(TERMINE) It's nice to have an old friend for dinner. [pv Hannibal]

L'absence de ponctualité est un défaut qu'Hannibal pardonne difficilement, un défaut par lequel Will n'avait nullement l'intention de pécher ce soir-là, bien au contraire, même. Ce moment, ce rendez-vous qu'il guette avec la plus grande impatience ne saurait tolérer le moindre retard. C'est leur moment, et Will le premier tient à s'y présenter à l'heure dite. Il porte une tenue de circonstance, élégance étant de mise, apparence soignée, mais il s'est assuré d'avoir toute liberté de mouvement malgré tout. Son instinct lui susurre que ce ne sera pas un moindre luxe. Chose promise, chose due, il a apporté le vin. Ses compétences en œnologie sont sans comparaison possible avec celles de son hôte, mais le grand cru qu'il tient sous le bras fera, il s'en convainc, l'affaire. La qualité de cette soirée ne dépend certainement pas uniquement de l'alcool qui l'accompagne, mais dans ces circonstances, rien n'est laissé au hasard ni ne doit l'être.

Il se rend à l'adresse du psychiatre. Il a songé, en chemin, que les lieux auraient encore changé de forme, comme ce semble être leur spécialité, il s'est imaginé qu'il ne retrouverait pas l'endroit. Mais à présent qu'il sait où trouver Hannibal, la ville semble conciliante, presque à son service, elle le guide à travers des rues qui n'ont plus rien du dédale qu'il a parfois eu le sentiment de traverser, et c'est sans aucune difficulté, presque poussé par les circonstances elle-même, qu'il se retrouve sur le pallier. Alors qu'il appuie sur la sonnette, il entend une voix toute féminine de l'autre côté qui lui laisse deviner qu'au moins un de leurs deux invités est déjà présent au rendez-vous. En avance, donc. La porte s'ouvre, et tout peut commencer.

"Bonsoir, Hannibal", le salue Will en lui confiant au passage sa bouteille de vin. "Je vois que je ne suis pas le premier arrivé."

Et la blonde peroxydée, façade surmaquillée, robe moulante et décolleté plongeant (à l'évidence, elle voit dans ce dîner le prétexte à séduire son mystérieux psychiatre), de se présenter en "bonne et due forme" sans deviner combien ces présentations sont inutiles. Ce qu'il doit savoir d'elle, il l'a déjà appris d'Hannibal. Mais quelques secondes d'introduction suffisent à confirmer l'idée qu'il s'est fait d'elle. Superficielle et arrogante, vulgaire en diable. L'attrait pour la manipulation évoqué par Hannibal se discerne à la manière dont son attitude calculée semble automatiquement s'adapter à son interlocuteur, qu'il s'agisse de lui ou du psychiatre. Il ne pourra pas entièrement la blâmer pour ce dernier trait de caractère. Il ne compte pas se comporter bien différemment avec elle non plus.

"Mademoiselle Foster, je présume ? J'ai beaucoup entendu parler de vous, j'étais impatient de faire votre connaissance."

La flatterie fonctionne à la perfection. Il ne lui faut visiblement pas grand-chose. Et Will ne ment qu'en partie. Il avait effectivement hâte de la rencontrer. Pour d'autres raisons. Elle minaude, prononce quelques mots qu'il n'écoute pas vraiment, quand la sonnerie retentit à nouveau, cette fois pour accueillir l'invité manquant. Ils seront bientôt au grand complet. Et la soirée pourra véritablement commencer.

Un sentiment de totale familiarité l'envahit tandis qu'il retrouve de ces habitudes qui en grande partie lui ont manqué, tout en se félicitant intérieurement de bientôt en créer de nouvelles. La demeure d'Hannibal est comme dans le souvenir qu'en a gardé Will, à quelques exceptions près. La table élégamment dressée, le raffinement de la décoration, l'alléchant fumet qui émane de la cuisine... Will observe du coin de l'œil leurs deux futures victimes. Il n'a guère besoin de pousser bien loin l'observation pour comprendre pourquoi il les a choisis. Et Will n'éprouve ni appréhension ni scrupules à la perspective de ce qui les attend. Ils ne représentent qu'une seule chose à ses yeux, et c'est à peine s'il daigne les humaniser. Il ne songe qu'au plaisir qu'il éprouvera au moment de trancher les chairs, d'éteindre les souffles, d'interrompre les cœurs.

Il s'apprête à prendre place quand Hannibal lui propose de l'aider à apporter les plats, ce que Will interprète évidemment comme l'occasion d'un aparté qu'il n'a pas l'intention de lui refuser, tout au contraire. Il consent poliment à rejoindre Hannibal en cuisine, non sans avoir au préalable adressé un sourire de circonstances aux deux invités bien ignorants du sort qui les attend, sourire dont ils devraient terriblement se méfier s'ils savaient combien ils sont peu naturels ou du moins bien rares quand ils viennent de Will...

