Il est des intuitions qui ne peuvent être considérées comme des certitudes et doivent être, tout naturellement, prises avec des pincettes… Celles d’Albus – il en fait le constat tout à fait modeste – l’ont néanmoins rarement trompé. Cela ne l’aura pas toujours dissuadé de suivre les mauvais chemins ou de prendre les décisions les moins appropriées, mais il l’imputera pour sa part bien davantage à son caractère, à la mauvaise gestion de ses émotions, qu’à une quelconque défaillance de ses intuitions. Et en effet, dès l’instant où Albus Dumbledore a rencontré le jeune Tom Jedusor dans l’orphelinat où ce dernier était alors logé, il a eu une… intuition.
Rien d’entièrement arrêté néanmoins. Il y avait les signes naturellement alarmants, ceux qui lui avaient été rapportés par Mrs Cole ou encore par le jeune Tom lui-même qui, trop enthousiaste à l’idée de recevoir la preuve qu’il était plus que ce qu’on l’avait soupçonné être, lui avait fait la confidence d’actes hautement répréhensibles, et d’autres plus neutres en eux-mêmes, mais qui dissimulaient malgré tout une sorte de sous-texte relativement perturbant. Il y en avait d’autres aussi, plus subtiles, presque invisibles, et qui auraient peut-être pu échappé à sa propre vigilance s’il ne l’avait pris au dépourvu dans un moment de pure sincérité, au cours duquel il n’aurait su être à même de lui dissimuler autant ses pensées que ses émotions.
Depuis trois ans que le jeune Tom Jedusor est élève à Poudlard, oui, le professeur de métamorphose porte sur lui un regard attentif et plus prononcé qu’il ne le fait avec la plupart de ses élèves, pas tant en l’occurrence par favoritisme (un favoritisme dont le jeune vert et argent bénéficie déjà plus que largement de la part du professeur Slughorn dans tous les cas) que par légère inquiétude, le besoin, disons, de s’ôter d’un irrépressible doute. Bien sûr, c’est avec discrétion qu’il s’enquiert de l’évolution de son jeune élève. Il peut compter pour cela sur les cours qu’il lui dispense ou encore ceux que lui rapportent ses collègues. Le discours de ces derniers, d’ailleurs, devrait assez naturellement le rassurer à son sujet. Au regard de ses pairs, Tom Jedusor est en effet considéré comme l’élève parfait : d’une intelligence redoutable, d’une serviabilité et d’une politesse à toute épreuve, d’un charisme irrésistible… Oui, mais loin de véritablement le rassurer, ces traits de caractère qu’il impose à la vue de ceux qui lui portent attention ne viennent que davantage l’intriguer, l’inquiéter… Car de tels atours, auxquels il est trop simple de se laisser prendre, n’en sont que naturellement plus dangereux – et Albus en sait, d’expérience, quelque chose.
Ceci dit, pour l’heure, ce n’est pas tant la sécurité des autres que celle de ce jeune adolescent qui inquiète le professeur de métamorphose, et c’est aussi là la raison de sa surveillance attentive… Les chemins sur lesquelles il pourrait éventuellement s’engager sont sombres et sinueux, et ne le laisseront pas indemnes… Empêcher ce qui peut encore l’être, sans s’octroyer une mainmise trop directive sur les décisions de Tom est ainsi sa parade, tandis qu’il se sent devenir le seul obstacle entre ce garçon trop ambitieux et la noirceur qui, progressivement, semble vouloir définitivement envahir une âme déjà pervertie… Mais son regard, si attentif et perçant soit-il, ne le garde pas de certaines surprises, et il n’imaginait pas, par exemple, que son élève débarquerait en trombe dans son bureau, d’une humeur telle qu’il n’est guère nécessaire à Albus d’user de ses talents de legilimens pour comprendre l’étendue de sa colère et de sa frustration.
« Il est d’usage de frapper avant d’entrer, Tom », dit-il calmement en levant les yeux de la pile de copies qu’il est en train de corriger, son regard électrique le sondant à travers ses lunettes en demi-lunes.
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Albus Dumbledore
Happiness can be found, even in the darkest of times, if one only remembers to turn on the light.
L’ombre oblique créée par la porte ouverte de la salle de classe plongeait la moitié du corps de Tom dans l’obscurité. La lumière artificielle engendrée par les bougies allumées ici ou là dans la pièce dévoilait le poing droit du jeune homme. Il était fermement serré autour de sa baguette qui aurait probablement cédé s’il avait plus de force. Il était prêt à en découdre. Avec qui ? Dieu seul savait. Albus Dumbledore semblait être le sac de frappes que Tom avait choisi ce soir pour décharger sa colère. « Pourquoi le nom de mon père n’apparait-il nulle part, Professeur ? » Abrupts, violents, ses mots s’échappaient de la noirceur dans laquelle le futur Voldemort était plongé. Il avait fait fi du rappel des règles élémentaires de la part d’Albus : si la porte avait été fermée, Tom l’aurait probablement fait exploser avec un sort quelconque. Il était impossible de comparer sa colère vive à un volcan en ébullition. Elle était si diffuse, si profonde et animée qu’un univers entier explosait en lui. Un véritable big bang dans lequel s’effondrait le mythe qu’il avait bâti autour de son père dès qu’il fut en âge de parler et de formuler des idées claires. L’idée que sa mère puisse être une sorcière ne lui avait jamais effleuré l’esprit. Elle était trop saugrenue, trop inconcevable pour que Tom juge nécessaire de penser à une telle éventualité. Son père ne pouvait qu’être le sorcier dans cette histoire. Il devait l’être. Tom Jedusor ne pouvait concevoir que sa magie vienne d’une personne aussi faible que sa génitrice, de cette pleutre qui s’était laissée crever sur un trottoir une fois qu’elle avait accouché de lui. Il n’acceptait déjà pas d’être un sang mêlé au regard de son talent, de son accointance presque gémélique avec la magie… Alors, cette réalité au sujet de son sang, de son père était la goutte de trop. Il méritait mieux. Son génie, sa puissance méritait mieux. Tom contenait tellement sa colère que son poing serré tremblait autour de sa baguette.
