Klaus s'était à l'évidence réjoui bien trop vite en supposant qu'une petite pilule du bonheur dans le café tant adoré de son frère aurait le don de le rendre ne serait-ce qu'un peu plus détendu et fun... il en avait eu la vague illusion un très court instant, mais il faut bien qu'il se rende à l'évidence à présent : son frangin, peu importe les merdes qui se trouveront dans son organisme, on ne le changera pas. Quelque part, c'est pas si mal, parce qu'il l'aime comme il est, son Fivey, mais là, tout de suite, il aurait bien aimé qu'il soit un peu moins Fivey et un peu plus... un peu plus quoi, il en sait rien, juste qu'il ne ramène pas une nième fois la situation à sa gueule comme si la tristesse légitime qu'il éprouve à l'évocation de l'amour de sa vie ne méritait pas qu'il s'y attarde.

Des morts, il y en a tous les jours, sans déconner ? Si y en a bien un pour être au courant de ça, c'est bien le médium de service, même si là, actuellement, ses pouvoirs sont partis en vacances (ce qui est sans doute pas plus mal en fin de compte). Mais donc, non, apparemment, Klaus n'a pas le droit d'être malheureux, cet incroyable privilège n'appartient bien sûr qu'à mossieur Five Hargreeves qui a tout vu, tout chié, et qui lui a visiblement le droit de râler (râler ou chouiner, la frontière est mince) constamment parce qu'il porterait toute la misère du monde sur ses épaules.

En vrai, dans d'autres circonstances, si Five n'avait pas balayé d'un revers de la main le sujet "Dave" comme si ce n'était rien au moment où Klaus aurait définitivement eu besoin d'un mot gentil de la part de son frangin, il aurait sincèrement de la compassion pour Five. Parce que oui, dans le fond, bien sûr qu'il sait que rien ne se compare à l'horreur que Five a vécue, et que son chagrin d'amour à lui doit être bien dérisoire. Mais du coup quoi ? C'est supposé être un concours ? Il faut lui décerner la palme du plus malchanceux, c'est quoi l'idée. Le premier réflexe de Klaus - aussi ridicule que sa démarche chancelante, et d'envoyer une poignée de sable dans le visage de son frère.

"C'est toi qui fais chier, Five. C'est bon, à la longue, on a compris que t'étais le grand sauveur de l'humanité, qu'on serait rien sans toi et que tu nous considères tous comme des merdes, t'es pas obligé de nous bassiner avec ça tous les quatre matins. On a compris. Et si on te fait à ce point chier, alors arrête de te soucier de nous et fais ta vie, vas-y, ça nous fera des vacances."

A son tour, il bouscule son frère, avec sans doute ce qui pourrait s'assimiler à la force et la vigueur de l'asticot moyen, mais l'intention est là.

"Je fais ma dramaqueen si je veux. Dave était l'homme de ma vie, OK ? Toi la seule personne avec qui t'es capable d'avoir une connexion profonde, c'est un putain de mannequin en plastique, alors pose-toi peut-être les bonnes questions, au bout d'un moment."

Quand Five se relève pour se précipiter vers lui et le faire basculer au sol, Klaus ne peut pas prétendre l'avoir ne serait-ce qu'un peu cherché. D'accord, d'accord, si Five n'avait pas mâché ses mots plus tôt et avait clairement appuyé où ça faisait mal sans même s'en rendre compte, Klaus ne pouvait pas prétendre avoir, de son côté, fait preuve d'un tact proverbial non plus. C'était donnant-donnant, en somme, et par conséquent, il n'y avait pas franchement de quoi s'étonner au moment de voir le duo de frangins complètement déchirés à l'alcool et défoncés à l'ecsta en venir aux mains, avec sans doute autant de ridicule que ne le permettait forcément une situation comme celle-ci, où ni l'un ni l'autre ne se trouvaient clairement dans les meilleures dispositions, certainement pas en mesure en tout cas de livrer leur combat leur plus épique ou dantesque (même si dans le cas de Klaus, qu'il soit sobre ou non n'aurait que peu de chances d'y changer quoi que ce soit dans tous les cas).

Alors que Five le surplombe de toute sa hauteur relative d'adolescent, Klaus croit bien qu'il va se manger son poing en pleine figure, et il ne cherche même pas à s'en défendre ou alors bien mollement, en agitant assez vainement les bras, sans destination particulière. Mai au final, son frère fait le choix de le secouer comme un prunier en lui balançant toute sa rage et toute sa frustration à la figure. Il l'a sûrement pas volé, mais bon, il a pas envie de l'entendre, pas dans ces circonstances. Quand on piétine ses sentiments, il a pas forcément envie de s'attarder sur ceux de celui qui vient de les piétiner, et ça peu importe leur légitimité.

Le pire, c'est qu'il remet pas en question le fait que Five soit celui qui a le plus souffert, il arrive même pas à s'imaginer ce que ça a dû être pour lui tellement la chose est inconcevable, l'extrême solitude qu'il a dû ressentir, la douleur qu'il a éprouvée, tout ça, il a beau être à côté de la plaque de manière quasi-constante, c'est une chose qu'il comprend véritablement, mais c'est pas parce qu'il le comprend qu'il estime qu'ils devraient tous se la mettre en veilleuse et ne pas avoir le droit de porter leur propre chagrin.

