In vino veritas

Poussant la porte d’entrée du bar malfamé, je scrutais les alentours. La soirée était déjà bien lancée et l’établissement bien occupé. Je croisais parfois déjà des regards bien éméchés de gars cherchant la bagarre ou de filles très aguicheuses. Je ne m’arrêtais cependant sur aucun d’entre eux. Car aucun ne correspondait au signalement que j’en avais. C’était bientôt le cinquième bar que je visitais ce soir et rien. Absolument aucun signe de la personne sur laquelle je devais mettre la main. Pourtant trouver un vieillard d’une cinquantaine d’années bloqué dans un corps prépubère d’adolescent, ça ne courrait pas les rues. Encore moins dans ce genre d’endroit.

Pourtant, j’étais persuadé qu’il devait être dans un bar à vider des coups et à se prendre une cuite monumentale. Ce n’était pas la première fois et ce ne serait certainement pas la dernière. Ce qui préoccupait Five était un grand mystère pour tout le monde. Même moi qui vivait avec lui, je n’étais pas parvenu à lui tirer les vers du nez. Pourtant, ce n’était pas faute d’avoir essayé. Mais ce que soit dans ce monde ou dans notre monde d’origine, Five restait une putain d’énigme à résoudre. Je commençais à en avoir raz le bol de toutes ces choses que je ne comprenais pas. Marre de devoir m’inquiéter pour lui à chaque fois qu’il ne donnait plus signe de vie.

Comprenez-moi, je n’ai rien contre le fait de devoir jouer les grands frères protecteurs. Cela faisait partie du rôle de leadeur de devoir se préoccuper du moral de ses troupes. Et je savais parfaitement bien que même maintenant adulte, il y avait toujours en moi ce gamin bègue haut comme trois pommes qui rêvait d’être un jour le Numéro 1 de la Umbrella Academy. J’avais envie que mes frangins se tournent vers moi quand ils avaient des problèmes et qu’ils sachent qu’ils pouvaient me confier leurs problèmes. Ouais mais voilà, Five n’était pas Klaus. Je pouvais tolérer le comportement merdique de notre camé de frangin. Veiller sur lui avait toujours été une part importante de notre relation privilégiée et ce depuis l’enfance. Inconsciemment, je trouvais ça presque normal.

Mais avec Five c’était différent. Il s’était toujours cru plus malin que tout le monde, nous snobant de toute sa hauteur en se croyant supérieur à nous. T voilà où ça l’avait mené… à se retrouver à cuver ses boissons dans des bar minables. Et tout ce temps perdu à boire, il aurait pu l’investir en m’aidant à comprendre tout le bordel que constituait ce nouveau monde parallèle dans lequel on avait atterri. Non clairement, je ne passerais pas l’éponge là-dessus. Il valait tellement mieux que cette loque. Il n’y avait pas écrit « assistant social » sur mon front, merde !

Tout plongé à mes réflexions, je finis par le retrouver. Il était assis au comptoir, ses petites jambes touchant à peine le sol. Il avait l’air clairement bancal sur sa chaise et je me demandais comment il faisait pour maintenir son équilibre. Je me rapprochais de lui et sans même un bonsoir m’assis à ses côtés. Je vis le barman de poster devant nous, attendant de prendre ma commande.

« Une tequila, per favore. Et vous l’ajouterez sur l’ardoise de mon frangin. »

J’avais lancé cette phrase tout en pointant du doigt le gamin assis à mes côtés. La situation fit froncer les sourcils du barman. Il devait certainement me prendre pour une espèce d’irresponsable qui laissait boire son frangin tout en lui faisant en plus porter le chapeau. Ouais clairement, la situation vu de l’extérieure devait semblé plus qu’étrange. Je me tournais alors vers le principal intéressé.

« C’est ça de moins que tu me devras sur ta part de loyer de ce mois-ci. »

J’attendis quelques instants et lorsque le barman déposa mon verre devant moi, avala une première gorgée. Une manière pour moi de conserver mon calme avant de lui adresser la parole.

« T’as l’intention de me dire ce que tu fous ici ou je dois deviner tout seul ? »

In vino veritas

Ca fait combien de temps que Five Hargreeves était comme ça ? Trop longtemps visiblement. Si bien qu'il avait réussit à se foutre à dos Klaus, car il a fini par oublier de revenir à son mariage. (Il faut dire qu'il était parti cuver ailleurs) Il a décidé de tout laisser tomber... Que ca soit son travail qu'il avait réussit à dégoter, que ca soit donner des nouvelles à tous ses proches. Non, franchement, s'attacher, les expériences sociales, très peu pour lui.

Au moins ici, y'avait de quoi boire et de nombreux bars alors bon... C'est ce qu'il faisait de mieux quand ca n'allait pas. Picoler. De toute manière, sa bande de bras cassés qui lui sert de famille s'était bien passé de lui pendant toutes ces années. Il ne serait pas d'une grande perte. Sa relation avec Jodie lui avait fait beaucoup de mal, mais aussi ne pas comprendre ce qu'il foutait ici. Il avait réussit à faire pleurer Dolores et se prendre la tête avec elle. Il ne sait même pas s'il allait la revoir un jour... Un modèle social ! Vraiment !

C'est clairement dans cet état d'esprit qu'il se retrouve dans ce bar, dans un état d'ébriété déjà avancé. Seule chose plutôt bien ici, c'est qu'il a continué à grandir et qu'il est aujourd'hui en majorité et légalement responsable de consommer de l'alcool. (responsable haha) Mais son jeune âge attirait quand même l'attention et le regard de certains.

