Will progresse tranquillement dans le parc désert à cette heure de la soirée, Poe, le chien qu'il a recueilli (le premier, mais qui ne sera certainement pas le dernier) sur les talons. Il sait à nouveau apprécier la solitude à sa juste valeur dorénavant, puisque cette sensation de vide, de manque, d'incomplétude, celle qui le poursuivait comme une ombre depuis sa sortie de l'hôpital et même bien avant - depuis qu'il a mis les pieds dans cette ville qu'il a maudite avant de la chérir - l'a finalement déserté. Il a trouvé la pièce manquante, celle qui donne sens au dessin, au dessein, celle qui le complète, lui, et il peut donc de nouveau apprécier la simplicité d'un parc déserté de ceux qui à certaines heures de la journée, même par ce froid mordant et hivernal, l'occupent comme s'il leur appartenait.
Il est tard, il faut dire. A cette heure de la soirée, le parc n'est pas loin de fermer, et beaucoup auront préféré rejoindre la chaleur et le confort des demeures qu'ils se sont appropriées, dans cette nouvelle vie qui n'appartient qu'à ceux qui savent finalement la saisir. Lui-même n'est pas pressé. Il n'est pas attendu, pas ce soir, du moins, alors il peut bien perdre tout le temps qu'il veut. Il n'a pas encore pris ses nouvelles fonctions au poste de police non plus, ce qui lui laisse un temps raisonnable pour tuer ce même temps, faute d'autre chose, faute de quelqu'un d'autre. Poe, en tout cas, a l'air d'apprécier, même si est d'avis à Will qu'il aurait certainement besoin de compagnie supplémentaire.
Les mains enfoncées dans les poches de son épais manteau d'hiver, il fait encore quelques pas, il ne tardera pas, sans doute, à rentrer chez lui malgré tout, dans le cloaque insipide dont il s'est contenté jusqu'ici faute de moyens ni d'avoir d'énergie à dépenser dans une installation pérenne, vie en sursis pendant plusieurs mois avant de le trouver. De se trouver.
Après quelques pas, il se fige néanmoins, entraperçoit du mouvement. Il a le sentiment qu'on l'observe. C'est peut-être vrai. Il découvre la silhouette d'une jeune femme, à quelques mètres. Il ne lui a pas prêté grande attention, mais il lui semble la reconnaître. Il l'a certainement croisée quelques fois. Une voisine, peut-être ? Il a déjà constaté combien cet endroit avait le don de placer sur votre route ceux que vous ne demandiez pas à croiser, et plus d'une fois tant qu'à faire, le tout pour s'obstiner à vous tenir à distance de qui vous cherchez réellement à trouver.
Will adresse à l'inconnue qui, lui semble-t-il, le regarde - mais dans la pénombre nocturne, c'est difficile d'en être certain - un signe de tête vaguement poli, décidé à tracer sa route quoi qu'il en soit.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
La manière qu'a cette jeune femme de le regarder, de le fixer, a quelque chose d'intrigant. Elle ne semble ni intéressée, ni curieuse. En fait, elle semble apeurée... Oh, elle a à vrai dire de bonnes raison d'avoir peur. Quiconque croiserait sa route à présent, la route d'un Will qui n'est plus en devenir, mais bel et bien devenu, devrait certainement s'inquiéter de ses éventuelles intentions à leur égard, même si, en l'occurrence, il n'en a absolument aucune. Peut-elle le percer à jour si facilement ? Peut-être s'inquiète-t-elle seulement de tout et de tout le monde. La paranoïa est un sentiment commun à beaucoup d'habitants de cet endroit - si ce n'est tous les habitants de cet endroit, et il y a de quoi, d'ailleurs... Quand on se retrouve propulsé du jour au lendemain dans un endroit qu'on ne connaît pas, entouré de personnes qu'on ne connaît pas davantage, au nom d'incompréhensibles motifs, il y a effectivement de quoi ne pas être tout à fait serein.
