Murder family values

feat. Will, Hannibal & Peter

Les réactions modérées et presque trop silencieuses de Will et Hannibal après qu'elle ait affirmé que Peter retrouverait sa tante étaient éloquentes. Ils ne souhaitaient pas que Peter retrouve ce qu'il lui restait de famille. Et pourquoi ? Elle le devinait aisément. Elle ne comprenait pas comment cela s'était passé, elle ne comprenait pas d'où venait un tel désir, mais elle comprenait en revanche ceci : Will et Hannibal s'étaient attachés à Peter, au point d'espérer qu'il intègre définitivement cette ébauche de famille qui se dessinait lors de ce repas de Noël. N'était-ce que la conséquence de sa convalescence chez les deux hommes, ou était-ce un désir antérieur ? Quoiqu'il en soit, Abigail se figura qu'elle n'obtiendrait pas de réponses, pas ce soir-là.

Alors, plutôt que de chercher à en savoir davantage, elle se concentra sur le récit que faisait Peter de son stage, s'intéressa aux réactions des deux hommes à la table et esquissa un sourire quand son camarade de classe les interrogea sur leurs résolutions. Là encore, les réponses sobres de leurs hôtes étaient éloquentes pour quiconque connaissait au moins en partie leur nature et leurs secrets. L'évocation du chien, en revanche, la fit sourire plus franchement. Elle adorait les chiens de Will, et savait qu'il en prenait véritablement soin.

Et la concernant... Le seul projet qui ait occupé son esprit, souvent avec obsession, avait été de se défaire de l'emprise de son père. C'était chose faite désormais. Elle ne tenait cependant pas à ce que Peter le sache, parce qu'elle le savait curieux, et qu'en ces circonstances, ses questions pouvaient faire plus de mal que de bien. Et elle n'était pas prête à l'évoquer trop ouvertement.

- Rien d'original non plus de mon côté, mais je suppose qu'obtenir mon année devrait être ma priorité. Quant au reste... Je n'en sais trop rien en fait, je n'ai jamais réellement réfléchi à mon avenir.

Et elle n'était pas pressée d'avoir à le faire quoiqu'il en soit.

- Et toi Peter ?

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Will ne peut s’empêcher d’écouter Abigail avec une attention toute particulière quand cette dernière évoque ce que pourraient éventuellement ses projets. La mort de son père lui ouvre tout naturellement des perspectives dont elle n’avait pas disposé jusqu’alors. Et leur présence peut autant ouvrir certaines perspectives pour elles qu’en fermer d’autres, en bref, son avenir est des plus incertains, et il est plus que logique qu’elle n’ait pas de réponse arrêtée aux questions qui lui sont posées. Ses perspectives ne se limitent définitivement pas à ses études, mais bien sûr, il y a des choses qu’elle ne pourrait dire en présence de Peter. Il y a de nombreuses choses que partagent les membres de cette famille dysfonctionnelle qui ne peuvent être dites en présence de Peter, et cela perturbe forcément l’équilibre de cette situation. Logique, donc, qu’Abigail ne développe pas vraiment le sujet avant que de poser, en retour, la question à Peter.

Comme toujours, ce dernier ne manque pas de matière quand il est question de développer une conversation qui autrement se résumerait sans doute à l’échange de quelques mots seulement, pas plus. Il évoque ses études sans particulièrement développer le sujet, avant de suggérer vouloir monter sa propre équipe de super-héros. De sa part, cela n’a rien de surprenant, mais la nouvelle est loin, malgré tout, d’enchanter Will, qui sait bien à quel danger le jeune homme ne cesse de s’exposer à travers de telles initiatives. Un danger duquel il n’est pas en droit de le préserver réellement. Il ne fait aucun commentaire concernant Vought et le business des super-héros, c’est un domaine qui lui a toujours échappé… Il songe aux termes employés à son procès, au moment d’évoquer son don d’empathie, quand il avait été qualifié alors de super-vilain… il voudrait pouvoir se soustraire pour de bon de cette dialectique, mais ce serait ignorer que c’est de son propre chef – ou presque – qu’il a décidé de prendre une super-araignée sous son aile.

