(Abandonné) Peace and Terror | Orson

« Taste me, drink my soul. Show me all the things that I shouldn't know. When there's a blue moon on the rise. I had everything. Opportunities for eternity and I could belong to the night. I can see in your eyes. Everything in your eyes. You make me wanna die. I'll never be good enough. You make me wanna die and everything you love will burn up in the light. I would die for you, my love. I would lie for you, my love. I would steal for you, my love and I would die for you my love, my love. We'll burn up in the light and every time I look inside your eyes. I'm burning in the light, look inside your eyes. » ( MAKE ME WANNA DIE ❖ THE PRETTY RECKLESS )






En pénétrant dans une salle d’interrogation de forme circulaire et sommaire, Orson Krennic vient sous ses meilleurs atours. Uniforme blanc, impeccable, assortie d’une cape familière et longue qui lui arrive sous le talon. Pas un seul pli. Bottes noires cirées avec soin. Pantalon d’uniforme réglementaire noir fraîchement repassé. Gants en cuir. Nouveaux, pour l’occasion. Quelques cylindres codés impériaux disposés à droite et à gauche du buste, dissimulés de moitié sous les fines poches de son uniforme. Et enfin, son insigne militaire, car bien qu’occupant un poste de supervision, il n’en demeure pas moins un haut gradé et membre du haut commandement impérial. Propre au rang de commandant. Orson Krennic fait une apparition remarquée et particulièrement soignée. Jusqu’aux mèches argentées de ses cheveux et du choix de son eau de Cologne. Il transpire la perfection, l’odeur de la laque pour les cheveux et le parfum boisé, légèrement vanillé de son parfum haut de gamme. Orson Krennic vient d’apparaître à son fiancé sur l’île comme celui que l’on nomme « Directeur Krennic ». Hors de question de montrer le moindre signe de faiblesse, même en face de Galen Erso et surtout pas en face de Galen Erso. Pas après les récents évènements, pas après ses humiliantes retrouvailles avec Wilhuff Tarkin et le scandale qui en a résulté pour tout le monde, à la suite du gala organisé pour la nouvelle année. Il a fui comme un lâche et continuera de se comporter comme un lâche, maintenant qu’ils sont ramenés dans leur véritable monde.

Lorsqu’il pousse les portes coulissantes d’un simple mouvement de son index sur le tableau de commandes, Krennic referme volontairement son visage pour ne laisser transparaître aucune émotion. Froid, insondable, le regard blanc et inexpressif. Orson doit se comporter comme avec n’importe quel autre prisonnier ou traître de l’Empire galactique. C’est ce qu’est Galen Erso. Aujourd’hui, les voilà retournés dans leur univers. Krennic en a plus qu’assez de ces allers et retours entre l’île et la galaxie entière. Cela fait deux semaines, environ, qu’ils ne se sont pas côtoyés ou même parlés depuis les évènements tragiques sur la plate-forme d’Eadu. Comme par le passé, tout s’est déroulé exactement de la même manière. Comme les trois fois où ils se sont tous deux retrouvés aux mêmes endroits, campant les mêmes rôles. Tout s’est déroulé de la même manière, à quelques exceptions près. La claque, l’ordre d’exécuter toute l’équipe scientifique, mais cette fois, pas de conversation entre eux, pas d’explosion, pas de Jyn Erso. Il a ignoré délibérément Galen, - fuyant toutes ses responsabilités, fuyant la peur des explications, fuyant les raisons véritables qui l’ont poussé à s’abandonner dans les bras de son pire ennemi et d’échanger ses draps avec ceux de son bien-aimé, fuyant… le regard triste et brisé de Galen Erso, tout bonnement. Krennic l’a ignoré pour fuir les éventuelles remontrances, interrogations susceptibles de s’échapper de la bouche du scientifique. Bien que cela soit légitime de la part de Galen, le directeur impérial refuse de les entendre. Il refuse de se confronter aux conséquences de ses erreurs, d’autant plus… qu’il n’y a pas eu « qu’une seule erreur ». Krennic est retourné dans son monde peu de temps avant et cette fois, sans Galen. Retourné sur Scarif, en compagnie de Tarkin. Ce qu’il s’y est passé… l’a quelque part changé. En pire, sans doute, s’il est possible d’envisager qu’il puisse y avoir un pire. L’impérial n’en garde pas de réelle culpabilité, car il a appris assez vite à déresponsabiliser le moindre de ses actes. Il considère que ce qu’ignore Galen Erso n’est pas supposé lui faire de mal. Ce qui se passe sur Scarif a vocation à demeurer sur Scarif.

