[Marché de Noël] La magie de Noël (Ft Sophie)

Sophie était ravie de la soirée qu'elle passait en compagnie de Jean. Elle était heureuse de pouvoir passer du temps avec lui. Elle était heureuse de pouvoir profiter de cette période avec lui. Depuis trois ans, elle ne rêvait que de ce genre de moments. Elle s'imaginait sans cesse comment serait un Noël en sa compagnie, comment serait telle ou telle sortie avec lui. Aujourd'hui, elle avait la chance de pouvoir enfin le vivre. Sa patience avait été récompensée. Il était là et, elle l'espérait, il resterait là à jamais, à ses côtés.

Comme il en avait exprimé le souhait, ils avaient dansé tous les deux, oubliant tout du monde qui les entourait. Aux yeux de Sophie, ce début de soirée était parfait. Elle ne pouvait pas rêver mieux. Et ce n'était que le début ! La jeune femme avait prévu un enchaînement d'activités qui les occuperaient une bonne partie de la nuit. Elle voulait profiter de tout avec lui, pour rattraper le retard, pour se créer de nouveaux souvenirs, pour être à ses côtés. Leur danse, sur une musique imaginaire, terminée, l'impatience de Jean à poursuivre cette sortie amusait Sophie. Des deux, elle était normalement la plus impatiente, mais pas ce soir. Enfin, elle l'était aussi, mais Jean semblait l'être davantage. « Pas presque. » Rétorqua-t-elle, son petit sourire amusé toujours aux lèvres lorsqu'il évoqua la taille de sa liste de choses à faire. Sa liste était très longue et elle comptait bien en faire le maximum - si elle ne pouvait pas tout faire. Jean avait plutôt intérêt à être prêt.

Jean tenta alors d'expliquer son impatience, ce qui fit rire Sophie. « Mais nous aurons bien d'autres Noëls après celui-ci ! » Ajoutait-elle, voulant se montrer raisonnable alors qu'elle était elle-même morte d'impatience à l'idée de faire tout ce qui était prévu en cette veille de réveillon. Simplement, pour une fois qu'elle était celle qui montrait le plus de retenu, elle comptait bien en profiter et lui rappeler.

Avant de sortir, Jean et Sophie se rapprochèrent de la sortie pour enfiler leur manteau, gants et écharpe pour affronter le froid de l'extérieur. Puis Jean attrapa la main de Sophie pour l'entraîner dehors et, main dans la main, le couple s'avançait vers le marché de Noël. Ce dernier n'était pas tout à côté de la salle de bal, mais ils y seraient rapidement malgré tout, il suffisait d'un peu de marche. Ils pouvaient alors profiter de cette balade, tous les deux, sous la neige qui recommençait à tomber. Pour une fois, Sophie restait silencieuse. Elle ne prononça pas le moindre mot. Elle voulait simplement profiter de ce moment de tranquillité où ils n'étaient que tous les deux, où rien, à part eux, n'existait.

Après une dizaine de minutes, Jean et Sophie arrièrent enfin à l'entrée du marché de Noël. Aussitôt, un sourire illumina le visage de Sophie, heureuse comme une enfant de pouvoir profiter de ce moment avec lui. Terminé alors la Sophie silencieuse et tranquille. Reprenant ses habitudes, elle se stoppa, se tourna vers Jean en gardant sa main dans la sienne et lança, sourire aux lèvres : « D'abord, le chocolat chaud ! » Puis, sans attendre, elle reprit la marche. Accélérant le pas, la main de Jean toujours serrée dans la sienne, elle l'entraînait là où ils allaient pouvoir acheter ce fameux chocolat. « Nous l'avons bien mérité ! Il fait si froid ce soir ! » Avait-elle réellement besoin d'une excuse pour boire ce chocolat ? Non, mais elle aimait tout justifier comme pour donner une excuse à tous ses excès et toutes ses envies.

Sophie se raisonnait et se montrait patiente - ou elle faisait semblant de l'être, du moins. Elle avait aussi hâte que lui, bien sûr. Elle voulait partager tous ces instants avec lui, elle voulait goûter au plaisir d'un Noël en famille. Elle voulait profiter de chaque instant et de chaque occasion qu'elle pouvait passer près de Jean. « Laisse-moi faire semblant d'être raisonnable, pour une fois. » Souffla Sophie, son regard amusé posé sur Jean. Pour une fois qu'elle pouvait se vanter d'être plus raisonnable que lui, elle n'allait pas s'en priver. « Non, tu as raison. Je n'aurai jamais la patience d'attendre un an pour vivre tout ça. » Ajouta-t-elle, sincère, tout en sortant aux côtés de Jean, sa main bien au chaud dans celle de Jean.

Sans jamais se lâcher, Jean et Sophie s'étaient dirigés jusqu'au marché de Noël. Pendant tout le trajet, Sophie était restée inhabituellement silencieuse. La jeune femme profitait simplement de l'instant tranquille qui lui était donné. Sa main dans celle de son mari, la neige qui tombait, le calme qu'offraient les rues à cette heure-ci... Tout était parfait ! Alors elle profitait de chaque seconde qui lui était offerte pour imprimer ce nouveau souvenir dans son esprit.

A peine arrivés, Sophie perdit son calme pour s'agiter en réclamant ce chocolat chaud tant attendu. Elle avait tellement hâte de partager ce moment tout simple avec Jean. Comme autrefois. Sans attendre et sans perdre de temps, la jeune femme avait traîné Jean jusqu'au fameux stand où il commanda le premier et où Sophie prit exactement la même chose que lui. Ils attrapèrent les tasses qu'on leur tendait et se réchauffèrent aussitôt les mains grâce à elles. Silencieusement - comme à chaque fois qu'elle se retrouvait face à quelque chose qui se mangeait - Sophie mangeait et profitait de ce délicieux chocolat chaud. Bien trop ailleurs, elle fut tirée de ses pensées par Jean, qui affirmait que son chocolat était presqu'aussi bon que ceux qu'ils buvaient lorsqu'ils étaient enfants. Sophie ne put s'empêcher de sourire et de sourire davantage encore lorsqu'il ajouta que les marshmallows - qui n'existaient pas à leur époque - étaient un des bons côtés de ce monde. Il n'avait pas tort, Sophie était même totalement d'accord avec lui - elle était d'accord et pouvait appliquer cette affirmation à la majorité des sucreries et des cochonneries qui existaient dans ce monde.