Les commentaires d’Hannibal ne l’interpellent pas particulièrement, c’est vers Abigail que son intention se tourne quand Peter suggère qu’elle pourrait combattre le crime avec eux – surtout pas. Le moindre commentaire qu’il pourrait faire à ce sujet serait forcément malvenu, raison pour laquelle il s’efforce de n’en faire aucun, mais c’est loin d’être chose facile. La question que pose ensuite Peter est de celles qu’il s’est déjà posée mais concernant laquelle il ne l’a jamais interrogée directement. Il a pu lui faire comprendre qu’il n’éprouvait pas forcément ce choix d’études, mais n’avait jamais chercher pour autant à la dissuader de suivre ce qu’elle devait estimer être sa voie. Malgré tout, il garde une certaine réserve à ce sujet, et qu’il serait bien en mal d’occulter totalement.

« Abigail sait que je ne suis pas un exemple à suivre », se contente-t-il alors de commenter.

Ce qui n’est rien de le dire.

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Abigail faillit s'étouffer avec son vin au moment où Peter suggéra qu'elle intègre son équipe de... super-héros. Qu'elle combatte le crime à leurs côtés ? L'idée était particulièrement risible, sur bien des points. Mais elle ne voulait pas être désagréable avec Peter et surtout, elle ne voulait pas subir un interrogatoire quant aux multiples raisons pour lesquelles il était inenvisageable qu'elle lutte contre le crime.

- Oh tu sais, mes études... C'était surtout par intérêt intellectuel. Je suis pas vraiment faite pour ça, je crois.

Elle lui adressa un sourire quelque peu forcé, mais qu'elle avait suffisamment pratiqué avec les jeunes filles ciblées par son père, par le passé, pour savoir qu'il était efficace.

- Quoique profiler, ce serait intéressant, ajouta-t-elle après un temps de pause.

Mais dangereux. Elle en avait conscience. Une part d'elle, ce qu'il lui restait de rébellion, envisageait ce destin pour le simple plaisir mesquin de donner quelque cheveux blancs supplémentaires à ces deux hommes. Mais ce fut une idée qu'elle abandonna presque aussitôt qu'elle fut formulée.

- Mais je crois pas que ce soit accepté que je travaille avec Will.

Ce serait trop suspect. Abigail tourna son regard vers celui qu'elle venait d'évoquer, au moment où il formula à quel point il n'était pas un exemple à suivre. Elle n'était pas certaine d'être d'accord avec lui à ce sujet. Ce n'était cependant pas un débat qu'ils pouvaient avoir devant Peter. Les omissions et les euphémismes avaient leur limite, d'autant que Peter ne manquait pas de jugeotte. Elle craignait, par ailleurs, que tôt ou tard, le sujet de son père soit évoqué. Et elle n'avait pas envie d'expliquer toute la complexité de son deuil.

Estimant qu'encourager Peter à parler était moins dangereux que de s'aventurer sur toutes les bonnes raisons qu'elle avait de ne pas trop s'impliquer auprès de la police, Abigail reporta son attention sur son camarade de classe.

- Je pensais pas qu'il y avait autant de super-héros que ça en ville. T'en as rencontré beaucoup ?

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Mieux vaut ne rien dire quand Peter prétend que lui et Hannibal seraient de véritables modèles à suivre. D’un point de vue extérieur, peut-être, mais si le jeune homme connaissait le dixième de ce que le couple lui cache, il réviserait à coup sûr son jugement, et très rapidement. Will n’est certainement pas dupe de cela. Faire ce constat lui rappelle que la place de Peter n’est définitivement pas ici, et pourtant, il ne fait toujours rien pour l’empêcher. Will n’en montre évidemment rien, mais quand Abigail affirme que les études sont pour elle motivées par une pure curiosité intellectuelle – totalement compréhensible – et rien d’autre, il se sent naturellement rassuré de ce constat. S’il est évident que la jeune femme, plus que jamais, s’engage à marcher sur ses pas, il a envie de croire pouvoir la préserver de ces dangereux écueils qui ne sauraient aboutir qu’à des situations dont il aimerait savoir la préserver, faute d’être en mesure de la protéger de cette noirceur qui prend doucement possession d’elle. Quand elle ajoute que devenir profiler pourrait être une chose intéressante, il devine qu’elle prononce ces mots surtout dans l’intention d’une réaction consciente ou inconsciente.

