« Qu’est-ce que vous décideriez de faire ? Si vous étiez aussi vieux et bienveillant que ça ? Et le dernier de votre espèce. »

C’était ainsi qu’Amy Pond avait décrit le Docteur lors de la première balade qu’il lui avait proposé et il fallait reconnaître que ça lui allait bien. Le Docteur est né il y avait des années sur une planète dont personne ne savait rien. Le mystère de sa naissance coïncidait avec celle des Seigneurs du Temps au sein desquels il grandit et apprit à se construire. Mais l’adulte qu’il construisit ne tenait pas en place et, bientôt, il vola un TARDIS, avec sa petite-fille, et commença à parcourir le monde. La Terre eut sa préférence et, à de nombreuses reprises, il prit auprès de lui des humains de toute origine.

De régénération en régénération, le Docteur parcourut l’univers, le temps et l’espace. Il se fit de nombreux alliés et de non moins nombreux ennemis. L’un d’eux, le Maître, était à la fois son meilleur ami et son plus cruel adversaire, mais jamais le Docteur ne céda ou ne lâche prise. Il protégeait l’univers, et en particulier la Terre, contre ceux qui voulaient du mal à des civilisations qu’ils considéraient comme trop fragiles et facilement annexables. Le Docteur n’échoua jamais à sauver la planète qu’il préférait, négligeant sa propre planète, ce qui lui valut le pire de ses souvenirs.

Un jour, en retrouvant sa planète, il la découvrit aux prises avec les Daleks, dans une guerre dangereusement destructrice. Cette régénération, il la fit volontairement belligérante pour avoir le courage de faire ce qu’il fallait, pour avoir le courage de protéger sa planète. Mais il ne put la sauver. Ce fut pour cette raison qu’il vola le Moment, l’arme la plus puissante possédée par les Seigneurs du Temps. Cette arme lui ouvrit les portes vers son avenir et l’aida à trouver la solution pour préserver son monde, sans le savoir. Mais il l’oublia et vécut avec la certitude de les avoir éradiqués.

C’est ainsi qu’il connut Rose, celle qui, par son amour et son soutien, lui réapprit la compassion et le fait de laisser une chance à ses ennemis avant de les détruire. Elle le bonifia et il devait bien reconnaître qu’il développa de vrais sentiments pour elle. D’autres compagnes suivirent, toutes importantes. Martha, la docteure qui avait eu la force de choisir un autre chemin que lui. Donna, celle qui savait si bien lui répliquer et qu’il avait dû priver de ses souvenirs. Et River. River qu’il rencontra pour mieux la perdre, juste après avoir compris à quel point elle était précieuse pour lui.

C’est par ce chemin qu’il atteignit l’apparence qu’il avait aujourd’hui, celle du onzième, quoi qu’il s’agisse en réalité de sa treizième régénération. Le premier visage que le onzième vit fut Amelia Pond. La petite fille avait su toucher le cœur du Seigneur du Temps qui ne savait pas encore à quel point elle allait changer sa vie. La fille qui attendait dut attendre douze ans avant de pouvoir prononcer ses mots au sujet d’une baleine stellaire, au sujet du Docteur. Ce fut aussi la réapparition de River, qui était morte dans le passé, qui le rencontrerait dans le futur, c’était cela de voyager à l’envers de l’autre.

Au fil de ses aventures avec Amy et Rory, le Docteur devint de plus en plus proches du couple, jusqu’à découvrir que River était leur fille et à en faire sa femme. Il lui était d’autant plus pénible de penser que bientôt, il ne la verrait plus, tant ses sentiments grandissaient pour la psychopathe qu’on avait manipulée pour le tuer et qui avait préféré l’épouser. Pourtant, il se laissa aller à savourer la sensation d’être marié avec elle, jusqu’à ce que la disparition dans le passé d’Amy et de Rory ne mine à nouveau son moral. Heureusement, elle était encore là pour l’instant, pendant un temps.

C’est à la suite de la disparition d’Amy et de Rory que le Docteur voulut abandonner sa manie de venir en aide aux humains, contre l’avis de ses amis, le Paternoster Gang, qui essayèrent de lui rappeler qui il était sans résultat. Ce fut Clara, sa fille impossible, qui parvint à faire ce que personne n’avait fait avant elle. Clara qu’il vit avant de la rencontrer. Clara qui ne le reconnut pas quand elle le vit la première fois. Clara qui était un cadeau du Maître au Docteur, et qui fut le plus précieux de tous.

Sa fille impossible. Le Docteur commença par renoncer à ses questions pour profiter de la présence de la jeune fille dans sa vie, une jeune femme avec laquelle il se sentait particulièrement complice. Et puis un jour, il comprit. Quand la jeune femme pénétra sa force de vie, il comprit pourquoi elle apparaissait partout dans sa vie et il la sauva. Ce fut elle qui lui fit comprendre comment sauver sa planète de la guerre du temps. Clara fut une renaissance pour le Docteur, une amie sincère qui lui permit de se relever, de redevenir qui il était au fond de lui-même.

Alors qu’elle était en train de travailler et qu’il voyageait seul pendant un temps, il se retrouva sur la Terre à admirer une mystérieuse lune rouge qui fascinait et terrifiait le monde. Et ce fut alors qu’il fut projeté dans la ville mystérieuse et dépourvue de sortie dans laquelle il vivait depuis un an. Sa première inspiration fut de tenter de collecter des données avec son tournevis sonique. Celui-ci sembla complètement vide de son énergie. Pas de tournevis sonique, et alors ? Il n’en avait pas lors de sa première mission en tant que onzième. Sa seconde inspiration fut de rechercher le TARDIS, mais celui-ci n’était trouvable nulle part et la ville labyrinthique le rendait perplexe.

Le Docteur n’aimait pas être coincé à un endroit. Il passa du temps à chercher un moyen de s’enfuir sans le moindre résultat. Il ne lui vint pas à l’idée de chercher ses anciens compagnons ou même Clara, il ne pouvait pas s’imaginer qu’ils étaient là. Pendant plusieurs mois, il vécut de façon erratique, cherchant à fuir, voyageant sans parvenir à quitter la ville, se nourrissant comme il pouvait, mais il finit par admettre qu’il ne réussirait pas à fuir de cette façon. Il allait lui falloir de la patience et il n’en avait guère.

Le Docteur fit un effort, il trouva un logement, prit un emploi à l’université en tant que professeur de Physique, et s’efforça de vivre une vie normale. Il parvint à la rendre partiellement supportable en bricolant dans son garage, en cherchant à refaire marcher son tournevis, en tentant de se faire de nouveaux amis, de nouveaux compagnons, mais il a toujours envie de s’envoler loin de là et il n’attend que le jour de pouvoir enfin revivre de folles et passionnantes aventures.