Malgré l'insistance de son regard, qui pique en partie sa curiosité, il choisit dans un premier temps de ne pas se soucier d'elle et de simplement rentrer chez lui, Poe sur ses talons. Il sera préférable pour cette jeune femme, en vérité, qu'il ne s'intéresse pas à elle de trop près, mais elle finit par briser le silence de la nuit, pas par un "bonsoir" poli ou une quelconque civilité attendue dans ces circonstances. Non, elle vient lui poser une question. Une question incompréhensible, mais prononcée avec quelque chose dans la voix qui ressemblait à de la conviction. Qui que soit cette Elizabeth qu'elle venait d'évoquer, deux choses semblent certaines : la première, c'est que cette jeune femme croit dur comme fer qu'ils sont de connivence. La seconde, c'est qu'elle a l'air parfaitement inquiète à sa seule évocation. Will s'arrête sur place, Poe poursuit sa marche sans se soucier de ce que les deux humains peuvent bien avoir à se dire.
"Vous demandez ça à toutes les personnes que vous rencontrez ?"
Quelque part, Will pourrait peut-être en partie comprendre ces sortes d'obsession que l'on nourrit, spécifiquement à cet endroit - même si, en ce qui le concerne, il n'avait pas vraiment attendu de se retrouver ici pour laisser l'obsession l'emporter. Il suppose que dans sa recherche désespéré d'Hannibal, il n'a pas dû sembler très rationnel, lui non plus. Peut-être que cette Elizabeth est l'Hannibal personnel de Mary ? Ou quelque chose d'approchant. Quelqu'un de son ancienne, de sa "vraie" vie, en tout cas.
"Je ne connais pas d'Elizabeth."
Pas encore, du moins. Mais le fait est que la question de son interlocutrice le pousse à présent à s'en poser lui-même. Et finalement, il voudrait bien savoir de qui il peut bien s'agir.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
Will comprend bien vite qu'il doit la singularité de cette conversation à deux notions bien distinctes et en l'occurrence hors de propos : le hasard et la paranoïa. Will n'a guère eu d'intérêt à rôder à dessein autour de cette jeune femme ou de son entourage. S'il a été aperçu à plus d'une reprise dans son sillage, c'est sans doute qu'ils ont des habitudes aux mêmes endroits, ni plus ni moins, mais il sera sans doute difficile de faire entendre raison à son interlocutrice sur la question, car elle ne paraît pas décidée à le croire sur parole, et elle-même semble convaincue que n'importe quel inconnu passant à quelques mètres d'elle peut avoir le dessein d'attenter à ses jours. Cela le rend curieux, certes, mais en revanche pas d'humeur à se justifier d'un comportement en l'occurrence innocent - ce qui de sa part n'était pas gagné d'avance.
Cette femme, quoi qu'il en soit, a l'air de se croire importante, de se penser légitimement menacée. Est-ce à tort ou à raison, la question se pose. Cet endroit a sans doute de quoi rendre paranoïaque même les individus les plus sains d'esprit. Et tout comme lui-même ne l'a jamais vraiment été, il doute fort que cette femme intrigante, et qui ne s'est toujours pas présentée à lui, soit complètement équilibrée non plus. Si elle l'a été, à l'évidence, ce n'est plus le cas à ce jour en tout cas.
Elle n'a pas tort d'affirmer que quand bien même il connaîtrait effectivement cette Elizabeth qui semble lui vouloir du tort, il nierait en bloc, logique élémentaire. Ceci dit, Will estime relativement... dégradant d'œuvrer à la solde de quiconque, ce n'est pas une démarche qu'il aurait adoptée quoi qu'il puisse en être, chose que là encore il n'exprime pas, convaincu que toute justification de sa part ne viendra que conforter plus encore la jeune femme dans ce qui manifestement tient de la lubie la plus totale.
Non, cette personne, qui qu'elle soit et pour peu qu'elle existe véritablement, ne lui a rien demandé de faire, mais il ne prendra pas la peine de le répéter ou de chercher à en convaincre son interlocutrice quand celle-ci ne semble pouvoir et savoir être convaincue que par ses propres observations, des convictions biaisées par les circonstances et, éventuellement, une expérience à l'évidence malheureuse. "Si cette personne vous pose problème ou si vous redoutez qu'elle envoie n'importe que inconnu s'en prendre à vous, il serait préférable d'en référer à la police, vous ne pensez pas ?" répond très posément Will qui si nécessaire ne se privera pas de lui faire remarquer que la police en question, eh bien, c'est lui.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
Tout le monde ici semble adopter le postulat que la police ne peut rien en aucune circonstance. A présent qu'il travaille de nouveau pour les forces de l'ordre, Will pourrait éventuellement s'en offusquer, il n'en est rien, il a toujours fait peu de cas de l'opinion générale concernant les investigateurs, policiers ou autres profilers de son acabit. Pour cela, il faudrait qu'il se sente véritablement faire partie de la "maison", et ce n'est pas le cas. Comme à l'époque à Quantico, ici aussi il se sent en marge, et ça lui convient très bien. Par ailleurs, en effet, un groupuscule d'humains, même bien intentionné, ne peut sans doute rien face aux circonstances, aux événements, aux aléas de cet endroit. Dans ces circonstances neuves et au regard de ses démons récemment apprivoisés, autant dire que Will, ça l'arrange plutôt, par ailleurs.