Will préfère s’abstenir de tout commentaire. Inutile de discuter de ce qu’ils savent tous les deux déjà, encore plus en présence de Peter, qui serait bien en mal de comprendre d’où lui vient une telle réserve. Quant au fait qu’ils finissent par travailler ensemble un jour, c’est bien évidemment exclu. Il ne saurait en être question, surtout pas. Alors il préfère ne faire aucun commentaire et laisser Abigail interroger Peter… la conversation en elle-même et sa nature l’intéressent moins que le miracle que représente le fait de se retrouver tous les quatre autour de cette table, et il s’en contente, sans forcément prendre une part très active à la conversation, comme à son habitude tout sauf bavard.

Peter remarque qu’au final, peu de superhéros ont daigné sortir de l’ombre… Certains doivent manifestement donner l’exemple. De son côté, Will écoute d’une oreille distraite, sans intervenir. Il n’a pas une opinion tranchée sur ces justiciers masqués qui seraient indispensables à la bonne marche de la justice. Dans ce monde, la situation est trop complexe pour avoir une vision arrêtée de la situation. A la mention de dieux, Will n’est pas étonné de voir Hannibal réagir, il offre les réponses que Will aurait pu probablement donner lui-même, et plutôt que de rebondir sur ce propos, il veut donner à Abigail l’espace de répondre à la question posée par Peter, et qui l’intéresse étrangement.

On pourrait la considérer comme classique, admettre qu’elle n’a pas grand-chose de remarquable, mais ce n’est pas ainsi qu’il l’observe. La réponse à une question classique peut parfois s’avérer révélatrice. Concernant le pouvoir qu’Abigail voudrait faire sien, Will a peut-être quelques idées, mais il les garde pour lui, semblant, sur ce temps de la conversation, s’intéresser davantage au contenu de son assiette qu’aux propos tenus, ce qui n’est pourtant pas le cas. Will agit simplement en qualité d’observateur, dans l’attente de ce qui suivra.

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Des dieux, des superhéros... Peter semble avoir connu un monde similaire au leur, et pourtant bien différent quant à la présence d'êtres exceptionnels. Elle est certaine, à cet instant de la conversation, qu'Hannibal est intrigué par l'existence de ces dieux mentionnés presque anecdotiquement par Peter. Elle-même est surprise, et curieuse. Des êtres dotés de tels pouvoirs doivent causer bien plus de ravages que tous ceux qui sont rassemblés à cette table, cannibalisme ou non. Qu'en est-il de la justice dans le monde de Peter ? Les simples humains subissent-ils des peines aussi lourdes, la justice humaine s'occupe-t-elle du cas de ces superhéros, supervilains et autres dieux, ou en subissent-ils les actions ? Si elle parvient un jour à se sentir plus à l'aise en présence de Peter, elle l'interrogera sans doute sur tout cela. Mais en attendant, c'est lui qui l'interroge, et une fois de plus, sa question la prend au dépourvu. Elle, avec des pouvoirs... ? Ce n'est qu'un exercice d'imagination, bien sûr. Mais même en imagination, les possibilités sont telles qu'elle est perdue. Elle n'est pas certaine de savoir penser à toutes les réponses qu'elle pourrait avoir, à tous les pouvoirs accessibles dans d'autres mondes que le sien. Plus tard, lorsqu'elle sera de nouveau seule, elle y réfléchira davantage et trouvera des dizaines d'autres réponses, des dizaines d'explications, mais pour le moment... Abigail se contente de la première pensée qui lui vient :

- Je n'y ai jamais réfléchi mais... l'invisibilité, je pense, répond-elle posément.


Elle aurait été fort pratique, à divers moments de son existence. Lorsque les accusations pleuvaient sur elle suite aux crimes de son père. Lorsque les deux hommes qui se trouvaient à cette table s'étaient intéressés à elle d'un peu trop près. Lorsque l'un d'eux l'avait attirée près de lui pour lui trancher la gorge. Oui, les choses se seraient passées différemment... Mais elle ne saurait dire si cela aurait été pour le meilleur, ou pour le pire.

Songeuse, elle reporte son attention sur Peter :

- Tu en as déjà, toi, mais si tu pouvais changer, qu'est-ce que tu choisirais ? Et... Vous deux ? fait-elle en tournant cette fois-ci son regard vers Will et Hannibal.

