur côté des choses à son frère qui, il le sait, garde une certaine rancœur, compréhensible, de cette situation. Compréhensible, certes, mais inutile, au fond. « Et si t’oses redire que papa avait raison, j’annule tout ce que je viens de dire. » Il lui tapote doucement l’épaule alors que tous les deux sont sortis de la voiture et se dirigent vers la voiture. « Bon, c’est peut-être le moment de te le dire, par contre, toi et JFK, vous aviez aucune chance, c’était une romance vouée à l’échec », il ajoute pour détendre l’atmosphère. « T’as eu l’impression de pas être là pour moi tout à l’heure, peut-être ? Vraiment, Diego, t’as rien à te reprocher. »

A so long day without you

Je souris légèrement en imaginant le tableau réunissant la nouvelle génération de la famille Hargreeves. Très honnêtement, ça aurait été loin d’être idyllique… aucun de nous n’était vraiment fait pour ça. Et on savait tous sur qui on pouvait rejeter la faute. Lorsque toute notre enfance a consisté à obéir aux ordres d’un tyran, difficile de s’imaginer en papa gâteau. Je poursuis alors sur le ton de l’humour.

« T’as raison. Je suis persuadé que j’arriverais à convaincre Allison après son trente-troisième mariage et son dix-septième gosse. Ou Five… quand il sera en âge physiquement de fonder une famille. »

Autant dire quand les poules auront des dents. Mais cette idée me faisait rire.

« Honnêtement Klaus, je crois qu’aucun de nous ne sera jamais véritablement à la hauteur dans le rôle de parent. »

Bon ça serait mentir de prétendre que je n’y avais pas pensé un jour mais c’était trop de responsabilités et j’avais bien mieux à faire que de changer des couches et préparer des biberons. En plus perpétuer ce poison qu’était le nom des Hargreeves était-ce réellement une bonne chose ? Non décidément, je ne me voyais pas tenir ce rôle. Je souris en entendant mon frangin adoré affirmé qu’il était hors de question qu’il me laisse de côté lors du grand jour. Eh ouais… si je voulais bien accepter que Mutt prenne la main de mon frère, mon futur beau frère ne devrait jamais oublier que je me tiendrais toujours à deux pas derrière son mari pour veiller au grain. C’était une belle façon de le lui démontrer, non ?

« Merci bro, je te promets que je serais à la hauteur… tant que tu évites de me confier le rôle d’animateur de soirée. »

Non parce qu’il fait bien comment ça finirait et je n’étais pas certain que finir la soirée dans le sang et les larmes soit réellement le ton qu’ils souhaitent donner à leurs festivités de mariage.

Je restais pensif en entendant les propos suivant de mon frère. Klaus avait raison. On avait fini par se recroiser. Dans le fond est-ce que c’était pas le plus important ? Nous n’étions pas responsables de notre séparation mais nous pouvions faire en sorte que nos retrouvailles rattrapent le coup. Je finis par le regarder, un léger sourire aux lèvres. C’est sans doute la raison pour laquelle j’aimais autant mon frangin. J’avais beau critiqué ce côté nonchalant, je savais que son optimisme finirait forcément par me calmer et me rassurer. Jamais personne ne s'en sortirait mieux que lui dans ce domaine. Je passais alors une main derrière sa nuque pour une sorte de mini-câlin maladroit.

« Tu as raison… on a eu de la chance finalement. »

Ma main venant par la suite lui ébouriffer les cheveux.

« Mais ne t’avise pas te servir de ta nouvelle vie d’homme marié comme prétexte pour m’éviter… on a beaucoup trop de soirées gaufres, virées en voiture et parties de Mario Party à rattraper et il est hors de question que je fasse tout ça sans mon meilleur pote. Alors débrouille-toi pour être présent. »

Je sortis plus ou moins difficilement de la voiture, je restais aux côtés de Klaus ma main valide derrière ses épaules. Je finis par lever les yeux au ciel à sa remarque.

« Ben tien, ça m’aurait étonné que tu puisses comprendre qu’on puisse sauver quelqu’un par pur respects de nos valeurs personnelles. Si j’étais parti assassiner Hitler dans les années 40’ t’aurais dit quoi ? Que c’était pour me faire Eva Braun ? Ou que j'avais un faible pour Churchill ? »

Il faudrait que j’évite de mettre des images pareilles dans la tête tordues de mon frangin. Comme s’il était pas déjà suffisamment doué pour se faire des films tout seul. Je le regardais ensuite affectueusement, touché par ses paroles.

