Il était une fois...
Son passéIl y a très longtemps, deux espèces se partageaient la terre : les hommes et les monstres. Un jour, une guerre éclata entre les deux espèces. Après une très longue guerre, les humains étaient victorieux. Ils condamnèrent les monstres à une vie sous terre, dans les grottes du Mont Ebott, sans espoir de revoir un jour le soleil. C'est ici, dans cette prison, que sont nés Sans, et, quelques années plus tard, Papyrus, son petit frère, tous deux des squelettes, et vraisemblablement les seuls de leur espèce.
En tout cas, il a forcément dû naître puisqu'il est là. Si vous demandez aux habitants de Snowdin qui sont Sans et Papyrus, vous obtiendrez un grand sourire et un « Tout le monde les connait ici ! ». Par contre, si vous leur demandez comment ils sont arrivés là, il y a souvent un flottement. On dit d'eux qu'ils sont arrivés un matin, venus de nulle part, et que c'est comme si la ville avait pris vie depuis.
La vérité, c'est que les frères n'ont pas plus d'idées de comment ils sont arrivés là. Tous les souvenirs de leur passé sont contenus dans une vieille photo brûlée sur laquelle est noté « N'oublie pas », que Sans a enfermé dans un tiroir de son atelier derrière chez lui, à côté d'une étrange machine abandonnée.
Tout ce que Sans sait, c'est que ça a toujours été juste lui et Papyrus, d'aussi loin qu'il se souvienne. Il a pour ainsi dire élevé son petit frère seul. Oh, bien sûr, il y a eu des couacs, mais personne ne lui a appris à être une sorte de père, il a fait ce qu'il a pu. Papyrus, c'est sa plus grande fierté. Vous ne l'entendrez jamais dire du mal de son petit frère et il est son plus grand fan, supportif même dans ses idées les plus folles, comme celle de rejoindre la garde royale alors qu'il est évident que Papyrus ne pourrait jamais participer dans une guerre étant donné à quel point il est gentil et ouvert aux autres. Sans pourrait parler pendant des heures de son frère si on le laissait faire, au point, parfois, de tout simplement s'oublier pour lui faire de la place.
En particulier quand il s'agit d'amitié. Papyrus a toujours eu un peu de mal à se faire des amis, là où Sans a tendance à attirer la sympathie de toutes les personnes qu'il rencontre de manière spontanée, grâce à sa bonne bouille et ses blagues douteuses. C'est un pitre très charismatique qui aime faire rire et jouer de bonnes blagues à presque toutes les personnes qu'il rencontre, y compris les plus importantes (il a déjà serré la main du président des États-Unis et caché un coussin péteur dessus, le buzz assuré en quelques heures). Cependant, de manière assez ironique, Sans n'a pas tant d'amis que ça. Pas de vrais amis. C'est quelqu'un de plutôt solitaire et secret, qui n'aime pas parler de lui-même et qui ne se dévoile pour de vrai que très rarement. Le visage de clown n'est qu'une façade qui renferme une existence remplie de détresse et de peines inavouées, puisque si elles venaient à être rendues publiques, elles détruiraient bien plus de vie que la sienne.
Tout a commencé dans les Souterrains, lorsque Papyrus est devenu ami avec une petite fleur jaune nommée Flowey. Sans n'aimait pas trop la facilité déconcertante avec laquelle Flowey réussissait à manipuler son frère, mais à chaque fois qu'il voulait en discuter avec lui, il avait cette étrange impression. Comme s'il avait déjà eu cette conversation. Parfois, dès qu'il approchait trop, Flowey reculait avec une expression de terreur pure plaqué sur le visage. Sans décida donc d'enquêter. Et ce qu'il trouva ne lui plut vraiment, vraiment pas, au point qu'il espéra mille fois n'avoir jamais rien vu et tout oublié.
Sans a toujours été intelligent. Il ne sait pas d'où lui viennent ses connaissances en sciences, en physique quantique, en astronomie tout particulièrement, il s'agit d'un des mystères qui entoure son enfance. Il suppose qu'il a travaillé dans un laboratoire (ou, à défaut, a été une expérience de laboratoire) et que quelque chose s'est mal passé, ce qui a fait que Papyrus et lui se sont retrouvés amnésiques, mais il n'a jamais pu le prouver. En revanche, il y a cette étrange machine dans le sous-sol de sa maison, sur laquelle il a passé pas mal de temps pour comprendre, pour apprendre, quitte à se brûler les ailes. Sans découvrit un jour un drôle d'écran avec une ligne droite, et soudainement un gros gribouillis. À première vue, ça ne faisait aucune sens, jusqu'à ce que Sans réussisse à décoder l'étrange langage qui accompagnait le schéma. On y parlait de ligne temporelle. La ligne continue représentait le déroulement normal du temps, et le gribouillis… quelque chose en train de jouer avec le temps. Il ne mit pas longtemps à faire le lien entre Flowey et l'anomalie. Flowey pouvait revenir en arrière, jouer avec sa vie, avec la vie de son frère, encore et encore, sans aucune conséquence. Même s'il intervenait, et il était certain qu'il était intervenu à un certain point dans ce bazar temporel, ça ne servait à rien. Flowey avait juste à recommencer, et lui ne pouvait rien y faire, si ce n'était oublier tout ce qui était arrivé avant.