Alors qu'elle s'apprêtait à répondre, Jean la coupa pour se moquer d'elle parce qu'elle s'était, semble-t-il, mis de la chantilly et du chocolat au-dessus des lèvres. « Ne te moque pas de moi ! » S'agaça-t-elle faussement, en s'essuyant du revers de la main, plutôt qu'en utilisant la petite serviette en papier qu'on leur avait donné en même temps que le chocolat. « Pourquoi te le dirai-je ? » S'amusa Sophie devant l'impatience de son époux, en buvant une nouvelle gorgée de son chocolat chaud, les marshmallows et presque toute la chantilly ayant déjà disparu depuis longtemps. « Je sais ce que tu vas me répondre : pour le faire, je dois te le dire. » Ajouta-t-elle avec une très mauvaise imitation de Jean, avant de rire. « Je veux qu'on fasse le tour des stands pour goûter à tout. » Et elle était très sérieuse. Peut-être ne goûterait-elle pas à absolument tout, mais elle voulait manger un peu tout ce que cet endroit proposait. « Et lorsqu'on aura fait ça, tu iras me gagner cette peluche que tu m'as promise. » Ajouta-t-elle après une nouvelle gorgée de son chocolat. « Et lorsque ça, ce sera fait, nous irons patiner. » Elle avait bien d'autres choses en tête, mais elle voulait lui faire plaisir et faire ce qu'il avait proposé aussi. Alors pour être certaine d'avoir le temps de le faire, il fallait commencer par ça. « Je vais te montrer que je suis plus rapide que toi sur la glace. » Lança-t-elle, le regard plein de défis et un sourire espiègle aux lèvres. Elle avait bien l'intention de faire la course et de gagner. Elle ralentirait Jean, en faisant semblant de tomber pour qu'il s'arrête et la rattrape, comme il le lui avait promis. Ou, elle tomberait réellement, parce qu'il y avait de grandes chances pour ça arrive, évidemment, et Jean se retrouverait réellement ralenti - comme elle.

Sophie profitait de chaque instant qui lui était offert avec Jean. Il n'y avait rien d'extraordinaire. Ils passaient des moments simples, mais heureux ensemble. Ils profitaient de s'être retrouvés pour goûter aux bonheurs simples. Cette sortie en était le parfait exemple. Sophie ne se sentait jamais aussi bien que lorsqu'elle était là, tout près de Jean, à échanger des taquineries et à boire un chocolat chaud, tout en profitant de l'ambiance de cette nuit d'hiver. Après une très mauvaise imitation de Jean, Sophie s'était décidée à lui donner une partie du programme de la soirée. Ils ne pourraient sans doute pas faire tout ce que Sophie avait imaginé - gourmande, comme d'habitude, il aurait fallu bien plus d'une nuit - mais elle tenait à faire ce que lui avait prévu et pas seulement se contenter de se faire plaisir à elle. Alors le programme était plutôt simple : goûter au maximum de choses que les stands proposés ici, patiner, obtenir la peluche géante qui lui avait été promise. Et s'ils avaient encore du temps, Sophie lui dévoilerait le reste de la soirée au fur et à mesure.

Pour l'heure, elle préférait lui raconter comme elle était plus rapide que lui sur la glace et comme elle le battrait sans la moindre difficulté lorsqu'elle chercherait à lui prouver qu'elle était la plus rapide. La réflexion de Jean la fit rire parce qu'il devinait ses plans sans aucune difficulté. Il la connaissait si bien que ce n'était pas bien difficile pour lui. « Oh Jean... » souffla-t-elle, amusée et espiègle, avant de venir l'embrasser sur le coin des lèvres. « Tu sais bien que jamais je ne pourrai te faire ça. » Si. Elle comptait le faire. Il avait raison, elle allait tricher en prétextant tomber pour le ralentir et le devancer. Il suffisait de voir son regard amusé et son sourire qui ne quittait plus le coin de ses lèvres pour s'en rendre compte.

Terminant son chocolat, alors que Jean n'était encore qu'en train de le boire, il attira son attention vers quelque chose. Il lui proposait de faire une photo pour garder un souvenir de cet instant. Comment pouvait-elle lui refuser ? Etait-elle capable de lui refuser quelque chose, de toute façon ? « Si tu veux ! Mais, en échange, tu n'as pas le droit de te plaindre une seule fois, même si tu es fatigué de me suivre partout. » Parce que Sophie s'impatientait déjà d'être sur place à ne rien faire et avait besoin de bouger, elle imaginait déjà Jean s'en plaindre. Son chocolat terminé, elle avait hâte de goûter à toutes les cochonneries qu'elle trouverait ici et de traîner Jean un peu partout, comme prévu. « Allez viens ! » Souffla-t-elle en attrapant sa main pour le traîner jusqu'à ce fameux photographe. Il y avait un certain temps d'attente, alors avant de s'y arrêter, les yeux de Sophie se posèrent sur un stand voisin. « Attends ! » Cria-t-elle sans doute un peu fort. « Il me faut de quoi tenir pour attendre. Tu sais que la patience n'a jamais été la première de mes qualités, n'est-ce pas ? » Tenta-t-elle de se justifier tandis qu'elle le traînait devant un stand où étaient vendus des biscuits de Noël de toute sorte. Après avoir fait son choix, elle s'empressa de demander à Jean : « Tu veux quelque chose ? » Avec ce que Sophie avait pris, il y en avait assez pour deux personnes raisonnables. Comme Sophie était là, il y avait de fortes chances pour qu'elle engloutisse tout en un temps phénoménal sans en laisser une miette à ce pauvre Jean. Une fois la commande passée, payée et les spécialités en mains, la jeune femme se tourna vers Jean, croquant déjà dans un premier biscuit. « On peut y aller maintenant. » Et sans attendre sa réponse, comme depuis le début, elle tirait sur son bras pour l'emmener patienter dans la petite file d'attente qui s'était formée derrière le photographe. « Tu passes une bonne soirée ? » Parce que c'était tout ce qui comptait aux yeux de la jeune femme, que celui qu'elle aimait passe une aussi bonne soirée qu'elle, qu'ils partagent les mêmes joies d'être ensemble et qu'ils profitent tous les deux de ce moment. Alors même si Sophie paraissait bien souvent égoïste, elle n'oubliait jamais de penser à Jean pour ce genre de choses et voulait lui faire plaisir autant qu'il lui faisait plaisir.

Il était évident que Jean allait comprendre. Il connaissait Sophie par coeur donc, évidemment, il savait qu'elle allait tricher. Alors, lorsqu'elle assura, après lui avoir déposé un baiser aux coins des lèvres, qu'elle ne lui ferait jamais ça, Jean se mit à rire. « Je peux encore te surprendre, j'en suis certaine. » Il avait beau la connaître, elle était certaine de pouvoir le surprendre. Enfin, pas dans cette course sur la glace puisqu'elle avait bel et bien l'intention de tricher pour gagner. Elle le surprendrait un autre jour, lorsqu'il ne s'y attendrait pas.