« C’est vrai ça... je suis un héros. Heureusement que je pourrais toujours compter sur toi pour satisfaire mon syndrome du Sauveur ! »

Je finis par regarder l’hôpital, poussant un large soupir. Ce que je pouvais détester ces endroits… et j’aimais encore moins l’idée de me faire recoudre… et leurs grosses aiguilles.

« Bon on y est… t’es vraiment sûr que c’est une bonne idée ? »

A ces mots, j'entendis du bruit derrière moi. Relâchant Klaus, je me tournais et scrutait l'horizon. Je tentais alors de guetter ce qui pouvait provoquer ce bruit.

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feat. Diego

Klaus ne cherche à rassurer ou à réconforter Diego, et se contente de rire franchement quand Diego suggère que personne au sein de leur fratrie ne voudrait faire de lui le parrain de leurs enfants… Inutile d’en faire tout un plat, ou même de faire des plans sur la comète, au passage. Leur histoire est particulièrement compliquée, et leur famille plus encore. Prétendre qu’ils seraient capables d’anticiper ce qui adviendra serait de toute évidence un mensonge des plus éhontés. Autant en rire. Qui sait ce qui les attendra, à tous, d’ici dix, vingt, trente ans, et combien d’apocalypse ils auront essuyé d’ici là. Autant voir les choses au jour le jour. Il ne cherche pas non plus à contredire Diego quand il affirme qu’aucun d’eux ne serait jamais un parent idéal. Vu l’exemple que leur paternel leur a donné, c’est pas si surprenant. Quoi qu’Alison semble définitivement être l’exception qui confirme la règle… mais on ne peut pas faire abstraction de sa vie familiale et sentimentale dissolue.

« Ah… Bon, je te raye de la liste des animateurs potentiels, alors »,  fait mine de concéder Klaus, qui pas un seul instant ne l’aurait laissé jouer ce rôle, à la vérité, surtout pour le voir organiser un lancer de couteau en plein toast pour réchauffer l’ambiance (on sait jamais).

Klaus sourit doucement alors que Diego, à sa manière, lui laisse entendre une fois de plus sa crainte d’être délaissé sous le prétexte qu’il sera à présent marié. Est-ce qu’il peut prétendre que ça ne va rien changer… Difficile à dire, en réalité… Impossible à dire, même, mais Klaus Hargreeves sait bien qu’il ne négligera pas l’importance que Diego a pour lui, et Mutt a été prévenu d’office : on ne se débarrasse pas d’une famille aussi envahissante que les Hargreeves, c’est impossible.

« Promis, on se fera toutes les soirées que tu veux, et le plus tôt possible dans que t’as qu’une main pour tenir ta manette », il dit avec un sourire en coin.  Avant de chambrer tout naturellement Diego au sujet de ce qu’il estime être sa fixette quasi-obsessionnelle pour Kennedy (il n’en démordra certainement pas, pas le moins du monde, même). « Moi, ce que j’en dis, c’est que les convictions ont bon dos. Mais t’inquiète, va. C’est vrai qu’il était plutôt beau gosse, ce bras Johnny », ajoute-t-il, goguenard et sans le moindre sérieux, vraiment pas.

Pour le reste, Klajus ne pense même pas avoir besoin de préciser à Diego qu’il n’a besoin d’absolument personne pour alimenter son syndrome du sauveur tant ce dernier est déjà hyper-prononcé. Lui-même ne peut qu’en avoir conscience, bien sûr.

« Qu’est-ce qui est une bonne idée ? De pas te laisser te vider de ton sang à même le parking ? » il demande en lui adressant un sourire en coin. « Laisse-moi y réfléchir deux secondes », ajoute-t-il en faisant mine d’être en proie à un véritable dilemme, alors que c’est bien sûr tout décidé. « Allez, viens, franginou, fais pas ta chochotte ! »

A so long day without you

Un sujet en amenant un autre, on se mit à discuter de la future potentielle nouvelle génération des Hargreeves. Est-ce qu’on pourrait être crédible dans notre rôle de parent ? Bon Allison s’y était elle-même essayée et on sait tous quel avait été le résultat. J’avais décidé d’éviter d’enfoncer le clou en ce qui la concernait. Il faut dire que j’aimais Klaus autant que je haïssais Allison et ça avait été comme ça dès le début. Mon frangin le savait et comme il était très proche de notre Numéro 3, je me disais que ça n’avait pas dû être tous les jours facile pour lui de devoir se retrouver le cul entre deux chaises et nous entendre nous disputer à longueur de temps. Autant éviter le sujet, ça valait mieux pour tout le monde. En revanche, je ne sais pas c’était un délire du à ma blessure ou simplement au plaisir d’avoir retrouvé mon bro après tout ce temps, mais je ne pus m’empêcher de lui lancer une pique bien sentie. J’eus d’ailleurs eu du mal à garder mon sérieux lorsque cette idée me frappa. Je me tournais vers lui, très sérieux.