Peu à peu, Sans se retrouva pris dans une tourmente infernale. Il réalisa très vite qu'il ne pouvait pas partager cette information, et il garda tout pour lui. Ce fut à ce moment que les cauchemars débutèrent. Il voyait son frère se faire tuer par Flowey, il voyait Flowey se battre contre lui, il voyait Flowey tourner son frère contre lui. Encore et encore, sans que jamais ça ne s'arrête. Peu à peu, Sans perdit pied dans la réalité. Et si ses cauchemars étaient plus réels qu'il ne le pensait ? Le problème étant que même s'ils l'étaient, il ne pouvait rien faire pour sauver ces passés alternatifs. Il était impuissant. Petit à petit, Sans se demande à quoi bon continuer à vivre, si tout était prédestiné. Quel pourcentage de ce qu'il était été le vrai lui, et quel autre était le résultat de centaines de manipulations de Flowey ? Combien de fois avait-il eu ces pensées ?
Fatigué de tout, Sans abandonna. Il devint apathique, distant et paresseux. Incapable de rester éveillé plus de quelques heures, incapable d'assurer un travail malgré toute l'énergie que Papyrus avait mis pour lui en trouver un. Incapable de dire la vérité et de se débarrasser de ce poids.
Et puis, un jour, la ligne temporelle reprit. Comme ça, du jour au lendemain. Après des années à revenir en arrière, Flowey s'était finalement lassé. Le court espoir de Sans fut broyé par l'apparition d'une nouvelle anomalie quelques temps plus tard, pire, bien pire que la précédente, et surtout, plus terrifiant, qui signait sa fin. Paniqué, Sans s'imagina mille scénarios possibles de ce qui pourrait arriver, mais certainement pas l'arrivée d'un nouvel humain.
Pour briser la barrière, le roi, Asgore Dreemur, cherche à obtenir sept âmes humaines. Jusque-là, il en avait obtenu six, et cet humain, cet enfant humain, était le dernier. Sans aurait pu le tuer. Il aurait même dû le tuer. Mais quelques temps plus tôt, une vieille dame derrière une porte dans la forêt, où il s'amusait à s'entraîner pour ses blagues, lui avait demandé de promettre de protéger le prochain humain à en sortir. Sans détestait les promesses, mais il n'en avait tellement rien à faire qu'il s'était dit qu'il n'aurait de toute façon jamais à croiser la route d'un humain. Raté. Il aurait dû le tuer, mais… Il y avait Papyrus. Papyrus s'inquiétait constamment pour lui dernièrement, alors il décida que ça ferait une bonne diversion et le laissa passer.
Mais comme pour Flowey, il y avait quelque chose d'étrange avec cet humain. À chaque fois, c'était comme s'il savait ce qu'il allait dire, ce qu'il allait faire. Sans mit peu de temps à comprendre ce qu'il était, et d'où lui venaient les récents cauchemars qu'il faisait : des cauchemars où son frère se faisait décapiter sous ses yeux, où ses amis tombaient en cendres les uns après les autres, et où il devait se battre, seul, dans l'espoir d'arrêter la folie du monstre. Pour autant, cette fois-là, l'enfant ne leva la main sur… Personne. Absolument personne. C'était comme s'il refusait de se battre et, à la grande surprise de Sans, réussit à briser la barrière, seul, et à libérer son peuple de la montagne. Sans aurait dû être heureux, il aurait dû s'extasier devant le soleil levant, sauter de joie avec son frère.
Mais il y avait cette terrible, terrible sensation que ce n'était pas la première fois qu'il le voyait. Et cette sensation ne le quitta jamais. À chaque fois qu'il fermait les yeux, il craignait qu'en les ouvrants, il se retrouve de nouveau dans les Souterrains, sans le moindre souvenir que tout ça était vraiment arrivé. Il réalisa qu'il ne pourrait jamais être heureux tant que l'humain, Frisk, serait là.