Oubliant le patin un temps, Jean proposa de prendre une photo avec le Père Noël. Si Sophie n'avait aucune intention de refuser, elle faisait semblant d'accepter sous condition. Il n'avait pas le droit de se plaindre une seule fois, quand bien même cette soirée serait interminable. Sa réponse fit sourire la jeune femme et lui fit lever les yeux au ciel, l'air faussement exaspéré. « Tu pourrais aussi te montrer moins parfait parfois, tu sais, comme tout à l'heure, lorsque tu étais impatient ? » Lui rappela-t-elle alors qu'il assurait qu'il ne se plaignait pas. Jamais. Jean semblait presque parfait en toute circonstance, mettant ainsi en évidence les trop nombreux défauts de Sophie qui n'était qu'impatience et gourmandise et qui se plaignait sans cesse.

Sans plus attendre, la rousse entraîna son mari vers la longue file d'attente. Sauf que l'impatience de Sophie la poussait à regarder partout et ses yeux se posèrent sur un stand qui l'attirait tout particulièrement. Ce petit stand vendait un tas de spécialités de Noël et Sophie ne pouvait pas y résister - moins encore, en sachant qu'elle allait devoir attendre de longues minutes pour pouvoir prendre la photo, comme le voulait Jean. Alors, elle l'avait tiré jusque-là et avait passé commande d'un tas de cochonneries. Sa propre commande passée, elle laissa Jean commander à son tour. A peine payée, Sophie croquait déjà dans un biscuit avant d'entraîner Jean, de nouveau, vers la file d'attente. Croquant dans un second biscuit, Sophie s'intéressait à ce que Jean pensait de cette soirée. Tout ce qu'elle souhaitait, c'était savoir qu'il passait une bonne journée et une bonne soirée. Elle aimait tellement savoir qu'il était heureux et qu'il se sentait bien auprès d'elle, craignant sans cesse de le perdre ou de le voir disparaître à nouveau. La bouche pleine, il répondit, ce qui fit rire Sophie. « On se moque de la politesse ici... » Souffla Sophie, le regard espiègle, toujours à moitié morte de rire. « Personne ne va nous demander de bien nous tenir. » Sophie avait toujours détesté qu'on l'oblige à bien se tenir et à avoir des manières, l'empêchant alors d'être elle-même. Sans se comporter n'importe comment, ici, ils n'avaient plus besoin de faire attention à leur manière d'être ou de faire en permanence. C'était l'un des avantages de ce monde, Sophie y avait gagné, selon elle, en liberté. « Laisse-moi goûter ! » Et sans attendre, Sophie piocha dans le sachet que Jean avait dans les mains, goûtant à son tour. « C'est vrai ! C'est délicieux ! » Affirma-t-elle en engloutissant le premier avant d'en prendre un deuxième, sans se soucier de savoir si Jean était d'accord pour partager. « Super. Désolée. » Sophie se lançait dans une très mauvaise imitation de Jean, la bouche pleine, avant d'exploser de rire. « Pardon, mais c'était bien trop tentant ! » S'amusa la jeune femme en lui lançant un sourire. Puis Sophie se reconcentra sur ses biscuits, tout en soupirant de temps à autre. « C'est long. » Pesta alors Sophie, au bout d'une minute ou deux, en observant la file qui s'était nettement réduit, malgré tout, mais elle aimait bien trop se plaindre pour se retenir.

La presque perfection de Jean amusait Sophie. Ils étaient si différents tous les deux. Elle cumulait autant de défauts qu'il ne cumulait de qualités. Il était patient là où elle était l'impatience incarnée. Il était sage là où elle ne faisait que des bêtises. Il était raisonnable là où Sophie ne savait être que déraison. Posé et réfléchi face à une Sophie impulsive et boudeuse. Non, ils étaient vraiment très différents. Sophie aimait les qualités de Jean comme lui semblait aimer ses défauts à elle. C'était peut-être pour ça qu'ils étaient si bien ensemble. Ils se complétaient, s'entraînaient l'un et l'autre vers davantage de nuance. Il la poussait à se raisonner quand elle le poussait à se lâcher un peu. « Tu aurais pu dire que j'étais parfaite moi aussi. » Souffla-t-elle, l'air faussement boudeur au visage, les sourcils froncés. « Ce qu'on s’ennuierait si nous étions tous les deux comme toi. » Sophie plaisantait, évidemment. Elle aimait Jean comme il était. Elle aimait Jean pour ce qu'il était. Mais, quelque part, il y avait une forme de vérité dans ce qu'elle disait. S'ils étaient tous les deux aussi calmes, raisonnés et posés, elle se demandait bien de quoi seraient faites leurs journées ? Et leurs discussions ? Du sérieux, encore et encore ? C'était d'un ennui, aux yeux de la jeune femme, qu'elle se félicitait d'être cette insupportable gamine qu'elle savait être parfois.

Sophie ne prenait pas le temps de profiter de ses achats, elle engloutissait les biscuits à une vitesse folle. Si elle sentait le regard de Jean sur elle, la jeune femme ne réduisait pas le rythme pour autant. Elle continuait de manger comme elle l'entendait. Jean, quant à lui, fit une réflexion, la bouche pleine. S'il s'excusait pour son impolitesse, Sophie, elle, riait et le rassurait. Quelle importance ? Il n'avait rien fait d'impardonnable ! Personne ici n'allait leur rappeler les bonnes manières ou comment se tenir en société. Ils n'étaient que tous les deux. Les inconnus qui les entouraient n'avaient pas la moindre importance aux yeux de Sophie. Pourtant, Jean ressentait une certaine obligation à être celui qu'on lui avait toujours appris à être. Sophie n'avait pas ces difficultés puisque, pour elle, il ne s'agissait que d'être elle-même et d'être enfin libre de toutes ces règles qui l'avaient toujours ennuyée. « J'essayerai de faire un effort pour faire moins ma Sophie, si tu préfères. » S'il le disait avec le sourire, peut-être se sentait-il gêné, parfois, par le comportement de Sophie ? Ou peut-être pas. Mais elle ne voulait surtout pas le mettre mal à l'aise alors elle se calmerait et reprendrait de ses bonnes habitudes, s'il le fallait. Chez eux, elle aurait été, sans le moindre doute, bien différente en public. Ici, elle profitait d'être plus libre et de se laisser aller, mais elle pouvait se contenir un minimum - un minimum, il ne fallait pas s'attendre à ce qu'elle se transforme entièrement - pour faire plaisir à Jean.

