(Terminé) (( intrigue n°3 )) ⁂ you were my everything ❘ gannic. (( nsfw ))

Galen Erso a raison sur beaucoup de choses, mais Orson Krennic ne s’aperçoit pas encore de ce qui semble terriblement évident. Terriblement tragique, aussi. Galen est le plus réaliste des deux, le plus âgé, le plus sage, le plus raisonnable. Galen Erso a toujours revêtu cette position dans leur binôme. Orson Krennic est celui qui prend les risques, qui s’enflamme, qui se moque de bafouer la morale ou l’éthique pour arriver à ses fins. Malgré son âge, ce n’est en aucun cas un homme que l’on peut caractériser comme sage ou raisonnable. Il n’apprend jamais de ses erreurs. Jamais. Encore une fois, Krennic se heurte à un mur, et cela le fait souffrir. Parce qu’il refuse tout bonnement d’ouvrir les yeux. Il veut croire avec naïveté en la chance d’un renouveau pour eux, d’une nouvelle vie, d’une manière bien sordide de réécrire l’histoire de leur relation, de changer le passé pour de bon. Orson s’y accroche comme à la prunelle de ses yeux océaniques. Voilà pourquoi les prochaines paroles de Galen Erso le frappent en plein coeur comme un milliard de lames aiguisées et tranchantes. Pleines de sang. Le sang de sa culpabilité, de son orgueil, de ses échecs, de ses peurs, de ses erreurs. « Justement, je ne crois pas qu’on puisse changer quoi que ce soit à ce que nous avons été, ou à ce que nous avons fait. J’ignore ce qui se passe ici, Orson, mais je ne crois pas que ce soit… réel. » Une grimace se dessine spontanément sur son visage blâfard, affaibli par l’attaque sur la planète Eadu. Il baisse alors les yeux vers son bandage, une zone relativement large couleur rouge vin s’est formée dans le creux de son aisselle. Le sang est partout. Krennic déglutit péniblement. A la fois de douleur physique et morale. Il ne croit pas se remémorer un souvenir encore plus cuisant que celui-ci, dans toute l'histoire de leurs longues conversations houleuses, de leurs disputes ou de leurs contentieux. Galen Erso lui dit des vérités qui le blessent. Orson Krennic n'est pas idiot. Il est bien conscient être dans l'erreur, mais il préfère s'y enfoncer davantage jusqu'à se noyer.

Krennic soupire longuement, un peu exagérément. Galen le coupe dans ses tirades, parfois au beau milieu, mais Orson poursuit, sans se démonter. Il ira au beau de ses accusations, il pestera, il hurlera, même si cela doit réveiller la douleur de sa blessure et le meurtrir durant des heures entières pendant la nuit prochaine. « Tu ne comprends pas. » Non, il ne comprend pas. Comment peut-il comprendre un seul instant ? Il est encore dépassé par le fait de s’être sacrifié et de ne recevoir en échange qu’indifférence et dédain. Du dédain, oui, c’est de cette manière que Krennic perçoit le comportement de Galen. Il ne comprend pas et il refuse de comprendre ce que Galen veut lui dire. Il préfère n’écouter que lui et ses aprioris, se laisser submerger par ses incertitudes au point que celles-ci sont sur le point de le dévorer tout cru. Krennic s’agite nerveusement en réponse, faisant saigner davantage son précieux bandage qui maintient son épaule endolorie. Il gigote les épaules, faisant fi de la douleur sourde qui commence à prendre davantage d’ampleur, à mesure que l’effet salvateur des analgésiques s’estompe. Krennic se moque bien de la souffrance. Il souffre intérieurement depuis toujours. Ce n’est pas une douleur physique qui aura raison de sa volonté d’acier. Et enfin, Galen lui dit quelque chose qui le laisse intérieurement sa voix. Krennic est brisé par le fait d'être la peur de Galen. « J’ai cru que j’allais te perdre. Je n’aurais pas supporté de te perdre… » Cela le fait s'interrompre, mais il reprend, avec une expression plus sévère au visage. Non, cela ne le fera pas s'arrêter. Il a certainement mal compris. Galen ne peut lui dire toutes ces choses brutales, et prétexter ensuite avoir peur de le perdre et de ne pas être en mesure de supporter le poids de ce deuil. Krennic ne veut pas assimiler la détresse de Galen, étant bien trop focalisé sur la sienne.