Sont-ils à son goût ? Oui, ils le sont. Et Will approuve d'un hochement de tête éloquent, une lueur au creux des prunelles qui ne saurait tromper le cannibale quant aux pensées qui l'habitent. Ils n'ont pas exactement ce quelque chose qui faisait du dragon rouge une proie unique en son genre, mais ils lui plaisent. Le choix d'Hannibal a été judicieux, un cadeau qu'il lui fait comme il lui en a servis d'autres par le passé déjà, à la différence près qu'il ne les a jamais aussi naturellement, sincèrement, impatiemment acceptés. Ils sont les acteurs privilégiés de ce nouveau baptême, ils devraient presque s'en sentir honorés.

Will apprécie cette main qui capture ses hanches, complètent le caractère idéal d'une soirée tant attendue, et ce avant même qu'il ne retrouve Hannibal. Quand il a dû se la figurer, et il l'a souvent fait, ce ressemblait toujours à s'y méprendre à cet instant.

"Je crois que je préfèrerais que nous dînions en tête-à-tête", répond simplement Will, le regard ancré dans celui du psychiatre.

Impatient, il l'est et peut difficilement s'en cacher, mais il ne trouverait cela dit guère d'intérêt à échanger quelques banalités que ce soit avec leurs futures victimes, il doute fort qu'une longue conversation avec eux ne le divertisse en quoi que ce soit.

"Au mieux nous pouvons les épargner le temps d'un verre. Il serait dommage de gâcher tout ce vin." Le regard de Will se détache d'Hannibal un instant pour examiner le plan de travail. Il avise le présentoir à couteau, en extirpe une lame aiguisée. "M'autorisez-vous à vous l'emprunter ?"

Il est temps, plus que temps, même. Attendre la fin du dîner aurait tenu du supplice, pas seulement du fait de la compagnie incommodante de leurs hôtes mais bien de l'impatience qu'il peine à contenir encore. Pourtant, il a déjà bien attendu, mais justement, à l'aube de savourer enfin pleinement ce qu'il n'a cessé de quérir, consciemment ou non, il compte les minutes. Et l'invitation tacite d'Hannibal de passer enfin à l'action est saisie dans l'instant par celui qui n'espère plus que de sacrifier à la bête, celle qui ne sommeille plus vraiment, qui guette seulement le moment opportun, un moment enfin arrivé. Will joue son rôle encore quelques instants, il apporte un plat sur la table, dans sa main, tout de même, l'arme blanche qui lui servira d'alliée privilégiée en ces circonstances.

De retour dans la salle à manger, il adresse un faux sourire à Mlle Foster, qui emplit la pièce de ses minauderies insupportables. En effet, il était sans doute présomptueux de leur accorder ne serait-ce qu'un très léger répit. Il ne sera pas si patient, et personne n'attend de lui qu'il le soit. Malgré tout, la bête ne se déchaîne pas immédiatement. Il prend le temps, courtoisement, de remplir les verres, et dès lors que le liquide carmin colore chacun d'eux, il lève le sien et prend la parole, presque cérémonieux, car à vrai dire, ce moment a quelque chose qui tient du sacré, et Will ne veut rien entacher, rien gâcher. Le couteau posé en évidence face à lui sans que quiconque pose la moindre question lui renvoie un reflet de lui-même en partie dissemblable à l'image qu'il se découvre en temps normal dans le miroir, mais sans doute plus proche de ce qu'il a toujours été. C'est la bête qui croise son regard, et elle l'encourage d'un léger éclat au creux des prunelles.

"Je suggère de porter un toast", dit-il alors en levant son verre. "A Hannibal, pour ce délicieux dîner." Pas encore savouré, mais il n'a pas besoin de l'être pour que le compliment soit déjà de mise. "Et à ma renaissance."

Il fait peu de cas de la circonspection qui habite à présent le visage des deux invités, incapables de réellement comprendre de quoi il retourne, dont les regards se croisent un instant. Au moins, durant ce temps, l'intarissable et insupportable Mlle Foster aura cessé de piailler. Lui, il boit une gorgée de son verre puis empoigne le couteau, se redresse, passe dans le dos de l'insipide homme des assurances. Un regard entendu à l'adresse d'Hannibal. Et cette fois, il n'attend plus.

Le geste est rapide, salvateur, nécessaire. La lame aiguisée tranche le cou. L'homme se redresse, les yeux exorbités, horrifié. Mlle Foster hurle, cette fois, sous le jour de la victime paniquée, ses cris sont semblables à ceux d'une truie. Will laisse à Hannibal le soin de la faire taire si tel est son désir, c'est le cadeau qu'il lui fait en retour de tous ceux qu'il obtient lui-même. Mr Bardutch se redresse, tremblant, pour lui faire face, tend ses mains pour l'attaquer en retour, Will se révèle plus rapide, et surtout plus avide d'une souffrance dont il se délecte alors que la lame s'enfonce dans son abdomen comme dans du beurre, dans un flot ininterrompu d'hémoglobine. Alors il la ressent de nouveau, cette euphorie sublime, cette perfection, la beauté de l'instant. Il se sent vivant.