La seule chose qui retient Klaus de l'envoyer bouler une fois de plus ou de lui enfoncer à son tour la tête dans le sable (pour peu qu'il en soit capable, ce dont on peut légitimement douter), c'est le fait de voir les larmes sur ses joues, et ça ça le déstabilise complètement. Parce que voir son frère râler et insulter son monde, c'est une constante. Le voir pleurer, par contre, c'est clairement pas une chose à laquelle Five l'a habitué, et ça le déstabilise quand même sacrément. Merde, ils étaient supposés disserter sur des conneries en se déchirant la tronche, pas se foutre sur la gueule en chialant... Quel foirage total.

"T'as raison, c'est vraiment de la merde. Si j'avais su que je te reverrai aujourd'hui, promis, je nous aurais pris de la qualité, de la vrai." Klaus se redresse légèrement sur ses avant-bras et pousse un soupir. "Bon, écoute, je suis désolé, ça te va ? J'ai pas envie de te voir comme ça."

Pour le coup, c'est vrai, il avait clairement pas eu envie qu'ils en arrivent là, à se battre dans le sable comme deux abrutis en se renvoyant leurs propres malheurs en pleine tronche.

"Allez viens, on s'arrache d'ici, et je te promets que je te laisserai râler autant que tu voudras."

Gênante, cette situation ne commence pas seulement à l’être. Très clairement, depuis tout à l’heure, n’importe qui d’extérieur à la scène leur ferait aimablement (ou pas forcément aimablement d’ailleurs) remarquer que leur discussion partait dans tous les sens et qu’ils se révélaient être aussi imbuvables l’un que l’autre, quand ils s’y mettaient. Ils auraient été complètement sobre que ça aurait pas spécialement été heureux, mais alors là… y en a pas un pour rattraper l’autre.

Alors en matière de gêne, on a déjà atteint le sommet, mais au moins, on s’épargne davantage de prises de bec fraternelles (temporairement), parce que si les aptitudes de Five au combat ne sont certainement plus à prouver, celles de Klaus, en revanche… bref, pas besoin de s’attarder là-dessus. Et dans tous les cas, Klaus n’a aucune envie de se prendre le bec avec son frangin, surtout pas. C’est qu’en dépit de toutes ces merdes et des mots qu’ils peuvent s’adresser, il l’aime, son psychopathe de frangin, et il lui a terriblement manqué, par ailleurs.

Klaus se redresse à son tour et se débarrasse, d’un geste d’une inélégance folle, des grains de sol qui lui collent à la peau et à ses vêtements détrempés. Il va choper la crève, ça fait aucun doute, mais bon, dans le fond, ça lui est plutôt égal. Il a beau être soûl et défoncé, il a toujours le sentiment de pas être dans l’état qu’il faudra au regard de toutes les merdes qu’ils ont essuyées jusque-là.

"Merci", se contente de répondre Klaus qui ne va pas insister davantage quand Five lui promit de ne plus faire de remarques au sujet de Dave.

Qu’il admette ses torts et… s’excuse, en quelque sorte (sans dire qu’il était désolé, certes, mais c’est Five, Klaus s’attend pas non plus à ce qu’il lui saute dans les bras en lui demander son pardon, ou bien il serait aussitôt convaincu qu’on avait remplacé son frère par il ne sait quel clone sans intérêt.

"Mise plutôt sur quatre ou cinq", réplique Klaus quand il demande à trouver un endroit où se vider la tête et boire.

Lui aussi aurait bien besoin de quelques verres en plus, même si en vrai, vu son état, il aurait plutôt intérêt à se trouver un lit dans lequel s’effondrer.

"Viens, on va en boîte, ils voudront jamais te laisser entrer avec ta tête de mineur mais on va bien réussir à s’incruster discrètement par une issue de secours, on est plus à ça près, pas vrai ? Et dans le pire des cas, t’auras qu’à négocier avec le videur, c’est ton truc, la négociation, non ?" suggère Klaus sans ironie aucune, avant d’ouvrir la marche d’un pas ne témoignant définitivement pas de la plus grande sobriété. Déjà que marcher droit est un effort de tous les instants en temps normal, là je vous raconte même pas.

Alors qu’ils arrivent finalement devant le bâtiment duquel s’échappent les échos du vacarme à l’intérieur, Klaus se tourne vers son frère.

"Bon, on opte pour la méthode bourrine ou bien on essaye l’entrée discrète ?"

Plus question de revenir sur le sujet de leur dispute. L'ambiance n'est pas encore à son meilleur, mais au moins, ils ont tous les deux décidé de mettre de l'eau dans leur vin. Bon, ça ne durera peut-être pas. Surtout s'il doivent décider d'ajouter encore un peu d'alcool au reste, ce qui n'est définitivement pas une bonne idée (mais ne les empêchera pas de le faire malgré tout). En attendant, se retrouver dans une ambiance bondée et alcoolisée ne leur fera pas plus de mal que ça. Et Klaus est d'avis que ça lui videra agréablement la tête. Même s'il tente de reléguer le sujet Dave le plus loin qu'il peut, ce n'est évidemment pas si facile. Il le garde dans un coin de son esprit, et il a besoin d'étouffer le tout dans le bruit, la torpeur et l'alcool.