En tous les cas, même si la jeune femme semble toujours sur ses gardes, elle paraît du moins disposée à l'entendre et admettre un éventuel quiproquo. Will, quant à lui, demeure curieux de comprendre plus précisément à qui il a affaire, mais pas seulement, il est aussi plutôt curieux en ce qui concerne la fameuse Elizabeth, qui semble vouloir tant de mal à son interlocutrice. On ne s'attire pas des foudres si dangereuses sans aucune raison, il est bien placé pour le savoir. Qui sait si sous les airs ingénus et innocents de cette jeune femme déterminée à protéger sa vie ne se dissimule pas des intentions et des pensées bien moins louables ?
"J'habite juste à côté, oui", confirme tranquillement Will sans encore trop savoir quelle est dorénavant l'opinion de son interlocutrice à son sujet.
Si elle a baissé sa garde, elle le fait peut-être un peu trop hâtivement. Certes, Will n'a aucune mauvaise intention à l'encontre de son interlocutrice, en tout cas elle ne lui a donné aucune raison de s'intéresser à son cas de cette manière, mais sait-on jamais. Il ne sait pas à quel point son interlocuteur acceptera de lui révéler cette histoire commune avec cette femme qui veut la faire tuer (au vu de la manière dont a évolué sa relation avec l'homme que Will avait voulu faire tuer de son côté - et avait cherché à le tuer aussi, au passage -, tout était possible), mais, d'une certaine manière, au vu de cette conversation et de cette situation pour le moins incongrue, il estime avoir gagné le droit d'en apprendre davantage. "Que vous a-t-elle fait, cette femme ? Pourquoi vous en veut-elle à ce point ?"
Les questions sont posées sans certitude de réponse, mais il estime avoir largement gagné le droit de laisser parler sa curiosité en ce qui le concerne. Cette jeune femme a ce mérite, qui n'est pas forcément une chance, auquel tout le monde ne peut prétendre : Will lui trouve un certain intérêt. Ou du moins, il en trouve à son histoire dont il ne devine que l'esquisse.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
L'histoire de Mary rend Will curieux. Malheureusement, cette dernière semble bien décidée à se montrer aussi évasive que nécessaire au sujet du sort qu'elle a subi ou qu'on lui a fait subir, et qu'elle redoute qu'on lui fasse endurer encore. Il ne devrait pas s'intéresser à la vie de cette femme, ce n'est sans doute qu'une perte de temps, mais voilà, elle l'a mêlé presque malgré elle, malgré eux, à ses histoires, et dès lors, elle a aiguisé sa curiosité, une curiosité qui ne sait se contenter des remarques évasives qu'elle lui accorde pour résumer le sort terrible que lui aurait fait subir cette Elizabeth.
Sans pouvoir en être totalement certain, il est porté à croire que son interlocutrice ne lui ment pas et qu'elle est effectivement très honnête quand elle lui assure que cette femme lui a fait beaucoup de mal et serait capable de tout. Quand elle ajoute qu'elle n'a jamais vu personne d'autre capable d'à ce point de cruauté, il veut bien croire qu'elle n'en a jamais vu d'autres, mais il veut penser en revanche que ce n'est pas son cas à lui. De par sa profession, passée et présente, il a côtoyé, de très, très près, les esprits les plus dérangés que l'on puisse imaginer, qui ont toujours rivalisé d'horreur et d'imagination pour fomenter les crimes les plus horribles. La cruauté, il en a exploré de nombreuses formes et constaté l'absence de limites. "Je ne suis pas certain de pouvoir en dire autant.", répond-il au fait que Mary n'avait jamais vu personne plus cruelle que cette Elizabeth.
