Il était une fois...
Hannibal est né en Lithuanie, premier né d'un couple de la haute bourgeoisie lithuanienne : le conte Lecter et Simonetta Sforza-Lecter, italienne de naissance, qui lui inculquera un peu de sa culture, et son amour de la culture italienne (la peinture de la Renaissance florentine, surtout). De ses parents, Hannibal n'a que peu de souvenirs. Ces derniers sont décédés alors que lui-même n'avait pas une dizaine d'année. Il est alors devenu pour sa petite soeur, Mischa, une sorte de figure paternelle. Mischa a longtemps été le seul être humain qu'Hannibal Lecter ait jamais aimé, inconditionnellement. Ce qui est arrivé à Mischa, il n'est capable d'en parler à personne. La seule chose qu'il daignera en dire, à un nombre restreint d'individus qui auront ne serait-ce que connaissance de l'existence de cette soeur dont il ne parle jamais, c'est qu'il n'a pas tué sa soeur. En revanche, oui, il l'a mangée.
A l'âge de seize ans, il est adopté par son oncle Robertus, et sa tante, Lady Murasaki. Dans cette période, il se rapproche de Chiyoh, une toute jeune servante... Il lui confie son histoire, et c'est ensemble qu'ils décident de retrouver l'assassin de Mischa. L'intention d'Hannibal était claire : il tuerait cet homme. Mais Chiyoh l'en a dissuadé. Hannibal a choisi de laisser le sort de cet homme entre les mains de son amie, qui pendant des années, a gardé l'homme prisonnier du manoir des Lecter. Homme dont elle est autant devenue la prisonnière qu'elle n'en était la geôlière.
Hannibal, lui, est parti sans se retourner, avec l'intention de tirer un trait définitif sur son passé douloureux. Il s'est rendu à Florence, et c'est là, pour ainsi dire, qu'à commencer sa brillante carrière de tueur en série. Esthète et amateur de grandes mises en scènes, il disposaient ses victimes à la manière de tableaux de grands peintres de la Renaissance. Il écopa alors son premier nom de Serial Killers : "Il mostro di Firenze" : le monstre de Florence. Quand l'inspecteur de police Rinaldo Pazzi, remonte sa trace, Hannibal s'en sort indemne en faisant accuser un autre homme à sa place avant de quitter Florence.
Il s'installe alors en Amérique, à l'invitation de l'école de médecine John Hopkins, très intéressé par ses dessins anatomiques. Chirurgien de métier d'abord, il se tourne rapidement vers la psychiatrie. Quiconque se retrouve sur son divan se voit passé au crible... encourageant les pulsions criminels de ses patients les plus susceptibles d'y céder. En parallèle, il poursuit ses activités criminelles. Il assassine au hasard de ses envies et de ses caprices, et prélève toujours, en guise de trophée, un organe minutieusement choisi, qui sera ensuite soigneusement cuisiné par ses soins. Car oui, Hannibal Lecter est un grand cuisinier, qui n'hésite pas à partager ses talents culinaires au cours de grandes réceptions. Cannibale, il ne considère pas l'être. L'on est cannibale si l'on mange un autre soi, n'est-ce pas ? Et Hannibal ne considère personne comme son égal, encore moins ceux qui finissent dans son assiette, et qu'il ne considère pas autrement que comme des porcs.
C'était du moins le cas jusqu'à ce qu'il fasse la rencontre de Will Graham. Profiler jugé instable, souffrant d'une empathie exacerbée lui conférant la faculté unique de pénétrer l'esprit des tueurs, de penser comme eux, de devenir eux, Hannibal devait donner la confirmation à Jack Crawford, directeur du département des sciences comportementales du FBI, que Will était paré à revenir sur le terrain. Etait-ce vraiment le cas ? Peu importe. Hannibal a bien vite été bien moins intéressé par les considérations de Crawford que par le cas Will Graham. Très rapidement, cet homme ne pensant comme aucun autre l'a intrigué, pour ne pas dire fasciné. Il a vu en lui le seul, peut-être à pouvoir le comprendre, et cette soif d'être compris s'est révélé plus puissante qu'il ne l'imaginait, comme lui-même était peut-être le seul à réellement comprendre Will Graham. Pour lui, Will n'est pas, comme Jack l'envisage, un chien-flaireur à criminels. Il ne voit pas l'instabilité, il ne voit pas le "don d'imagination", il voit l'homme. Et le plein potentiel de cet homme... qu'il va doucement encourager à embrasser sa vraie nature. La nature d'un tueur.