Il a du mal à garder le fil tandis que Five lui fait part de la suite et de la manière dont ils pourront s'introduire dans la boîte. Effectivement, attaquer frontalement ne mènera pas à grand-chose, et ils se feront rembarrer aussi sec, surtout dans l'état où ils se trouvent, ils faut donc espérer qu'ils parviennent à s'introduire discrètement dans la boîte sans attirer l'attention de quiconque. Pas simple quand le frangin de dix-sept ans ressemble à un écolier en culotte courte, avec son petit uniforme certes sacrément sale, pour le coup, mais qui lui donne tout de même des airs de jeune premier bien trop propre sur lui. Sans la veste, c'est déjà mieux, et Klaus regarde son frangin tenter de shooter dedans (avec une inélégance proverbiale), un sourire un peu bête sur le visage.

"Tu sais que si t'étais pas absolument illégal, tu serais presque sexy, comme ça ?" observe-t-il en jetant un œil amusé à son frère. Il plaisante, bien sûr. Enfin, c'est sans doute pas totalement faux, mais c'est son frère quoi, donc évidemment qu'il pense pas un truc pareil. "Le jour où tu nous trouveras une situation que t'envisages pas de résoudre en explosant des gueules, faudra en faire un jour férié, allez on s'arrache beau gosse."

Ils se remettent en route tandis que Five commente son état. C'est sûr que lui doit sentir l'huître pas fraîche à plein nez et ses vêtements sont détrempés, mais pour sa part, il se dit que ça lui donne un petit style, après tout. C'est pas si mal, non ? Non. Et puis en boîte, ça pue la clope et la sueur, de toute manière, il sera dans le ton. Ils s'en fichent, une fois qu'ils seront à l'intérieur, ils réussiront bien à aviser.

"Euh ouais ? Je sais plus. On s'en fiche. Fais vite si tu peux pas te retenir", assure-t-il quand Five remarque qu'à un moment donné, l'idée d'aller pisser s'est imposée. Ouais ouais, il en sait rien, pour le moment, l'idée s'est évaporée, et il est plus focalisée sur le fait de faire découvrir à Five les joies des soirées en boîte.

Leurs pas finissent par les mener jusqu'à la boîte en question, un vieux bâtiment à l'extérieur pas très engageant. Ils s'éloignent de la file d'attente où les videurs font leur taf avec beaucoup de zèle et contournent le bâtiment jusqu'à trouver l'issue de secours. Klaus force sur la poignée comme un forcené, avec très certainement l'élégance et la grâce d'un ornithorynque bourré.

"Ça s'ouvre paaaaaas !" se plaint-il de façon tout aussi ridicule.

Clairement, plus d'une fois cette nuit, les talents paumés de Five leur auraient été d'une grande aide, mais puisqu'ils ne devaient pas compter là-dessus, eh bien... ils faisaient avec les moyens du bord. Klaus a parfaitement conscience de l'inélégance de sa manœuvre en cet instant, mais pour tout dire, il l'assume assez, et suffisamment pour ne pas prendre ombrage de la réflexion de son frère, qui ne se prive pas de se payer sa tête et de le lui dire.

"Au moins on a trouvé un truc qui te fait marrer", répond Klaus avec un grand sourire avant de laisser à Five le soin d'essayer.

Peut-être aurait-il été piqué dans sa fierté si le gringalet (même s'il ne l'est pas franchement moins) était parvenu où lui-même a échoué, mais outre le fait que c'était de toute façon peu probable, il est bien trop impatient de pouvoir rentrer dans le bâtiment pour que l'exploit suscite chez lui autre chose qu'un enthousiasme franc et massif. Mais non, donc, Five n'arrive à rien, et puisqu'il n'ont pas (encore) de nouvelles de Diego le crocheteur en chef, ils doivent s'y prendre d'une autre façon.

En toquant à la porte ? Ah bah oui, apparemment. Marrant, c'était ce que Klaus allait suggérer de faire et il s'était attendu à ce que Five le rembarre pour n'en avoir ne serait-ce que suggéré de le faire. Comme quoi, le Five défoncé ne cessera jamais de le surprendre. Il faudra vraiment qu'ils leur donnent plus d'occasion de faire connaissance, même si le frangin serait sûrement pas d'accord (et que d'autres aspects du Five défoncé étaient franchement pas aussi drôles à observer).

Et donc le pire, c'est que ça marche, la porte s'ouvre sur un type qu'ils n'ont aucun scrupule à enfermer dehors. Klaus se laisse traîner dans la boîte, vu l'ambiance et l'absence de lumière, ils peuvent être à peu près rassurés sur le fait que Five passera globalement inaperçu... dans la mesure où il en est capable.

"C'est le meilleur plan que t'aies jamais élaboré de ta vie", confirme Klaus avec un large sourire quand, en désignant le bar, Five suggère de boire d'abord et d'aviser ensuite.