Une sensation non pas neuve mais retrouvée au centuple envahit chaque fibre de son être. C'est un état de grâce, de transe, de l'ordre de l'indescriptible. Une chaleur vive, un incendie, presque, mais agréable, court le long de ses veines, agite un cœur qui bat la chamade, excite le moindre de ses sens. Le mot "renaissance" n'est pas superflu. Il se sent bel et bien renaître, comme débarrassé enfin et définitivement de son ancienne peau. Il est un autre, il est la bête. Et tandis qu'il contemple son œuvre, le sang qui s'échappe en borborygmes de la gorge tranchée, arrose ses vêtement de vermeille, le corps qui se tasse sur lui-même, comme disloqué, le regard dont tout signe de vie a déserté, il n'éprouve pas de scrupule, il ne considère pas l'horreur de ce qu'il a accompli. Il sent grandir en lui une énergie nouvelle, quelque chose de l'ordre de la fierté, de l'orgueil... Il a disposé d'une vie humaine sans aucune considération, sans aucune crainte, sans aucune seconde pensée, et c'était définitivement tout ce qu'il avait toujours attendu.

Son regard se tourne vers l'autre victime, celle laissée aux bons soins du cannibale. Il a été rapide, efficace, d'une dextérité séduisante. Will aurait voulu faire durer le plaisir plus longtemps. Mais il y aura d'autres occasions, même si celle-ci était toute particulière. Comme la nuit avant la chute, il ressent la même exaltation, et les mêmes certitudes. Seulement, cette fois, il ne laissera pas le sort décider de la suite. Il est le sort, celui qu'il réservera à d'autres, toutes les vies qu'il brisera, qu'ils briseront. Jamais il ne s'est senti à ce point lui-même.

Hannibal se rapproche, Will le regarde dans le blanc des yeux, et ce qui se découvre dans les siens en dit sans doute plus long que tous les mots qu'il pourrait prononcer. Oui, ils sont du même monde, à présent. Un monde que Will a côtoyé, envié, rejeté, désiré, et finalement pleinement apprivoisé. Il lui rend un sourire, de ceux qui ne se contiennent pas, expression libératrice d'un sentiment qu'il est incapable de contenir. il ne craignait pas la déception, il a eu raison de ne rien craindre. C'était encore meilleur que dans son souvenir, quelque chose qui tient de l'euphorie brute, sans ambages. En mots, même s'il ne sont peut-être pas nécessaires, Will daigne tout de même répondre à la question d'Hannibal. Dans les termes qui lui semblent se rapprocher au plus près de ce qu'il éprouve, même si aucun d'entre eux ne saurait rendre pleinement justice à ce qu'il ressent.

"Je me sens vivant... puissant."

Il se sent lui-même. Enfin à sa place. Une place qu'il ne peut néanmoins occuper qu'avec lui. Ce baptême pourrait signer la fin de la cohabitation de deux monstres qui se sont peut-être suffisamment nourris de la présence de l'autre pour que cette dernière leur serve encore, mais Will est bien incapable de l'observer ainsi. La présence d'Hannibal est une condition nécessaire à cette plénitude acquise. Il se rapproche de lui, l'étreint, sans doute moins fébrile que la nuit du basculement, mais en revanche plus convaincu que jamais, et glisse à son oreille les mots qu'il ne lui doit que trop.

"Merci."

Hannibal n'a pas fait de lui ce qu'il est en cet instant, mais il avait besoin de lui, néanmoins, pour se révéler à lui-même. Et aucun mot ne saurait suffire à lui exprimer sa gratitude à ce sujet. Il s'écarte après un instant, mais de quelques centimètres seulement, ses lèvres à portée des siennes.

"Et si nous passions à table, maintenant ?"

La métamorphose est complète, tout ce qui doit s'ensuivre ritualise simplement la renaissance mais n'y participe plus. La créature émergée de la chrysalide a sa propre forme, sa propre identité, ses propres aspirations, mais quoi qu'il advienne, elles resteront toujours en étroite proximité avec celui qui a tant encouragé cette nécessaire résurrection. La suggestion d'Hannibal, celle de participer ensemble à la préparation du plat de résistance, résonne dans son esprit comme une invitation naturelle, à vrai dire indispensable. En son sein couve une impatience, une faim qui semble inextinguible, et qu'il ne peut que vouloir rassasier par les moyens qui lui sont donnés.