Il ne se rappelle plus des nombreux accrochages qu'il avait pu avoir. L'alcool faisant son effet, Five pouvait se trouver un peu hors de la réalité aussi. Peut être lui restait-il un peu de sang sur sa chemise. Du sang qui avait séché mais qui restait bien en évidence.

Avachi face à son verre, l'air complètement à la ramasse, il fixait le fond de celui-ci, son cerveau au ralenti. Il entend alors une voix familière qui le fait se redresser un peu. Il pivote légèrement sur son tabouret et fixe Diego qui vient prendre un verre avec lui. Il le regarde d'un oeil vitreux, alors qu'un sourire provocateur se dessine sur le coin de ses lèvres. Il annonce la couleur de son état émotionnel par une de ses répliques bien incisives:

" A ton avis connard ? J'apprends les claquettes... "

Five finit par tirer le verre que Diego a à peine le temps de boire pour le siffler déjà.

" T'as pas une grand mère à secourir là ? ... Pas d'humeur à parler... " Ca fait quand même plusieurs mois...

In vino veritas

En prenant place aux côtés de Five, je n’avais pas manqué de pousser un soupir. C’était pénible de le voir dans cet état. Vraiment pénible. Il méritait tellement mieux que ça franchement. Je préférais milles fois le voir tenir des discours sur les multiples apocalypses et son intelligence supérieur. C’était qu’un p’tit con certes mais il était loin d’être une loque. Oh c’est sûr qu’il avait eu des problèmes d’alcool à certains moments. Je me revoyais encore parcourir les rues de la ville avec Luther pour chercher Five qu’on avait retrouvé une bouteille dans une main et son mannequin adoré dans l’autre. Mais cela n’avait jamais duré longtemps. Il avait toujours fini par se ressaisir. Mais là sérieux… c’était vraiment du foutage de gueule ! Lorsqu’il me balança ses piques habituelles sur la raison évidente pour laquelle il était ici, je tirais d’un geste brusque sur son tabouret ce qui le fit légèrement vacille. Cela aurait bien plus efficace de foutre un coup de pied dans le tabouret de bar pour le faire basculer. J’aurais pu faire une croix sur mon envie de parler avec lui. Là clairement, il ne m’aurait plus du tout écouter. Je tâchais donc de conserver mon calme et me contentais de serrer les poings sur un ton égal.

« Encore heureux, pas sûr que ça donnerait une performance brillante, Fred Astaire. »

Je ne réagissais pas plus lorsqu’il prit mon verre pour le descendre lui. Un de plus… et certainement celui de trop. Un sourire moqueur éclaira mon visage au moment où il évoqua mes activités nocturnes.

« Moi au moins j’ai un objectif et un but dans la vie. Tu devrais peut-être en trouver un toi aussi. »

Je regardais mon frangin qui était juste en train de ficher toute sa vie en l’air. Mais pourquoi au juste ? Qu’avait-il pu arriver dans sa vie pour qu’il devienne aussi misérable ? Cette épouvantable loque qui effrayait tout le monde.

« C’est bien dommage que tu n’aies pas le cœur de parler parce que je compte pas lâcher l’affaire. Ca fait des mois Five… des mois que tu te conduit comme un abruti, que tu te renfermes sur toi-même et que tu pourris la vie de toute le monde avec ton comportement de merde. »

Est-ce qu’il fallait vraiment que je revienne sur le mariage de Klaus ? Non il ne valait mieux pas parce que clairement cela m’aurait mis plus en rogne qu’autre chose. Mais on comptait tous sur lui et on s’inquiétait pour lui. Tout du moins… JE m’inquiétais pour lui ! Et il était hors de questions que je l’abandonne à son sort.

« Mais merde Five qu’est-ce qui t’es arrivé à la fin ? Tu vaux beaucoup mieux que tous les connards qui sont ici. Et tu vas pas me dire que tu as réellement envie de finir comme cette bande de saoulards. »

In vino veritas

Five a un léger rire ironique quand Diego lui parle d'un objectif de but dans la vie. Il se tourne vers lui et le détaille du regard. Il était en train de le juger ouvertement alors qu'il lui répond: " Ha bah putain... Tu vends du rêve là tout de suite. Je signe où ? " Bon, Five n'était pas d'humeur pour parler mais l'était-il après tout un jour ? Surtout que pour l'heure et avec son sang qui nageait dans l'alcool... C'était pas gagné.

En attendant, il continue de picoler. Oublier. Faire ce qu'il fait de mieux. Après tout, c'était pas comme s'il avait espéré avoir un avenir au delà de vouloir sauver le monde ? Il l'avait fait. Basta. Fin de l'histoire. On en parle plus.

" Ca y est, il joue le psy du dimanche... " Dit-il en se marrant à moitié dans son verre, complètement bourré et prêt à en foutre pleins la gueule à son frère. Un frère qui ne faisait que s'inquiéter mais il n'avait pas besoin qu'on s'inquiète pour lui. " Vous vous êtes bien démerdé sans moi pendant tout ce temps. Ecoutez, j'ai sauvé vos miches, j'ai fait ce que j'avais à faire. Si j'ai envie de me torcher la gueule dans tous les bars du coin, putain mais... foutez moi la paix ! "

Diego et sa morale à deux balles. Putain qu'est-ce qu'il détestait ça. Il roule des yeux et continue de se marrer avec cet air qui transparaissait le fait qu'il prenait, d'apparence, tout à la légère.