Alors Klaus s'installe au bar et commande d'office deux verres de "ce que le bar propose de plus fort" parce que bon, au point où ils en sont, autant y aller franchement. Sitôt servis, Klaus dépose son verre entre les mains de Five et boit une longue gorgée du sien.

"Bon allez, on avale ça cul-sec et on va danser, je meurs d'envie de te voir te déhancher sur la piste de danse. Dommage que je puisse pas filmer ça pour la postérité."

Même si boire est la priorité, il est hors de question de ne pas aller lui-même se donner en spectacle s'approprier la piste de danse comme il se doit.

« C’est bien pour ça que je veux te voir danser », réplique Klaus qui n’est pas le moins du monde convaincu par le discours de son frère quand ce dernier lui fait remarquer qu’il ne sait pas danser, le tout en forçant sur la métaphore, preuve sans doute de combien il pouvait être à la fois stone et bourré… pas que Five soit dans un meilleur état, cela dit.

Certes, il avait une bonne endurance, mais il commence quand même à sentir le sol tourner sévèrement sous ses pieds. Raison de plus pour aller danser, au final. Quitte à tourner, hein.

« Tu as l’impression qu’ils ont l’air de savoir danser, eux ? » ajoute-t-il en désignant d’un geste de la tête la foule compacte qui s’amassait sur la piste de danse.

Clairement, aucun d’eux n’offre le spectacle du siècle, et même s’il y en a qui doivent savoir danser parmi, ils se perdent très rapidement dans la masse, si bien qu’il est tout bonnement impossible que qui que ce soit remarque votre manière de danser.

« Oh et puis, tu fais ce que tu veux », ajoute-t-il en déposant une tape sur l’épaule de son frère avant de se jeter ou presque dans la piste de danse.

Est-ce que c’est franchement malin de laisser son frère sous emprise, et clairement pas habitué à consommer, seul dans une boîte alors qu’il a qui plus est la gueule d’un « gamin » de dix-sept ans ? Sans doute pas. Mais si Klaus Hargreeves avait un jour été un homme responsable, ça se saurait, et ce n’est pas le cas du tout. Non, il ne va pas lui coller au train non plus. Et puis, c’est Klaus qui a parlé du fait qu’il voulait faire de nouvelles expériences, pas vrai ? Eh bien, qu’il ne se prive pas, dans ce cas-là. Klaus, de son côté, ne fait plus attention à rien. Il se laisse transporter par le rythme de la musique, et il ne prête pas attention au reste. A l’aise sur la piste de danse, il jongle entre les partenaires sans franchement réfléchir, dans cet état second encouragé pour l’impulsion des basses, des émotions de la soirée et de toutes les substances consommées. Le tout mélangé offre définitivement un cocktail des plus détonnants.

Ce n’est qu’après de longues minutes, quand Klaus se sent partant pour prendre un nouveau verre, qu’elle décide de s’intéresser à Five et à tout ce qu’il peut bien faire de son côté. Il essaie de repérer son visage à travers la foule, mais un possible de le trouver au milieu de la foule. Est-ce qu’il se serait décidé à aller danser, finalement ? Klaus prend le temps de se servir un nouveau verre, qu’il avale cul-sec également, avant de partir plus activement à sa recherche. Et c’est là que son regard tombe sur lui, sur lui et sur le type qui lui fourre littéralement la langue dans sa bouche. Klaus les observe, abasourdis. Comment dire qu’il s’y était pas attendue, à celle-là. Il tombe des nues, mais il se ressaisit bien vite.

« Sans déconner ! » Il se rapproche et les oblige à interrompre leur échange. Déso pas déso. « Désolé d’interrompre, ça durera pas longtemps. » Il tourne son regard vers l’autre gars. « Je te le rends dans quelques secondes, c’est juré. Bouge pas de là, OK, t’es super canon, change pas. »

Avant de reporter son attention sur Five, qu’il a attiré un peu plus loin.

« Eh bien, je vois que tu t’emmerdes pas. Je vais pas te faire un sermon, chuis pas papa, et encore heureux hein… Fais ce que tu veux, vraiment, mais fais pas de conneries non plus. Je te dirai bien de faire attention mais en même si le gars te cherche des noises, on sait tous les deux que tu le défonces, pas vrai, frangin ? Tu me préviens juste si jamais je dois pas t’attendre et oh attends, je dois avoir… » Il fouille ses poche et parvient à en extirper un préservatif qui, avec un peu de chance, ne sera pas périmé. Il l’agite sous le nez de son frère avec un sourire amusé. « Je compte sur toi pour en faire bon usage. »

Oui, c'est bien Five le psychopathe en herbe (ou le psychopathe) de la bande), et dans ce contexte, c'est un peu rassurant, ça signifie que même jeté comme il l'est dans de telles circonstances, il sera tout de même capable de séparer son amant de ses bijoux de famille si ce dernier devait se faire menaçant ou autre... ce qui est pas forcément trop rassurant non plus, mais Klaus a pas l'intention de s'en mêler plus que nécessaire non plus. Enfin si, il compte s'en mêler, sinon il n'aurait pas interrompu son frère sans la moindre vergogne. Cela dit, il a pas l'intention de s'en excuser étant donné la réaction de son frère quand ce dernier lui pose des questions. Alors alors, demander conseil à Klaus Hargreeves quand on s'apprête éventuellement à vivre sa première fois, c'est certainement la pire chose à faire au monde, ce qui n'empêche pas Klaus de prendre son rôle de conseiller très à coeur, trop à coeur, certainement.