Hannibal le guide jusque dans la cuisine, le corps désincarné de Mr Bardutch entre ses bras. Will le suit docilement. Il réalise n'avoir jamais été à ce point en phase avec ses émotions, plus un seul instant en lutte contre elles. Ce sont de nouvelles sensations qu'il découvre et qu'il apprivoise, à la rencontre de lui-même. Curieux de lui-même. De ce qu'il sera capable de faire. Quelque part convaincu qu'il est capable de tout.

"Je n'ai aucune crainte", répond posément Will.

Ces mots ne sont pas prononcés avec défi, ni même avec orgueil. C'est un constat qu'il fait à son propre sujet, et dont il prend la pleine mesure en même temps qu'il l'articule en mots. C'est bien de cela qu'il s'agit. Will n'a pas peur, il n'éprouve aucune forme d'appréhension, en cet instant, et c'est une révélation. La crainte, une crainte viscérale de lui-même, avait longtemps été son moteur. Une lutte constante contre une nature qui le terrorisait, et maintenant qu'il l'a endossée, qu'il l'a acceptée, la peur s'est elle-même évanouie. Il se découvre, en quelque sorte. Ne plus être en phase de devenir, être enfin, ne signifie pas qu'il sache entièrement qui il est. Il s'apprivoise lui-même, se découvre sous son nouveau jour, admet les limites qu'il repousse sans mal, s'interroge sur celles qui, peut-être, lui resteront. Et il appréhende le tout avec une émotion qui se rapproche au plus près de la sérénité, s'il ne s'agit pas de sérénité pure.

Ses doigts parcourent le jeu de lames. Il prend son temps, finit par choisir celle avec laquelle il incisera le corps déjà entaillé de l'homme qui n'est en cet instant plus que pièce de viande. Qu'il n'a jamais vraiment perçu autrement dès l'instant où ils se sont poliment salués, dans l'entrée de cette demeure. Le geste est lent quoiqu'imprécis. Il manque évidemment de maîtrise, souffre d'une impatience mal contenue. Pour autant, sa main tremble à peine tandis que la lame traverse la chair, arrose le plan de travail d'un vermeil presque élégant.

Ses doigts divisent la charogne en deux, exposent l'intérieur, exhibent les organes, morbide buffet à volonté. Doigts crispés sur la cage thoracique de sa victime, elle peine à lui céder. Un flot incontrôlé de sang gicle à son visage, il ne prend pas la peine de l'essuyer, de l'éponger, il est concentré, habité. Quand les poumons sont libérés de leur cage osseuse, c'est à mains nues qu'il les arrache, et les tend vers Hannibal, à la manière d'une offrande. Le foie, ensuite, lui est plus simple à extraire, flasque et légèrement brunâtre, au creux de ses paumes.

"Que comptons-nous en faire ?"

Le tout premier plat qu'Hannibal lui ait jamais préparé. Will aurait presque honte de ne pas s'en être souvenu lui-même, en revanche, l'attention lui plaît. Tout est affaire de symbolique. Ce n'est pas un cycle qu'ils répètent, en revanche, c'est une cycle qu'ils concluent. Cette boucle-ci définitivement bouclée, Will ne reviendra pas à qui il a été lors de ce premier repas partagé, à cette lutte contre lui-même qui commençait déjà à sourdre sans qu'il daigne entièrement en avoir conscience. Il a trop redouté, à son arrivée ici, de retourner à qui il ne voulait plus être, il refuse que cela se produise. La bête n'est pas magiquement apparue au fil du temps, ça non. Elle était là dès leur première rencontre, mais muselée, captive de ses chairs, il ne l'avait pas laissée s'exprimer. C'est pourtant elle qui lui a permis de comprendre Hannibal comme personne n'y était parvenu avant lui, elle qui l'autorisait à endosser la peau des criminels sur lesquels il enquêtait. Elle qui forçait cette empathie qui n'a jamais été autant exacerbée qu'en la présence de celui qui croise à nouveau son regard, lui adressant au passage ce compliment dit sans emphase, presque sans émotion, mais auquel Will sait donner toute sa valeur. Il n'envisage pas de le contredire parce qu'il le ressent, profondément. Ses défenses abattues, il sent qu'il est la version la plus évidente, la plus pure (tout est affaire de perspective), la plus accomplie de lui-même. Et c'est ça, plus que l'image qu'il renvoie sans doute, qui est magnifique.

"J'ai vu plus d'une fois à travers vos yeux", répond simplement Will. "Je pense qu'en me regardant dans le miroir, je verrais la même chose que vous."