Lorsque Galen s'approche avec précaution de lui pour calmer son énervement, en posant sa main sur son épaule valide, cela ne fait que l'emporter encore plus. Krennic se fige, comme un glaçon. Il refuse d'être touché par Galen. Pas après l'absence de remerciement, de reconnaissance. Pas après son sacrifice, ainsi bafoué et reproché. Tout ce qu'Orson a voulu, c'est de leur donner une seconde chance. Apparemment, cela n'est pas dans les projets de Galen Erso. Un sourire triste et amer se niche au coin des lèvres de Krennic, alors qu'il termine de déferler l'ampleur de sa hargne et de sa rancœur. Il est épuisé, moralement et physiquement. Affaibli, dans ce grand lit médical. Vulnérable, avec une épaule valide. Les cernes légèrement bleutées sous ses yeux ne font qu'illustrer le poids de sa fatigue et de ses remords. Krennic grimace, car en ayant voulu se remettre correctement dans le lit, il s'est malencontreusement appuyé un peu trop fort sur son autre épaule. Le sang coule encore un peu. Orson étouffe un gémissement plaintif. Il refuse de se montrer faible devant qui que ce soit, et encore moins devant Galen, alors il intériorise ses souffrances physiques pour donner l'air d'être parfaitement indifférent à ces dernières. « C'est ce que j'ai dit. » souffle Galen. Bien qu'il en brûle d'envie, Orson ne dit rien. Il ne prononce pas un mot. Bien sûr que c'est ce qu'il a dit. « Reste ». Krennic s'en souvient pour s'être imprégné longuement de cette supplique, avant de sombrer dans le trou noir. Avant de s'évanouir sous la pluie battante du centre de la base militaire. Une part de lui est heureuse de constater qu'il s'agit bien des mots prononcés par Galen. Après tout, qui lui confirme qu'il n'a pas tout fantasmé ? Galen le rassure quant à ses nombreux doutes. Cela semble très légèrement apaiser la colère d'Orson, qui se détend dans son lit. Ses muscles se relâchent doucement, et le pic d'adrénaline redescend d'un coup sec. Orson parvient désormais à contrôler les palpitations effrénées de son coeur qui ne cesse de se serrer de douleur depuis tout à l'heure. Il recourbe ses longs doigts dans le creux de sa paume, puis les desserent, comme pour calmer les derniers sursauts nerveux qui continuent à l'assaillir une fois sur deux.

Orson se focalise sur le rythme plus lent, plus calme des battements de son palpitant, tout en écoutant Galen lui confesser qu'il n'a pas d'autre endroit où aller. Son coeur bondit de joie à l'instant même où ces mots franchissent la barrière des lèvres du scientifique. Comme une décharge électrique, Krennic se sent revigoré. Une sensation de chaleur se diffuse dans son estomac, puis remonte jusqu'à sa poitrine. Enfin. Galen l'aide à opérer un revirement. Et le reste vient naturellement, la douceur et l'émoi en première ligne. Les tremblements dans le son de sa voix trahissent le choc de ces sentiments contradictoires qui se mêlent dans son coeur. « Reste avec moi. » grommèle-t-il. Galen vient enfin de lui dire ce qu'il a toujours voulu entendre. « Merci » Orson se répète ce mot inlassablement dans un coin de sa tête. « Fais ce que tu m'as promis. Reste. » Il se répète, et sa voix se brise au beau milieu de sa phrase. Krennic ne s'en rend pas bien compte, pas dans les premières secondes du moins, mais sa voix sanglote désormais. Elle se brise, pour laisser place à un silence religieux. Orson garde la bouche entrouverte, comme bloqué dans son élan. Il sent les larmes lui monter aux yeux, brûlantes et piquantes. Il les retient du mieux qu'il peut. Il s'efforce de ne pas exhiber ses tourments, mais le voile d'humidité qui s'est formé dans le bleu de ses yeux ne laisse aucune place au doute. La voix d'Orson se brise et son intonation change parce qu'il est heurté. Profondément. « Je t'ai sauvé. » Je veux te sauver, a-t-il envie de préciser. « Tu es là. Tu es là, Galen. » Oui, il est là. Près de lui. Il est là, si proche. En vie, en chair et en sang. Il respire. C’est presque trop beau pour être vrai. Il ferme les yeux, parce qu’il ne peut s’empêcher de respirer le parfum de son eau de Cologne pour s’en enivrer, de savourer le souffle chaud plein de vie de son amant contre son visage, ou de toucher la ligne des veines du dessus de sa main, juste sous ses phalanges, pour se le prouver à lui-même. Galen Erso est bien en vie. Son cœur respire pour lui. Grâce à lui. Orson peut sentir son souffle contre sa peau moite, lorsqu'il vient déposer un chaste baiser au sommet de son front. La douceur de ce geste est telle, qu'elle fait céder ses dernières barrières. Des premières larmes roulent le long de ses joues. Elles sont si chaudes, et elles tombent sur son drap blanc. Comme des gouttes d'eau. « C'est déjà fait, Galen. Ne me demande pas si je pourrais te sauver. C'est déjà fait. Je t'ai sauvé. Je viens de le faire. » Krennic se répète en boucle. « Sinon... Sinon, tu ne me parlerais pas, à cet instant. » Cela se tient, mais Galen a raison, ce n'est qu'un mauvais rêve. Ou un bon, pour Orson Krennic.