« D’ailleurs en parlant de gosse… il faudra un jour qu’on rediscute de la garde de Five. Non parce que la garde exclusive ça va un moment mais je suis pas sûr de le supporter encore très longtemps. On passe en mode garde partagée ? Je suis sûr qu’il te manque… en plus ça ferait un grand frère à Indy. »

Je n’avais pas dit ça contre Five, bien évidemment. Même si c’était pas facile tout les jour, je l’appréciais notre crâne d’œuf complotiste aux cheville bien plus grandes que sa taille. Mais pourquoi pouffer tout seul dans mon coin alors que je pouvais le partager avec Klaus et en rire avec lui ? Mon sourire s’élargit davantage lorsque le futur marié confirma qu’animateur de soirée n’était clairement pas ma vocation. Qui l’eut-cru ?

Je fus touché par la compréhension de Klaus. J’avais ressenti le besoin de faire part de mes appréhensions, sachant qu’à présent les choses ne seraient plus jamais comme avant. Il l’avait compris et tentait à son tour de me rassurer. Et il parvint à atteindre son but. Oh bien sûr, je n’allais pas jouer les beaux-frères insupportables à venir stalker tous leurs moments en amoureux. Je comprenais parfaitement qu’ils avaient besoin de temps à eux pour construire leur bonheur que rien ni personne ne devrait troubler. Mais je ne pensais pas être trop exigeant en espérant lui  demander un ou deux rendez-vous par semaine pour passer un peu de temps ensemble.

« Tu sais quoi… on va faire monter les enchères. Si tu arrives enfin à me mettre la raclée à Mario Kart, je paie votre pièce montée. Ça te va ? »

J’étais confiant sur mes propres capacités. Je savais qu’il y avait de grande chance pour que même avec ma main blessée. Et si je perdais je contribuerais à ma façon au mariage et au bonheur de Klaus. C’était finalement un pari gagnant-gagnant.

Je faisais mine de soupirer et de lui en vouloir lorsqu’il insista sur Kennedy mais j’eus beaucoup de peine à retenir un sourire. Ce n’est pas que les conneries de mon frangin m’avaient manquées… mais c’était tout comme. Avançant sur le parking. Je sentais le stress monter d’un cran et pensais légitimement qu’un nouveau brin d’humour m’aiderait à me calmer. Poursuivant sur la lancée de ses idées sur mes intentions concernant Kennedy et les mecs en général.

« Laisse Kennedy à sa magnifique Jackie. Elle a suffisamment morflé comme ça. En revanche, je te promets une chose Carino… si un jour je dois faire mon coming out devant toute la famille tu seras le premier à qui je présenterais mon petit-ami. »

Je l’avais dit sur le ton de plaisanterie. A première vue, rien de sérieux même si je n'étais pas totalement hermétique à l'idée. Ca aurait été mentir de prétendre qu’il n’y jamais eu d’attirance ou d’expériences avec des hommes… même si j’avais gardé ça pour moi. Je ne savais même pas si mon frangin l'avait compris.

"Par contre si je craque sur une fille, je te garantis pas de te réserver le scoop."

Je me focalisais ensuite sur Klaus et ses fausses réflexions sur l’utilité d’aller à l’hôpital. Très honnêtement, si mon frangin n’avait pas été à mes côtés, j’aurais sans doute passé mon chemin et bricoler un truc maison. Mais je tenais à ce qu’il soit parfaitement rassuré alors j’avais accepté. C’était pour le mieux dans le fond.

« Moi faire ma chochotte, tu plaisantes j’espère ? Je suis déjà passé par des blessures pires que ça. Allez on y va. »

Est-ce qu’il y croyait seulement ? Est-ce qu'il pensait que j'allais pouvoir jouer les gros durs ? Je l’ignorais mais j’aimais l’idée qu’il puisse le croire. Alors je continuais d’avancer, restant à deux pas de Klaus que nous franchissions les portes des urgences. Les bruits entendus auparavant n'étant plus qu'un lointain souvenir.

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feat. Diego

Klaus affiche un sourire amusé quand son frère lui fait remarquer qu’il serait probablement plus que temps de discuter de la garde de Five, étant donné que c’est une responsabilité que, pour le moment, Diego se coltine pour lui-même. Klaus n’a aucun mal à admettre que la tâche ne soit pas facile, mais il est hors de question pour lui de laisser Five s’incruster chez lui, chez eux… c’est déjà assez de devoir s’occuper de son chien et de lui-même (accessoirement) sans avoir besoin d’en rajouter une couche supplémentaire.