Oui, il a vu à travers ses yeux, à sa manière du moins, il a cherché à se glisser dans sa peau sans savoir qu'il s'agissait de lui, puis en en étant pleinement convaincu. Il s'est presque, par moments, senti devenir lui, si bien que leurs expériences ont manqué se confondre, si bien qu'il a fini par se sentir responsable lui-même de chacun des crimes que son égal avait commis. Il s'était certainement déjà entrevu lui-même par le passé, d'ailleurs, à travers ces yeux maintenant retournés à leur préparation culinaire minutieuse. Et se voir à travers ses yeux avait été une expérience éprouvante pour celui qui refusait de se laisser correspondre à cette vision pourtant plus réelle, plus concrète qu'aucune autre. D'autres ont voulu le cerner, mais lui y est parvenu. Son égal, presqu'un reflet.

"Je vais chercher Mlle Foster", ajoute-t-il alors simplement avant de s'éclipser dans la salle à manger le temps de récupérer l'autre cadavre.

Une fois dans la pièce, il prend le temps de contempler les lieux. Les restes du massacre imprègnent chaque détail de ce tableau singulier, environné d'un calme presque apaisant. De retour en cuisine, il fait de la place sur le plan de travail.

"J'aimerais vous voir à l'œuvre. Si vous n'y voyez pas d'inconvénient."

Il le sait, il l'a compris, cette soirée est la sienne, elle lui est consacrée. Mais elle ne saurait pas être entièrement la sienne si elle n'est pas au moins en partie la leur.

Pas un instant le visage de Will ne se détache du spectacle dont il apprend à apprécier chaque nuance, chaque subtilité. Ce qu'il s'évertuait autrefois à qualifier d'horrible, d'insoutenable, il le considère comme la chance de voir un artiste à l'œuvre. Et c'est le cas, c'est précisément ce qu'il observe. Quand ses yeux ne considèrent pas le corps sans vie savamment dépouillé de ses organes, il s'attardent sur Hannibal, le détaillent tout entier, sans réserve ni pudeur. Il est le maître incontesté de son domaine, et l'application, la minutie d'orfèvre qu'il met à la tâche lui est en partie fascinante, en grande partie séduisante. Il s'imprègne d'un instant dont il apprécie savoir goûter l'évidente beauté. Si évidente qu'il a bataillé pour ne pas toujours la considérer dans sa prime splendeur. Impeccable, Hannibal est à mille lieues de la boucherie dont il s'est lui-même rendu responsable, dans son empressement à voir le sang couler, dans son besoin presque viscéral d'exprimer ce plaisir pur et sans faille d'être simplement au monde... Un monde à leur pied, le monde que la bête attendait pour éclore et s'épanouir.

Le silence n'est troublé que par le craquement des os, l'écoulement discret du sang. Une mélodie singulière, et Will observe, écoute. Il savoure, et par la même, il prend note. Il ne s'est jamais tant senti l'âme d'un artiste, mais à cet art-là, il devine qu'il est capable d'exceller. Will recueille entre ses mains le cœur que lui tend Hannibal comme s'il s'agissait de la plus précieuse des offrandes. C'est ce qu'il est. Il ne saurait passer à côté de l'intention sous-jacente. Ni négliger de faire la parallèle avec un autre cœur de sang et de muscle, offert avec grandiloquence dans le chœur d'une chapelle florentine.

"Plus que ça...", répond Will quand Hannibal lui demande s'il est satisfait, d'une voix qui ressemble à un souffle, comme pour ne pas troubler plus que nécessaire le caractère presque sacré d'une scène que, il en est est convaincu, personne ne saurait comprendre mieux qu'eux. Personne n'est en droit de la comprendre mieux qu'eux, d'ailleurs.

Hannibal retourne s'affairer à la préparation de leur dîner. Il émane des fourneaux une odeur irrésistible et familière en même temps.

"Je suis affamé", répond Will avec dans la voix ce quelque chose d'assuré, de carnassier, qu'il se découvre en partie.

C'est le cas. Il sent gronder en lui une faim qui semblerait presque inextinguible, un appétit comme il n'en a jamais ressenti, et qui ne se limite pas seulement aux mets raffinés qui gagneront bientôt son palais. C'est le monde qu'il pourrait dévorer. Il repose le cœur sur le plan de travail avec minutie, prend le temps de contempler plus avant les restes du carnage. Admet son manque manifeste d'élégance.

"J'ai été peu soigneux", remarque-t-il alors, pas vraiment sur le ton de l'excuse, davantage celui du constat. "J'accorderais plus d'attention à votre plan de travail la prochaine fois." Et il s'engage tacitement, bien sûr, à rendre cette cuisine comme neuve. Il laisse s'égrainer quelques courtes secondes de silence. "Par ailleurs il nous faudra décider de comment disposer des restes."

Une certaine soif de grandiloquence le pousse à se laisser attirer par ces mises en scène remarquables dans lesquelles Hannibal était passé expert. Se contenter de faire disparaître ce qu'il reste de Miss Foster et Mr Bardutch de façon disons conventionnelle lui semblerait assez peu convenir à marquer un événement aussi notoire que celui de sa renaissance. Même si un peu de pragmatisme ne nuit pas. Il ne faudrait pas manquer leur deuxième chance pas désir de grandeur. Ils n'en auront pas de troisième.