Parce que la tentation était trop grande, la jeune femme attrapa une des choses que Jean avait achetée pour goûter. Puis, pour se moquer, elle tenta une imitation de Jean. A la réflexion de Jean, Sophie ne put que sourire et hausser les épaules. « Nous sommes mariés, nous devons tout partager, non ? » Répondit-elle, amusée. « Je t'apprendrai à imiter les gens, si tu veux. Tu ne pourras jamais m'égaler, mais peut-être que... avec un peu de chance... Peut-être que tu pourras faire quelque chose de... supportable.» Elle n'était pas sérieuse et elle savait parfaitement qu'elle n'avait aucun talent particulier, hormis celui de se moquer de Jean, en permanence. Mais elle était bien trop heureuse de son compliment pour le laisser passer, sans faire une petite réflexion au passage.

Il était désormais question d'attendre. D'attendre encore. Et toujours attendre. C'était beaucoup trop long. Surtout pour Sophie qui n'avait pas la moindre patience. Elle, elle aimait tout avoir tout de suite. Alors, elle se plaignait. Comme toujours. Évidemment, Jean lui rappela qu'elle n'avait pas le choix que d'apprendre à être patiente parce qu'il voulait cette photo et il l'aurait. S'il souriait, son regard lui prouvait qu'elle ne réussirait ni à négocier par ses caprices, ni à le faire changer d'avis en lui faisant les yeux doux. Alors, elle allait devoir attendre. Aux mots de son mari, la jeune femme se mit à soupirer bruyamment pour montrer son mécontentement. Même si, en réalité, cette photo, elle la voulait aussi. Elle aurait juste aimé pouvoir passer devant tout le monde. « Très bien, très bien ! On va la faire cette photo ! » Boudeuse, Sophie se tourna pour regarder devant elle et ne plus faire face à Jean. Étrangement silencieuse, elle observait la file avancer avec lenteur, soupirant de temps à autre pour montrer son agacement, et refusant tout regard à Jean. Puis, après ce qui lui semblait être une éternité, leur tour était enfin arrivé. « Content ? » Ne put-elle s'empêcher de demander en lui attrapant la main. Et même si elle voulait continuer à faire la tête, elle ne put s'empêcher de sourire, en posant les yeux sur lui. Au fond, elle était ravie d'avoir patienté pour offrir ça à Jean et lui faire plaisir. Après tout, ce n'était rien qu'une photo et elle lui devait bien ça, puis rien n'était plus important que lui faire plaisir.  

« Tu ne diras peut-être plus la même chose dans quelques années quand je t'aurai totalement épuisé. » S'amusait Sophie, en riant, lorsqu'il lui assurait - à sa demande - qu'il n'aurait pas pu vivre avec quelqu'un comme lui. Sophie aurait trouvé ça d'un ennui... Mais, d'ici quelques années, lorsque Sophie n'aurait eu de cesse de faire sa Sophie, peut-être serait-il lassé et, épuisé, il partirait, en courant, le plus loin possible d'elle. Pour le moment, le caractère et le comportement de Sophie ne semblaient pas lui déplaire. Le regard qu'il posait sur elle, les sourires qu'il lui offrait, les gestes tendres auxquels elle avait le droit, les preuves étaient suffisantes pour qu'elle n'en doute pas. Pourtant, elle voulait faire des efforts pour être certaine de ne pas l'ennuyer ou de ne pas le gêner, surtout lorsqu'ils étaient en public. Sophie s'était plutôt très rapidement habituée à ne pas surveiller son comportement en permanence, mais pour Jean, les choses étaient peut-être différentes. Alors, lorsqu'elle lui demanda s'il préférait qu'elle fasse moins sa Sophie, il s'était mis à rire avant de lui dire que ça n'avait pas d'importance parce qu'il l'aimait d'autant. « Cinq minutes ? Je parierai sur deux heures ! Je te prouve pendant deux heures que je peux être moins moi-même et, si je réussis, tu nous prépares un délicieux repas, avec tout ce que j'aime, juste pour nous deux. Et si je ne réussis pas, tu auras eu la chance d'avoir raison. » Le marché n'était pas du tout équitable puisque Jean n'y gagnait rien si ce n'était le droit de préparer un dîner pour eux - avec la condition, en plus de tout, de lui préparer tout ce qu'elle aimait, ce qui lui prendrait un certain temps. « Et moi je n'aime pas prendre mon temps. Pourquoi est-ce que je mangerais lentement ? Je perds moins de temps comme ça ! » Demanda-t-elle dans un haussement d'épaules. Sa gourmandise et son impatience ne faisaient pas bon ménage et elle ne pouvait s'empêcher de tout engloutir à toute vitesse.

Et parce que sa propre nourriture ne lui suffisait pas, Sophie venait voler dans celle de Jean. A sa réflexion, Sophie n'avait pas pu s'empêcher de trouver la parade idéale - à ses yeux. Ils étaient mariés, ils partageaient. Bien sûr, plutôt que de la contredire, Jean trouvait à son tour une réponse pour la prendre à son propre piège. S'il partageait avec elle, elle partageait avec lui. La main de Jean s'approchant dangereusement de ses friandises, alors Sophie lui avait frappé la main afin de l'en empêcher. « Je ne sais pas si toi tu le mérites ! » Rétorqua la jeune femme sérieuse, avant de se mettre à sourire, amusée. Elle prit alors, elle-même, un biscuit de son paquet pour le tendre à Jean. « Tu en as assez. Tu as bien moins d'appétit que moi. » Elle plaisantait évidemment, si Jean voulait partager équitablement, elle partagerait. Elle n'était égoïste que pour plaisanter - dans la plupart des cas, en tout cas. Et sa mauvaise foi la poussait à dire que les preuves étaient nombreuses, notamment parce qu'elle était prête à prendre de son temps pour lui apprendre à imiter les gens - elle n'était pas douée, mais l'idée l'amusait beaucoup. Prendre du temps pour quelqu'un, ce n'était pas être égoïste, n'est-ce pas ? « Oh oui ! » N'avait-elle pu retenir, en sautillant presque sur place. « Promets-moi qu'on se fera cette soirée, j'ai hâte de pouvoir me moquer de toi et de tes imitations. » Venait-elle dire avant de l'embrasser au coin des lèvres, comme pour se faire pardonner d'avance de se moquer de lui.  

Bien vite, Sophie n'en pouvait plus d'attendre. Quelques minutes lui paraissaient toujours des heures pour elle qui aimait avoir tout tout de suite. Jean était intransigeant. Cette photo, ils la feraient. Alors Sophie boudait parce qu'il ne cédait pas à son caprice - alors qu'elle la voulait cette photo, elle aussi, mais elle aurait aimé l'avoir sans avoir besoin d'attendre. Elle exprimait son mécontentement de toutes les façons possibles. Elle soupirait et montrait clairement qu'elle boudait. Elle refusait le moindre regard à Jean. Elle se comportait clairement comme une enfant. Jean, au bout de quelques secondes, n'avait pu s'empêcher de se pencher vers elle pour lui embrasser la joue et lui expliquer qu'elle avait déjà été bien patiente. La prenait-il pour une enfant ? Sa seule réaction fut alors de croiser les bras et de tourner la tête, comme pour lui montrer que ses baisers et ses mots encourageants ne changeaient rien du tout.