" Je suis déjà un saoulard si t'avais pas remarqué. Tu sais pas tout ce que j'ai pu picolé quand j'étais bloqué dans ce futur merdique. " Il se secoue la tête. " Et qu'est-ce qui ne va pas ? C'est p'tet que je suis trop fracassé pour essayer de penser que je puisse avoir un avenir finalement ? J'ai couru après les apocalypses toute ma vie... Et quand j'essaye d'avoir une vie normale, et bien... tout m'explose à la gueule. "

Il repense à ce qu'il s'est passé avec Dolores, et puis avec Jodie... Bon en y réfléchissant, c'était ridicule de se foutre dans des états pareils pour des nanas. Vraiment ridicule et il ne préfère même pas en parler à Diego. Sinon ca serait assumer qu'il ne vaut pas mieux que son frangin avec Lila.

In vino veritas

En entendant les propos de Five, je levais les yeux au ciel tout en soupirant. Non mais sérieusement ? C’était ça la nouvelle version de Five qu’on allait devoir supporter à partir de maintenant ? L’alcoolique dépressif, qui préférais noyer son chagrin dans l’alcool plutôt que d’affronter ses problèmes ? Non ! Je refusais tout bonnement d’accepter ça. Notre petit génie en culotte courte n’ayant que le mot apocalypse à la bouche me manquerait terriblement. Il fallait que je le ramène à la raison.

« Pourtant je trouve pas l’idée aussi incohérente avec tout ce que t’as fait jusqu’à présent. La Umbrella Academy, la Commission, les Apocalypses… t’as toujours été un héros, Five ! Même si aujourd’hui tu as l’air de l’avoir oublié. Tu devrais y réfléchir… je suis sûr qu’un peu d’action ça te ferait le plus grand bien. »

Il avait aussi oublié qu’on s’était promis de comprendre le mystère qui se cachait derrière cette putain de lune rouge et cette île pourrie apparemment. C’est sans doute cela qui m’énervait au plus haiut point. Le fait qu’il baissait les bras aussi rapidement alors que j’avais réellement besoin de ses lumières pour avancer et déchiffrer enfin l’énigme de notre nouvelle vie.

« Je te rappelle qu’on a toujours une mission à accomplir. J’ai besoin de toi, moi. Et là vu l’état dans lequel tu te trouves, t’aides personne en agissant ainsi et c’est clairement pas dans ton propre intérêt. Non mais tu t’es regardé ? Il est passé où le vioc qui répétait à longueur de temps qu’on devait essayer de ce bouger le cul pour savoir ce que cachait ce monde ou qui s’inquiétait des agissements du paternel ? T’avais beau me casser les pieds mais cette version de toi me manque. Et ça n’a peut-être pas d’importance pour toi mais on se fait tout beaucoup de soucis pour toi. »

Je me doutais que ces arguments n’auraient pas d’emprise sur lui. Après tout, il n’avait jamais donné dans la sensiblerie. Mais c’était au moins sincère et je me disais qu’il y avait peut-être une toute partie de lui qui se mettrait en marche pour faire refonctionner la machine. Après tout, il s’était toujours battu pour nous. Il fallait croire qu’il s’en fichait pas tant que ça de sa famille. Il me parla de l’apocalypse et je souris un peu moqueur.

« Ouais… c’est sûr que cette époque a été la plus belle de ton existence. Bloqué dans ce putain de futur apocalyptique avec pour seule compagnie un mannequin en plastoc. Tu supportais plus la solitude, Five. C’est pour ça que tu t’es mis à picoler… et que t’as tout fait pour nous retrouver. T’as vraiment envie de reproduire le même schéma ? Après tout ce qui s’est passé ? »

OK je passais peut-être pour le psy du dimanche mais si sa conscience était endormie, il fallait bien que quelqu’un lui balance un coup de pied au cul pour le réveiller. Il finit enfin par me donner un début de piste, quelque chose à creuser. Je n’allais donc pas me priver de l’interroger à ce propos.

« Qu’est-ce que tu veux dire par tout t’explose à la gueule ? Qu’est-ce qui s’est passé pour que tu réagisses comme ça ? Quelque chose de moche t’est arrivé dont tu refuses de parler ? Quelqu’un t’a blessé ? Allez parle-moi. Je suis un moins mauvais psy que ce que tu sembles croire. »

In vino veritas

Un léger rire ironique s'échappe de ses lèvres lorsqu'il entend le mot héro. Mais pour Five, les héros ca n'existe pas. Ca n'est que le fruit d'un archétipe grotesque où l'être humain a besoin de foutre des gentils et des méchants dans des cases. Sauf que la vérité étant: il n'y a pas de véritables méchants, ni de gentils. Le monde est un bordel ambiant constant et chacun essaye de survivre.

" Un héro... " Il continue de se marrer au dessus de son verre. " T'as oublié que j'ai été un assassin Diego ? Ou ta petite caboche de Numéro Deux a oublié ce détail ? " Répond-t-il acerbe à la remarque de son frère.

C'était la vérité, il n'était pas dupe. Il était très réaliste. Surement le plus réaliste de la team (avec Ben). Diego essaye de l'amadoué avec une histoire de mission et tout le bazar. Five écoute attentivement ce qu'il a à dire, non sans prendre son petit air arrogant dont il avait le secret.