La raison, ou un semblant de raison du moins, retrouvera à terme toute sa place, saura se repaître de délicatesse et de minutie, mais pour l'heure, la raison sans être complètement absente, s'efface du moins au profit d'autres sortes d'émotions, prégnantes, souveraines, nécessaires. Hannibal le résume parfaitement. Manque d'habitude, excitation de l'instant, qui ne lui est d'ailleurs toujours pas passée. Il sent l'euphorie, l'exaltation imprégner chaque fibre de son être nouveau, de son être révélé. C'est comme s'il respirait pour la toute première fois après avoir trop longtemps, beaucoup trop longtemps retenu sa respiration. Il est ivre de cet air nouveau, et s'il s'accoutumera, s'il finira bien par non pas museler la bête mais du moins mieux l'apprivoiser, il est pour le moment à peine capable de la contenir, surtout, il n'en a pas l'envie. Pas ici et maintenant, pas dans cet espace clos où il peut entièrement s'exprimer, en présence du seul qui sera capable de le voir, de le voir vraiment, avec ou sans masque, et qui a tout autant que lui, en vérité, mérité de voir la bête se déployer dans sa splendeur entière, brute, sans restriction aucune.

Ce dîner, il le savoure comme il n'en a jamais apprécié aucun autre, ce n'est pas seulement la délicatesse d'un mets si soigneusement préparé, ce n'est pas uniquement la teneur même du repas, c'est un tout... Une réécriture de ce qu'ils sont. Will ne sait avoir en mémoire celui qu'il a été au moment de partager un repas presque identique - et en tout point différent - avec le psychiatre qu'il venait alors à peine de rencontrer. Ses souvenirs de son ancien lui lui semblent flou, sans doute parce que son esprit tout entier abandonné au plus pur instinct ne s'embarrasse pas de souvenirs négligeables. Oh, certains ne le sont pas, tous ceux qui les concernent - même les plus horrifiants, surtout les plus horrifiants d'ailleurs - ne le seront jamais. Mais ils appartiennent à une autre vie, à un autre Will, celui qu'il a tant craint d'avoir à se réapproprier en l'absence d'Hannibal, celui dont il ne voudra plus jamais à présent. Sa mue est accomplie, il a fait peau neuve, et c'est ce sentiment qu'il savoure en même temps que chaque bouchée de son assiette, dont il ne laisse pas la moindre miette.

Hannibal se rapproche, lui suggère de se nettoyer. Pas un moindre luxe compte tenu de tout le sang qui tache son visage, imprègne ses vêtements... mais à vrai dire, et même s'il n'a pas l'absurde idée de quitter cet endroit sans être préalablement lavé et changé - il a tout de même encore un minimum de sens pratique et d'esprit d'autopréservation -, il n'est pas pressé de revêtir l'apparence de l'innocent... Il se sent bien dans sa tenue débraillée et ensanglanté d'assassin, il n' a pas envie de s'en défaire si vite... ou pas de cette manière en tout cas. Et Hannibal le comprend sans doute en partie quand il suggère qu'ils peuvent tout aussi bien passer immédiatement au dessert. Le repas lui-même aurait pu attendre, car la bête, elle, est guidée par une autre sorte d'appétit. Des émotions contenues, emprisonnées, reniées, à présent parfaitement admises et assumées, veulent toute à la fois s'exprimer. Une frustration proche d'insupportable qu'il veut à présent, viscéralement, violemment, réduire au silence.

"Je ne me sens pas encore complètement rassasié", souffle-t-il en se redressant à son tour. Son regard soutient le sien, une lueur sauvage brille au creux de ses prunelles.

Les mains plaquées sur ses joues, il approche son visage du sien. Ses lèvres ne l'embrassent pas, elles le dévorent, compensent l'immense frustration d'un désir trop longtemps contenu. Le besoin de le consommer, de se consumer. Ses doigts empoignent sa chevelure avec fermeté, sans que ses lèvres ne se séparent des siennes ou presque, tandis qu'il le pousse contre la table. Il mord sa lèvre inférieure jusqu'au sang, goûte du bout de la langue la fine traînée de liquide carmin qui s'échappe de ses commissures. L'instant d'après, ses lèvres, sa langue, ses dents, partent à l'exploration de son menton, puis de sa gorge, alors qu'il s'évertue, avec un empressement presque fiévreux, à le débarrasser du tissu qui couvre le haut de son corps.

