Son regard scrutateur recherche désespérément une ombre, un mouvement, un indice… n’importe quoi, dans l’obscurité ambiante, mais c’est peine perdue. Où que son regard se pose, il ne côtoie que l’obscurité, et les murs humides, rongés par la moisissure, de ce qui ressemble à un gigantesque hangar. La tête encore lourde, il lui faut un certain temps pour prendre la mesure de ce qui lui arrive. Il ressent une vive douleur à l’arrière de son crâne qui lui laisse supposer qu’il a été assommé… mais il pourrait tout aussi bien avoir été drogués. Les souvenirs sont flous… rien ne semble faire vraiment de sens. Tout ce qu’il est capable de constater, à présent légèrement plus réveillé c’est que ses chevilles et ses poignets sont entravés, ligotés à ce qui ressemble à une chaise que Will ne tarde pas à découvrir inconfortable. Il doit être assis là depuis un moment, il ressent la soif avec violence, comme si des dizaines d’aiguilles lui assaillaient la gorge. Pour le reste… Pour le reste, il ne comprend toujours pas.
Ça lui pendait au nez, c’est ce qu’avait plus ou moins sous-entendu récemment le commissaire Crawford, en charge de la police de Gotham, alors que son obsession pour le Joker et pour ses nombreux crimes avait fini par atteindre un seuil critique. Will avait refusé de l’entendre, il avait refusé d’admettre avec la même lassitude que la plupart de ses collègues que rien ne pouvait être fait et qu’il fallait accepter d’attendre le prochain coup d’éclat du clown maléfique plutôt que de s’évertuer à lui courir après… Compte tenu des circonstances, il n’avait probablement pas tort… Will avait empiété sur ses heures de travail, fouillé assidument des scènes de crime où il n’avait pourtant pas été invité, traqué ce monstre devenu familier et en même temps insaisissable à force de vouloir se rapprocher de – voire s’approprier – sa psyché dérangée. Il aura probablement interrogé la personne de trop, vu un détail qu’il n’aurait pas dû… Ou bien le Joker aura-t-il eu accès à ses recherches, ce qui est une autre possibilité, d’autant que Will a quelques doutes quant aux accointances que le Joker possèderait peut-être avec quelques individus haut placés au commissariat. En dehors de Jack, il a appris à ne pas faire confiance à grand-monde… Ce qui ne l’a pas empêché de commettre l’erreur de ne pas le prévenir de ses recherches… Si bien qu’à l’heure actuelle, personne ne sait où il se trouve. Ni depuis combien de temps (et là, il pense à ses pauvres chiens qui vont mourir de faim s’il ne rentre pas rapidement s’occuper d’eux).
Jouer le chevaliers solitaires, les grands défenseurs de l’ordre et de la Justice, voilà qui ne lui aura que moyennement servi. C’était prévisible. Une seule chose le rassure, et c’est qu’il est encore en vie. Le Joker aurait pu décider d’en finir avec lui, de le tuer sans demander son reste, sans rien chercher à obtenir de lui. S’il a décidé de le garder en vie, alors cela signifie qu’il compte pour quelque chose. Quoi exactement ? Va savoir. Peut-être veut-il seulement connaître les informations que ce dernier a accumulées le concernant avant d’en finir avec lui. Peut-être… Toujours est-il qu’il aura peut-être l’opportunité d’enfin le rencontrer en personne.
Cette pensée ne devrait probablement pas le réjouir, elle éveille pourtant en lui un sentiment pour le moins exaltant. Will a trop longtemps marché sur ses traces, il s’est trop longtemps habitué à penser comme lui, à voir à travers ses yeux… Et pourtant, à aucun moment son regard n’a croisé le sien. Il est temps d’y remédier. Plus il a passé de temps à l’étudier, et à observer le moindre de ses faits et gestes, plus il a éprouvé une sorte de compréhension profonde à son égard… plus il s’est senti… happé, fasciné. Dans des proportions difficiles à expliquer. Et qu’il ne pouvait certainement pas partager auprès de ceux qui, d’ores et déjà, le contemplaient comme une sorte de curiosité, de phénomène de foire.
Quand une lumière aveuglante, accompagnée d’un long grincement, ramène complètement Will à la réalité du moment, il doit cligner plusieurs fois des yeux pour s’habituer à l’extinction pure et simple des ténèbres. Il peut alors voir s’approcher une silhouette dont les contours se dessinent de plus en plus profondément, jusqu’à offrir à Will la vision d’un visage peinturé de blanc et de rouge, les lèvres dessinées artificiellement en un gigantesque sourire.
« Où est-ce que je suis ? »
Une question simple, une question bateau, en guise de préambule, c’est pourtant bien la dernière question qu’il voudrait lui poser. Bien d’autres lui viennent à l’esprit que pourtant il ne pose pas. Qu’il garde pour plus tard si plus tard il doit y avoir. Le Joker est seul, il n’est pas entouré de ses sbires. Aux yeux de Will, c’est une satisfaction, un soulagement… Mais ce soulagement sera probablement de courte durée.
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(abandonné) When you stare into the abyss... [Joker]
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