Klaus ne réalise même pas qu'il submerge peut-être Five avec toutes ses explications, il ne réalise absolument pas le fait qu'il en dit sans doute beaucoup trop au sujet de détails que son frère n'avait aucun besoin de connaître en la circonstance - ou dans n'importe quelle circonstance au passage -, et peut-être pas assez au sujet d'informations qui lui seraient peut-être utile. On peut le dire, la sexualité de Klaus n'est pas forcément la plus conventionnelle. Pas parce qu'il est à voile et à vapeur, mais parce qu'il est Klaus, et que l'absence de conventionnel est ce qui le définit. Quoi qu'il en soit, Five a l'air quand même d'assimiler une ou deux informations qui pourront lui être utile.

Déjà, il retiendra sans doute le fait de se tourner vers le bel étalon qui heureusement est suffisamment patient pour attendre la fin de cette conversation gênante n'est pas un problème. Oui, Five est plus âgé qu'il n'en a l'air, mais dans ce contexte en particulier, il y gagnera très clairement à passer pour un adolescent de dix-sept piges plutôt que pour un vieux coincé dans un corps de jeune. Surtout que ça pourrait éventuellement bloquer le garçon au joli minois s'il devait l'apprendre et, surtout, le croire. Son apparence justifiait son inexpérience, il avait tout intérêt à en profiter, pour le coup.

"Tu me remercieras tout à l'heure, tu verras", répond Klaus avec un clin d'oeil complice quand Five affirme qu'il n'est pas sûr de devoir le remercier ou l'insulter. Dans tous les cas, puisque c'est Five, il fera certainement l'un et l'autre, alors bon. "Allez, amusez-vous bien", qu'il ajoute en laissant les deux vaquer à leurs affaires.

Pas qu'il y ait pas un peu de curiosité de sa part, mais non, il a pas spécialement envie d'être aux premières loges quand arrivera ce qui arrivera. Il les suit quand même du regard quand les deux s'éclipsent vers la sortie. Le type lui a évité la partie de jambes en l'air dans les chiottes, c'est plutôt être bon seigneur, et tant mieux pour la première fois de Five. Encore que rien ne garantit à Klaus que le frangin va pas finir ce qu'il a commencé dans le local à poubelles derrière la boîte. Bon, peu importe, Klaus, pour sa part, décide qu'il est l'heure, d'enquiller de nouveaux verres avant de retourner sur la piste de danse. Pour sa part, il a juste envie de boire et de danser, pas spécialement intéressé par davantage d'interactions avec les autres.

Il n'a pas conscience du temps écoulé, complètement stone, quand Five revient enfin. Peut-être quelques minutes, peut-être une heure ou deux ? Dans tous les cas, Five finit bel et bien par lu revenir en un morceau.

"J'en déduis que ça s'est bien passé", répond Klaus avec un sourire complice. "Va falloir qu'on fasse péter le champagne pour fêter ça. On va se vider une bouteille et tu vas tout me raconter, dans le moindre détail", déclare-t-il en attirant déjà Five vers le bar.

C'est bizarre de voir Five avec un tel sourire sur le visage, ça lui donnerait presque l'air un peu niais, en réalité, mais en revanche, ça lui va plutôt franchement bien. Et c'est un agréable changement, on va pas se mentir, en comparaison du Five absolument agressif et qui passe son temps à râler sur tout le monde. Klaus apprécie. Si la solution, c'est d'offrir une bonne partie de jambes en l'air au frangin pour le décoincer, ben il est prêt à s'arranger pour jouer les entremetteurs pour lui autant qu'il le voudra. Quoique, peut-être qu'à la longue, perdre le Five acariâtre qu'il avait l'habitude de connaître lui ficherait un coup.

Grand sourire quand Five accepte de payer la bouteille de champagne. En vrai, ça valait mieux, parce que Klaus a beau proposer, il aurait pas eu les moyens de la payer. Quoi qu'il en soit, ils se retrouvent donc à se murger une fois encore, mais avec panache. La danse a aidé Klaus à décuver un peu... dans une moindre mesure, mais suffisamment pour apprécier le contenu de sa coupe sans se sentir nauséeux. Ce qui était pas plus mal.

S'ils réussissaient à finir cette soirée - improbable - sans dégueuler une seule fois, ce serait définitivement la meilleure soirée qu'il aurait passé sur cette île. Si ce n'est la meilleure soirée tout court, en réalité... mais ils en sont pas là du tout. La soirée n'est pas finie, et pour le moment, Klaus veut surtout que son frère lui raconte tout, et sans lui épargner les moindres détails. Quoi ? C'est glauque ? Mais pas du tout, voyons... rien d'autre que de la très légitime curiosité, ni plus ni moins.

