Au crépuscule de sa vie, en 34 ABY, Luke ne fit plus qu’un avec la Force. Son dernier combat, il l’a mené contre son propre neveu, Ben Solo, pour une nouvelle fois faire office de figure d’espoir au sein de la rébellion et libérer la galaxie. Si ce dernier pensait pouvoir éliminer son oncle qu’il haïssait tant une bonne fois pour toutes, il s’était fourvoyé. La personne qu’il s’obstinait à combattre n’était autre qu’une projection astrale du Maître Jedi. Il était bien au chaud sur l’île dans laquelle il s’était exilé après ce triste incident où pendant une seconde, l’idée de tuer Ben lui avait traversé l’esprit lorsqu’il sentait le côté obscur prendre possession de l’adolescent. « Je ne serai pas le dernier des Jedi, » avait-il dit avant de pousser son dernier soupir sur Ahch-To, exténué par cette projection qui lui demandait un pouvoir et une concentration immense. Il savait qu’il pouvait partir en paix, maintenant qu’il avait fait gagner du temps aux rebelles prisonniers de la mine dans laquelle ils s’étaient réfugiés et qu’il y avait Rey pour prendre la relève des Jedi. La Force l’accueillait à bras ouverts pour rejoindre l’éternité et les Maître Jedi qui l’avaient précédé.

On se souviendra toujours de Luke Skywalker comme le fils de l’Elu et de la Sénatrice Amidala. Il sera toujours cité dans l’histoire comme un héros de guerre, celui qui a réduit à néant l’Empire Galactique avec l’Alliance Rebelle part deux fois au cours de la Bataille de Yavin en l’An 0 et d’Endor en 4 ABY. Il restera toujours ce puissant Maître Jedi émérite et légendaire qui reconstruisit l’Ordre Jedi, bien que sa chute fut précipitée à cause de la manipulation de Snoke sur son neveu menant à la destruction du temple Jedi dans lequel Luke formait de nouveaux apprentis. Pour plusieurs générations de jeunes adultes, Luke, ainsi que Leia et Han, a été un symbole d’espoir. Par ce biais, il prouvait que, prendre les armes, se battre, c’était donné à tout le monde tant qu’on se donnait les moyens pour ça et qu’il était nécessaire de se battre pour ses idéaux jusqu’au bout, quoiqu’il en coûte. Rien n’est perdu tant qu’il y a de l’espoir. Le souvenir de Luke au sein des Jedi, au sein de l’histoire héroïque de la République sera toujours transmis et partager avec les générations futures, faisant de lui une légende autant de son vivant qu’après sa mort. Rey est la preuve du pouvoir que cette légende a sur les gens. « Luke Skywalker? I thought he was a myth. »

Toutefois, la Lune Rouge avait prévu autre chose pour Luke, une autre fin, une autre vie. Il ne rejoindrait pas la force comme les autres, comme Obi-Wan, Yoda, les deux Maître qui avaient fait son éducation, ou son père.

La sonnerie de son alarme l’extirpait de son sommeil. Tout en grommelant, à moitié réveillé, Luke se tournait vers l’appareil maudit et lui donnait un coup-de-poing pour le faire taire, comme si c’était une habitude ancrée dans son quotidien. Sept heures. La radio s’enclenchait toute seule une fois que le pauvre réveil s’était pris un coup de la part de son propriétaire. Étrange…L’enchaînement des événements lui semblait si familier, mais inconnu à la fois. La suite n’allait guère l’aider. Quand il se redressait enfin dans son lit pour bâiller et se frotter les yeux, il se rendit compte que sa main droite était faite de chaire et d’os et plus de ferrailles et de mécaniques complexes — l’ayant perdue lors de son premier combat contre celui qui allait lui révéler être son père, Dark Vador, au cours de la bataille de Bespin. Interloqué, le jeune Skywalker l’était encore plus lorsqu’il découvrit en soulevant la couette que sa bedaine d’homme grisonnant avait été remplacée par ses abdos d’antan. Pas que la chose lui déplaisait, mais elle n’était tout bonnement pas naturelle. « Je suis dans la Force, là… ? » Les choses lui semblaient être bien trop réelles pour être dans un monde qui s’apparenterait à un au-delà. Il décidait d’en avoir le cœur nette en se rendant tout bonnement dans sa salle de bain pour se regarder dans le miroir.