Après un temps infiniment long, c'était enfin à eux. Sophie, même si elle tentait de garder son air boudeur, s'était alors retournée vers Jean pour savoir s'il était heureux. Son sourire et sa main autour de la sienne répondaient à cette question pour lui et, à son tour, la jeune femme n'avait pas pu s'empêcher de sourire. Elle le laissa alors entourer sa taille de son bras et la rapprocher de lui. La photo prise, Jean avait relâché Sophie et ils avaient attendu - encore, puisqu'il était toujours question d'attendre - de pouvoir récupérer ce pour quoi elle avait déjà tant été patiente. Parfaitement silencieuse, Sophie laissait à Jean le temps de profiter de cette photo. Il semblait si content qu'elle ne pouvait que se féliciter de ne pas avoir insisté pour ne pas faire cette fameuse photo. Lorsqu'il l'avait remerciée, Sophie avait relevé les yeux vers lui, pour lui offrir, à son tour, un sourire. Toute colère et impatience avaient disparu désormais. Elle était tellement heureuse de le sentir l'enlacer, l'embrasser et de le voir heureux, qu'elle ne pouvait rester en colère plus longtemps. « Tu sais bien qu'en réalité, je la voulais aussi, cette photo. » Admettait-elle, confessant qu'elle n'avait joué la capricieuse que par habitude et par envie. Puis, à son tour, elle était venue déposer un baiser sur ses lèvres, profitant de le distraire pour lui prendre la photo des mains, avant de s'éloigner. « Maintenant, si tu veux la récupérer, rattrape-moi ! » Et parce que Sophie se moquait parfaitement du regard que les autres posaient sur elle, elle se mettait à courir, morte de rire, entre les allés du marché de Noël. « Dépêche-toi un peu, nous avons encore beaucoup de choses à faire ! » Et elle comptait bien faire le plus de choses possibles.

« De toi. Je ne doute jamais de moi. » Sophie souriait et essayait de paraître sûre d'elle. Néanmoins, il y avait un fond de vérité dans ce qu'elle disait. C'était toujours l'une de ses plus grandes craintes, qu'on ne la supporte plus et qu'on la rejette pour ce qu'elle était. Sophie n'avait pas un caractère facile, elle en avait parfaitement conscience. Elle faisait des efforts, mais le naturel reprenait souvent le dessus. Jean la supportait, mais la supporterait-il éternellement ? Ne finirait-il pas agacé par ses défauts au point de ne plus vouloir la voir ? L'abandon. C'était, sans le moindre doute, l'une de ses pires peurs et elle devait, malheureusement, faire avec chaque jour.

Heureusement pour elle, Sophie savait donner l'illusion que tout allait bien et elle savait s'en convaincre. Alors, elle oubliait cette crainte, qu'elle cachait dans un coin de son esprit, pour se concentrer sur le moment présent. Elle était avec Jean et ils passaient, tous les deux, un moment merveilleux. C'était à ça qu'elle devait se concentrer. C'était ça, l'essentiel. Alors, elle profitait des mots de Jean pour tirer avantage de la situation, pour continuer de s'amuser et de plaisanter avec lui. « C'est exactement ça. Tu cuisines, je mange. » Ils formaient un bon duo, non ? « Oh si, je peux te promettre que tu ne me reconnaîtras pas pendant deux heures. » C'était une promesse. Et, même si Sophie ne tenait pas toujours ses promesses, celle-là, elle comptait bien la tenir. « Prépare-toi à cuisiner ! » Il cuisinerait parce qu'elle allait gagner, c'était une évidence pour elle.  

La photo de leur premier Noël ensemble était prise. Jean avait ce précieux souvenir auquel il tenait tant. Sophie avait pris sur elle et s'était montrée patiente - même si, quoi qu'il arrive, elle lui aurait offert ce cadeau parce qu'elle y tenait autant que lui. Et ça, Jean le savait parfaitement, comme il le lui avait confirmé après l'aveu de la jeune femme. Mais maintenant qu'il avait eu ce qu'il voulait, Sophie comptait bien s'amuser et se venger d'avoir dû se montrer si patiente. La jeune femme l'avait donc distrait en l'embrassant. Pendant ce temps, discrètement, sa main avait attrapé la photo que Jean tenait. Puis, elle s'était éloignée à toute vitesse en lui demandant de l'attraper, s'il voulait la récupérer. Jean, après avoir ri à la bêtise de Sophie, l'avait mise en garde quant à l'état de la photo et la réaction qu'il aurait si elle avait le malheur de l'abîmer. A sa mise en garde, la jeune femme n'avait rien répondu, se contentant de courir plus vite et de rire.

Sophie avait jeté un léger coup d'oeil derrière elle pour vérifier que Jean était bien à sa poursuite. Presque aussitôt, elle avait senti quelque chose lui attraper la taille. Ce fameux quelque chose l'avait entraînée dans sa chute et elle s'était retrouvée étendue dans la neige. Sophie était morte de rire et elle était incapable de s'arrêter. « Non, tu cours beaucoup trop vite. Je savais que tu allais me rattraper. » Il n'avait peut-être pas tout compris, tant elle riait, encore et encore, mais elle pensait chaque mot - et Jean savait parfaitement comme Sophie n'aimait pas avouer ne pas être la meilleure dans un domaine. Jean courrait plus vite qu'elle, malgré tous les efforts qu'elle faisait pour le distancer. « Et je l'espérais bien. » Son but n'était pas de courir des heures à travers les allées du marché de Noël, sans qu'il ne la rattrape. « Je t'aime. » Souffla soudainement Sophie, sérieuse, en se rapprochant de lui pour l'embrasser. « Et la photo n'a rien. » Avait-elle fini par dire, un sourire ne la quittant plus aux lèvres, en lui mettant la photo devant les yeux, sans même l'avoir observée d'abord. « Tu ne voulais pas aller patiner ? » Sophie avait prévu un nombre incalculable de choses, mais elle voulait d'abord faire ce que lui avait envie de faire, bien décidée à lui faire plaisir. Puis, ils devaient bien se relever - d'autant qu'on les regardait étrangement - et se dépêcher un peu s'ils espéraient faire un maximum de choses.

Après une course à travers les allées du marché de Noël, Jean avait fini par la rattraper et la faire tomber, au passage, dans la neige. Sophie était morte de rire. Jean, aussi. Heureusement pour elle, elle n'avait pas abîmé cette fameuse photo. Enfin, elle le supposait puisque Jean l'avait rangée sans lui faire la moindre remarque. Elle aurait pu rester des heures comme ça. Allongée dans la neige, à rire et à le regarder rire. A plaisanter et à l'embrasser. A lui dire combien elle l'aimait. Ils n'étaient pas seuls, mais Sophie avait l'impression que plus rien n'existait en dehors d'eux. Elle était dans une bulle. Une bulle bien trop agréable pour vouloir en sortir.