Il s’approche d’un pas conquérant, sachant Galen Erso épuisé par les conditions de sa détention, une fois avoir verrouillé les portes d’acier d’un mouvement de la main, en prenant toujours le soin presque méticuleux de ne pas croiser le regard défait de Galen Erso. Ces grands yeux marron chocolat, si intenses et moralisateurs. Galen Erso a toujours été moralisateur. Il a toujours critiqué ses décisions. Il lui a toujours fait des reproches. Il l’a surtout dupé pendant de très longues années. Rien que pour cette audace, Galen doit en payer le prix. Le prix de son silence. Le prix de son dédain. Le prix de ses infidélités. Le prix de ses projets de conquête. Il lui a « pardonné » sur l’île mystérieuse, soi-disant. Non, Orson Krennic ne lui a jamais vraiment pardonné de l’avoir dupé sur un registre à la fois sentimental et professionnel, quoiqu’il puisse dire. Il a menti. Est-ce vraiment surprenant ? Ils ne sont pas quittes, contrairement à ce qu’il lui a affirmé dans les bois. Ils n’en ont pas terminé avec leurs démons, contrairement à ce qu’il lui a chuchoté, le soir d’Halloween. Ils n’en auront définitivement fini que lorsqu’Orson Krennic en aura décidé autrement. Pour le moment, il évolue en eaux troubles. Il rassemble ses projets, ses espions sur l’île mystérieuse dans le plus grand secret, à l’insu de Galen. Il projette de reprendre la guerre, en compagnie des impériaux qu’il a retrouvé après moultes recherches acharnées et compulsives. Galen ne doit pas le savoir, pour une raison évidente : il désapprouvera. Il désapprouvera toujours les actes et les aspirations de Krennic. Là est leur point faible, la faille dans leur relation à l’apparence si parfaite et lisse. Orson et Galen ont des idéologies très marquées depuis toujours et diamétralement opposées, rien ne les changera. Pendant longtemps, Krennic a cru devoir les étouffer pour séduire Galen, ce qui a été une erreur, puisque ce dernier a choisi d’épouser Lyra Erso, très différente. Son opposé. Autant caractériellement, que physiquement ou idéologiquement. Ensuite, Krennic a cru pouvoir séduire Galen en apprenant à changer. En devenant quelqu’un de bien pour leur relation, ce qu’il n’a fait que prétendre durant des mois, incapable de mettre à la poubelle des années de despotisme et de caprices d’enfant gâté ambitieux. Désormais, depuis le retour complet de tous les souvenirs le liant de près ou de loin à Galen Erso, une nouvelle solution lui est apparue. Comme par magie. Galen étant désormais sous sa coupe, fou amoureux, pourquoi lui céder en quoi que ce soit ? Pourquoi ne pas simplement… lui imposer sa vraie nature ? Lui mentir, encore et encore. Le préserver de choses qui ne le concernant pas, tel que son adultère avec Wilhuff Tarkin. Le priver du droit de lui opposer un « non » catégorique, comme en lui dissimulant que ses journées sont majoritairement consacrées à la réparation d’un tout nouveau prototype d’Etoile de la Mort dans les locaux de Mordor Industries. Lui sauver la face, en n’avouant pas avoir un enfant légitime, qui se promène sur l’île et dont il a désormais la garde exclusive, au décès de sa mère : une ancienne maîtresse. Puisque Galen Erso l’aime plus que sa propre vie, il est désormais temps qu’il le lui prouve, au lieu de vouloir l’aimer qu’à moitié. Qu’il lui prouve l’aimer suffisamment pour accepter chacune de ses facettes, les bonnes comme les pires. Qu’il fasse à son tour les sacrifices douloureux qu’il a été forcé de faire durant une année sur cette île pour convaincre Galen Erso de lui accorder son affection. Krennic ne cèdera pas. Krennic ne cèdera plus. Krennic réalise avoir été en deçà de ses possibilités durant des mois, tel un homme médiocre et sans valeurs. Krennic veut plus que tout retrouver le pouvoir et la domination de chaque pan de sa vie, – sa vie sentimentale comprise. Galen se pliera à sa volonté, car les choses ne peuvent se passer autrement entre eux. Il ne jouera plus le rôle que Galen désire qu’il joue. Il jouera selon ses propres règles. Lorsqu’il repense aujourd’hui, cela aurait toujours dû se passer ainsi. Krennic a été bien faible et lâche, exactement comme ce que Tarkin lui a reproché. Il peut encore redevenir l’homme qu’il a été dans son vrai monde. Il le peut avec un peu de force et de persuasion.