La cruauté, il y a pris goût. Ainsi que le disait très justement Chiho, la cruauté, la violence, sont les langages qu'il comprend le mieux, et il est bien possible que cette Elizabeth et Will parlent un langage plus proche l'un de l'autre que celui de Mary. Encore qu'il n'est pas entièrement convaincu du fait qu'elle soit blanche comme neige non plus. Si les situations s'étaient inversées, qu'aurait-elle été capable, elle, de faire afin d'obtenir cette chose que les deux femmes avaient convoité ? Etait-ce une affaire de cruauté intrinsèque ou de circonstances favorables qui avait placé l'une dans le rôle de l'innocente et l'autre dans le rôle de la "méchante". Il y a toujours plusieurs versions à une même histoire, et cela, Will, assez curieux de connaître le dessein de cette Elizabeth tout comme de savoir ce qui avait été celui de son interlocutrice. "Et qu'est-ce que vous convoitiez à ce point, toutes les deux ?" se permet-il de demander sans redouter d'être indiscret.
Si elle avait voulu se montrer plus précise, elle l'aurait fait, mais cela ne l'empêche pas de demander plus de précisions. C'est elle qui l'a mêlé à tout cela pour commencer, après tout.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
La jeune femme demeure toujours aussi évasive pour chaque réponse qu'elle daigne lui adresser. Will est-il en mesure de le lui reprocher ? Pas vraiment, non, on ne peut pas dire que lui-même soit le plus prolixe au moment de délivrer des informations à son propre sujet. Dans sa vie passée, déjà, il se gardait bien de trop en dire à son propre sujet, et percer sa carapace demandait un effort certain à quiconque voulait l'attendre, c'est une chose qui aurait eu peu de chances de changer dans cette nouvelle vie, d'autant plus que ses choix, entièrement assumés à présent, ne jouent pas en faveur de confidences trop prononcées.
On peut dire quoi qu'il en soit qu'ils ont fait quelques progrès. Après tout, même si elle est toujours sur la réserve (et elle a d'excellentes raisons de l'être), elle daigne au moins répondre à ses questions, et ce faisant, elle semble par la même lui accorder le bénéfice du doute, suffisamment pour délivrer ce qui n'est que des bribes d'informations, mais est toujours mieux que rien. Will a toujours eu un certain talent pour lire entre les lignes. Ce qui ne signifie pas pour autant qu'il comprend vraiment ce qu'elle a vécu, ou ce qu'elle prétend lui expliquer.
Une place, cela veut tout et rien dire, et peut être interpréter de centaines de manières. Pour ce qui est d'affirmer qu'il n'était question que d'une "simple place", il aurait tendance à remettre cette affirmation en question tout de même. Si cette place a valu que son interlocutrice et cette Elizabeth se livrent une guerre sans merci, qui se poursuit encore ici, dans ces circonstances toutes singulières, c'est définitivement qu'elle n'avait rien de simple, c'est même une absolue certitude. "Une guerre à ce point interminable qu'elle vous a poursuivie jusqu'ici", observe-t-il sans attendre de confirmation de sa part, puisqu'il en est tout à fait convaincu.
Et ça l'intrigue. Il est facile, et essentiel, même, pour lui de voir en ces lieux une terre d'opportunités. Ou c'est du moins une observation qu'il a pu faire au moment de retrouver Hannibal, mais il faut considérer les choses objectivement. Ce lieu ne vous apporte pas ce que vous désirez, il peut également vous rendre ce que vous redoutez. Cette femme qui doit se confronter à son ennemi même maintenant encore le fait songer à ses propres "ennemis". Mason Verger, Jack... Jack serait un ennemi, ici, dans cette dimension. Il ne veut pas l'envisager, mais c'est tout de même un fait, et auquel il est bien contrait de réfléchir plus précisément dans ces circonstances.
"Une place qui n'existe peut-être même plus dans ce monde. Je me trompe ?"
Elle va le trouver trop insistant, lui demander qu'il mette un terme à ses interrogations, mais Will laisse s'exprimer sa curiosité, tout simplement. Tant que son interlocutrice daigne encore lui répondre.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
La question de la jeune femme arrache à Will un des rares sourires qu'il daigne afficher en temps normal. Il comprend que sa curiosité puisse déranger mais n'a pour autant pas l'intention de s'en excuser. Il est certain qu'il ne voudrait pas forcément être à la place de cette inconnue qu'il accable de questions quand lui-même évite généralement autant qu'il le peut de répondre au question des autres. Will n'a jamais été quelqu'un de sociable, pourtant, loin de là, même, et limiter ses interactions sociales au strict minimum n'a jamais été pour le déranger, bien au contraire. Mais à circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Pour comprendre cet endroit, pour déterminer ce qu'il faut déduire de tout ceci, s'intéresser aux histoires des autres se révèle être un bon indicateur, ou un indicateur, tout du moins, reste à mettre en lumière ce dénominateur commun qui pour le moment lui échappe, qui peut-être lui échappera toujours, c'est à redouter. "Toutes les personnes que je croise dans la rue ne m'accusent pas d'être envoyé par je ne sais qui pour m'en prendre à elle", répond-il simplement avec un certain calme.