" J'ai une bonne nouvelle pour toi ! Y'a plus de monde à sauver. Quant au pater. " Il a une large exclamation ironique. " Je m'en fous. Il nous a jamais considéré, alors pourquoi j'en ferai de même ? Et il va faire quoi ? Pleurer sur la grosse épaule poilue de Luther ? Pathétique. "

Diego n'avait pas tord, mais elle l'appelait cette solitude. Elle était la seule qu'il avait connu pendant de trop nombreuses années. Car au final, les relations humaines, c'est de la merde. Qu'il n'y comprend que dalle et que de toute manière, soit il foirait tout, soit il finissait par souffrir. Et il était hors de question qu'il l'affirme. Mais vu comment il a fini par se comporter avec Dolores, peut être qu'il l'avait mérité.

" Ouais bah... p'tet que j'suis bien dans ma solitude. Au moins, j'emmerde personne. Et vous là... Vous pouvez vivre votre petite vie à la con. "

Mais Diego insiste et Five retourne picoler son verre d'un air ailleurs. Il fait un peu la sourde oreille mais il sait aussi que son frère pouvait être incroyablement obstiné quand il veut. Il soupire longuement et finit par lui répondre:

" Klaus m'en veut parce que je ne me suis pas pointé à son mariage de merde. La vérité, c'est que j'ai pas eu le cran de me pointer après... " Il marque une pause et se tourne vers Diego. Son ton est moins sur la défensive, bien que ses mots sont déliés par l'alcool. " ... Mouais... Tu vas te foutre de ma gueule. Alors y'a eu Jodie... mais c'est pas possible entre nous et l'autre jour, j'ai croisé Dolores. " Il marque une pause et prend un air appuyé, bien qu'il tenait difficilement sur son tabouret, il regarda Diego droit dans les yeux et il ajoute. " J'ai été un putain de sale con. " Il lève les deux mains en l'air comme pour balancer l'info dans les airs. " Et puis, je sais pas c'que j'veux dans cette merde. Je sais pas à quoi je sers... Et c'est trop le bordel alors ouais, la picole et la solitude, c'est pas trop mal. Parce que tout le reste, je suis pas doué pour. "

In vino veritas

Franchement, ça me faisait mal de le voir dans cet état. Je ne pouvais m’empêcher de me demander où se trouvait le vrai Five… terré au fin fond de son esprit. Pourquoi ? Qu’est-ce qui avait fait qu’il se retrouve dans cette situation ? Il me manquait tellement ce p’tit con terriblement arrogant certes mais aussi combattif et persévérant. J’étais prêt à faire preuve de patience, suffisamment au moins pour qu’il puisse comprendre qu’il était totalement dans son tort et que question choix de vie, il avait les moyens de faire beaucoup mieux que ça.

« Ouais mais dans le fond tu sais que tu l’as toujours fait pour le bien de tous. T’étais animé par de bonnes attentions à chaque fois… tu te rappelles l’assassinat de ce conseil à la con ? J’irais pas jusqu’à dire que j’approuve la méthode mais je sais une chose. Tu l’as jamais fait par pur égoïsme ou pour ton petit confort personnel. Et ça pour moi ça s’appelle de l’héroïsme. »

Il allait sûrement me rétorquer quelque chose dans la foulée mais au moins j’avait pu lui dire ce que j’avais sur le cœur. C’est pour ça que j’admirais mon frangin et que je restais proche de lui. On se ressemblait sur ce point. Et je pouvais pas le laisser le voir abandonner cette part de lui. J’avais aucune envie de le perdre.

« On a peut-être aucune envie de vivre cette vie sans toi. C’est mon cas en tout cas. T’es plus tout seul comme t’as pu l’être à l’époque. Que tu le veilles ou non tu fais partie de cette communauté et de cette famille aujourd’hui. Et en faire partie ça te mènera forcément à avoir des interactions avec les autres. Et ça eh ben ça s’apprend. »

Je lançais un regard noir en direction de Five lorsqu’il fit allusion au mariage de Klaus. Perso, j’étais pas vraiment ravi que Mutt fasse partie de la vie de Klaus. Mais je l’avais accepté… pour le bonheur de mon frangin préféré. J’avais aucune envie de me friter avec lui et j’en avais profité pour refoutre un coup de pression à mon nouveau beauf. Qu’il s’avise de le rendre malheureux et je l’épinglerais au mur. Quoi ? On s’amuse comme on peut. En tous les cas, on pouvait pas me reprocher de ne pas avoir été là. Ce qui n’était pas le cas de Five. J’étais bien curieux de connaître l’explication de Five. Celle qui nous avait échappé jusque-là. Je restais donc un moment silencieux écoutant ses explications sans l’interrompre. Il me parlait des ses histoires de cœur et je comprenais que c’était la frustration qui l’avait empêché de venir au mariage. Je soupirais alors légèrement, avant de me tourner vers lui. La voix toujours aussi calme et ne révélant rien de la colère que j’avais ressentie plus tôt.