Alors qu’il essaie de se convaincre de ses nouvelles résolutions (vive la bonne année), la voix familière et rauque de son fiancé le tire de ses pensées obscures et décisives. Galen s’adresse enfin à lui, d’une voix affaiblie par les privations et la solitude. Quelques mots. Une simple constatation déguisée en un reproche : « Je m’attendais à te voir plus tôt. ». Krennic est bien incapable de le blâmer d’éprouver cette douloureuse sensation de trahison. Il laisse espacer quelques secondes avant de cingler, d’une voix claire une réponse. « Cela ne fait que quelques semaines. » fait-il remarquer un peu trop froidement, de manière à imposer une distance émotionnelle entre deux amants coupables de lourds secrets, digne d’un glacier gigantesque s’opposant à eux. Orson ne fait que mentir depuis qu’il est retourné dans leur vrai monde, – depuis cette scène sur la planète Eadu. Il part du postulat que tout ce qu’ils ont bien pu vivre sur cette île de malheur n’est qu’une illusion. Un putain de cauchemar. Comme cette nuit avec Tarkin… ne peut-il s’empêcher d’ajouter dans ses pensées, avant d’accompagner ces dernières d’un rictus suffisant. « J’ose espérer que l’on te traite bien. » Non, il s’en moque, et cela se sent au léger rictus sarcastique qui décore ses lèvres. Un rictus moqueur, presque insolent. Il veut le faire payer, plus que tout. Cette trahison. La trahison de toute une vie. Galen Erso a détruit toutes ses chances de plaire à l’Empereur. Galen Erso a saboté le projet de toute sa vie. Plus de trente ans de vie et d’efforts, de sacrifices et de privations. Galen Erso a tout anéanti, par ce qu’il estime n’être rien d’autre qu’une démarche égoïste et vaine. Au nom de quoi ? D’une cause perdue ? La rébellion, la paix dans la galaxie ? Foutaises. Krennic réfute cet argument. La seule paix que la galaxie mérite d’avoir est la sienne. Il ne négociera pas, il imposera. Cartes sur table. Il ne se montrera plus faible. Il affirmera enfin son point de vue, sans ciller, sans craindre de perdre Galen Erso, car une chose est désormais parfaitement claire dans son esprit, depuis leurs récentes entrevues sur l’île mystérieuse… Jamais, Ô grand Dieu jamais, il ne perdra Galen Erso. Galen Erso a beaucoup trop misé sur leur relation, sur eux. Galen Erso a fait le choix de tout perdre pour ses beaux yeux océan. Galen Erso ne partira jamais, car il n’a nulle part où aller. Galen Erso lui appartient. Corps et âme. Rien ne l’arrêtera, rien ne l’empêchera de mener sa vie ou ses projets comme il l’entend. Comme il en a toujours été secrètement question. « Je peux entendre une réponse négative… Les prisons impériales n’ont jamais eu bonne réputation. » souffle-t-il gravement, en renonçant à ce fragment de sourire pour revêtir en lieu et place une expression glaciale.

Krennic pose ensuite le plat de ses paumes contre les rebords d’une chaise en acier, afin de la tirer d’un coup ferme en arrière pour pouvoir y prendre place, toujours sans accorder le moindre regard ou clin d’œil à son « prisonnier ». Il ne rira pas, il ne lui soufflera aucun mot doux ou réconfortant. Orson ne doit pas se permettre un tel élan d’affection ou signe de faiblesse. Sans quoi, tous ses beaux projets s’évaporeront en fumée sous ses yeux. Il doit affirmer son autorité, ici et maintenant. Devant Erso. Lui montrer et lui prouver qu’il ne plaisante pas. Devenir menaçant et dangereux. Galen doit céder à ses prochaines demandes, c’est impératif. Il le doit, pour maximiser le plus de temps. Sans l’aide avisée de Galen Erso, ce n’est pas que la réparation du piège introduit par ce dernier dans le cœur de l’Etoile de la Mort ne pourra jamais se faire, bien au contraire, mais elle prendra bien trop de temps à son goût. Krennic n’a pour l’instant pas dévoilé aux autres que Erso a bel et bien compromis le projet, de peur que le Seigneur Vador ne mette un terme prématuré à une existence qu’il estime brillante.  Il n'en parlera qu’une fois le problème solutionné et définitivement derrière eux. Pas avant. Krennic imagine déjà le poids d’une pression qui reposera sur ses épaules, des deadlines cruciales, des moqueries du Grand Moff Tarkin, mais surtout de la sensation de vulnérabilité qui ternira chacune de ses réussites et obscurcira ses pensées logiques. Aucun impérial, mis à part lui et éventuellement quelques personnes de confiance, ne doit apprendre la sinitre vérité avant que les choses soient sur le point d’être oubliées.