Pourtant, il fallait être réaliste et se montrer raisonnable. Ils avaient beaucoup de choses prévues. Enfin, elle en avait énormément. Et elle avait envie de tout faire, évidemment. Mais la première chose à faire était d'aller patiner. Elle voulait faire plaisir à Jean et faire ce qu'il avait envie de faire. Alors, les sortant de cette petite bulle dans laquelle ils étaient, Sophie lui rappela son envie de patiner. Avant de lui répondre quoi que ce soit, Jean s'était remis debout, retirant la neige de son manteau. Puis, il avait tendu une main à Sophie pour l'aider à se relever. Elle l'avait attrapée et s'était redressée à son tour. Alors qu'elle se relevait à peine, Jean l'avait attiré à lui sans lui lâcher la main pour la faire danser et la faire tourner sur elle-même. Une fois encore, la jeune femme n'avait pu s'empêcher de rire. Elle aimait le voir comme ça. Elle aimait le voir s'amuser comme elle le faisait sans cesse. Il y avait bien longtemps que Sophie ne s'était pas autant amusée, n'avait pas autant ri et ne s'était pas autant sentie aimée.

Puis, enfin, il avait répondu à sa question après lui avoir dit qu'il l'aimait. Sa réponse l'amusait. Décidément, elle déteignait beaucoup trop sur lui. C'était Sophie qui accusait tout et tout le monde lorsqu'elle perdait quelque chose, normalement. C'était à son tour, désormais ? « Tu veux que je te laisse gagner ? » Soufflait-elle, avant de reprendre presque aussitôt. « Non, ne réponds pas, je ne le ferai pas. Je veux gagner. Et je vais gagner parce que je suis bien plus douée que toi. » Pour le mensonge, oui. Comme faire semblant de se blesser pour le dépasser alors qu'il viendrait s'inquiéter de sa blessure. Pour patiner, c'était autre chose. Sophie n'était pas la meilleure, loin de là. Elle savait patiner, mais son impatience et son manque de concentration la conduisaient souvent à tomber. « Ne t'en fais pas, lorsque tu auras perdu, je t'offrirai un chocolat chaud pour te consoler. Et un baiser. Ça suffira à me faire pardonner ma victoire, je pense. » S'amusait-elle en attrapant sa main. « Allons-y. » Parler, c'était une chose qui pouvait attendre, gagner, en revanche, non. Alors, il était grand temps qu'ils y aillent afin que Sophie puisse gagner et voir comme Jean l'accusait d'être responsable de sa défaite.

Sophie était persuadée de gagner cette course, qu'ils avaient prévu de faire en patinant. Non seulement, elle croyait un peu trop en ses talents inexistants, mais, en plus de tout, elle comptait bien tricher et ralentir Jean, si cela s'avérait nécessaire. Il ne résisterait pas à l'envie de lui venir en aide si elle prétendait s'être fait mal ou être tombée. Sophie en était persuadée. Il était bien trop attentif à son bien-être pour prendre le risque de ne pas venir si elle s'était réellement fait mal. Alors, elle jouait de ses certitudes. Elle n'hésitait pas à montrer qu'elle était certaine de pouvoir gagner, ce qui semblait faire rire Jean. A cette réaction, la jeune femme avait froncé les sourcils parce qu'il continuait de se moquer d'elle. Puis, il insistait en prétendant que si elle gagnait, elle aurait forcément triché en le retardant volontairement. « Tu trouves des excuses simplement parce que tu n'assumes pas d'être moins bon que moi. » Avait rétorqué Sophie, alors qu'elle savait qu'il avait parfaitement raison. Elle gagnerait peut-être, mais parce qu'elle le retarderait ou le ferait tomber, si c'était nécessaire - et sans la moindre hésitation. Son impatience et sa maladresse l'empêcheraient de gagner sans tricher, elle le savait.

Néanmoins, parce qu'elle n'était pas qu'un monstre, elle promettait à Jean de lui offrir une compensation lorsqu'elle aurait gagné. Pour le consoler de sa défaite, Sophie promettait donc de lui offrir un chocolat chaud et un baiser. Un prix déjà bien trop élevé selon Sophie, mais insuffisant d'après Jean. Puisque, de toute façon, il était si sûr de lui, pourquoi négocier un lot de consolation ? Puis, que voulait-il de plus ? « Tu n'auras rien de plus. C'est déjà bien suffisant. » Assura la jeune femme, refusant de lui céder davantage de choses, en cas de victoire. Elle était déjà en train de lui faire plaisir en allant patiner et il gagnait quelque chose en cas de défaite, c'était déjà bien plus que suffisant. Jean en voulait beaucoup trop, à croire qu'il prenait un peu trop exemple sur Sophie.

Mais pour tout ça, il fallait déjà qu'ils se décident à aller patiner, comme prévu. Alors, après avoir discuté de la victoire de l'un d'eux, Sophie avait attrapé la main de son mari pour le traîner sur la glace. A mesure où ils s'avançaient, Sophie regrettait d'avoir été si pressée. Encore une fois, malheureusement pour elle, l'attente semblait interminable pour l'impatiente qu'elle était. Sophie boudait déjà aux premiers mots prononcés par Jean - elle boudait déjà, rien qu'en voyant la file, en réalité - et, en apercevant l'amusement de ce dernier, elle n'avait fait que bouder davantage. « Je n'ai plus envie de patiner. » S'agaçait-elle, sérieuse. « Jean... »Avait-elle soufflé pour supplier comme lorsqu'elle cherchait à obtenir quelque chose. « On ne va pas passer toute notre soirée à attendre... » Elle pestait, ses petits yeux suppliants fixant Jean pour l'attendrir et le faire céder à son caprice. « J'espère que j'aurai quelque chose pour toutes les fois où j'ai dû faire preuve de patience ce soir ! » Elle s'agaçait comme si Jean était responsable de l'attente ou comme s'il pouvait y faire quelque chose. « J'essaie de te faire plaisir et de ne pas penser simplement à ce que, moi, j'ai envie de faire et voilà comment je suis récompensée. » Elle continuait ses plaintes, les bras croisés sous sa poitrine, agacée que les choses ne puissent jamais se passer comme elle le voulait : rapidement.