« Ah non, hein, j’ai mieux à faire de mon temps que de me faire insulter non stop. T’as qu’à demander à Alison, je suis sûre qu’elle adore ça, secrètement », il dit alors, catégorique à ce sujet, parce qu’il a beau aimer très fort son frère (comme tous ses frères), il a un seuil de tolérance limité, lui aussi… peut-être plus grand que la moyenne, certes, mais le Fivey… il est pas simple à gérer. Et encore moins ces derniers temps… Même sans apocalypse imminente, il est capable d’être sur les nerfs plus que n’importe qui d’autre, et c’est insupportable. Qu’il ait sa dose de café journalière ou non n’y change au passage pas grand-chose. « Indy kiffe être fils unique, en plus », il ajoute en souriant.

Non, il ne reviendra pas là-dessus… Et y a bien assez de monde au sein de la fratrie pour se débrouiller d’une autre manière sans que Klaus ne doive s’infliger cette corvée… En plus, dernièrement, chaque fois qu’il voit Five – quand il le voit –, ça finit immanquablement soit à l’hosto, soit à la gendarmerie, alors… Bon… question hosto, Diego est pas mieux mais… bref, c’est une autre histoire.

« Ooouuuh tu as décidé de te ruiner, alors ? Parce que je te préviens, je veux une pièce montée qui fait le double, non, le triple de ma taille. Genre mariage princier, Buckingham et crème fouettée », il dit, ravi de voir son frère se détendre quand ce dernier suggère de payer leur pièce montée… Bon, s’il lui met la raclée à Mario Kart, certes. Mais ça se négocie, ça. « Qui te dit que je me suis pas entraîné à Mario Kart ces derniers mois ? D’où est-ce que tu crois que j’ai gagné de telles compétences en conduite ? » il le chambre clairement avant de déposer une tape – heureusement légère – dans son dos.

Dans tous les cas, Klaus sait bien que le moment venu, et en étant témoin de son bonheur, Diego participera à cent pour cent, aussi bien émotionnellement que matériellement, et c’est bien sûr là le mieux que Klaus puisse souhaiter de la part de son frère.

« AH SI HEIN !!! Tu vas quand même pas me reprocher de pas t’avoir retrouvé avant ? C’est pas ma faute si je pouvais pas t’en parler avant, je savais pas où t’étais, moi », il fait en prétendant être offusqué. « Donc si, tes histoires de cœur, tu me les racontes en premier. De toute façon, tu comptes en parler à qui, sinon ? A Five ? »

Ces mots, il les prononce avant que Diego ne joue les gros durs et qu’ils pénètrent dans les urgences, il ne leur reste plus qu’à attendre dans la salle d’attente… Plus qu’à… ça peut prendre du temps quand même… Le pronostic vital de Diego n’est ^^as engagé du tout, alors il y a de fortes chances qu’on le laisse mariner un bon moment.

« Quand on sortira d’ici, tu m’offres un verre. Je l’aurais bien fait, moi, mais j’ai pas de monnaie », il dit en haussant les épaules sans chercher à être crédible.

A so long day without you

En entendant les propos de Klaus, je ne pouvais m’empêcher de sourire. D’ailleurs, j’étais plutôt d’accord avec ses propos. Five n’était pas le colocataire le plus facile à vivre. Pourtant, il y avait certains avantages à être en colloc avec. On ne s’ennuyait jamais, ça c’était une certitude. De plus, il tombait facilement dans les mêmes délires que moi et là où une autre personne aurait tenté de refreiner mes élans, lui les soutenait, parfois, et nous y plongions ensemble tous Les deux. Ce n’était clairement pas déplaisant. Je ne pus m’empêcher de lui lancer une pique lorsqu’il fit allusion à notre chère numéro 3.

« Oh tu sais, si ça plait vraiment à Allison de s’en prendre plein la figure, je pense qu’elle en aurait bien plus pour son argent en vivant avec moi qu’avec Five. »

J’en voulais pour preuve nos 18 premières années de vie qui n’avait été que moqueries et critiques qu’on s’envoyait à la figure sans aucun ménagement. Une collocation entre nous aurait vite fait les choux gras du quartier. Je chassais cependant cette idée de ma tête. Il y avait des choses qui ne valaient même mieux pas imaginer.

La joie de Klaus concernant son mariage était communicative… ou tout du moins la perspective de faire qui le rende heureux me plaisait beaucoup. Je serais très fier d’apporter la contribution qui le marquerait le plus dans toute la fratrie. J’allais sûrement le laisser gagner, mais pas sans combattre. C’était déjà suffisamment rare que je puisse éveiller chez mon frangin un quelconque instinct guerrier. Je n’allais pas me priver d’une occasion comme celle-là.