« Je suppose que tu sais pertinemment pour quelle raison tu te trouves ici. » dit-il, dans un murmure à peine audible, en positionnant le datapad qu’il a emprunté avant d’entrer dans la salle, juste sous ses yeux. Tout en parlant, il se focalise sur chacun des mouvements de son index ganté le long de l’écran tactile haut de gamme. « Fuite d’informations confidentielles, détournements de biens appartenant à l’Empire, sabotage d’un projet top-secret. » Krennic parle mais ne regarde pas Galen. Krennic s’adresse à lui avec le plus de distance et de dureté possible, au vu des récents évènements et de la trahison du scientifique. Son parti pris : prétendre n’avoir conservé aucuns souvenirs de leur vie sur cette foutue île. C’est son seul moyen d’atteindre Galen le plus profondément possible. Il doit le briser, une nouvelle fois, pour ensuite faire germer dans son esprit quelques pensées insidieusement suggérées. Le faire courber l’échine une bonne fois pour toutes à l’ensemble de ses projets fantasques. Le faire capituler et accepter sa vraie nature. Le faire collaborer de bon cœur aux projets qu’il compte mener à bien sur cette île, s’ils doivent y retourner un jour ou l’autre. Le faire l’aimer encore et encore pour la personnalité destructrice, ambitieuse et téméraire qui est la sienne depuis toujours. « La détention à vie est ce que je peux t’offrir de mieux, compte tenu des circonstances funestes qui ont failli être les tiennes, si je n'avais pas interféré en ta faveur. » affirme Krennic, en farfouillant dans l’un des dossiers enregistrés dans la mémoire de son datapad personnel, pour en sortir une fiche technique, accompagnée de quelques schémas et plans de la station de combat mobile. « Ne te méprends pas sur mes intentions. Je ne l’ai pas fait pour toi, mais pour la sécurité du projet. » prétend Krennic, ce qui est en soi un mensonge. « Après ce que tu as fait, tu comprendras aisément que nous ne pouvons prétendre aspirer à une quelconque amitié. Cette amitié vieille de trente ans est désormais révolue, tout comme le reste. Tes manipulations n’auront pas seulement compromis le projet, mais également la confiance que je te portais et que tu n’as eu de cesse d’ébranler, depuis ta fuite de Coruscant. La confiance est une chose précieuse, Galen. Tu l’as trahie en t’enfuyant une première fois, mais je t’ai pardonné en réquisitionnant tes services sur Lah’mu. Je te l’ai redonnée, lorsque tu as commencé à retravailler pour nous. Tu l’as une seconde fois piétinée, en m’assurant te dévouer à la cause avec sincérité et efficacité, tout en fomentant un piège risquant de me coûter, non seulement ma carrière ou ma réputation, mais également ma vie. » Orson risque tout, à cause de cette erreur. A cause de cette faille dans la station de combat. « Trente ans de travaux réduits à néant. » soupire-t-il en contenant un grognement de rage, qui s’avère toutefois perceptible. On le sent dans la retenue, dans la frustration, dans la colère intériorisée. Il sent les muscles de son cou se crisper à cette pensée. Retourner sur Eadu, revivre ce qu’ils ont vécu… lui a fait momentanément mettre de côté tous les bons moments de leur relation sur l’île, pour se remémorer les pires dans leur vrai monde. Le goût amer de la trahison encore en bouche, métallique à cause du sang versé. « La détention à vie et les travaux forcés dans les mines impériales à l’autre bout de la galaxie est la vie qui t’attend, si nous n’obtenons pas ta collaboration sur la résolution d’une équation