Il pleure. Vraiment. « Pourquoi me parles-tu de me sauver ? Tu me sauves en restant en vie. En restant avec moi, ici. » A Coruscant. Dans l'Empire. « On va rentrer. » Il sanglote, mais cherche à ignorer ses larmes qui ne cessent de couler, et sa vue qui se trouble de plus en plus pour finalement ne former que des zones épaisses et diffuses. Les détails des pieds de son lit, ou du mobilier de la chambre médicalisée se voilent, mais il s'en moque. Il fait comme si de rien, comme s'il est toujours lui. En pleine capacité de ses moyens, dans le contrôle de ses émotions, alors qu'elles lui explosent en pleine figure. C'était inévitable. Après toutes ces émotions, tous ces souvenirs douloureux qui remontent en flèche, cela ne peut être autrement. Il craque, mais il se voile encore et toujours la face. « Je t'emmène à Coruscant. On reprendra le projet ensemble. » Sa main valide cherche celle de Galen, qu'il étreint de toutes ses forces. De ses maigres forces. Ses doigts s'enroulent autour des siens. Il est reconnaissant envers les derniers mots de Galen. Il tient à le lui montrer, en silence. Ses forces, c'est pour lui qu'il veut les exprimer une dernière fois. Lui non plus, n'oubliera jamais cette journée, ou l'acte de sacrifice qu'il vient de réaliser pour sauver la vie de Galen Erso. Cela le touche si profondément, d'entendre Galen dire qu'il ne l'oubliera jamais, qu'il s'en montrera digne, que cela le fait frôler la folie. Les larmes de Krennic redoublent sous le coup de l'intensité de leurs émotions qui se confrontent. Il parle, mais sa voix est hachée, entrecoupée de soupirs difficiles, de sanglots, de mots bafouillés, de gémissements plaintifs.

« Dis que tu vas rentrer avec moi. C'est avec moi, que ta place se trouve. On va... On retravaillera ensemble... sur tout ce que tu voudras. On reprendra le projet dont tu m'as un jour parlé. Je te le promets. Je ne te demanderais plus de t'investir dans des projets funestes. On travaillera dans l'énergie. Mais seulement... seulement... Après avoir réglé la faille de l’Étoile de la Mort. Ils ne le savent pas encore, mais ils le découvriront. On la solutionnera avant qu'ils ne s'aperçoivent que ta trahison est allée bien au-delà d'une simple fuite de données, et je pourrais ainsi justifier de te garder encore en vie. Près de moi. Tout le temps. » Orson refuse tout simplement qu'on lui enlève Galen, que l'acte vienne des rebelles ou des officiers impériaux. « On dira que tu es encore essentiel... pour le projet, que tu acceptes d'être un otage de l'Empire pour racheter ton défaut de surveillance. On dira que tu as simplement cherché à protéger ton équipe scientifique. Tu t'es accusé à la place de l'un d'eux, mais ils ont tous été tués, aucun ne pourra contredire ta version... » Par lui. Krennic en a donné l'ordre. « Tu dévoueras le reste de ta vie à l'Empire. C'est ce que tu leur diras pour te préserver. Je sais... que ce n'est pas ce que tu veux. Ce ne sera qu'un mensonge supplémentaire pour les convaincre. Nous deux... nous deux, nous saurons la vérité. Je sais que tu ne leur dévoueras absolument rien, mais ce n'est que transitoire... Avant que tu puisses être libre d'être affecté à d'autres projets, tu devras leur prouver que tu regrettes d'avoir eu cet excès de zèle et de paternalisme, et que tu as été manipulé par d'autres scientifiques. Tu devras leur montrer que ta loyauté est envers nous. Tu n'es pas un traître. C'est un autre, qui nous a trahi sur Eadu. C'est un malentendu. Parce qu'ils te surveilleront, ils ne te laisseront plus dorénavant. Tu devras faire très attention, jusqu'à ce qu'ils relâchent leur vigilance. Si tu restes sous ma protection, Galen, si tu acceptes de faire tout ce que je te dis, je... » Krennic se coupe, sans interrompre ses larmes qui coulent, comme un enfant en pleine crise. « Je pourrais te protéger. » Krennic est solennel.