« Crois-moi, les histoires d’amour foirées je sais ce que c’est. J’ai bien assez à balayer devant mon paillasson pour oser me foutre de ta gueule. »

C’est sûr que j’en avait une liste d’amour impossible et de peine de cœur. Patch… Lila… même Vlad si jamais notre relation ambiguë pouvait compter dans la balance. En réalité, il y avait très peu de personnes qui aurait pu supporter un Hargreeves tel que nous étions. Des inadaptés sociaux. L’espace d’une seconde, je repensais à Annie. A ses beaux cheveux dorés, son magnifique sourire… son cœur à la fois si fort et si fragile qu’elle avait toujours sur la main prête à l’offrir sans compter aux autres. Est-ce que quelqu’un comme elle serait en mesure de m’accepter un jour sans demi-mesure ? Je chassais ces idées de ma tête, conscient que ce qui comptait à l’instant c’était la situation de Five.

« On nous a pas donné les armes pour comprendre les codes sociaux, ça c’est certain. C’est normal que tu te casses la gueule de temps en temps. C’est en faisant des erreurs qu’on apprend et toi t’as bien quatre décennies de relations sociales à rattraper. »

Je le lui avais annoncé pour le taquiner avant de reprendre plus sérieux.

« C’est pas en noyant ton chagrin dans l’alcool que tu vas avancer… et encore moins discerner quoi que se soit. Ta seule solution c’est soit de passer à autre chose ou alors de tout faire pour réparer les pots cassés. Tu y tiens vraiment à ces filles ? Il y en a une des deux que tu pourrais pas supporter de perdre ? »

Je réfléchis alors un instant. Je comprenais ce qu’il pouvait ressentir à l’idée de se sentir ainsi totalement inutile.

« Et si tu veux te rendre utile, il y a une chose que tu pourrais faire. Tenter de résoudre le mystère de cette île avec moi. J’ai pas laissé tomber cette histoire. Je pourrais jamais passer à autres chose tant que j’aurais pas retrouver les personnes qu’on a laisser derrière nous ou que je me serait pas assurer que Papa ne prépare pas encore un de ces coups tordus. C’est ça qui me permet de tenir debout et avancer pour le moment. »

In vino veritas

C'était un truc qu'il ne voulait pas perdre dans le fond. Son humanité. Quoi qu'il lui reste... Parfois, Five se demandait si un jour, il n'allait clairement pas finir comme The Handler. Il soupire longuement au dessus de son verre quand Diego lui affirme qu'avoir tué tous les gens du conseil, il l'avait fait pour l'intérêt de tous.

" Ouais je l'ai fait pour vous. Et pour ce que ca a servi... " Il marque une pause. " Et c'est un très bon exemple tiens... Parce que je ne sais pas si je ressens de la culpabilité à l'avoir fait. Les héros font pas ça. Et ils ne... " Il était vraiment bourré pour parler de ça. " ...ressentent pas ce plaisir à tuer. Parfois, ca me monte à la tête. Je ne devrai pas. D'ailleurs Lila m'a très bien fait comprendre le genre de fils de pute que je suis. "

Non, il ne devrait pas et pourtant... Il l'avait ressenti, c'était plus fort que lui. Et puis, oui, parfois les paroles de Lila lui tournait en boucle. Même s'il avait voulu croire que ce qu'il faisait n'était pas personnel, ca l'était malgré tout. C'était des vies en jeu. Et l'histoire de Lila l'avait beaucoup plus marqué qu'il n'y paraissait.

Il se tourne vers Diego et le regarde longuement quand il parle de ce qu'il représente pour leur famille. Il lui lance néanmoins un regard désolé.

" Je ne suis plus le Five qui a quitté la maison. Courir après une fin du monde ensemble, c'est une chose, mais me coltiner ca en est une autre frangin. Et qui te dit que j'ai envie de me sociabiliser... " Finit-il par soupirer en se braquant comme il sait si bien le faire. Bien que c'est totalement faux, il avait vécu dans la solitude extrême. Finir seul c'était la dernière chose qu'il voulait, mais rejeter les autres, c'était la seule chose qu'il savait faire.

Five finit par se confier à Diego sur ses histoires de coeur et il se sent tellement stupide. Déjà, il avait plongé le nez dedans à fond. Il avait fait de la merde comme pas possible... Et il se retrouvait là. Ca ne lui ressemblait absolument pas. Five a un léger rire quand même lorsque Diego parle de ses propres aventures foireuses. Oui, il en avait eu un paquet. Et il ne pensait pas un jour se confier à lui en retour sur les siens. Quelle ironie.

A vrai dire, il ne parle plus quand Diego reprend la parole ensuite. Il regarde le fond de son verre, perdu à moitié dans ses pensées, les paroles de son frère essayant de faire écho dans son esprit. Il finit par lui répondre:

" Déjà je t'emmerde. " C'était plus histoire de s'exprimer sur le fait que Diego le taquine ouvertement. " Et ensuite: je m'en fous. Je cherche pas après l'âme soeur. Et de toute manière, que ca soit l'une ou l'autre, c'est deux histoires d'amour bizarroïdes. J'ai vraiment un gros soucis. " Osera-t-il en parler clairement ? Au point où il en était... " Après tu me diras, les histoires d'amour bizarroïdes c'est notre délire dans la famille. " Il lui fait un de ses fameux sourires ironiques qui lui prend tout le visage. " Tu vois Dolores ? Elle est ici, et humaine. Et t'en fais pas, Klaus l'a croisé aussi, il est au courant, donc je ne me tape pas un groooos délire. Même si j'avais encore bien picolé ce soir là, et l'autre ? Jodie ? C'est le sosie de Viktor. Après niveau caractère iels sont bien différents mais le fait est là: " Il montre son verre. " ... Ca me donne bien le droit de me bourrer la gueule non ? "

Diego essaye de lui donner un truc à faire. Ca n'était pas forcément plus mal, même si Five roule des yeux, comprenant le stratagème de son frère. Mais Five avait déjà fait le tour de la question et... le tour est très long à faire... Et trop long à faire.