« J’ai vraiment hâte de voir ça… et là tu pourras te prendre tous les trottoirs que tu voudras. »

Je lui avais répondu avec légèreté avant que le sujet se tourne vers mes propres histoires d’amour. Je dévisageais alors Klaus, ne m’attendant pas à ce qu’il prenne aussi facilement la mouche… ou suive le mouvement de mes remarques taquines. Pourtant je connaissais mon frère, je savais qu’il adorait les cancans cela n’aurait pas dû me surprendre. Je continuais cependant à jouer, faisant mine de réfléchir quelques instants à sa question.

« Mmmh je pourrais toujours choisir Ben comme confident d’histoire de cœur. »

Ce n’était pas des paroles en l’air. J’avais toujours été proche de Ben, presque autant qu’avec Klaus même si la nature de notre relation était bien différente. En plus, mon deuxième frangin préféré me manquait atrocement. J’avais hâte de pouvoir enfin le revoir et passer du temps avec lui. Ce que je ne croyais plus jamais pouvoir faire de ma vie. Mais quand même, Klaus restait indétrônable lorsqu’il s’agissait de me montrer vrai et authentique.

« Non en vrai ça pourrait se négocier… tant que tu promets d’éviter de tout cafter aux autres. »

Je poussais alors un soupir avant de franchir la portes des urgences qui étaient déjà bien occupé. Il est clair qu’on allait devoir patienter un moment avant d’être pris en consultation. Je partageais d’ailleurs ma pensée, suivant les propos de Klaus.

« Au rythme où ça risque d’aller, quand on sortira d’ici je pourrais même t’offrir un café et un croissant. »

J’évitais sagement le fait que c’était toujours à moi de payer de toutes manières, Klaus investissant par le passé tout dans ses doses. Mais là clairement ce n’était ni le moment, ni l’endroit. Je sentais que j’aurais besoin de la présence de mon frangin devant cette situation qui serait tout sauf évidente pour moi. Traînant les pieds, jusqu’au admission je me retrouvais devant une réceptionniste bien occupée. Elle me demanda alors, les yeux rivés sur son ordinateur.

« Nom et prénom ? »

J’y réfléchis quelques instants. Est-ce que j’était vraiment prêt à lui donner ma réelle identité ? Je craignais de devoir perdre la face devant mes adversaires si jamais ils venaient à apprendre que je m’étais blessé dans une bagarre de rue. Je regardais un instant Klaus, souriant légèrement au moment où une idée me traversa l’esprit.

« Antonio… Antonio de la Vega. »

Elle me tendit alors un formulaire d’un air distrait, me demanda de le remplir, ce que je fis assez rapidement, ne gardant les aspects de la vérité que pour les questions vraiment importantes. Groupe sanguin, allergie… je partis ensuite m’asseoir aux côtés de Klaus. Je tentais alors de calmer les battements rapides de mon cœur qui s’affolait tout comme ma respiration. Je me sentais nerveux et mon regard s’était alors posé sur une infirmière qui rentrait dans une salle de consultation, une grosse seringue posée sur son plateau. Je me mis alors à parler en bégayant, chose que je ne faisais que lorsque mes émotions m’échappaient.

« Tu… tu es sûr que ça ne te dérange pas d’a… d’attendre avec moi ? Je ne voudrais pas que ton homme finisse par croire qu'on t'a ki... kidnapper. »

Je sursautais au moment d’entendre un cri surgir de la salle de consultation dont je n’avais pas quitté la porte des yeux. Je sursautais alors de ma chaise, posant ma main sur le bras de Klaus que je serais bien plus que je ne le voulais. L’infirmière était-elle vraiment si indélicate que ça ? Est-ce que j’aurais le droit moi aussi au même traitement ?

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feat. Diego

Klaus se contente d’afficher un vague sourire complété d’un haussement d’épaules – que l’on pourrait probablement traduire par « C’est pas faux » - quand Diego lui fait remarquer que sa sœur s’en prendrait bien davantage en pleine figure si elle devait l’avoir plutôt que Five comme colocataire. Klaus n’en doute pas, étant donné l’expérience qu’il garde du temps passé au sein du manoir Hargreeves, quand lui-même n’était pas trop défoncé pour exactement comprendre ce qui se passait autour de lui… Mais tout ça, c’est loin, maintenant. Tous autant qu’ils sont à présent, ils sont des adultes presque équilibrés…. Pas tout à fait, certes, mais qui font l’effort de l’être autant que possible, et qui réussissent même le miracle de se construire des vies à part entière, loin du giron du vieux Reggie (quand bien même sa présence se laisse constamment ressentir malgré tout). Pour le reste non plus, il ne commente pas, du moins pas verbalement, jusqu’à ce que le sujet dévie sur les histoires de cœur de son frère – et là, pensez bien que Klaus avait son mot à dire sur à peu près tout.