« Juste une dernière fois, joue le jeu une dernière fois. » Il l’implore. Sa voix n’est plus qu’une supplique sinistre et triste. Orson ne relâche pas sa main. Il lève ses beaux yeux embués de larmes dans les siens, et souffle, avec difficulté : « Après... tout sera terminé. » Personne ne mourra. Orson n'ira jamais sur Scarif. Orson vivra. Maintenant que Galen est en vie... Ils peuvent réécrire le futur. « Fais-le pour moi. Fais-le pour nous. » Orson glisse ses doigts sur le menton de Galen, pour le lui caresser distraitement, dans un acte d'immense dévotion. Il accepte d'abandonner ses aspirations fantasques, après l’Étoile de la Mort. Ce qu'il veut dire à Galen, c'est qu'il est prêt à se tourner vers d'autres projets que de semer la mort sur son passage. Que ce soit le projet d'énergies renouvelables énergétiques dont il lui a un jour parlé, ou un autre... Qu'importe. Il sacrifiera sa fin de carrière, après cet ultime et dernier projet. Ils mèneront une vie de scientifiques, travaillant d'arrache-pied pour créer et faciliter l'existence des citoyens impériaux. Ils ne fabriqueront plus d'armes. Il le lui promet. « J'ai besoin de toi. » Ils ne peuvent pas tout plaquer maintenant, c'est impossible. C'est du suicide. Ils doivent aller au bout. Une part d'Orson refuse de renoncer totalement à ce pourquoi il a consacré trente ans de sa vie. Cela l'arrange bien, de devoir conclure l’Étoile de la Mort. Il aura l'impression de terminer « en beauté ». Après tout, après avoir dévoué une partie de sa vie à ce projet, il ne voit nullement l'intérêt de passer les dernières décennies qu'il lui reste sur autre chose d'aussi... conséquent. C'est le projet d'une vie. On a qu'un seul projet d'une telle envergure dans une vie mortelle. Orson Krennic sera célèbre dans toute la galaxie. C'est tout ce qui lui importe. Il sera admiré, comme un héros de l'Empire. Il pourra très bien s'abandonner à des projets avec des vues plus... pacifistes ensuite. Sa carrière sera irréprochable et sa réputation enviée dans toutes les entreprises de la galaxie. Peut-être même qu’il demandera à être affecté à la direction d'un autre département de l'administration impériale. « Je t'aime. » murmure-t-il d'une voix si faible, si fragile. Krennic est épuisé, après s'être excessivement mis dans tous ses états, le voilà qui se laisse reposer contre la joue de Galen Erso. Sa main s'éloigne de son menton, pour venir se glisser dans le creux de son cou, puis sur sa nuque, qu'il enserre amoureusement et possessivement. Il l'embrasse ensuite. Il n'y a pas de sauvagerie, de violence ou de possession dans ce baiser, non, il n'y a que de la douceur, de la lenteur et de la tendresse. Et pour la première fois, ce baiser n'évoque pas une envie de prendre le pouvoir sur Galen Erso, de le réduire à l'état de chose. Ce baiser est un acte d'amour pur et véritable. Il évoque le poids de ses sentiments. Nus, libérés de toutes ses aspirations démoniaques, de sa lutte continuelle pour tout. Autant dans la manière sensuelle dont ses lèvres se mouvent contre les siennes, que dans celle de sa langue qui l'étreint avec calme et saveur. Krennic savoure ce baiser comme son dernier.