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Une fine esquisse de sourire s’affiche sur les lèvres de Will quand Abigail choisit assez spontanément l’invisibilité en réponse à la question de Peter sur le pouvoir qu’il souhaiterait posséder. L’invisibilité, dans le cas qui la concerne, aurait été plus d’une fois pratique, le serait probablement encore dans l’avenir. Cette question innocente peut être au fond révélatrice, Will y songe quand il réfléchit à la réponse qu’il serait capable d’apporter à cette même question, le tout pour constater qu’il aurait probablement fait le même choix qu’Abigail, en fin de compte. Quand bien même il préfère assister en cet instant à la conversation plutôt que d’y participer activement.

Peter ne le surprend pas vraiment davantage quand il évoque avec eux son désir de se démultiplier. Ce pouvoir très pratique pour un hyperactif et hyperattentionné tel que lui serait de ceux qu’il déplairaient fortement à Will pour sa part – sans surprise. S’il éprouve un attachement sincère envers Peter, il lui est impossible de se reconnaître en lui, probablement parce qu’il possède absolument toutes les qualités que le profiler, pour sa part, ne possèdera probablement jamais. Contrairement à Abigail, qui se rapproche bien davantage de lui en matière de caractère… sans que Will n’ait jamais estimé que ce soit entièrement une bonne chose. Il ne fait pas nécessairement bon lui ressembler… Mais il est diablement agréable de trouver des personnes qui nous ressemblent.

Hannibal exprime à voix haute ce que Will avait pensé tout en s’épargnant d’en faire le constat verbal. En effet, ces dons leur vont comme un gant. Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il serait bon pour eux d’en disposer véritablement… Peut-être serait-ce même tout l’inverse, d’ailleurs.

Au moment de répondre à son tour aux questions de Peter et Abigail, Will réalise que la réponse qu’Hannibal serait susceptible de donner l’intriguerait tout autant qu’à eux. Il s’engage dans une dérobade pour commencer, mais il est vrai que souvent, Will a songé qu’il y avait peu de talents qu’Hannibal ne possède pas : intelligent, cultivé, artiste talentueux… et ces critères pouvaient être observés assez aisément sans que l’on ne remette en cause son objectivité vis-à-vis de l’homme qui partage sa vie. Finalement, Hannibal penche pour la connaissance et la mémoire universelle. Là encore, ça n’aurait rien de surprenant.

« Comme si tu n’en savais pas déjà bien assez pour ton propre bien », commente Will à l’adresse d’Hannibal avant de réfléchir à son « super-pouvoir » éventuel. Son empathie exacerbée était considérée par certains comme en étant un… ce n’était peut-être pas si éloigné de la réalité… Mais Will ne l’entend pas ainsi… Tout comme il s’en serait bien souvent passé, même s’il a appris, au fil du temps, à apprivoiser cette singularité, en même temps que sa monstruosité. « J’aurais probablement penché pour l’invisibilité également », ajoute-t-il sans trop se mouiller tout de même, il faut le dire.

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Abigail écoute les récits de Peter, et les imagine effectivement très aisément adaptés en bande-dessinés, voire en films… C'est fascinant, à vrai dire, que d'imaginer tout cela. C'est même très difficile à croire. Elle ne songe pas un seul instant à douter de ce qu'il leur raconte, car elle sait qu'il n'est pas malhonnête, mais… Elle peine à imaginer toutes ces situations. Là où, au contraire, elle n'a aucun mal à imaginer d'autres types d'événements improbables… faits de meurtres et de violence particulièrement sanglante, principalement. À chacun ses expériences de jeunesse, n'est-ce pas ? D'un côté, les super-héros, les dieux nordiques, les super-pouvoirs… De l'autre, les parties de chasse sur des gibiers un peu plus gros et un peu plus causants.

Quant au pouvoir choisi par Peter, elle n'en est pas surprise, et ne rit pas, mais sourit d'un air entendu. Effectivement, c'est un pouvoir qui lui irait merveilleusement bien… Même si elle est certaine que cela ne suffirait pas à dépenser son énergie affolante, ni à lui permettre de se dégager du temps libre. La jeune femme reporte son attention sur Hannibal au moment où celui-ci commente leur réponse, puis estime que ce seraient aussi des dons dangereux. Elle admet bien volontiers cette hypothèse, mais s'intéresse davantage à leurs réponses à eux, qui se font bien discrets depuis quelques minutes. La réponse d'Hannibal ne la surprend pas non plus, mais l'amuse ouvertement, cette fois-ci.