« Ben est nul pour ça », répond Klaus avec une lassitude exagérée. « Il va te juger constamment et commenter tes choix de vie en levant les yeux au ciel, vraiment je conseille pas. »

C’est ce qu’il dit… et c’est pas totalement faux. Mais en vérité, Klaus estime que Ben est certainement le meilleur confident que l’on puisse avoir… Et par ailleurs, il a joué parfaitement son rôle de petit ange posé sur son épaule quand Klaus partait dans tous les sens… Bon, c’est pas pour autant qu’il acceptait de l’écouter, mais ça c’est une autre affaire. Bien sûr… Quoi qu’il en soit, c’est certainement pas une raison pour qu’il soit laissé sur le bas côté au moment de s’adonner à l’une des activités qu’il préfère. Pour ce qui est de jouer les commères, Klaus sera toujours présent au rendez-vous, fidèle au poste. C’est un rôle qui lui tient à cœur – et en plus du reste, pour lequel il estime être particulièrement doué. Alors vous imaginez bien qu’il ne va pas lâcher l’affaire si facilement.

« Et promis, je serais une vraie tombe. »

Ou pas, il ne faut pas forcément compter sur Klaus pour être le roi de la discrétion… mais pour les choses vraiment, vraiment importantes, il peut tout de même faire un minimum d’efforts. Il se contente de ces mots cependant, alors qu’ils se dirigent jusqu’aux admissions, où Diego se présente sous un nom qui a immédiatement le don de faire pouffer Klaus.

« OK, Zorro, la dernière chose qui te distingue encore d’Antonio Banderas, c’est ton bras en compote », il dit en se marrant.

Ils vont s’asseoir ensemble alors que Diego s’applique à remplir le formulaire qui lui a été désigné.

« T’inquiète, y a une invention géniale qui s’appelle le téléphone portable, Mutty sera juste content d’avoir le canapé pour lui tout seul – si Indy a pas volé sa place avant », il promet en souriant tout en sursautant au moment d’entendre un cri émaner de la salle de consultation. Le genre pas rassurant du tout. « Ah oui quand même… » Il baisse les yeux sur son bras, que Diego tient fermement à présent. « Hey, panique pas, franginou, ça va bien se passer ! »

A so long day without you

La réaction de Klaus à propos de ma vie amoureuse m’amusait. C’était presque touchant de le voir ainsi vouloir conserver la priorité sur ces confessions. Son opinion sur Ben était également assez drôle, compte tenu du temps que les deux avaient passés ensemble depuis la mort de notre frangin. Je ne savais pas réellement à quoi avait pu ressembler leur duo à cette époque. J’avais été le premier surpris à apprendre après toutes ces années que l’âme de Ben avait survécu dans notre monde. Mais j’imaginais assez bien que Ben avait eu plus d’une fois l’occasion de lever les yeux au ciel. Il s’agissait des choix de Klaus après tout. Cela avait dû être assez pénible pour lui de ne pas avoir d’autre choix pour survivre dans notre monde que de rester avec notre junkie de frangin durant toute sa mort. Bon d’accord, cette réflexion sonnait un peu hypocrite de ma part. Contrairement à Ben, j’aurais pu traîner avec n’importe lequel de nos frangins. Pourtant, mon frangin préféré restait Klaus et rien ne me rendait plus heureux que de le savoir enfin à nouveau à mes côtés. Je laissais un sourire malicieux apparaître sur mes lèvres avant d’ajouter sur un ton ironique.

« Alors que toi tu approuveras toujours sans discuter mes choix amoureux bien sûr. »

Je laissais un instant de silence plané avant de reprendre la parole.

« Tu veux qu’on reparle de Lila, peut-être ? »

Cette réflexion me semblait totalement contredire ce qu’il venait d’affirmer, vu à quel point il pouvait sauter au plafond à la moindre prononciation de son nom. Je sentis mon cœur se serrer légèrement à ce moment-là. Qui sait si un jour je pourrais la retrouver ? Je restais cependant sur cette pensée, préférant ne pas rester d’humeur morose. A sa dernière réflexion, je réfléchis un instant avant d’ajouter, amusé.