Cri de surprise. L’homme de cinquante-trois ans qu’il fut avait laissé sa place au jeune homme de vingt-cinq ans qu’il avait été. C’était à peu près cet âge-là, voire un peu plus, qu’il avait quand il porta secours au petit Grogu sauvé dans un premier temps par un Mandalorien, Din Djarin, quatre environ après la chute définitive de l’Empire. Sensible à la force, la petite créature de la même espèce que l’ancien maître de Luke était la preuve qu’il y avait encore des jeunes à former et que la création d’un nouvel Ordre Jedi était nécessaire. Comme il avait été fier de donner une nouvelle fois un nouveau souffle de liberté à la galaxie en bâtissant quelque chose d’aussi noble liée au Jedi. Luke était honoré de pouvoir enfin transmettre ce que ses Maîtres lui avaient inculqué.

Après avoir passé un temps fou à se regarder dans le miroir, absolument pas pour s’admirer, mais pour se faire à cette nouvelle image et tenter de percer le mystère autour de cette nouvelle apparence, Luke retournait dans ce qui était dans son salon, la tête embuée. Que faisait-il ici ? Pourquoi ? Comment ? Non loin d’être apeuré, et à la manière d’un scientifique, il se mit à fouiller méthodiquement son appartement à la recherche d’indices et de preuves au sujet de cette nouvelle vie que semblait être la sienne. Au cours de sa fouille, il découvrit qu’il était ingénieur en aérospatial et qu’il passait ses journées à créer des objets spatiaux (satellites, fusées…) en tout genre. « Si Oncle Owen savait ça… Il en serait malade. » Mort depuis longtemps, son vieil oncle avait tout fait pour écarter Luke du danger, dès l’instant où Obi-Wan lui ait confié l’enfant, et surtout des petits vaisseaux et engins à moteur sur lesquels Luke passait tout son temps pour les réparer ou les améliorer. Son oncle avait pourtant tout fait pour en faire un vrai fermier, mais Luke était comme Anakin — il aimait bien trop créer, bricoler. Rien d’autre ne le stimulait. Luke découvrit aussi au cours de ses recherches qu’il était à l’université et qu’il préparait une thèse en astrophysique. Il trouvait des cahiers criblés de notes et de dessins en tout genre, très techniques, très précis, réalisés par ses soins comme il reconnaissait son écriture. Il semblait travailler sur la vitesse de la lumière, la gravité, les ondes gravitationnelles… Ces notes révélaient toutefois que l’ancien Maître Jedi avait des difficultés à comprendre certains concepts de ce monde, de cet univers, comme il n’était pas régi par les mêmes lois physiques que son Ancien Monde. Cette partie-là lui rappelait les nombreuses missions/sauvetages qu’il avait pu faire aux quatre coins de la galaxie. Il se souvenait aussi, en riant, de Han qui passait son temps à se vanter d’avoir fait la course de Kessel en moins de 12 parsecs. Il revoyait sa sœur lever pour la énième fois les yeux au ciel en l’entendant se vanter. « Solo, continue et je t’éjecte du vaisseau. »

Seulement, découvrir ce qu’il faisait dans cette vie, dans ce monde n’était pas la partie la plus intéressante et incroyable de la fouille de son appartement. C’était plutôt ce petit coffret en bois qui allait être le centre de son attention. Avant de l’ouvrir, il s’asseyait par terre, sur sa descente de lit et enfin, il découvrit le trésor qui se trouvait à l’intérieur.

Le sabre laser d’Anakin Skywalker, son père, avant qu’il ne devienne Dark Vador.

Luke ne comprenait pas pourquoi c’était lui qu’il l’avait alors que Rey l’avait récupéré et enterré sur Tatooine. Ce sabre, il était à l’origine de tout, de son histoire. C’était grâce à lui que Luke avait pu en savoir un peu plus sur Anakin quand il fit la rencontre du vieux Ben alias Obi-Wan Kenobi, reclus sur Tatooine. Luke avait été amené à le chercher après l’achat par son oncle de C3PO et de R2-D2 qui avait en sa possession un message de la Princesse Organa adressé à l’ancien maître de son père. C’est Obi-Wan qui lui donna le sabre, qui le convainquit de partir à l’aventure pour sauver Leia des mains de l’Empire. C’est avec le sabre de son père qu’il s’entraina et développa ses capacités de Jedi sous l’enseignement d’Obi-Wan et de Yoda ensuite sur Dagobah. (Yoda qui avait d’ailleurs été fatigué par l’impatience du jeune Luke. Vraiment comme son père !) C’est aussi grâce à cette arme et à la Force qu’il put se libérer et s’échapper de la caverne où un wampa le tenait prisonnier sur Hoth. C’est également avec ce sabre à la lame bleutée qu’il affronta pour la première fois son père, sur Bespin, la Cité des Nuages. Et c’est grâce à ce sabre qu’il avait lutté de nombreuses fois avant d’avoir le sien.