Les négociations entre Jean et Sophie étaient en route. Sûre de gagner la course, elle prévoyait le lot de consolation qu'aurait Jean. Elle proposait donc un chocolat chaud et un baiser, ce qui lui semblait être un marché honnête - pour elle, surtout. Jean essayait d'obtenir davantage, mais Sophie l'arrêtait en lui expliquant qu'il avait déjà bien assez et qu'il n'aurait rien d'autre. « Tu ne m'en veux jamais ! » Affirma alors Sophie, un sourire malicieux aux lèvres, alors qu'il lui assurait qu'elle avait de la chance parce qu'il n'était pas gourmand et qu'il ne lui en voulait pas. Bien qu'elle ne pouvait pas l'affirmer totalement puisqu'elle n'avait pas de souvenirs d'eux en tant que couple marié, Sophie pouvait déjà affirmer que jusqu'à présent, depuis leurs retrouvailles, il ne lui en avait jamais voulu. Et, si elle devait se montrer tout à fait franche, elle devait bien avouer qu'elle en profitait un peu - beaucoup - parfois.

Les négociations terminées, Jean et Sophie se dirigèrent vers la patinoire. Aussitôt arrivés, Sophie avait dû supporter les moqueries de son mari parce qu'elle allait devoir, encore une fois, attendre. Alors, sans perdre de temps, Sophie avait commencé à supplier Jean pour qu'ils n'attendent pas, elle pestait et s'agaçait, prétendant qu'elle ne devait faire qu'attendre encore et toujours alors qu'elle essayait de lui faire plaisir - c'était donc ça la récompense pour essayer de se montrer attentive aux besoins des autres ? « Avec la file qu'il y a, tu patineras pour la nouvelle année ! » Souffla Sophie d'agacement, en croisant les bras, exagérant plus que nécessaire les choses, comme bien souvent. « Et je ne vais pas perdre. » ajouta-t-elle, ne pouvant s'empêcher de sourire en lui lançant un regard plein de défi. « Si tu étais si bon joueur, tu me laisserais gagner. » poursuivit-elle, en souriant pour le convaincre de la laisser gagner si jamais il devait prendre l'avantage dans cette course.

Néanmoins, presque aussitôt, Sophie reprenait son air boudeur et répétait qu'elle espérait obtenir quelque chose en échange de sa patience, qu'elle jugeait suffisamment exceptionnelle pour la faire remarquer. Jean continuait de se moquer d'elle, comme il le faisait sans cesse. « Tu ne penses pas que je mérite quelque chose pour avoir fait preuve de tant de patience ? » Il était injuste, il savait bien comme Sophie détestait attendre et, pourtant, elle le faisait pour lui. « Je suis généreuse, sinon je n'attendrais pas. Et arrête de te plaindre de tes récompenses ou je retire le baiser. » Même si elle boudait - plus pour obtenir quelque chose que réellement, désormais - elle ne pouvait s'empêcher d'avoir ce petit sourire amusé aux coins des lèvres. « Plutôt qu'attendre bêtement dans une file qui n'avancera jamais suffisamment vite à mon goût, je préférerais encore être installée tranquillement quelque part avec toi pour profiter de ta présence. Autant ne rien faire parce qu'on l'a décidé que parce qu'on nous impose d'attendre. » Affirmait-elle pour ne pas lui laisser le dernier mot. Bien sûr que le plus important aux yeux de Sophie était de passer du temps avec Jean, néanmoins, elle préférait encore ne rien faire volontairement, confortablement installés quelque part, qu'attendre pour faire quelque chose, debout et dans le froid. C'était vraiment le simple fait d'attendre qui agaçait tant Sophie parce qu'elle n'avait jamais eu de patience - et pourtant, la file avançait, mais Sophie trouvait toujours de quoi soupirer en lançant des regards désespérés à Jean, dans l'espoir de le voir abandonner. « Je croyais que tu n'étais pas gourmand ? » Rétorqua-t-elle en croisant les bras alors que Jean réclamait autre chose en cas de défaite, en échange d'offrir quelque chose à Sophie pour sa patience légendaire. « Que veux-tu que j'ajoute ? » Cédait-elle. Au moins, discuter de tout ça faisait passer le temps un peu plus vite, alors autant le faire.

« Je n'exagère jamais, moi, monsieur. » Assurait Sophie, après la réflexion de Jean, tout en profitant de la caresse sur sa joue. Il lui expliquait les choses comme si elle n'était encore qu'une enfant - il fallait dire, pour la défense de Jean, qu'elle se comportait, à cet instant, comme une enfant impatiente - alors elle prenait son air boudeur. Et, pour se moquer de lui, elle ajouta, en reprenant ses mots : « Et moi, je pense que c'est toi qui n'a aucune notion des distances, mais je ne t'en veux pas, je t'aime quand même. » L'attente était insupportablement longue pour Sophie, qui n'avait jamais eu la moindre patience - et c'était un point qui ne s'était pas arrangé en grandissant, même si elle faisait des efforts lors de certaines occasions. « Ne sois pas aussi attentionné et prévenant, tu gagneras. » Soufflait-elle en s'amusant, sachant qu'il n'arrêterait pas de l'être à cause de quelques mots. Jean la connaissait si bien, il savait qu'elle jouerait de son caractère pour le faire s'arrêter ou pour le ralentir afin de gagner, mais c'était de sa faute à lui, s'il cédait à tout si facilement.

Sophie jugeait avoir fait preuve de tellement de patience qu'elle méritait un cadeau. Si elle acceptait d'attendre, c'était pour lui - et aussi pour elle, mais ça, elle ne l'avouerait pas. « Et qu'aurai-je ? » Demanda-t-elle, curieuse, lorsque Jean assura qu'elle aurait mérité une surprise une fois l'attente terminée - sans doute pour éviter de la voir fuir avant. Mais l'impatience de Sophie ne pouvait pas attendre. Elle voulait savoir, maintenant, ce qu'il comptait faire pour la récompenser d'une si longue et interminable attente - si peu, exagéré, vraiment. Puis, si Sophie se plaignait énormément, elle n'était pas la seule. Face aux menaces de la jeune femme, Jean se plaignait. Alors, elle le menaçait de lui retirer le baiser. Elle avait le droit de se plaindre - elle s'en faisait même un devoir - mais elle l'interdisait à Jean, parce que c'était bien plus amusant ainsi. « C'est exactement ça ! » Rétorqua-t-elle, un sourire moqueur aux lèvres, lorsque Jean lui parla de ne pas avoir le droit de se plaindre quand elle le faisait sans cesse. Sophie en avait le droit parce qu'elle avait toujours détesté attendre et qu'elle faisait un effort incroyable pour lui. Quitte à ne rien faire, autant le choisir et ne rien faire où on le voulait, d'après Sophie. Là, elle n'avait rien décidé et elle devait attendre dans le froid, debout. Sa réponse la fit sourire et elle n'avait pas pu s'empêcher de lever les yeux au ciel, pour plaisanter. « Nous avons un programme chargé, tu sais ? » Autrement dit, ils ne trouveraient pas le temps de se poser tranquillement quelque part pour boire ou manger quelque chose. « Mais nous aurons des jours entiers pour faire ça. Ne rien faire et profiter l'un de l'autre. » Souffla-t-elle avec tendresse, avant de reprendre, plus amusée : « On ne fait rien dans cette file, je ne fais rien d'autre que t'écouter te plaindre encore et encore. » Ou c'était le contraire, peut-être. « Je ne suis pas certaine qu'il soit correct de passer son temps à s'embrasser ici, au beau milieu d'une file interminable. » Se moquait-elle en référence à l'éducation qu'ils avaient reçue. « Puis, je n'ai pas envie de te récompenser. » Le taquina-t-elle.