très simple, Galen. Quelle partie de mon projet as-tu donc injustement compromis ? Parce qu’il est évident que tu l’as compromis, pour avoir transmis des messages à la rébellion. A ta fille, Jyn Erso, si je ne m’abuse. Nous avons tout récupéré, Galen. J’ai pu tracer ces deux dernières semaines toutes tes communications. J’y ai décelé un certain nombre d’irrégularités. Tu as fait parvenir des informations concernant la sécurité du projet à un pilote impérial. Un traître, qui sera exécuté, une fois que nous l’aurons retrouvé. Tu as fait part d’informations de nature confidentielles. La rébellion sait que nous avons une arme. Les rumeurs se sont propagées dans toute la galaxie, suite à tes confidences. Ils savent pour la tueuse de planètes. Et je te connais suffisamment pour savoir également que tu ne t’es pas contenté… de laisser fuiter l’existence du projet et de son intérêt stratégique dans cette guerre. Ce n’est pas suffisant, d’exposer tous nos secrets, non. Mes secrets. Ce que tu veux, toi, c’est me faire payer ce qu’il s’est passé sur Lah’mu. Ce que tu veux, c’est me détruire en m’arrachant ce qui compte le plus pour moi, et ce qui compte le plus et a toujours compté à mes yeux… C’est bien ce projet. Tu veux le détruire de l’intérieur. Tu veux ruiner toutes mes chances de passer un jour Moff, d’évoluer au sein de l’administration impériale, et enfin de gagner les faveurs de l’Empereur. Tu veux briser ma réputation comme j’ai brisé ta famille. Tu veux me faire passer pour un idiot. C’était ton plan depuis le début. Tu as accepté de revenir travailler pour moi à cette fin sordide. Tu as activement participé à la création de cette arme dans le seul et unique but de la compromettre de l’intérieur. Alors, je te le redemande, pour que les choses soient parfaitement claires entre nous. Montre-moi donc, sur cet écran, où se trouve ton piège. » Tout en lui posant cet ultimatum, Krennic décide de faire tourner lentement l’écran, avant de poser enfin sur le scientifique un regard aussi glacé qu’une brise de vent d’hiver. « Tu peux encore changer l’histoire. Tu peux m’aider et réparer chacune de tes fautes. Si ce que nous avons partagé compte réellement pour toi, si notre amitié a un jour été à ce point importante pour toi, tu feras ce qui est juste pour le projet, comme ce que tu m’as promis à l’époque. Je t’ai cru, Galen. Je t’ai sincèrement cru sur ton implication. Je te croyais avec moi et non pas… contre moi. » murmure-t-il en adoptant un timbre plus rauque, moins sévère, comme pour le séduire, sans jamais ciller ou sourciller. « A moins que cette partie-là aussi, n’ait été qu’un autre coup de maître de ta part, afin de mieux endormir ma confiance. Tu mérites alors mes plus sincères félicitations pour avoir développé d’excellentes capacités dans l’art du mensonge et de la duperie… » Un rictus s’installe au coin de sa bouche. Amer et ironique. Il lui impose son regard perçant, qu’il intensifie délibérément pour apporter plus d’impact à ses menaces. Galen Erso n’a pas le choix. Et cette fois-ci… Orson espère que Galen fera le bon choix. « Dis-moi la vérité, pour une fois. » Sur ces quelques mots, Krennic reprend une expression plus dure et un ton de voix… plus sec. Il joue parfaitement la comédie. A moitié, à vrai dire. Une part de lui en veut toujours et viscéralement à Galen Erso pour avoir compromis le travail de toute une vie, mais l’autre part, recherche simplement à le convaincre de l’absence de tous ses souvenirs concernant l’île mystérieuse.