Si, en effet, il ne prenait pas le parti de s'intéresser à la vie des autres pour tenter de dégager un sens quelconque à une situation qui poursuit de lui glisser entre les doigts, les circonstances dans lesquelles la jeune femme l'a abordé auraient à l'évidence suffi à susciter un tel interrogatoire de sa part. Encore qu'il pourrait se montrer plus insistant encore. Puisque la jeune femme lui répond toujours très évasivement, il déduit le sens qu'il peut des bribes d'informations qu'elle veut bien lui révéler, ni plus ni moins.
Quand bien même elle reste - et c'est tout à son honneur - sur la défensive, cela ne l'empêche pas de répondre à ses questions. Jamais en y ajoutant les détails suffisant pour comprendre de quoi il retourne, mais assez pour que se dessine une vision certes pas claire, mais du moins esquissée de sa situation, situation qui semble ô combien complexe. Mais un seul des habitants de cette ville a-t-il connu une vie simple et sans ombre avant d'être entraîné ici ?
Will se permet d'en douter fortement. Et ce n'est en tout cas certainement pas l'impression que lui ont donné celles et ceux qui ont croisé sa route jusqu'ici et ont daigné lui confier tout ou partie de leur histoire. Avec plus ou moins de bonne volonté et de bonne foi, cela va sans dire. "Je n'en doute pas", répond Will quand, sans savoir exactement de quelle place elle lui parle, il entend Mary lui assurer qu'elle aurait voulu que les conséquences de ces conflits passée ne la poursuivent pas jusqu'ici.
Il le comprend sans mal. L'intention d'un nouveau départ, d'une page blanche, qui s'exempterait des manigances et des drames du passé, il la connaît, et quelque part, il a été exaucé. Mais parfois, il redoute que cette impression de renouveau ne soit qu'illusoire, et finisse entachée par des éléments externes, sur lesquelles il n'aurait pas de prise. Il a même le sentiment que ça a déjà commencé, d'ailleurs.
"Il ne tient sans doute qu'à vous de trouver un moyen d'y remédier."
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
Bien sûr, prétendre qu'il "suffit" de remédier aux situations qui nous incommodent, c'est là une chose simple à dire, mais en revanche bien plus complexe à réaliser. Mais complexe ne veut pas dire infaisable, et dans une situation qui, quoi qu'il en soit, se jouait de vos attentes, de vos certitudes et de vos acquis, l'on peut dire sans trop craindre de se tromper que l'on a sans doute pas grand-chose de plus à perdre dans le processus que ce que l'on aurait, de toutes les manières, déjà perdu.
Oui c'est à l'évidence plus facile à dire qu'à faire, mais cela ne veut pas dire impossible. Quoique Will ignore pour quelles raisons il s'évertuerait à en convaincre son interlocutrice dans tous les cas. Il était curieux de son histoire, en grande partie parce qu'elle lui avait valu de se faire agresser tout à fait gratuitement, cela dit, il devrait peut-être revoir cette curiosité à la baisse et se contenter de rentrer chez lui, à présent. Ceci dit, son interlocutrice n'en avait pas fini.
Non, il ne connaît pas toute son histoire, et étant donné les quelques histoires qu'il a recueillies depuis sa sortie de psychiatrie, il serait assez porté à croire que son interlocutrice n'exagère rien quand elle suggère que son histoire altèrerait son opinion. Certainement. Tout comme son histoire lui, peu importe ce qu'elle présumait déjà de lui lui vaudrait d'avoir une vision très différente de qui il était. Et elle finit par se confier plus longuement, et il ne s'attendait certainement pas à ce qu'elle lui apprend alors. Séparée de son enfant. Condamnée à la potence. Etrangement, cette histoire un écho dans la sienne. "Je ne peux pas prétendre comprendre exactement ce que vous avez vécu, mais je sais ce qu'on ressent quand on vous prend votre enfant."