" Tu crois que j'ai pas déjà cherché Einstein ? Comment rentrer ? Comment se barrer d'ici ? Ouais, je sais des trucs mais... Au final, derrière les questions y'a encore plus de questions... C'est même pas un casse tête, c'est juste une énigme sans fin... " Il se tourne totalement vers Diego en pivotant sur son tabouret. " Pourquoi tu ne profites pas de la vie comme ils le font tous ? Parce que franchement, y'a plus d'apocalypse ? Y'a plus de Commission... Alors ouais... Papa ! Parlons en de papa... Ca m'étonne que Klaus ne t'en ai pas parlé d'ailleurs. " Il commence à parler un peu fort. " Il nous a envoyé des types bizarres comme des tests l'autre jour. A Klaus et à moi... Mais on a été le voir, j'ai... " Five se secoue la tête et se pince le haut du nez. Il a clairement envie de gerber d'un seul coup à s'exciter comme ça. " ... Ouais bon là t'as p'tet raison. Ca reste un putain de connard et... " Reggie lui a bien fait comprendre qu'il était un moins que rien. Five finit par dégueuler au pied du tabouret de Diego.

In vino veritas

Je me mordis la langue en me rendant compte que l’argument que j’avais avancé était monstre maladroit. Five avait beaucoup sacrifier pour nous offrir à nous tous un bond dans le temps qui aurait pu tout régler et comment l’avions-nous remercié ? Bon dans mon cas c’était un peu différent. Ce n’est pas que je n’avais pas prévu de me retrouver au rendez-vous à l’heure prévue. C’est que j’avais croisé la route de Lila qui m’avait joué un sacré tour. La garce. Mais quand même, ce n’était peut-être pas un souvenir dont il avait franchement envie de se rappeler. Je fus cependant interloqué lorsque Five me parla du fait qu’il prenait coupablement du plaisir à tuer. Vu le nombre de personnes qu’il avait zigouillées dans sa vie, c’est quelque chose qui pouvait se produire. Cependant, à l’époque où il faisait partie de la Commission, c’était normal qu’il agisse comme un vaillant petit soldat. Mais après…

« Je peux savoir ce qu’elle t’a dit exactement ? »

J’aurais sans doute dû évite d’en parler, mais le prénom de Lila sonnait toujours bizarrement à mes oreilles. L’entendre de la bouche de quelqu’un d’autre était encore plus troublant. Je fermais un instant les yeux, bien résolu à tourner 10 fois la langue dans ma bouche avant de causer.

« J’ai jamais vraiment eu à buter quelqu’un mais je vois ce que tu veux dire… un peu. Après tout, j’ai cassé plus de gueules dans ma vie que j’aurais dû. Et ça me botte tellement que je me fais payer pour ça aujourd’hui. Mais je… enfin je pense que tant que t’es pris dans des dilemmes moraux de ce genre, c’est que t’es pas encore totalement perdu. Il faut juste que tu trouves d’autres moyens de régler tes comptes. »

Il prétendait qu’il n’était plus le même Five que j’avais connu auparavant. C’était peut-être vrai. Mais si la deuxième option c’était de se transformer en soulon irrécupérable, il était clairement pas sur la bonne voie. Si seulement j’arrivais à le lui faire comprendre… et autrement qu’en lui enfonçant l’idée dans le crâne à coups de poings.

« Tu peux te convaincre du contraire mais je sais que t’aime pas être seul. Pas autant que moi, par exemple. Mais tu peux me croire, même si tu fuis jusqu’au bout du monde, t’auras toujours un connard qui viendra te rappeler que c’est pas la solution. Ce soir c’est moi mais demain ça sera un autre, et encore un autre… alors autant faire comme si tu en avais quelque chose à foutre. C’est encore le meilleur moyen pour qu’on te foute enfin la paix. »

Je souris en l’entendant dire qu’il avait un soucis à s’attirer toujours des relations zarbi. Eh ouais mon gars, tu fais partie de la famille Hargreeves. Deal with it !

« C’est pas faux… mais les histoires planplan en même temps c’est tellement chiant ! »

J’écoutais les deux histoires de Five, essayant de faire le tri dans ses amours. La première, Dolores, était la mannequin en plastoc qu’il s’était coltiné durant des décennies à l’époque où il avait vécu seul durant l’apocalypse. La deuxième, le sosie de Viktor… tiens, tiens qui l’eut cru ? Je devais admettre que c’était assez dingue comme histoire. J’essayais de compatir et de me mettre dans sa situation.

« Dolores… une femme ? Tu veux dire une vraie femme… eh ben. Je savais qu’il y avait des trucs dingues sur cette île mais je n’y aurais jamais pensé. C’est dommage que ça colle plus entre vous. Vous avez été ensemble très longtemps après tout… même si votre relation était loin d’être normale. »

Je fis une pause, perdu dans mes pensées, avant de me pencher sur le cas de Jodie.