- Vous ne vous ennuieriez pas, si vous n'aviez plus rien à apprendre ?

Et, en effet, Hannibal en sait déjà beaucoup. Beaucoup trop, selon certains. Abigail s'intéresse à son verre, inversant les rôles pour prendre à son tour la posture de l'observatrice muette concernant la discussion entre Will et Hannibal, pour jeter finalement un regard en coin à Will suite à sa réponse. Le fait qu'elle soit similaire à  la sienne ne l'étonne pas le moins du monde, mais c'est avec une certaine émotion qu'elle accueille cette ressemblance, toujours plus flagrante. Une ressemblance qu'elle avait eu tendance à fuir par le passé, mais qu'elle trouvait de plus en plus rassurante à présent.

- Ça t'irait bien, à toi aussi.

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Abigail marque un vrai point au moment de suggérer à Hannibal que s’il devait disposer de tous les savoirs possibles, il s’ennuierait forcément. C’est une possibilité plus que réelle, quand on le connaît et quand on sait sa curiosité. Même si, comme il ne manque pas de l’affirmer, il devait employer son temps à mettre à profit toutes les connaissances accumulées, il aurait vaincu un ennemi – l’ignorance – pour faire face, qui sait, à un ennemi plus redoutable encore : l’ennui et la lassitude… Seul lui peut en juger, mais au moins admet-il que la question est en réalité plus complexe qu’il n’y paraît en premier lieu… Et mérite une attention que n’exige peut-être pas une question de départ à la fois légère et hypothétique, mais il n’y a pas de mal à se demander « et si ? », n’est-ce pas ?

Même si la réponse demeure incertaine, y compris dans le cas de Will, quand bien même la réflexion d’Abigail quant au fait que le don qu’elle s’était choisi pour elle-même lui irait également très bien est loin de le laisser indifférent, preuve en est du fin sourire qui vient rapidement flotter sur ses lèvres. Ce n’est probablement pas grand-chose, mais les similitudes entre Abigail et lui, qui révèle la profondeur d’un lien paternel qui n’est pourtant pas naturel et pourrait donc apparaître comme factices, le réconfortent toujours dans l’évidence qu’elle représente à ses yeux.

A ce sujet, d’ailleurs, le grand absent de cette soirée se fait naturellement sentir. Will s’exempte avec plaisir de sa présence, et aucune de ses pensées ne s’est tournée vers Garret Jacob Hobbs depuis le début de cette soirée, mais d’un point de vue extérieur, l’absence du père d’Abigail ne pouvait qu’interroger. Tous s’étaient gardés d’aborder le sujet, comme si Abigail et Peter avaient toujours eu leur place autour de cette table, sans que rien ne soit susceptible de naturellement contrarier cet ordre artificiel des choses.

Peter, avec une innocence totale et cette gentillesse qui le caractérise (et qui fait de lui un véritable intrus autour de cette table – fuis tant que tu le peux, Peter, fuis !) décide donc de poser la question certes frontalement, mais tout de même avec un certain tact. A l’évidence, sans peut-être présumer du pire, il présume du moins de quelque chose…

Will se fige légèrement en entendant la question de Peter au sujet de la question ô combien légitime de Peter. Il ne répond rien. Son regard passe discrètement d’Abigail à Hannibal, d’Hannibal à Abigail. Les paroles d’Hannibal retranscrivent assez bien ce que Will lui-même aurait probablement articulé s’il ne s’était pas laissé prendre de court par une question à laquelle, pourtant, ils pouvaient plus que largement s’attendre.

Qu’elle invente une excuse ou décide de dire la vérité (bon, peut-être toute la vérité), il lui appartient de décider de ce qu’elle veut dispenser ou non d’informations. Même si, au vu du changement soudain de ton autour de la table, on pourrait difficilement supposer que le père d’Abigail ait juste donné la permission de minuit à sa fille pour réveillonner au sein d’un autre foyer que le sien.