Puis, comme il savait si bien le faire, Jean se montra d'une incroyable gentillesse, en lui rappelant, plus sérieusement, qu'il n'avait besoin de rien puisqu'il était avec elle - même s'il n'avait pas pu s'empêcher d'ajouter qu'elle déteignait sans doute un peu sur lui. « Il faut toujours que tu passes pour l'homme parfait. » S'amusait-elle en venant se blottir dans ses bras. « Puisque tu me fais attendre dans le froid et sous la neige, tu peux, au moins, me réchauffer. C'est mieux encore que de s'embrasser et c'est utile. » Argumentait-elle inutilement, juste parce qu'elle aimait parler encore et encore.

Parce que Jean aimait se moquer d'elle, il ne cessait de la contredire pour la pousser à faire la tête et à se plaindre. Selon elle, la file n'avançait pas suffisamment vite. Selon lui, évidemment, c'était tout le contraire. Alors, bien sûr, comme elle le lui disait si bien, c'était uniquement parce qu'il n'avait pas conscience des distances. « Tu ne sais donc rien faire d'autres que te moquer de moi ? » Puisqu'il s'amusait à répéter qu'il l'aimait quand même, comme elle venait de le faire, après avoir assuré qu'elle se cherchait des excuses. C'était évidemment l'hôpital qui se moquait de la charité puisque Sophie était la première à se moquer de lui et elle le faisait toujours avec un immense plaisir qu'elle ne dissimulait jamais. Mais elle avait le droit de s'en plaindre, pas lui.

Mais puisqu'elle devait être particulièrement patiente, elle espérait bien obtenir quelque chose en échange. Évidemment, Jean refusait de lui dire. A la place, il préférait la regarder bêtement, lui sourire et continuer de manger. Décidément, il n'y avait rien qu'il aimait plus que la taquiner encore et encore. Et comme, en plus de tout, elle refusait que lui se plaigne alors qu'elle ne faisait que cela, il venait de décider de lui retirer ce fameux cadeau. « Alors ça, non, c'est injuste ! » S'exclama Sophie, un peu trop fort, en fronçant les sourcils et en croisant les bras. « Je veux quelque chose ! » Ajouta-t-elle, déterminée à le faire céder.

Mais, malgré tout, elle ne pouvait pas lui faire la tête trop longtemps et, bien vite, elle lui faisait comprendre qu'ils ne se poseraient nulle part pour passer un moment tranquille puisque leur programme était déjà bien trop chargé pour entrer dans une soirée si courte. Ils feraient donc ça un autre jour. Mais, plutôt que de s'occuper de ce programme chargé que Sophie leur avait prévu, ils perdaient du temps inutilement dans cette file. Pour occuper le temps utilement, alors, il proposait donc qu'ils s'embrassent comme le faisaient d'autres couples. Elle plaisantait bien sûr et se moquait des bonnes manières qu'on leur avait apprises et la réponse de Jean la fit tout aussi rire. « J'ai très souvent raison, Jean. Simplement, tu refuses de l'admettre. » Rétorqua la rousse en lui jetant un regard de travers, pour s'amuser. Et, encore une fois, il ne pouvait s'empêcher de se plaindre parce qu'elle refusait de le récompenser, pensant qu'il ne le méritait pas. « Je ne me suis pas plainte une seule fois, alors ça ne doit pas être bien difficile à supporter. » Ça, c'était un joli mensonge. Sophie, en réalité, n'avait fait que se plaindre depuis le début de la soirée, puisque ça l'amusait beaucoup et parce qu'elle ne savait faire que ça. Et, il était vrai, donc, que ce pauvre Jean devait la supporter. Néanmoins, il en profitait bien assez pour se moquer. C'était ça, sa récompense et c'était largement suffisant.

Puis, oubliant un instant leur petit jeu, Sophie était venue se blottir contre lui. Elle appréciait tout particulièrement sentir les bras de Jean se refermer sur elle. Elle se sentait bien, là, dans ses bras. Bien comme elle avait rarement eu l'occasion de se sentir. Mais, plutôt que de lui dire la vérité, elle préférait prétendre qu'elle préférait ça à s'embrasser devant tout le monde et que c'était utile, puisqu'elle avait froid. « Tu obtiens toujours quelque chose. » Souffla-t-elle alors qu'il prétextait qu'ils seraient donc deux à se réchauffer. Mais elle ne luttait pas plus, préférant simplement profiter du contact de ses bras autour d'elle. D'un léger mouvement de la tête, Jean avait fini par lui indiquer un groupe de personnes qui était en train de chanter. Le visage toujours posé contre lui, elle avait tourné les yeux pour les regarder. C'était agréable, presque comme dans un rêve. Jean se prenait au jeu et chantait, comme d'autres passants. Sophie se contentait de rester dans les bras de son mari et d'écouter. Il n'y avait pas à dire, elle ne regrettait pas de passer cette soirée avec lui, ici. Après de si longues années sans se voir, elle pouvait enfin graver de nouveaux souvenirs avec lui et ça n'avait pas de valeur tant c'était une chose précieuse. « D'accord, ça vaut le coup d'attendre dans ces cas-là. » Admettait-elle, de bonne foi. « C'est plutôt agréable. » Ça l'était même beaucoup et c'était absolument magique. Sophie ne décollait plus des bras de Jean. Même lorsque la chorale s'était éloignée, elle restait là, sagement et silencieusement, à avancer, sans plus se plaindre. Puis leur tour arriva enfin et Sophie lâcha Jean un peu trop brutalement. « Prêt à perdre mon cher mari ? » Plaisanta-t-elle en enfilant ses patins et en lui tendant la main pour monter sur la glace. « Le premier qui arrive là-bas, d'accord ? » Et elle comptait bien gagner. Pour elle, il s'agissait réellement d'un concours et pas d'un simple jeu pour s'amuser. Et alors qu'il ne lui avait pas encore répondu, elle était déjà partie en quête de sa victoire, trichant très légèrement pour prendre de l'avance.