« Quant à Jodie… ouais je vois bien le genre. Tu pensais que t’allais plus jamais revoir Viktor dont t’as toujours été très proche. Et tu t’es raccroché à la seule personne qui pouvais te la rappeler un tant soit peu. Et puis à force de la fréquenter, tu t’es aperçu que leurs différences faisaient que renforcer votre relation et tu t’es senti coupable parce que leur ressemble physique tu pouvais pas l’éviter, j’ai vu juste ? »

Si c’était vraiment le cas, alors on avait encore plus en commun que ce que j’aurais pu imaginer. J’écartais le verre de Five, hésitant l’espace d’un instant à boire une gorgée avant de me raviser.

« Crois-moi, bro, aucune meuf mérite que tu te mettes dans un état pareil… surtout que j’ai pas l’impression qu’elles s’inquiètent vraiment pour toi. Je me trompe ? »

Il tenta alors de m’expliquer qu’il avait depuis longtemps chercher de son côté la vérité. La clairement je pouvais pas le contredire. Après tout, j’avais cherché la solution avec lui durant un moment. Mais aucune réponse ne semblait être la bonne. Clairement, c’était un sacré sac de nœuds à démêler et c’était bien pour cette raison qu’on avait besoin d’un Five bien disposé et en forme.

« Tu veux savoir pourquoi j’ai pas abandonné ? Parce que si je baisse les bras, il y a de grandes chances que je me mette à faire des conneries. Et ça c’est hors de question. Je finirais pas comme toi. Moi je continuerais à me battre quoi qu’il arrive et même si les autres trouvent ça stupide. C’est ce qui me permet de rester en vie. »

J’étais en revanche surpris d’entendre à nouveau parlé de Papa. Non, effectivement Klaus ne m’en avait pas parlé. En même temps il passait le ¾ de son temps à venir jouer les entremetteurs entre Annie et moi. Ca lui bouffait sûrement assez d’énergie comme ça. Mais quand même, j’étais choqué d’apprendre cette réalité. J’ignorais jusqu’à la présence de Reginald en ville. Comment ? Pourquoi ?

« Des tests tu dis ? Et pourquoi des tests ? Il cherchait quoi encore, ce tordu ? »

Je n’eus pas le temps de me poser davantage de question. Five se penchant vers moi dégueula tout ce qu’il pouvait. Cela me fit sursauter et je sautais sur mes deux pieds.

« Bordel Five, tu pouvais pas te retenir franhement ? »

In vino veritas

Five n'avait pas forcément envie de remuer le couteau dans la plaie avec Lila. Peut être qu'en temps normal, il aurait déjà envoyé chier son frère. Mais là, il avait plus d'alcool que de sang dans le corps alors bon... Il dit d'une manière désagréable et faussement détaché:

" Ouais, bah la Commission m'a fait tuer ses parents. Ou plutôt The Handler. Quoi qu'il en soit, je lui ai dit que c'était pas personnel et elle m'a dit que c'était toujours personnel et blablabla et blablabla... Le truc qui tape bien sur la conscience... "

Il souffle longuement d'un air dépité. Il regarde ensuite Diego en le fixant longuement alors qu'il tente visiblement de lui donner des conseils et de le faire déculpabiliser. Notre numéro cinq finit par avoir une exclamation, tout en lui répondant:

" Ton nouveau p'tit nom de Super, c'est Jiminy Cricket ? " Il se foutait de sa gueule bien entendu. " Diego, c'est bien t'es un bon Super Héro. Moi, j'suis un tueur. Je devrai penser à me faire payer pour ça. " Dit-il ironiquement, mais il sait bien que son frère essaye de l'aider. " C'est pas juste une histoire de régler mes comptes... C'est une sorte d'addiction ce truc là. C'est le côté adrénaline et sensation de puissance qu'il y a derrière aussi. Le droit de vie ou de mort sur les mecs que t'as en face de toi. T'es le chasseur et eux la proie. " Il était en train de raconter quoi là. Il se secoue la tête. " Ouais oublie, c'est trop tordu. "

Il n'avait pas envie de creuser en profondeur la question avec Docteur Diego qui avait envie de s'inventer psychologue tout à coup. Bon, il s'était toujours pris pour le leader de la famille. Et il s'était battu cette place avec Five aussi. Autant qu'avec Luther. Bien que Five savait pertinemment qu'il était le meilleur. (vive les chevilles)

" Voilà que je me colle une sangsue aux basques. " Dit-il en riant de manière vaseuse.

Il finit par lui parler de ses peines de coeur. Si ca convenait à Diego et les autres, pour Five c'était compliqué. Il n'avait pas vécu son adolescence vraiment. Il n'avait pas véritablement appris à connaitre l'amour. Bref, c'était un vrai bordel ambiant dans son crâne.

" C'est pas que ca colle plus. J'ai fait mon... " Il regarde Diego en se montrant. " ... Five. Comme ici et maintenant. Tu crois qu'elle l'a pris comment ? Ho et puis j'ai cru que c'était une blague de Klaus et j'ai pensé que c'était une prostituée vouée à me dépuceler ou un truc comme ça... Se faisant passer pour Dolores. " Il marque une pause. " Cette version là était beaucoup plus plausible. Passons... Elle ne veut plus me revoir depuis. "

Diego continue sa psychanalyse sur Jodie. Et il ne peut pas réfuter car il a touché dans le mille. Alors il lève un doigt.