Il n'a pas d'enfant lui-même pourtant, et non, ce n'est pas à Wilbur, l'enfant qu'il avait adopté, qu'il pense, mais bien à Abigail... Abigail qu'il a naturellement, instinctivement, considéré comme sa fille. Abigail qu'il avait cru avoir perdue pour toujours, puis n'avait retrouvé que pour qu'on la lui ôte de nouveau, qu'il la lui prenne de nouveau. Quant à la captivité, pour avoir été emprisonné au nom de crimes qu'il n'avait pas commis (à l'époque il n'en avait commis qu'un, et qui était à peine un crime au final), et même si cela n'avait sans doute pas duré aussi longtemps que ce que semble avoir vécu, il en a gardé un souvenir plus que marquant.
"Je sais aussi ce qu'on ressent quand on est enfermé contre son gré, et injustement." Même si son interlocutrice ne lui a pas précisé si elle a mérité son sort ou non. Quelque part, ça ne fait pas de grande différence aux yeux de Will. "Pour ce qui est de savoir ce qui se passe dans la tête d'un assassin, vous seriez surprise. C'est précisément ce à quoi j'étais payé dans mon autre vie."
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.
Il hoche la tête et se montre le plus sincère qu'il n'a jamais été depuis le début de cette conversation. S'il est une douleur à laquelle il est capable de s'identifier et de parfaitement comprendre, c'est celle d'un enfant. Pourtant, il n'a jamais été père au sens biologique de Margaux. Le bébé que lui et Margaux auraient pu avoir en était resté au stade d'idée, idée bien vite réduite à néant par Mason Verger. Il y avait eu Wally, bien sûr, mais ils n'avaient au final jamais été si proches, quand bien même Will l'avait adopté au moment d'épouser Molly, mais non, ce n'est pas à eux qu'il pensait.
C'est à Abigail, qu'il pense. Il s'était glissé dans la peau de son père avant même de la connaître elle. En lui sauvant la vie, il s'était senti une éternelle responsabilité envers elle, et il était parvenu à trahir cette responsabilité par deux fois. La première fois en la croyant morte, la seconde fois en prenant la mauvaise décision, celle qui l'avait condamnée pour de bon.
Will avait sans doute au final eu plus d'interactions avec Abigail dans son imaginaire dérangé, dans ce fameux palais de la mémoire où elle tenait une place des plus privilégiées, au cours de toutes ses errances, quand il refusait encore de croire en son absence, quand il s'inventait sa présence, chez lui où de l'autre côté de l'Atlantique... pour effacer sa culpabilité, peut-être. Il a pardonné à Hannibal ce qu'il a fait, en grande partie parce qu'il se sait aussi responsable de ce qui est arrivé à sa fille. A leur fille. Oui, il sait, au plus profond de lui, ce que cela fait de perdre un être qui vous est à ce point cher, et qu'elle n'ait pas été sa chair et son sang n'y change rien, n'y changera jamais rien. Il sent dans l'hésitation et la douceur de son interlocutrice qu'ils on, quelque part, trouvé un point sur lequel ils sont parfaitement s'entendre et se comprendre, le genre d'émotions avec lesquelles il est impossible de jouer ou de tricher.
Mais elle se tend immédiatement au moment de l'entendre parler de ce à quoi il employait sa vie passée. Il faut dire qu'il n'a pas vraiment utilisé les bons termes pour en parler, peut-être inconsciemment, d'ailleurs. Pourtant, quand elle lui demande s'il est d'un assassin, c'est avec un naturel qui le surprend lui-même qu'il lui ment sans l'ombre de la moindre hésitation. "Je ne suis pas un assassin." C'est un mensonge. Combien de fois avait-il prononcé cette phrase par le passé, pourtant, dans l'espoir de se convaincre qu'il pouvait lutter contre cette nature profonde, cette noirceur qui, à présent, le domine complètement. "Vous n'avez pas à vous inquiéter", ajoute-t-il. "J'étais profiler. C'était mon métier d'analyser la psychologie des criminels", ajoute-t-il sans oublier de spécifier son propos.
Il sait que son travail ne parle pas à tout le monde ici.
▿ Métier : Mary gère sa propre fortune. Elle investit dans certaines entreprises... Elle possède également sa propre entreprise : une salle de réception, où elle aime s'investir, car cela lui rappelle la vie à la cour.