Cette nuit fut particulièrement agitée pour toi. Tu avais eu un sommeil étrange, avec des sensations peu agréables et c’est en nage et paniquée que tu t’étais réveillée. Que s’était-il passé ? Tu n’avais que très peu de souvenir de tes songes mais la sensation elle, restait attachée à ta chair de manière indélébile. Tu finissais par te lever, bien trop anxieuse à l’idée de retrouver ton lit, tu ne retrouverais surement pas le sommeil, tu le savais désormais. Alors, dans un silence des plus communs, tu enfilais tes affaires de sport pour aller courir un peu. Ce n’était pas une passion à proprement parlé, mais avant une grande journée, c’était le seul moyen que tu avais trouvé pour te changer les idées. Une heure après de course, tu arrivais à l’hôpital. Souvent tu y prenais ta douche pour commencer une journée. Aujourd’hui, tu avais deux opérations de programmé et tu voulais revoir certains détails avant d’opérer.

Les gestes ne se perdaient pas, certes, mais les conditions étaient bien différentes de ce que tu avais déjà vécu jusque là. Tu repensais à ces champs de bataille où tu avais été, et dans quel état pouvait se trouver certains patients. Tu te souviens des odeurs, de la faible luminosité, les conditions très difficiles et la peur constante d’y voir un être cher sur ta table d’opération. Désormais, c’était bien différent, tu n’allais pas t’en plaindre. Mais parfois, comme un jour comme celui là, ton passé te manquait. Il te manquait et même si tu te faisais une raison comme tu pouvais, les souvenirs eux étaient toujours présent.

Tu avais finis ta deuxième opérations quand tu décidais d’aller prendre un quelque chose à manger. C’est la silhouette non loin qui te mit la puce à l’oreille malgré toi, te demandant ce qu’il pouvait bien faire ici. Tu fronçais les yeux avant de t’approcher de lui. Tu le connaissais bien, même très bien.

« Monsieur Jones. Que faites-vous… ici ? »

Bien consciente que le ton que tu venais de prendre était un peu trop officiel et ce n’est pas ce qu’elle voulait. Loin de là. Tu te rapprochais de lui afin de lui dire, de manière plus douce.

« Tout va bien ? Mutt ? » Tu souriais, afin de réconforter. Tu savais qu’il était passé par des épreuves un peu difficile ces derniers temps. Tu voulais après tout savoir comme il allait.

Parfois, tu le savais, tu te comportais comme une mère poule. Tu avais été comme cela avec Brianna, durant de nombreuses années et tu le restais encore avec certains des patients avec qui tu avais un lien particulier. C'était le cas, du jeune homme en face de toi. Certes, tu ne l'avais pas vu grandir, ni quelque chose s'y rapprochant, mais en tous les cas, tu avais vu en lui un quelque chose, qui malgré toi, te touchait. Tu l'appréciais bien sur et tu ne voulais pas qu'il puisse lui arriver quoique ce soit. Tu étais consciente que parfois, il fallait mettre une distance entre les patients et toi, mais c'était plus fort que toi, tu ne pouvais pas l'expliquer. Parfois tu te demandais, ce que faisais ta fille. Etait-elle toujours à Boston ? Avait-elle fini ses études, était-elle actuellement avec Roger. Il y avait quelque chose que tu avais détecté et que tu souhaitais bien fort entre eux. Mais tu n'avais aucune réponse et ça n'allait pas s'arranger, malheureusement.

« Docteur Fraser... » Tu le fixais un peu plus longtemps que d'ordinaire, espérant que tout puisse se passer comme il se doit. Croisant les doigts, discrètement. « Et bien... On a connu mieux. »

Tu fronçais cette fois-ci les yeux en entendant ces mots. Comment ça un peu mieux. Tu massais nerveusement ta nuque dans l'attente d'une réponse un peu plus structurée que celle là. Tu allais l'aider, tu le savais, mais pour soigner quelqu'un tu devais connaitre absolument tous les symptômes. Tu procédais souvent comme cela.

« Disons que le temps devient long... Et Noël approche. Il a déjà loupé mon mariage... » Malgré toi, tu poussais un léger soupire, rassurée. Son état de santé n'était pas engagé, et tu ne devais pas vraiment t'inquiéter. Sauf que... « Saleté d'ile hein ? »

Le mal qui le rongeait était peut être plus difficile à soigner qu'une blessure ou une maladie. Tu le savais plus qu'autre chose. Tu avais été blessée par le passé et tu avais souffert mais ce n'était rien comparé à la douleur que tu pouvais vivre au quotidien. Être loin des être aimé, provoquait une douloureuse souffrance. L'approche des fêtes de fin d'année était une période difficile pour toi également, loin des tiens, loin de Brianna, de Jamie. Tu laissais un instant ton esprit s'évader vers Jamie. Etait-il toujours en vie ? Tu aurais tellement désirée avoir une réponse. Ton regard, chaleureux se posa sur Mutt.