Quand ils enquêtent ensemble sur le cas de Garret Jacob Hobbs, un tueur en série qui sélectionnait ses victimes selon leur degré de ressemblance avec sa fille, Abigail, Hannibal entrevoit une réelle opportunité. Alors qu'ils appréhendent le meurtrier, au moment où celui-ci s'apprête à trancher la gorge de la jeune Abigail, Will intervient et Hobbs abat Hobbs de dix balles... Son premier meurtre. Hannibal n'aura de cesse que de s'employer à convaincre Will d'une vérité qu'il n'admet pas encore après cela : le sentiment de puissance, de plaisir, qu'il a éprouvé, au moment de tuer Hobbs. Il lui "offre", de surcroit, une fille, en la personne d'Abigail, dont ils deviennent l'un et l'autre des figures paternelles.
Alors qu'Hannibal s'efforce de montrer à Will sa nature profonde, Hannibal, en parallèle, met un piège en place, destiné à se refermer sur Will. Il dissémine des indices destinés à le faire accuser des crimes qu'il a lui-même commis, en l'accablant notamment du meurtre d'Abigail, qui pourtant est toujours en vie, placée en sécurité en un lieu dont lui seul a le secret. Son stratagème fonctionne à merveille. Will, désormais convaincu de la culpabilité de Lecter, est enfermé derrière les barreaux à sa place. Et n'est-ce pas ce qu'il a voulu ? Plus que de faire porter à un autre le chapeau pour ses crimes ? Donner à Will l'occasion de voir qui il est vraiment... sans plus rien lui cacher.
Will derrière les barreaux, Hannibal éprouve un ennui terrible... Will lui
manque. Tandis que l'ancien profiler s'évertue à répéter à qui ne veut pas l'entendre qu'Hannibal est le tueur de Cheasapeake, Hannibal, de son côté, s'efforce de défaire ce qu'il a fait, et de sortir Will de prison... Lui qui pensait avoir le plein contrôle doit bien vite réalise que Will n'est en réalité pas en reste. Depuis sa cellule, il est presque arrivé à le faire tuer, en commanditant le meurtre auprès d'une tierce personne. Hannibal est prêt à lui pardonner un tel "écart" si ce dernier le rapproche d'autant plus de ce que Will est en mesure de devenir.
Finalement innocenté, Will reprend ses fonctions auprès du FBI, mais sa relation avec Hannibal évolue dès lors drastiquement. Will demande à reprendre sa thérapie auprès du psychiatre, non sans lui faire comprendre qu'il ne sera plus jamais dupe de ses mensonges... Leur relation prend alors une tournure beaucoup plus ambiguë. Leur "amitié", que nul ne comprend sinon eux, les rapproche plus que jamais (en dépit de ce que Will pourra en dire), et atteint son point d'orgue à la mort de Randall Tier, ancien patient qu'Hannibal avait envoyé tuer Will (c'est donnant-donnant), et que ce dernier a assassiné avec une violence qui ne saurait être justifié que par la monstruosité - la beauté - profonde du profiler. Ensemble, ils créent un tableau, au vu et au su du FBI... Hannibal caresse dès lors un projet de plus en plus précis. Ils ne peuvent se permettre de rester à Baltimore plus longtemps. Ils partiront. Will et lui. Et Abigail. Il ne parle pas de ce dernier point à Will, se contente de lui faire miroiter une fuite en avant, qui se décidera à la mort, inévitable, de Jack Crawford.