Five est bien tombée, et ça, quand même, ça rassure Klaus. Pas qu'il n'aurait pas été capable de se défendre si les choses s'étaient mal passées, mais c'est quand même mieux qu'elles se soient bien passées, point, et qu'il en garde un bon souvenir. Klaus, de son côté, pouvait pas franchement dire que sa première fois avait été un franc succès. Il s'en souvient à peine, il se rappelle juste que ça impliquait vaguement une chambre décorée avec du vieux papier peint dégueulasse, une bouteille vide de vodka et un ours en peluche.

"Mon frangin la bête de sexe ! J'étais sûre que tu gèrerais ça comme un pro - non, en fait, j'étais sûre que non, mais je suis content pour toi", qu'il affirme avec une totale sincérité. Il s'était pas attendu à ce rebondissement dans la soirée (mais honnêtement, il ne s'était attendu à aucun rebondissement, là...), n'empêche que ça lui déplaît franchement pas.

Puis ils en arrivent au sujet Dolorès, et évidemment Klaus ne peut être que tout ouïe tandis que Klaus raconte les détails de sa relation tumultueuse avec le mannequin en plastique. Klaus manque de cracher son verre de champagne tant il est hilare face au discours de son frère.

"Tu sais quoi, j'adore le Five dépucelé", affirme-t-il complètement hilare, même s'il y a au fond quelque chose de très triste dans ce qu'il affirme, marque de la profonde solitude à laquelle il a été exposé, mais Klaus ne l'observe pas du tout ainsi.

"T'inquiète, je juge pas, tu sais, t'as pas idée de tout ce que j'ai pu faire juste avec un ours en peluche ou un tuyau d'aspirateur, et moi j'avais pas d'excuse", ajoute-t-il dans un clin d'oeil avant de vider le fond de son verre et de le reremplir.

L’élégance, la finesse, la subtilité et la délicatesse se sont définitivement envolés vers des horizons très, très lointains… Pas que ce soit dans tous les cas des choses qui les caractérisent quoi qu’il en soit, mais on va pas se mentir, quand on retirait leur filtre à deux phénomènes qui en avaient déjà très peu, les chances pour que ça parte en couilles était absolument infinie, et en effet, leur conversation a dépassé le seuil du vulgaire, mais évidemment, ils s’en foutent, parce qu’ils sont complètement pintés et ont pourtant l’air d’estimer qu’ils ne le sont pas encore suffisamment, et c’est très grassement que Klaus ne peut s’empêcher de rire, entre deux gorgées de champagne, quand Klaus évoque l’état de son cul.

Une autre gorge manque de l’étouffer quand Five reprend par un « toi qui sais tout », avant de reprendre en suggérant qu’il peut avoir un truc pour faire passer la pilule avant de poursuivre en langage de bourré, c’est-à-dire de façon totalement décousue et à peine compréhensible pour le commun des mortels – et qui a le don de faire sacrément marrer Klaus, on va pas se mentir.

« Y a rien de mieux que des pilules pour faire passer la pilule, mais je suis à sec, frangin. »

Rien ne vaut la tête de Five quand ce dernier accueille les « révélations » de Klaus sur son rapport privilégié avec son ours en peluche ou encore l’aspirateur. Ben quoi ? C’était pas forcément le pire qu’il ait fait, au passage. Qu’est-ce que vous voulez, faut bien expérimenter. Et quand on est complètement jeté et à côté de ses pompes, c’est encore plus facile. Il est proche de l’hilarité tandis que Five déplore le sort du pauvre Teddy.

« Ça va, il était consentant, t’sais », qu’il répond dans un haussement d’épaules, avec le plus grand naturel et un détachement total.

Pour le reste, il se cherche pas vraiment d’excuse, il estime même pas avoir besoin de s’en chercher, honnêtement, mais c’est quand même vrai que vu la putain de famille déséquilibrée dans laquelle ils ont grandi, c’était logique que ça se passe comme ça. Et ouais, y avait pas trop moyen d’avoir une vie en dehors des exigences du paternel, et forcément que ça devait les faire vriller. Entre ça et ses pouvoirs qui lui pourrissaient l’existence et qu’il ne réussissait à calmer qu’en se mettant la tête à l’envers. Mais oui, c’était un bon exutoire. Dès qu’ils avaient des problèmes, dès qu’ils faisaient des conneries, il suffisait de se rappeler que c’était de la faute du paternel, et tout de suite, ça passait beaucoup mieux. Rejeter tous les reproches sur lui sans remettre leur comportement en question, ça faisait du bien et ça ne mangeait pas de pain, pas vrai ?

C’est un Five hyper-chancelant qui suggère que finalement il a envie de danser. Le sourire de Klaus s’élargit. Eh ben voilà, c’est pas trop tôt ! Bon, d’accord, il va falloir qu’il réussisse à tenir sur leurs jambes sans s’effondrer, l’un comme l’autre, car Klaus aussi doit bien constater qu’il a abusé, il a la tête qui tourne et le cœur au bord des lèvres. En revanche, il se sent plus réveillé que jamais, donc hors de question de s’arrêter en si bon chemin.