« Si je vous offrais un café, et qu'on parle de tout cela, autour de ce dernier ? » Tu ne le laissais pas vraiment répondre avant d'ajouter. « Je connais ça, être loin des proches. Tu n'as aucune nouvelle de ton père ? »  Parce que oui, il s'agissait là de son père, cette figure paternelle qui lui était si chère. Tu regardais un peu plus longtemps. « Allez viens, tu me remerciera pour le café... »

Elle n’avait pas hésité à proposer d’aller boire un café, le meilleur moyen de parler et de mettre de côté les soucis. Elle ne cherchait que cela.

« Ouais… On va faire ça. »

Elle était contente de faire quelque chose pour lui. Il avait un quelque chose d’attachant qu’elle ne pouvait pas lier. Comme le fils qu’elle n’avait pas eu. A cette pensée, elle ne pu s’empêcher de penser à Bree. Elle lui manquait terriblement. Elle avait fait son choix que de partir, de traverser les pierres et tu avais pris cette possibilité en compte. Tu n’allais plus la voir, mais le manque lui, se faisait ressentir toujours un peu plus.

« C’est toujours pareil. Maman l’appelle le grand paresseux. » Elle plissait les yeux, attendant sa réponse. « Plus le temps passe, moins j’ai d’espoir qu’il se réveillera. »

D’un seul coup, elle se souvenait de la situation et elle s’en voulait d’avoir oublié ce détail. Elle pinça les lèvres de mécontentement. Il était dans le coma et ne s’était pas réveillé. Tu ne pouvais imaginer le sentiment que la famille pouvait ressentir quand une personne était dans un coma. C’était difficile et le sentiment d’incapacité était d’autant plus grande. Elle fronça les yeux.

« Qu’ont dit les médecins pour son état ? »

Elle se demandait si elle pouvait voir son dossier et essayer de comprendre où en était le patient. Mais elle savait également qu’elle ne voulait pas donner de faux espoirs. C’était compliqué à gérer, elle ne voulait pas que la déception soit trop grande. Elle s’installa avec lui, glissant le café entre ses doigts. Une denrée qu’elle aimait un peu trop, comme le whisky de toute manière.

« Et vous ? J’espère que vous avez retrouvé des gens de votre côté. » Elle grimaça légèrement. « J’ai retrouvé ma mère. C’est déjà une bonne chose. »

Elle pensait à Brianna bien évidemment mais son esprit l’espace d’un court moment s’évada encore plus loin. Vers Jamie. Elle espérait de tout son coeur qu’il était bien là où il était. La jalousie, bien évidemment n’en pensait pas tout à fait de la même chose, car elle voulait qu’il soit toujours … Non elle ne pouvait pas lui demander plus de 23 ans après d’avoir toujours des sentiments pour lui. Ce n’était pas possible.

« Personne. » Elle tenta de garder un sourire sur ses lèvres. « ma fille, je ne sais pas où elle est… J’espère heureuse où qu’elle soit. Et puis… Je ne suis plus mariée depuis bien longtemps. »

Elle glissait ses doigts autour de son alliance. Celle de Jamie.

« Après, je ne suis pas certaine qu’il soit bien heureux de me revoir. » Dit-elle sur le ton de l’humour.

Toute cette histoire n'était pas évidente. Pour personne. Certains avaient retrouvé leur proche. D'autres étaient dans l'attente et la tourmente, comme Mutt. Et il y avait ceux qui cherchaient encore comme Claire. Mais ils pouvaient se retrouver et se réconforter entre eux. Par des paroles, et des gestes attentifs les uns envers les autres. Mutt était heureux d'avoir pu croiser la route de Claire. Il accepta donc cette compagnie pour boire un café.

Elle lui demanda ce qu'il en était de son père, ce que les médecins disent.

" Toujours la même chose... " Dit-il en soupirant. " Ca reste pareil. Il pourrait se réveiller, mais il ne le fait pas. Que l'esprit peut se trouver être une prison. Que cette commotion n'a pas un aspect grave d'apparence... " Il a un rire ironique. " En attendant... Si c'est pas grave, alors pourquoi il ne se réveille pas ? "

Il trouvait celà injuste et Mutt ne pouvait s'empêcher de penser que c'était la faute de son père. Qu'il le faisait exprès pour ne pas les revoir. Pour fuir sa vie. Mutt avait un tas de choses à dire à Indiana. Mais en attendant, il ne l'écoutait pas. Mais l'avait-il un jour écouté ?

Ensuite il écoute Claire se confier à lui quant à ses recherches. Pas de nouvelles de ses proches. Mutt avait au moins retrouvé sa mère et il était heureux qu'elle aille bien. Comme si mère et fils seraient à jamais liés dans l'adversité.

" Vous la retrouverez. " Lui dit-il avec beaucoup de compassion. " En tout cas, je vous le souhaite. Si je peux vous aider en quoi que ce soit... " Finit-il par se proposer.