Les gestes du psychiatre se font miroir des siens, et ils se mettent mutuellement à nu, lentement, découverte progressive de ce qui n’avait jusqu’alors été qu’imaginé, convoité plus qu’il ne l’a été admis avant cette soirée, leur soirée. Le spectacle progressif d’un torse lentement dévoilé, qu’il explore de ses doigts, qui redessinent sa musculature, se perdent dans la fine toison qui la recouvre par endroits, lui plaît immensément, alors que sa chemise vient choir au sol une bonne fois pour toutes, libérant cet obstacle de tissu entre leurs épidermes.

De désir pour un homme, Will n’en avait jamais éprouvé, ni ne s’était cru capable d’en ressentir. Ce qu’il éprouve d’ailleurs est quelque chose qu’il ne saurait définir qu’au-delà du simple désir. A chérir chaque millimètre d’épiderme, il ne se contente pas de vouloir ce corps, c’est de l’appropriation pure et simple. Ce n’est pas que du désir, non, c’est un bouillonnement, la revendication de quelque chose qui va au-delà de lui-même. Il faut qu’il lui appartienne car lui-même n’est plus capable d’appartenir qu’à lui. Ses gestes, son impatience, cette flamme dans son regard en sont autant d’indices. Il veut tout conquérir, tout de suite, tant il s’est restreint à ne rien obtenir, et en même temps, il souhaite que l’échange s’éternise, que cet ultime apprivoisement, ce dernier rempart qu’il lui restait à franchir sache conserver dans son esprit, dans sa mémoire, cette valeur essentielle. Une part intégrante de ce macabre et sensuel baptême.

Il photographie mentalement chaque sensation, comme ce frisson qui glisse le long de son échine et se laisse mourir au creux de ses reins quand de ses doigts Hannibal explore en retour chaque détail de sa propre physionomie, s’attarde plus longuement sur la cicatrice qui barre son abdomen. Son corps tout entier, leurs corps à tous les deux, racontent une histoire, leur histoire, géographie de leur relation tumultueuse imprimée au creux de leurs chairs autrefois meurtries. Tous leurs sens se retrouvent sollicités, toucher les caresse, vue ces corps progressivement libérés de tout vêtement, ouïe les soupirs, alors que les souffles sont plus haletants, que ce moment ne garde d’audible que ce que cet échange recèle de plus intime. Odorat, goût. Peut-être les plus sollicités. Will ferme un instant les yeux tandis qu’il offre sa gorge à son amant, qui vient l’explorer de sa langue. Ses paupières s’ouvrent à la remarque du psychiatre. Une esquisse de sourire amusé orne ses lèvres.

"Vous vous y habituerez", répond-il simplement, comme un refus d’une concession qui ne lui coûterait pas grand-chose, c’est certain. Il sait combien le parfum d’un after-shave il est vrai bon-marché peut heurter un flair si délicat. Mais il sait aussi que cette fragrance est à l’image de ces défauts qu’il ne saurait souffrir chez aucun autre et qu’il a appris pourtant à tolérer chez lui.

Les lèvres d’Hannibal glissent sur sa clavicule, ses crocs suivent presque aussitôt, mordent avec lenteur. La douleur, bien réelle, vif élancement qui irradie dans l’entièreté de son épaule, fait que d’un même mouvement, ses doigts s’agrippent aux bras du cannibale, et ses ongles s’enfoncent profondément dans sa peau. Mais il laisse faire. Même, il y prend, en vérité, plaisir. Son cœur, dont le tambourinement s’est emballé, semble battre à même la morsure encore fraîche contre son omoplate.

"Et pourtant vous m’avez à peine goûté", observe Will, un filet de malice dans la voix en réponse au compliment que lui fait Hannibal, et qu’il apprécie à sa juste valeur.

Ses lèvres, ces mots prononcés, repartent à l’assaut des siennes, recueillent à leur commissure quelques très fines perles d’hémoglobine. Baiser long, langoureux, apnée nécessaire qui concentre une fois encore tout ce qu’il n’avait jamais exprimé jusqu’alors de désir. Ses doigts empoignent griffent, happent, se cramponnent à ses bras, à son dos, à tout ce à quoi il accède, puis s’attèlent, dans un mouvement empressé à défaire sa ceinture, sans laisser ou presque à leurs lèvres l’occasion de se détacher l’une de l’autre.

Il a ressenti ce changement, la passion qui se change en rage, en colère sourde. Il ne les a pas identifiés comme telles mais il les a éprouvées à travers lui, dans la vigueur de ses gestes, dans ce contact visuel un instant rompu. Mais abandonné à ses propres émotions, il a gardé ces pensées en sourdine, et elles se sont effacées rapidement, estompées jusqu’à se résorber et donner à Will le sentiment d’avoir tout imaginé. Il ne veut laisser place à aucune interprétation hâtive qui viendrait gâcher l’instant et la perfection de ce dernier. Il se focalise sur ce qui importe, sur l’essentiel : la fusion de leurs corps, le plaisir, l’union la plus absolue, le point d’orgue d’une métamorphose qui a été lente, laborieuse, mais dont l’accomplissement tend dorénavant au sublime. Tout en le surplombant de nouveau, il le contemple dans ce qu’il lui trouve d’idéal, son idéal. Il n’est pas dans le plein contrôle de son image, il donne de lui ce qu’il a de plus réel, de plus authentique. Il le voit, il le voit comme il l’a parfois deviné, comme il l’a souvent désiré, comme il l’avait de plus en plus distinctement perçu, mais sans besoin de dépasser les artifices et les silences. Et il est parfait.