Alors qu’ils rejoignent la piste de danse à la manière de deux déchets complètement défoncés, Five suggère de faire autre chose, d’aller au zoo, de rependre les… ours en vert… Quoi ?

« J’en pense que j’ai rien pigé à ce que tu viens de dire », répond Klaus. « Si on va par là, d’abord on va au zoo et ensuite on file dans le premier magasin de prêt-à-porter venu et on balance de la peinture bleue sur tous les mannequins qu’on trouve en hommage à Dolorès – ouais, j’aime bien le bleu. » Il marque une pause. « Faut qu’on dévalise un magasin de bricolage, aussi. Pour la peinture. » Nouvelle pause. « Attends, la peinture c’est pas bon pour les Teddy, ça… » Il a un léger haut-le-cœur. « J’ai envie de gerber… »

La nature même de la conversation en dit long sur tout ce qu'ils ont consommé jusqu'ici. Ce qu'ils racontent a oublié d'avoir du sens depuis un moment déjà, mais là, l'absurdité de leur discussion a atteint son paroxysme : tout juste digne d'une pièce de théâtre absurde - comme celle avec les deux glandus qui attendent un troisième glandu pendant deux heures de dialogue inutile. En un peu plus drôle quand même. N'empêche que Klaus songe très sérieusement à leur plan stupide revenant à couvrir de peinture des mannequins et des ours en peluche qui n'ont rien demandé à personne.

Il n'a pas le sentiment que c'est le plan du siècle, mais il a quand même le sentiment que c'est vachement, vachement marrant, et qu'ils vont s'éclater, et que c'est une chose de laquelle ils se souviendront longtemps. Bref, bref, bref, pour ça, il faudrait quand même qu'ils réussissent déjà à mettre un pied devant l'autre, et ça, c'est pas gagné. Chaque mouvement, chaque parole, chaque geste lui remue l'estomac, et il a la tête qui tourne terriblement. Ouais, ça faisait un moment qu'il s'était pas mis une mine pareille, et quand on connaît l'énergumène, ça veut vraiment tout dire.

C'est d'un pas chancelant qu'il se laisse diriger à l'extérieur de la boîte. Houla, mais ça va vraiment, vraiment pas pour le coup. Il commence à voir trouble. Il se laisse totalement guider par Five, prenant surtout soin de tenir debout. Il doit vraiment résister à la tentation de juste s'étaler à même le sol pour faire passer son putain de tournis.

Mais alors qu'ils atteignent la sortie, Five se heurte au vigile. Putain, génial... Bon, il est ceci dit trop bourré pour s'inquiéter vraiment outre mesure. Là, y a plus grand-chose qui a d'importance, il est même pas complètement convaincu de son environnement.

"Ouais, ouais, si on a l'air d'être des cas c'est qu'on est des mineurs", tente de les défendre Klaus, complètement défoncé, et d'une voix telle qu'il n'est pas dit que son interlocuteur ait compris quoi que ce soit dans tous le cas. "Non, c'est pas ça, je voulais d..."

Klaus ne finit pas sa phrase. En revanche, le contenu de son estomac se répand sur les chaussures du vigile, et pas qu'un peu. Il en avait vraiment en réserve, c'est rien de le dire.

"Pfouuuh, ça va mieux", qu'il déclare, véritablement soulagé. Il est toujours pas au mieux de sa forme, mais déposer une gerbe au pied du vigile, ça fait du bien.

Enfin, sur le moment, parce que le vigile, lui, a pas l'air d'apprécier, il les attrape tous les deux par le col et les balance à l'extérieur. Klaus atterrit au sol et manque de peu de manger le bitume.

Bon, ça y est, il a de nouveau envie de vomir.

Sans surprise, après s’être fait gerber dessus sans vergogne par les deux frangins défoncés, le vigile les avait foutus dehors – qui l’eut cru, vraiment. Klaus, même si vomir un bon coup, ça lui a fait du bien, se sent toujours bien nauséeux, et de plus en plus claqué, mais il sent que Five, en ce qui le concerne, a de l’énergie à revendre. Inépuisable, le frangin. Alors, c’était quand même assez marrant de le voir comme ça pour commencer, mais là, ça commence doucement à être épuisant, en même temps, tout est épuisant. Klaus a envie de s’allonger là, au sol, à même le bitume et de piquer un bon roupillon, mais Five a pas l’air de cet avis. En hurlant plus qu’en parlant, il lui parle de peinture, et c’est là qu’il se rappelle leur plan foireux. Bon allez, ça va être drôle. Puis ça va le réveiller, surtout.

Il titube très largement tandis qu’ils cheminent jusqu’au magasin de bricolage. Qu’ils soient arrivés jusque-là pour commencer tient franchement du miracle tant il n’y en a pas un pour rattraper l’autre, là, tout de suite. Klaus se marre doucement en observant les tentatives de son frère, qui s’acharne sur la porte, porte qui bien sûr refuse de lui céder. Logique, goguenard, il ne lui viendrait évidemment pas à l’esprit de lui venir en aide, et il préfère très franchement se payer sa tête autant qu’il le peut. Il peut bien s’acharner et hurler, y a évidemment personne pour l’entendre, sauf sans doute des voisins à proximité qui doivent être ravis de s’être installés à cette adresse.