« Je compte sur toi pour être aussi discret que la fois où on a mis le feu à la fichue collection des livres préférés de Papa en faisant croire que c’était Pogo. »

Arrivés à l’hôpital j’allais m’annoncer, me présentant sous un faux nom qui fit immédiatement tilter Klaus. Au moins j’avais réussi à le faire rire. Ca en valait bien le coup, non ? En revanche moi, je riais beaucoup moins au moment de patienter en salle d’attente. Le cri du patient m’avait fait sursauter. Moi qui n’aimais déjà pas les aiguilles, cela ne rassurait vraiment pas. Agrippant Klaus, je tentais de trouver un peu de réconfort auprès de mon frangin. Pris de panique, je fermais un instant les yeux. J’entendis alors une voix raisonner dans le lointain.

« Diego. »

Une voix qui ressemblait beaucoup à celle de Klaus mais en plus douce et plus posée. Je sentis alors une main se poser sur mon genou. Une main à nouveau si proche de celle de mon frérot. Cependant, je savais que ça ne pouvait pas être Klaus. Je tenais encore fermement son bras de mon autre main.

« Tout va bien se passer, tu m’entends ? Allez ouvre les yeux. »

J’obéis alors, rassuré par cette voix et souris en voyant mon ami Vladek à genoux devant moi.

« Vlad… mais qu’est-ce que tu fais là ? Comment as-tu su ? »

Il m’adressa alors son sourire le plus énigmatique. Le genre de sourire qu’il m’adressait à chaque fois qu’il semblait être le seul à avoir conscience d’une réalité qui nous dépassait.

« Bien sûr, je suis bête. Les esprits. »

Nous restions alors en silence, nous regardant sans plus rien dire et échangeant juste un sourire. J’étais plutôt fier de cette déclaration. Ca prouvait qu’on se connaissait bien maintenant. Puis, reprenant conscience de la présence de Klaus, je me tournais vers mon frère. Cette situation était assez amusante dans le fond. Je ne comptais pas cacher l’existence du sosie de mon frère bien longtemps. Vladek et moi étions devenus très proches après tout. Ils auraient forcément fini par se croiser un jour. Mais je n’avais pas forcément imaginé que cela se ferait de cette manière. Je relâchais ma prise sur mes deux compagnons avant de les regarder l’un après l’autre.

« Bon ben puisqu’on va pas y couper… Klaus, je te présente mon ami Vladek. Vladek voici mon frère Klaus. »

Mon ami afficha alors un sourire amusé.

« Tu sais, je ne suis pas vraiment certain que tu avais besoin de le préciser. »

Vladek était au courant depuis longtemps de Klaus… je lui en avais parlé tellement de fois lors de nos discussions. Il se retrouvais enfin face à son miroir. Difficile de le confondre avec qui que se soit. Le chaman tendit alors une main bienveillante dans sa direction.

« Je suis ravi de faire enfin votre connaissance, Klaus. Diego m’a tellement parlé de vous. »

It's been a long day without you

feat. Diego

Ahaha, non, aucune chance pour que Klaus approuve la bouche en cœur tous les choix amoureux de Diego, et il lui suffirait d’évoquer le nom de Lila – tiens, c’est effectivement ce qu’il fait – pour en avoir la preuve stricte, rigoureuse et par l’exemple.

« Pas faux, mais j’ai toujours d’excellents arguments et un goût très sûr », il répond en laissant couler cette réflexion sans même envisager d’y réfléchir et d’argumenter… Comme si ce n’était rien, parce que dans le fond, ce n’est rien, ou en tout cas pas grand-chose.

Oui, bien sûr que Klaus serait naturellement exigeant envers toutes les conquêtes de Diego, pas pour l’emmerder mais parce qu’il considère que prendre soin de sa fratrie, c’est aussi leur donner leur avis sur leurs fréquentations… Et faut quand même dire ce qui est : les Hargreeves ont un goût tout sauf sûr d’un point de vue sentimental. Et quand ils tombent juste, eh bien ça a souvent de bonnes chances de mal finir. Pas dans le cas de Klaus, cela dit – cette fois, il sait qu’il a trouvé la perle rare. Alors faut pas s’étonner qu’il s’amuse à jouer les moralisateurs avec tout le monde à présent, vous pensez bien que c’est forcément bien trop tentant.

« Tu veux ce genre de discrétion ? D’accord, fastoche ! » affirme Klaus avec un sourire complice au coin des lèvres, ravi de constater que Diego paraît bel et bien se dérider petit à petit, pour son plus grand plaisir. Il n’aurait pas voulu que son frère garde le moral dans les chaussettes tout du long. C’est quand même déjà bien assez d’avoir le bras en écharpe comme un estropié du dimanche.