Ce sabre était devenu l’héritage de sa famille, le souvenir matériel de ce père qu’il avait tant désiré connaître tout au long de sa vie. Ils se sont fait la guerre, à deux reprises en face-à-face, puis par flottes interposées, mais Luke, foncièrement bon, bien qu’il fût par deux fois appelé du côté Obscur de la Force par Dark Vador sur Bespin et par Dark Sidious sur Endor, était désireux d’offrir une rédemption à son père, sentant ce tourment intérieur qui le ravageait. Il avait su voir, à travers la Force, ce que les autres avaient toujours ignoré – il restait un peu d’Anakin Skywalker en lui. Padmé l’avait dit à Obi-Wan avant de mourir et elle avait eu raison de toujours croire en lui. Luke avait su fouiller, se battre contre les démons de son père pour le ramener à la surface. Sans cela, sans lui, jamais Luke n’aurait pu survivre à l’attaque de Dark Sidious. Et c’est d’ailleurs grâce à Anakin qu’ils purent être débarrassés du Maître Sith. C’était donc important pour Luke ensuite d’offrir des funérailles descente à son père après cette rédemption.

Ce sabre était le souvenir de tout ce que Luke avait traversé autant dans sa jeunesse que dans sa vieillesse. Il lui rappelait sa rencontre tumultueuse avec Rey – Rey qui l’avait cherché parce qu’il était ce symbole d’espoir dont la rébellion avait besoin contre le Premier Ordre. Il lui rappelait aussi l’entraînement de la jeune fille dont il avait deviné depuis le début les origines funestes, mais comme pour Anakin, il avait vu le bon en elle, un bon qui n’attendait que d'être exploité. Ce sabre lui rappelait également son combat final contre son neveu avant que le vieux Maître ne trépasse. Et le sabre, au cours de cette énième guerre, avait choisi Rey comme héritière de cette histoire lourde, tumultueuse et chaotique, mais pleine d’espoir des Skywalker. Ce sabre montrait que le chemin et la voie des Jedi n’étaient pas une ligne droite, mais une route fait d’obstacle, qui pouvaient brièvement détourner tout individu, même les plus forts, de son chemin initial, mais la fin d’Anakin, et le voyage de Rey et de Luke dans ce cheminement intérieur montrent qu’il est toujours possible de retrouver la lumière.

Peut-être que cette nouvelle vie était cettee lumière pour Luke. Peut-être lui restait-il encore des choses à accomplir. Comme résoudre son différent avec son neveu, retrouver ses parents, sa famille. Rey était-elle là ? Son père ? Sa sœur ? Ben ? Si oui, devait-il garder ce sabre qu’il serrait contre lui comme une relique sacrée ou bien devait-il le rendre à Anakin ou à Rey s’ils se trouvaient dans ce monde ?

En tout cas, contrairement à la plupart des gens ici, Luke se plaisait sur cette nouvelle planète. Il découvrait une myriade de nouvelles choses qui remplissaient ses nombreux cahiers qu’il achetait en masse. Sa curiosité était servie ici. Il vivait la vie banale d’un jeune homme de vingt-cinq tout à fait lambda, se rendant compte que la guerre, l’ordre, les responsabilités que lui incombait son statut de Jedi lui avaient volé sa vie, sa jeunesse. Cette renaissance était une nouvelle chance de vraiment vivre, loin des conflits, loin de la violence et d’être réellement ce qu’il avait envie d’être bien qu’il fût toujours été très fier d’être un Jedi. Peut-être qu’il croisera à nouveau sa famille ici (il l’espère en tout cas), mais pour une fois dans sa vie, Luke se permit d’être un tant soit peu égoïste et de vivre comme il l’entendait, sans aucune pression. La ville accueillait enfin au moins un être venu d’ailleurs heureux.