Elle parle ensuite de son mari... ou ex-mari. Mutt l'observe avant de lui demander.

" Pourquoi vous dites celà ? " Il marque une pause avant de reprendre. " Je pense qu'il sera heureux de vous revoir. Enfin... Je ne le connais pas mais... vous savez ici... On a besoin des uns et des autres. De nos proches. " Non il ne voulait pas tirer de conclusions hâtives.

Claire connaissait de loin le dossier de son père, elle n’était pas son médecin elle ne connaissait pas tout. Mais elle le connaissait lui et ses venues dans cet hôpital avec sa mère. Elle comprenait qu’ils avaient un lien particulier, et de son côté elle avait espéré plus d’une fois qu’il se réveille. Après tout, n’était-ce pas le souhait de tout le monde dans cet hôpital. Que les malades finissent par guérir et repartir chez eux. Elle se contenta de lui sourire consciente que cela ne devait pas être facile pour lui. Tout cela.

« Toujours la même chose... » Il soupira et elle comprit assez rapidement que les réponses des médecins n’étaient pas celles qu’il attendait. « Ca reste pareil. Il pourrait se réveiller, mais il ne le fait pas. Que l'esprit peut se trouver être une prison. Que cette commotion n'a pas un aspect grave d'apparence... » De l’agacement naissait dans sa voix et elle ne pouvait que comprendre son désarrois présent. « En attendant... Si c'est pas grave, alors pourquoi il ne se réveille pas ? »

Elle soupira à son tour, il y avait parfois des explications qui ne venaient pas concernant les malades. Il pouvait se réveiller, comme ne jamais se réveiller. L’esprit, le corps en décidait et là la médecine ne pouvait rien y faire. Elle avait vu tellement de cas qui paraissait miraculeux quand d’autre était beaucoup plus tortueux. Elle n’avait pas les mots, parce qu’elle n’avait pas la réponse.

« Parce que le corps prend parfois du temps avant de sortir du coma, et malheureusement hormis la patiente, il y a très peu de choses à faire. Je voudrais avoir les réponses Mutt, mais je ne les ai pas… » Elle fit une pause avant d’ajouter. « Où votre père a décidé d’être particulièrement têtu, et de vous faire patienter longtemps. »

Elle tentait de dire cela légèrement afin de dédramatiser la situation. Ce n’était pas simple et pourtant il ne restait que cela en attendant les réponses à leurs questions. Les réponses à ses questions et de voir son père se réveiller. Elle le souhaitait tout de même même si parfois, elle se sentait bien inutile face à une telle situation.

« Vous la retrouverez.  » Elle l’espérait tellement. De pouvoir prendre dans ses bras sa fille, la serrer contre elle. « En tout cas, je vous le souhaite. Si je peux vous aider en quoi que ce soit... »

Elle dépose une main compatissante sur la sienne. Ses paroles étaient chaleureuses et agréables à entendre. Elle espérait aussi que sa puisse se passer aussi facilement. Et qu’il était là d’une certaine manière pour elle, alors qu’ils se connaissaient à peine. Mais elle était là pour lui et il semblerait que ce soit son cas pour elle.

« C’est très gentil à vous Mutt. Je ne sais pas si elle est ici, ou bien rester dans son époque. »

Et étrangement, elle ne savait pas ce qui était le mieux. Qu’elle soit tranquillement à Boston en train de finir ses études, où ici. Elle l’espérait en compagnie de Roger, elle avait vu combien tous les deux étaient attachés l’un à l’autre. Elle avait vu combien il la regardait et ô combien ses sentiments étaient assez fort. Mais elle n’était qu’une mère et elle ne pouvait rien décider. Elle espérait juste qu’ils soient heureux tous les deux, où qu’ils pouvaient être.

« Pourquoi vous dites cela ? » Il marqua un temps de pause avant de reprendre. « Je pense qu'il sera heureux de vous revoir. Enfin... Je ne le connais pas mais... vous savez ici... On a besoin des uns et des autres. De nos proches. »

Il m’était difficile d’expliquer clairement pourquoi elle disait cela. Elle se doutait bien que Jamie serait particulièrement perdu en avançant dans un tel univers bien loin de tout ce qu’il pouvait connaître. Elle lui avait parler de son temps, mais là encore on était très loin du sien. Alors pour Jamie. Elle le voulait près d’elle, mais cela faisait tellement longtemps qu’elle ne l’avait pas vu qu’elle se doutait bien que ça allait être très compliqué pour elle de le revoir. Plus de vingt ans de séparation c’était peut-être trop pour leur amour finalement.

« Oh j’imagine bien… mais vous savez ça fait plus de vingt ans qu’on ne s’est pas revu et ce monde est bien loin du sien. Je n’ose l’imaginer ici. » Elle se mit à sourire. « Quoique le kilt reste, il parait, indémodable. » Finissait-elle par dire dans un rire.