« Five… viens on s’en fout et on dort », décrète Klaus, qui en a définitivement plus qu’assez, là, tout de suite, et qui ne demande qu’à pouvoir dormir en paix, tranquillement.

Comme son frère a l’air beaucoup trop occupé pour s’intéresser à ce qu’il dit, tout comme Klaus oublie un peu de s’intéresser à ce que fait son frère (alors qu’il devrait peut-être en assumer la responsabilité, sachant que Five ne serait pas dans cet état s’il n’avait pas drogué son café pour commencer – oupsie), il décide de céder à l’envie qui le taraude depuis un moment et s’allonge sur le trottoir dans un franc soupir de soulagement. Le sol continue de tanguer en dessous de lui, mais la vue sur les étoiles est plutôt jolie…

Mais pendant ce temps, Five s’acharne. Il balance une bouteille de soda contre la vitrine, et Klaus sent quelques giclées de Coca lui arroser le visage. Comme un con, il se marre doucement. Enfin ça, c’est jusqu’à ce qu’il entende la vitrine du magasin se briser, suivi du cri de joie de Five mais pas seulement. Également de l’alarme du magasin qui se met à résonner bruyamment.

« Oh merde… » Klaus se redresse d’un bond et vacille légèrement. Il a l’impression de voir double, si ce n’est triple, quand ses yeux se posent sur son frère. « Viens faut qu’on se tire », dit-il en lui attrapant le poignet. « Non… non, faut qu’on récupère la peinture, c’est super important », se ressaisit-il en se figeant sur place.

Pourquoi est-ce qu’ils ont besoin de peinture, déjà ?
Au loin, il a l'impression d'entendre des sirènes de police. A moins que ce soit l'alarme qui fasse ce bruit-là ?

Dans l’état où se trouvent les deux frères, il ne faut pas s’attendre, définitivement pas, à ce que l’un ou l’autre soit à même de prendre une décision judicieuse ou sensée. A la place, Klaus et Five s’engrainent mutuellement dans leurs conneries respectives, et quand il n’y en a même plus un sur les deux pour accepter de réfléchir convenablement (ne nous le cachons pas, celui qui réfléchit, c’est généralement Five, Klaus n’aurait pas été d’une grande utilité dans tous les cas), eh bien le résultat est absolument déplorable. Fuir la police n’aurait sans doute pas été très efficace dans l’état où ils sont, mais ils auraient quand même pu essayer. Non, à la place, ces deux crétins s’amusent à explorer le magasin de bricolage sous le prétexte, qui plus est, le plus con qui puisse exister.

Franchement, à ce stade, c’est à peine si Klaus est capable de réellement faire la distinction entre les différentes couleurs qu’il lui désigne. Pour lui, tout est plus ou moins bleu ou vert, ou un truc du genre… Est-ce que c’est si important ? Il en est plus tout à fait sûr. Bon, si, s’ils choisissent une couleur, c’est forcément que la couleur a son importance, mais là, tout de suite, Klaus se souvient plus vraiment de pourquoi ils ont décidé de choisir de la peinture pour commencer. Donc, à partir de là… Mais bon, quand on commence un truc, faut le finir. Pas que ce soit une philosophie de vie pour lui non plus, ce serait quand même exagéré mais… bref, est-ce qu’il y a vraiment besoin d’insister, en fin de compte.

Five jette son dévolu sur un vert bouteille et Klaus se marre bêtement parce qu’il a prononcé le mot « bouteille » (admettez que c’est tout à fait hilarant). Il s’apprête à prendre un pot de peinture de son côté, jetant naturellement son dévolu sur un rose fuchsia du meilleur effet, mais ils n’ont pas vraiment le temps de faire grand-chose que les agents de police arrivent sur place pour arrêter les fauteurs de trouble. Klaus, par réflexe, lève les mains en l’air tandis que son pot de peinture vient à s’écraser au sol dans un « splash » pas très ragoutant. L’aplomb de Five dans ce contexte fait doucement marrer Klaus, qui lui aussi a du mal à garder son sérieux alors même que la situation ne prête absolument pas à rire. Ils se sont retrouvés en cellule de dégrisement, on dirait bien qu’ils sont bons pour un retour à la case départ.

« Attends-moi, mais attends-moi ! » proteste Klaus tandis que Five jette son pot de peinture au pied des flics. Il se retourne pour saisir le premier pot venu et le balancer à son tour. Un bleu « océan » qui fait doucement ressembler le flic le plus proche à un cosplay raté de Schtroumpfs.

« Ça suffit, on les embarque », soupire un des flics, à l’uniforme taché de peinture.

L’instant d’après, ils se retrouvent menotés et conduit à l’arrière d’une voiture de police. Retour à la case départ… Pourtant, Klaus a du mal à dramatiser dans ces circonstances.

« L’un dans l’autre, c’était une bonne soirée, non ? »