" Tu devrai ouvrir un cabinet Docteur Diiiiiiegooo... " Se marre-t-il. Et voilà le retour de la leçon de vie. " Bravo Diego, on devrait te donner une médaille... Désolé mais je suis pas toi. "

Il va pour se relever et gerbe à ses pieds alors qu'il commence de parler du vieux Hargreeves. Diego lui gueule dessus, Five le regarde avec un oeil vitreux et il répond:

" Parfois, j'aimerai que tu retiennes ta connerie frangin mais c'est plus fort que toi. Alors tu vois là... C'est pareil. " Il était vraiment torché pour le coup. " Ha ouais... Pour te répondre là... C'était des tests pour voir si on en valait la peine un truc comme ça. Je crois qu'il voulait reformer la Umbrella Academy. Mais il m'a dit que j'étais un bon à rien et pleins de jolis choses dans le genre. T'as vu Diego ! " Il se marre mais celà cache tout ce qu'il s'est pris dans la gueule depuis qu'il était ici finalement. Autant ses peines de coeur que le fait que le vieux Hargreeves l'ait finalement défoncé comme le reste de la fratrie. " Je suis un loser. Comme toi. Je t'avais dit qu'il allait me dire un... Je vous l'avez bien dit Numéro Cinq. " Il avait attrapé le col de Diego et s'était rapproché. Il était à deux doigts de se casser la gueule.

In vino veritas

J’écoutais l’histoire de Five et Lila en fronçant les sourcils. Est-ce que j’étais au courant de cette histoire ? Est-ce que je l’avais eu déjà su ? Je l’ignorais ou alors je l’avais oublié. Mais je comprenais mieux pourquoi est-ce qu’elle pouvait pas le blairer. L’inverse était plus étonnant. Même si foutre Lila en rogne était jamais une bonne idée non plus… elle était bien plus puissante que ce qu’elle semblait l’être au premier coup d’œil. Je ne rebondis pas là-dessus, en revanche je me permis de répondre à ses prochains propos. Lorsqu’il se fouta de ma gueule parce que j’essayais de l’aider en douceur, je répondis sur un ton égal.

« Ben tu sais, certains se plaignent que je cogne toujours avant de réfléchir. J’essaie une nouvelle méthode… de toutes manières, te frapper va pas vraiment te faire le merdier que t’as dans le crâne. Mais si tu insistes, je peux toujours tenter le coup. »

Je trouvais quand même sa théorie de tueur / super-héros assez intéressante. On s’en était bouffé des philosophies et des discours « un grand pouvoir implique de grandes responsabilités » quand on était petits. Mais Five avait l’air d’avoir rien retenu ou d’avoir tout entendu de travers. Mais ces derniers propos m’inquiétèrent au plus haut point.

« Tu t’es déjà fait payer pour ça Five, à l’époque où tu bossais pour la Commission. Tu te rappelle pas ? En tout cas ce qui est sûr c’est qu’ils t’ont bien lessivés le citron… quand je pense que c’est moi qui ai fini à l’asile. »

Remarquez, cela ne lui ferait peut-être pas de mal. Rester enfermé durant quelques mois dans une camisole de force, c’était peut-être la solution pour qu’il vire pas totalement psychopathe. Mais bon ça restait une hypothèse plus qu’un projet à mettre en place… quoi que… Il me parla alors de ses peines de cœur qui visiblement l’avait plongé dans cet état. Je pouvais même pas imaginer à quel point sa rencontre avec Dolores avait été catastrophique.

« Ah ça c’est clair que traiter la meuf avec qui t’es sorti pendant plus de 30 ans de pute, ça a pas dû lui plaire des masse. Mais bon, t’as toujours dû « Faire ton Five » avec elle, non ? T’as pas pu changer du tout au tout durant l’apocalypse. Tu pourrais toujours tenter les fleurs ou le chocolat pour te faire pardonner, non ? Et si ça marche pas avec elle, tente avec une autre. Je suis sûr que tu finiras par trouver une cinglée qui adorera le Five que tu es. »

Il venait d’annoncer qu’il n’était pas moi lorsqu’il dégueula au pied de mon tabouret. Par reflexe, je me relevais et m’écarta légèrement regardant mes pantalons et le maudissant d’avoir fait ça.

« Ah ça c’est clair… je finirais jamais aussi minable que toi. Non mais regarde mes godasses quoi !! Tu mériterais que je te… »

A cet instant, je préférais me taire plutôt que de dire une connerie plus grosse que moi. Si je lui annonçais qu’il méritait d’être abandonné, il sauterait sur l’occasion et disparaitrait pour ne plus revenir. Je le saisis alors par le col de sa chemise de manière violente avant de le tirer jusqu’aux chiottes. Non mais je vous jure !

« Voilà, maintenant tu vas finir ce que t’as commencé et te refaire une beauté. Une fois que tu as fini, on se barre. Il est hors de question que je te laisse seul et je tiens pas non plus à ce que tu parfumes ma caisse. On rentre à la maison et tu discutes plus. »

Je restais à ses côtés, le dos appuyé au mur et les bras croisés devant moi. Je réfléchissais à ses quelques propos sur le paternel.

« Du coup, il va nous laisser tranquille tu penses ? Quant à te traiter de minable, t’inquiète pas. Je te rappelles que c’est un de ces passe-temps préférés de nous rabaisser sans arrêt et nous rappeler à quel point on est des merdes. Et quand tu es allé là-bas tu as… je veux dire tu as vu Maman ? »