Ils sont à l’hôpital, et quelque chose se passe, quelque chose qu’il ne comprend pas immédiatement, parce que… juste… pardon ? quoi ? à quel moment ? pourquoi ? (il n’y a pas d’ordre défini à ces questions mais quoi qu’il en soit, Klaus se les est déjà toutes posées, c’est ce qu’il faut retenir). Et c’est ainsi que Klaus fait la rencontre de Vladek, un sosie parmi ses sosies, mais qui visiblement est familier de Diego… et surtout, qui semble… à part, ce qui a immédiatement le don de l’intriguer.

« Je te manquais tellement que tu t’es trouvé un Klaus de rechange ? » se marre le concerné en détaillant le fameux Vladek d’un regard qui n’oublie pas d’être insistant. Klaus n’hésite pas à accepter la main que son sosie lui tend, non sans un sourire en coin. « Enchanté, Vladek. Toi et moi, on va avoir un paquet de choses à se dire, j’ai l’impression. »

A so long day without you

Aurais-je pu en vouloir à Klaus de se montrer exigeant et critique vis-à-vis de mes fréquentations ? Non absolument pas. Après tout, je venais d’exprimer toute la réserve du monde en ce qui concernait ce mystérieux futur beau frère que je ne connaissais pas encore. Dans mon cas, c’était des plus normal. J’avais toujours tenté de protéger mon frère et je considèrerais toujours que cette mission était cruciale dans mon existence. Peut-être que dans le fond Klaus pensait la même chose mais il l’exprimait d’une autre manière voilà tout. Moi je casserais toujours la gueule au premier qui oserait lui faire du mal et lui me fera une liste personnelle des qualités et défauts de la personne que je lui présenterais comme le grand amour de ma vie, si jamais je venais à le rencontrer.

Une fois dans la salle d’attente de l’hôpital, je fus surpris de croiser la route de Vladek. Même si surpris était peut-être pas le mot qui convenait. Je commençais à bien le connaitre. Il avait toujours estimé que venir ici pour soulager la douleur des patients était une mission cruciale à ses yeux. J’ignorais si cela avait un rapport quelconque avec cette connexion si particulière qu’il avait avec les esprits. Peut-être que c’était juste le hasard qui l’avait placé ce soir là sur ma route… enfin sur notre route. Je me doutais bien que si jamais Klaus resurgissait dans ma vie cette rencontre serait inévitable. Et je pensais bien que mon frangin préféré ne manquerait pas de se poser une tonne de question sur ce type qu’il ne connaissait pas et qui lui ressemblait tellement. Par quoi commencer ? Les présentations bien naturellement même si, comme Vladek l’avait lui-même annoncer, elles n’étaient pas vraiment nécessaires. Pas de son côté en tout cas. Je lui avais parlé de Klaus a tellement de reprises.

Je restais un instant interdit en entendant les propos de mon frangin. C’est certain que cette rencontre n’était pas le fruit du hasard. Comment l’aurait-elle pu ? Il y avait forcément quelque chose qui m’avait attiré chez lui, crée une confiance si naturelle entre nous. Je ne pouvais pas la nier. J’avais cependant caché bien au fond de moi cette réflexion au fur et à mesure que j’avais tissé des liens avec le jeune chaman. Je tentais toujours maladroitement de le cacher, mais notre relation avait pris un tour bien inattendu. Je m’étais attaché à lui d’une manière si particulière que j’étais incapable de donner réellement une étiquette sur notre relation parfois ambiguë. Désireux de reprendre la parole, je lui lançais avec amusement.

« C'est un peu plus complexe que ça... mais il y a de l'idée. Vous êtes quand même bien différents.»

Vladek me sourit à son tour et planta son regard dans celui de Klaus.

« Ca m'a peut-être aidé qui sait ? Je suis en tout cas heureux qu'il me compte parmi ses amis.»

Il approuva alors d’un hochement de tête, serrant toujours la main de mon frère dans la sienne.

« Je le pense aussi. D’après ce que Diego m’a dit sur vous, nous avons beaucoup plus de points communs que notre simple apparence. Ca me ferait donc très plaisir d’en parler avec vous. »

Il se souvint finalement qu’il avait quelque chose caché dans sa poche. Un petit paquet qu’il me tendit avec conviction.

« En fait, Diego je venais t’apporter ceci. »

J’analysais alors ce petit paquet et voyant mon étonnement, il n’hésita pas à rajouter

« Ce sont des herbes qui soulageront ta blessure et te permettront de mieux cicatriser. J’ai aussi ceci. »

Il sortit alors une pilule de sa poche qu’il me tendit avec une bouteille d’eau.

« Tu prendras ça avant de passer sur le billard. C’est un tranquillisant et ça t’aidera à te détendre. Et tu me connais, tout est naturel. »

Il se tourna alors vers Klaus, lui souriant de toutes ses dents.

« J’espère que je pourrais compter sur vous pour bien prendre soin de lui. »