Les jambes de son amant s’enroulent autour de ses hanches, et il cède à cette apothéose redoutée et souhaitée en même temps, il laisse le plaisir l’absorber, le consumer. Le plaisir est un feu brûlant qui s’empare de tout son être, fait frissonner chaque millimètre carré de son épiderme, tambouriner son cœur contre sa poitrine à un rythme effréné. Jamais il n’a ressenti une jouissance comparable, ce sentiment absolu d’appartenir à quelque chose non pas de plus grand que lui, mais qui soit à sa hauteur, à leur hauteur. Ils sont unis, ils ont fusionné dans un tout, absolu, certain. Un râle profond de plaisir se perd contre les lèvres de son amant. Et il se sent bien, terriblement bien. Accompli, absolu.

Un instant, il n’y a que le silence, brisé de souffles encore courts, et son cœur qui cogne jusqu’à ses tympans, à un rythme qui peine à ralentir. C’est un silence apaisant, réconfortant, qui n’exige pas d’être rompu. Leurs regards échangés, ses yeux qui ne savent se détacher de siens, cela lui suffit. Ou du moins, il pense que ça lui suffit, juste le goût du silence, et ces émotions qui se passent de mots. Ou peut-être que non. Quand Hannibal rompt finalement le silence, Will comprend que non, le silence n’était pas assez. La plus belle conclusion à ce qu’ils viennent de vivre, ce sont ces mots, prononcés dans un murmure, qui ont une valeur inestimable.

Les sentiments d’Hannibal à son égard, il les a devinés, discernés, comme à travers le voile de ses propres incertitudes. Quand il avait interrogé Bedelia à ce sujet, il entrevoyait déjà la réponse, mais c’était de lui qu’il devait l’entendre. Hannibal aime à sa manière, et ce sentiment, dans ce qu’il a de plus absolu, sans la moindre compromission, peut être désarmant, mais aussi et surtout enivrant. Est-ce que Will l’aime en retour ? Il n’aurait su que répondre, avant, mais en cet instant, il sait, il le sait absolument, impérieusement, sans laisser aucune place au doute. Pour Alana ou Margot, il n’avait jamais eu que de l’attirance. Pour Molly, il avait eu de l’affection. Pour Hannibal, c’est autre chose, quelque chose de puissant, de dévorant… Il est l’homme pour qui il a traversé le globe pour retourner à ses origines, il est l’homme à qui il a tout pardonné, y compris le pire, y compris la mort d’Abigail. Il est l’homme qu’il a recherché désespérément, des mois durant, à son arrivée sur cette île, convaincu de ne pouvoir survivre à son absence. Il est celui sans qui il se sent incomplet, dépossédé de lui-même. Il l’aime oui, et même, il a découvert ce que c’est que d’aimer à son contact, ce sentiment pur, brutal, violent, qui ne conçoit ni compromission ni concessions, ce sentiment d’être à l’autre et d’être soi avec l’autre. Il l’aime au-delà de toute décence, de toute raison, de toute morale. Il l’aime comme un fou. Et sans doute a-t-il fini par l’être complètement. Par amour pour lui.

Un temps, il ne dit rien, se contente de savourer cette déclaration à sa juste valeur, conscient de cette ultime barrière qui se lève enfin, la seule vérité qui n’était pas encore dite, mais ne saurait plus être dissimulée, en aucun cas. Il l’observe un moment, caresse doucement sa joue du bout des doigts. Puis finalement, dans un souffle.

"Je t’aime, Hannibal."

Et il ne dit rien de plus, il laisse sa tête reposer au creux du cou de son amant et savoure d’entendre seulement leurs souffles mêlés, et les battements de son cœur qui se calment enfin. Il se sent serein, il se sent bien. Comme s’il avait été délesté d’un dernier poids, celui d’une vérité trop longtemps contenue, et qui attendait d’éclater. Plus de forteresses à gravir, d’un côté comme de l’autre, ou du moins l’un pour l’autre. Et c’est agréable. Will laisse les minutes s’égrainer, apprécie simplement de demeurer ainsi, peau collée à celle de son amant, avec ce sentiment grisant d’étourdissement et d’absolu qui ne le déserte toujours pas. Puis, après un moment, il rompt de nouveau le silence, fin sourire aux lèvres.

"Je crois qu’il est temps que je prenne cette douche."