Et un jour, comme s'éveillant d'un rêve, il se retrouva dans un lit qu'il ne connaissait pas, dans une maison qu'il ne connaissait pas… Et avec de la viande sur les os ??? Habituellement, Sans n'est pas quelqu'un de très expressif. Mais ce jour-là ? Il hurla de terreur comme jamais auparavant.
Sa vie aujourd'hui Passé le premier choc, Sans réalisa qu'il était devenu humain. Non seulement lui, mais aussi Papyrus. Alors qu'il avait toujours rêvé d'avoir des cheveux, il réalisa vite que son crâne était aussi rond et vide que d'habitude, même sous cette forme. Pour la première fois de sa vie, il avait aussi des besoins… Plus importants. L'apprentissage de la propreté fut sans doute le plus compliqué et humiliant, lui qui n'avait jamais eu besoin d'aller aux toilettes de sa vie, ou même de se laver. Il y avait aussi l'apprentissage de la digestion, et la douloureuse réalisation qu'il ne pouvait plus se nourrir uniquement de ketchup, et pire, que la cuisine de Papyrus était vraiment terrible. Il avait toujours été gentil jusque-là parce qu'il ne pouvait pas sentir ce que son frère cuisinait, n'ayant pas de langue, mais l'empoisonnement alimentaire après les spaghettis carbonisés, lui, était bien réel.
Par chance, dans sa malchance, il était arrivé ici avec Papyrus. Et heureusement pour lui, parce que Sans ne comprend toujours pas l'intérêt des tâches ménagères. Il tente d'aider, mais la lessive ? Jamais de la vie. Il déteste la machine à laver, c'est son ennemi mortel et il y a trop de boutons dessus. La machine à ligne temporelle ? Facile ! Des programmes automatiques de lavages à froid et des lingettes pour éviter la décoloration ? Il lui aurait fallu au moins trois doctorats supplémentaires pour ça.
Les premiers temps furent malgré tout compliqué pour les deux frères. Ils étaient seuls, loin de leurs amis, et sans savoir s'ils avaient seulement réussi à les suivre dans cet autre monde. Il y avait aussi le fait qu'ils se trouvaient à présent sans travail, et avec des courses à faire. Très vite, Sans se pencha sur ce problème, et se trouva deux boulots. Il réussit à se faire embaucher en tant qu'astrophysicien, d'une manière ou d'une autre. Il n'a techniquement pas de doctorat, mais les spécialistes de la physique quantique, ça ne court en général pas les rues non plus. La première fois que Sans reçut sa paie, il tomba des nues. On pouvait gagner plus de 30 or en travaillant ? Un nombre à quatre chiffres en plus ? C'était plus que tout ce qu’il n’avait jamais gagné avant. Mais il réalisa aussi que la vie était ici un petit peu plus cher que dans les Souterrains. Alors pour boucler les fins de mois, il décida de se relancer dans le business de la comédie. Il commença au talent, sans demander d'argent en retour, mais il a fini par se faire un petit nom et trouve ici et là de chouettes types qui veulent bien l'embaucher. On l'a même demandé à un mariage une fois. Il songe aussi à reprendre ses activités illicites de vendeurs de hot dog, mais ici, les gens font des hots dog avec des saucisses et pas des quenottes, et il ne comprend pas comment est-ce que ça fonctionne.
Ça et le fait qu'il n'a plus de magie. C'est étrange. Les monstres sont faits de magie. Le fait qu'il n'en a plus, c'est comme si on avait anesthésié une partie de lui-même. Mais ce qui lui manque le plus, c'est la téléportation. Les Souterrains étaient grands et il pouvait aller n'importe où en un claquement de doigt. Ici, il doit marcher. Et c'est bien plus grand que les Souterrains. Il travaille pour tenter d'avoir le permis, mais Sans panique au volant et a déjà raté l'examen cinq fois. Il ne désespère pas.
Car pour la première fois depuis longtemps, Sans n'a pas envie d'abandonner. Papyrus l'a convaincu d'aller voir un psychologue, qu'il voit presque tous les mois depuis. Il n'ose toujours pas parler des lignes temporelles, mais il s'est beaucoup amélioré et a appris à se connaître davantage, au point qu'il envisage désormais de parler au moins à Papyrus de tout ce qu'il a vécu. Il n'ose pas encore franchir le pas, mais il pense qu'il lui doit ça. Le psychologue lui a aussi appris à laisser Papyrus être un adulte et à arrêter de l'étouffer constamment, et surtout à arrêter de le faire passer avant lui constamment. Ce n'est… toujours pas gagné, mais il s'améliore ici aussi, et prend plus en compte les envies de son frère.