« Taste me, drink my soul. Show me all the things that I shouldn't know. When there's a blue moon on the rise. I had everything. Opportunities for eternity and I could belong to the night. I can see in your eyes. Everything in your eyes. You make me wanna die. I'll never be good enough. You make me wanna die and everything you love will burn up in the light. I would die for you, my love. I would lie for you, my love. I would steal for you, my love and I would die for you my love, my love. We'll burn up in the light and every time I look inside your eyes. I'm burning in the light, look inside your eyes. » ( MAKE ME WANNA DIE ❖ THE PRETTY RECKLESS )







Krennic dévisage longuement le visage tiré, et apparemment éprouvé du scientifique, sans ciller, sans lui sourire, sans lui faire signe que tout va bien aller. Car rien ne va bien aller. Krennic n’en démordra pas. Il ne laissera pas tomber son masque. Il continuera d’en vouloir à la terre entière, et en l’occurrence, à la trahison de Galen Erso. C’est bien plus simple de se focaliser sur les erreurs de son amant, plutôt que d’ouvrir les yeux sur les siennes. Des erreurs qu’il essaie d’oublier, d’enfouir si profondément en lui. Il ferme les yeux et fait l’autruche, comme il aime si bien le faire lorsqu’il est question de sentiments et d’émotions. Orson Krennic est quelqu’un qui exprime violemment ses émotions, mais… Ce ne sont que les pires d’entre elles qu’il laisse sortir hors de lui. Les bonnes, les meilleures, celles qui peuvent faire de lui un homme meilleur restent au plus profond de lui.

Galen lui fait remarquer que s’il collabore, il n’aura plus aucune raison de le garder en vie. Ce à quoi Krennic préfère ne pas apporter de réponse immédiate. Il reste silencieux, aussi muet qu’une tombe. Il sait très bien ce qu’il va faire subir à Galen, mais il ne compte pas lui en faire part. Il compte au contraire l’effrayer, et laisser l’angoisse dévorer son âme, le prendre aux tripes, jusqu’à le mettre à genoux. Il compte lui faire croire en conservant cette mine impassible et sévère, qu’il prévoit de mettre un terme à son existence sans sourciller. Il compte le laisser croire que son sort l’indiffère, alors qu’il n’en est rien. Il ira au bout de ses tentatives d’intimidation. D’une part, pour punir Galen pour avoir osé lui mentir pendant des années et saboter leur projet en commun, et d’autre part, parce qu’il ne désire pas passer aux aveux, et encore moins aux excuses pour ses infidélités. « Non. » répond-il sur un ton tranchant. Il joue son rôle à la perfection. « Seul le projet compte. » ment-il. Orson redevient, très brièvement, l’homme qu’il a été à une époque, au début de leur liaison. « Tu dois réparer les conséquences de tes erreurs. De tous tes mensonges. » Il le dévisage froidement, avec force. Orson évoque en sous-entendus le manège de Galen, du temps de la construction de l’Étoile de la Mort. Toutes les fois où le scientifique lui a menti, les yeux dans les yeux, en l’embrassant, en le touchant, en lui faisant l’amour entre les murs sombres de ses appartements. « C’est la moindre chose que tu puisses faire, désormais. » conclut-il, en rajoutant une couche de froideur et de dureté. Krennic glisse ensuite ses doigts sur l’écran de son datapad pour répondre à quelques message, après l’avoir récupéré à sa seule attention. « Je suis ravi que la raison prenne enfin le chemin de ton cerveau brillant. » chuchote-t-il avec un rictus. Il donne l’air de ne pas écouter les requêtes de Galen, mais il écoute en réalité très attentivement chacune d’elles. S’occuper de Jyn… Son souffle s’accélère discrètement. Il affiche une moue boudeuse. « Tu me prends pour sa babysitter ? » se moque-t-il sur un ton sarcastique, en terminant dans le même temps de répondre à ses messages. « C’est amusant comme tu penses… être en mesure de placer des conditions. » ricane Orson quelques secondes. Il dépose ensuite l’écran du datapad en face de Galen Erso. Il lui montre un schéma de la structure interne de l’Étoile de la Mort, avec l’intention ferme d’obtenir tout ce qu’il exige, sans concessions. « Montre-moi d’abord. » ordonne le directeur, cinglant. « On verra le reste ensuite. Peut-être que je consentirais à lui apporter ma protection... Elle aura bien besoin d’un père… » marmonne-t-il, en s’enfonçant dans son siège. Krennic glisse chacun de ses doigts entre ses phalanges, apparemment perplexe quant à la situation. « Après tout… J’en ferais une bonne impériale, endoctrinée à notre cause, et lorsqu’elle sera en âge, j’en ferais ma femme. » Il souffle ces mots sans rougir, sans trouver que ces derniers sonnent faux. Il est sérieux. S’il reste bel et bien dans ce monde, il épousera Jyn. Si ce n’est pas encore une hallucination collective, il scellera le destin de la fille de son meilleur ami. Il volera tout à Galen, il lui volera ce qu’il a de plus cher, comme Galen lui a tout pris par le passé.