Will avait d'autres projets. Vient la mort de Freddie Lounds, cette journaliste spécialisée dans les scandales criminels, qui a toujours par trop eu tendance à mettre son nez dans des affaires qui ne la concernaient pas. D'une impolitesse impardonnable... Hannibal s'est fait avoir, il a vraiment cru que Will l'avait tuée, n'a compris qu'au dernier moment que ce meurtre avait été une mise en scène, élaborée par Jack et Will, afin de le faire tomber. Trahi, déçu, Hannibal donne une dernière chance à Will de faire amende honorable et de le suivre malgré tout. Son refus, cette ultime trahison, mène à une scène de massacre. Hannibal s'attaque à Jack et le blesse mortellement avant d'assassiner Abigail sous les yeux d'un Will agonisant, qu'il a blessé de sorte à, si possible, ne pas le tuer. Et il est parti.
Will Graham n'était pas un substitut adéquat à sa thérapie. Accompagné de Bedelia, sa propre psychiatre, Hannibal, dorénavant recherché par le FBI, fuit en Europe, en Italie sous une fausse identité, et il s'y établit comme conférencier. Quant à Bédélia, devenue sa "femme" pour l'occasion. Il attend seulement le moment où elle sera mûre et à point pour la manger. Cela viendrait tôt ou tard. Hannibal le sait, Will est sur ses traces. Dans une chapelle florentine, il lui fait le cadeau de son coeur brisé, sous la forme d'une scène de crime élaborée à sa seule attention, mais leurs retrouvailles n'adviendront que plus tard. Will lui confiera alors avoir voulu le comprendre, totalement, avant de poser les yeux sur lui à nouveau. Ils admettent en cet instant, avec sincérité, leur dépendance mutuelle. Ils ne font plus qu'un, ils le savent. Mais ce n'est pas pour autant qu'ils cesseront de vouloir provoquer cette séparation dont ils ne veulent pas tout à fait, et qui ne peut que se conclure dans la mort de l'un, de l'autre, ou des deux.
Le duo finit entre les mains de Mason Verger, un "vieil ami" qui a quelques comptes à régler avec eux (pour cause, il a fini défiguré par leur faute). S'il est décidé à se faire un festin d'eux, la situation se retourne en leur faveur. Hannibal parvient à s'échapper, et sauve la vie de Will. De retour chez ce dernier, Will se montre tout à fait clair. Tout s'arrête ici. Les paroles qu'il lui adresse ont la saveur amère d'une rupture. Hannibal ne l'accepte pas. Will saura toujours où le trouver, quand il le désirera. Quand il sera prêt. Quand le FBI arrive chez Will, Hannibal se livre à eux délibérément.
Hannibal n'aura plus de nouvelles de Will pendant trois ans. Jusqu'à ce qu'une enquête particulière le pousse à venir le voir... Sous le prétexte de se mettre dans un certain état d'esprit, peut-être. Ou simplement parce qu'il voulait le revoir. L'affaire du grand dragon rouge les rapproche à nouveau. Jusqu'à l'évasion d'Hannibal. Ensemble, ils affronteront ce meurtrier, au prix de leur chair et de leur sang. C'est dans une étreinte ensanglantée, alors que Will admettait enfin la beauté de ce vibrant échange, presque charnelle, qu'ils ont été plus que jamais honnête envers eux-mêmes, et leur vraie nature. Puis, Will les a précipités dans le vide.
A son réveil à l'hôpital, dans ce nouveau monde étrange, il a fallu quelques semaines à Hannibal pour se remettre sur pied, davantage à Will qui, il l'a très rapidement su, avait été admis en institution psychiatrique. Hannibal, peut-être rancunier, peut-être seulement curieux, a préféré laisser Will venir à lui plutôt que d'aller le retrouver, disséminant çà et là quelques indices susceptibles de l'aider à remonter sa traces.
Long a été le temps qui a précédé leurs retrouvailles, au cours duquel Hannibal s'est établi en ville en tant que psychiatre, dans l'attente patiente de retrouver le seul qui saurait donner du sens à cet endroit.
Les retrouvailles ont été à la hauteur de ses attentes. Leurs sentiments, jusqu'ici muselés, enfin exprimés, leur nouvelle vie a pu commencer, comme cela aurait dû être le cas il y a tant d'année de cela. Aujourd'hui, le couple étrange et sordide qu'ils forment est fiancé. Mais leurs vies ne promet pas pour autant d'être un long fleuve tranquille.