En revanche, s'il y a bien une chose que Sans ne regrette pas, c'est la disparition de l'humain. Il culpabilise un peu, après tout, Frisk était ami avec Papyrus, ses amis, et, quelque part, lui-même, mais en même temps ? Pour la première fois, Sans n'a pas l'impression que tout ce qu'il fait est prédestiné, il a l'impression de faire ses propres choix et de ne plus être la marionnette du destin. Il ne craint plus non plus de se réveiller dans les Souterrains sans souvenirs de tout ce qu'il a vécu. Il se sent libéré, et heureux. Ses sourires sont plus vrais et il retrouve peu à peu l'envie de travailler, d'essayer, de faire des nouvelles choses, de prendre des responsabilités.
Ce nouveau monde, c'est une nouvelle chance de faire les choses bien, et il compte en profiter pleinement.
Anecdotes- Son prénom, Sans, est tiré de la police de caractère Comic Sans MS. C'est aussi avec cette police qu'il écrit de manière inconsciente, même à la main.
- Sans maîtrise la magie bleue, mais une forme un peu étrange. Dès qu'il touche un ennemi, il lui fait aussi mal que le mal que l'ennemi a fait aux autres avant. Plus l'ennemi a fait du mal, plus Sans fait mal. Au contraire, face à un innocent, sa magie n'est absolument d'aucune utilité. Il peut également se téléporter.
- Sans a la particularité d'être né avec un seul point de vie. Chez les monstres, c'est l'intention de blesser qui compte. Si la plupart des monstres peuvent supporter cinq ou six coups, en un coup, amical ou ennemi, Sans pourrait mourir. Il est bien content de ne plus avoir à se soucier de ça maintenant qu'il est humain, mais il a, en compensation, une santé assez fragile et tombe souvent malade.
- Sans boit du ketchup. À la bouteille. S'il le pouvait, il se nourrirait seulement avec ça, mais il s'est rendu compte que ça ne suffisait plus pour son corps humain. Alors il a ajouté les biscuits et les gâteaux à sa liste d'addictions. Papyrus essaie désespérément de le faire manger plus sainement, mais ce n'est clairement pas gagné encore.
- Sans et Papyrus ont un caillou de compagnie, qu'ils nourrissent avec de la nourriture pour poisson. Papyrus pense que ça l'aide à prendre ses responsabilités. Sans n'a pas le cœur de lui dire que le jour où Papyrus l'a envoyé chercher un animal de compagnie, il a littéralement juste ramassé une pierre devant chez eux et est rentré à la maison avec parce qu'il avait la flemme.
- Sans aime excessivement les blagues à base de coussins péteurs. Personne n'est à l'abri. Il ne craint ni les hommes, ni les dieux.
- Même après quelques mois, Sans sursaute toujours quand il croise son reflet dans le miroir, ou Papyrus. Il a vécu plusieurs dizaines d'années sous la forme d'un squelette, c'est toujours un peu perturbant pour lui. Il a constamment l'impression de marcher avec un manteau de chair sur le dos, et il essaie de ne pas y penser parce que ça le dégoûte un peu.
- Sans a un peu de mal avec tous ces humains. Ils se ressemblent tous et il n'arrive pas à les différencier les uns des autres. Il commence à comprendre le physique, mais l'âge, c'est toujours compliqué. Il appelle tout le monde « gamin » ou « gamine » (parfois en mélangeant les deux), sans jamais savoir si la personne devant lui a cinq, trente ou quatre-vingt ans. Il faut savoir que les monstres n'ont pas vraiment de genres et qu'ils sont tous de formes très différentes, alors ça demande un peu d'adaptation.
- Sans s'adapte encore au monde du dehors. Certaines choses étaient très différentes dans les Souterrains, et il arrive qu'il ait peur ou panique devant des choses simples. Une fois, quelqu'un lui a offert un cactus, il s'est piqué avec, l'a jeté contre le mur et s'est réfugié derrière le canapé, traumatisé et effrayé à l'idée que le cactus l'attaque. Oui, on parle du même gars qui est astrophysicien. On ne peut pas être un génie partout.
- Il a un problème avec les chaussettes. Chez les monstres, la chaussette est un équivalent de la petite lingerie. À chaque fois qu'il voit quelqu'un à pied de chaussette, il rougit furieusement et tente de fuir à tout prix. Sans a aussi plein de chaussettes sur le sol de sa chambre. Déduisez-en ce que vous voulez.
- Sans est en train de découvrir les memes. Le monde n’est pas prêt pour ça.