Ces affres violentes ne venaient cependant pas de nulle part. Elles étaient le fruit d’une accumulation de semaines intensives de recherches au sujet de ce père au point de créer un rituel presque sacré dans cette quête de réponses. Tom suivait toujours la même routine après chaque journée de cours. Il se rendait dans un premier temps dans la salle des Trophées où il parcourait inlassablement les noms gravés sur chacune des coupes en nourrissant l’espoir que celui de Tom Jedusor Snr. soit apparu au cours de la nuit ou de la journée. Il relisait même chaque patronyme au moins quatre ou cinq fois avant de passer au suivant. Un vrai maniaque obsessionnel. Si les fantômes de l’endroit s’interrogeaient au départ sur son comportement, ils finirent par ne plus le remarquer du tout. Ils s’inquiétaient même quand Tom avait quelques minutes de retard sur son emploi du temps de maniaque compulsif avant d’être rassurés en le voyant débarquer avec cette folie dans le regard, profondément convaincu qu’il trouverait enfin son dû aujourd’hui. Et comme toujours, la salle des Trophées se révélait être une constante déception.
Tom était cependant un garçon plein de ressources et ne restait sûrement pas sur l’échec de la salle des Trophées. Il filait ensuite à la bibliothèque pour consulter les registres ou même les livres magiques en eux-mêmes pour voir si son prétendu illustre père n’avait pas laissé sa trace quelque part dans l’histoire. Comment pouvait-il en être autrement ? Même si les trois quarts venaient de sa propre personne, il avait bien dû hériter sa magnificence de quelqu’un ! Son père avait forcément fait de grandes choses. Il ne pouvait en être autrement. Alors, comme un dément, Tom parcourait avec frénésie les pages des ouvrages qu’ils consultaient. Il n’était pas rare non plus de le voir balancer un livre ou de le maltraiter pour évacuer sa frustration quand il ne trouvait pas ce qu’il voulait. Une honte. Comment les livres pouvaient nier cette vérité écrasante ? Un Jedusor avant lui avait dû passer ici ! Un Jedusor avait forcément dû laisser une trace ! Il attirait les regards curieux des élèves qui se demandaient ce qu’il se passait ou qui était en train de perturber la tranquillité de la bibliothèque. Une curiosité qui se dissipait bien vite quand ils avaient le malheur de croiser le regard noir et possédé du jeune homme.
Et cette journée avait été la fois de trop. Il n’y avait pas de Jedusor tout simplement parce que sa mère, Merope, dont il ne connaissait pas encore le nom, était la sorcière de la famille. L’idée s’était imposée de plus en plus dans son esprit au point de faire plus de bruit que les autres, plus de bruit que ses mensonges parce que la vérité était toujours tonitruante. La nier la rendait encore plus sonore, invasive au point qu’elle était la seule pensée à envahir l’esprit de Tom. Ton père est un moldu, Tom. Un sale petit moldu grotesque. Il avait saccagé le coin de la bibliothèque dans lequel il s’était réfugié, créant un bruit monstre qui força la bibliothécaire à venir voir ce qu’il se passait. « Jedusor ! » Il était sur le point de jeter un Incendio sur le rayon quand elle était arrivée. Elle était à la fois horrifiée et désarçonnée de voir le jeune homme pris dans une telle fureur, lui qui était si calme et poli d’habitude ! Malgré l’heure tardive, malgré le simple éclairage à la bougie, elle avait pu remarquer son changement d’humeur dans son regard : cette folie qui devint sérénité au moment où il revêtait son masque. Elle l’avait interrompu dans sa pleine frustration, accroissant sa colère furibonde et voilà qu’il se vit forcer de la contenir pour ne pas briser son image si parfaite. Il avait envie de la tuer. Littéralement. Ses pulsions le lui ordonnaient. Il se retint. « Excusez-moi, madame. » À l’aide de sa baguette, il remit en place tout le désordre qu’il avait causé. Effrayés, les livres qu’il avait dérangés clopinaient jusqu’à leur place attitrée. Ils se faisaient le plus discrets possible, craignant de subir le courroux de Tom. « Cela ne se reproduira plus. » L’élève lui adressait ce sourire dont lui seul avait le secret, plein de charme et d’innocence. Séduite, la bibliothécaire en resta là et le Serpentard s’échappait de l’endroit.
Coupé dans son élan, sa grogne était encore plus démesurée. Dieu merci pour lui, grâce à l’heure tardive, il ne croisait pas grand monde dans les couloirs comme la plupart des élèves occupaient leur temps libre dans leur salle commune respective. Mais par précaution, Tom se devait de se retenir d’exploser. Son père était le coupable tout désigné dans sa tête pour une telle tromperie. Comment ça, il n’était pas sorcier ? Comment ça, sa mère était sorcière alors qu’elle était si faible ? Il était en boucle, haïssant encore plus ses géniteurs, surtout cette mère qu’il n’avait jamais considérée. Elle passait de néant à tout en un éclair violent. Sans elle, il n’aurait jamais pu arpenter les couloirs de cette école, y étudier… Le lien avec elle prenait trop de place, devenait trop important pour lui qui rejetait plus que tout cet attachement avec elle. Il devait nier désormais ce père, ce nom qu’il avait tant aimé et qui le dégoutait profondément maintenant que le mythe s’était écroulé comme un château de cartes déjà fragile à sa base. Tom était au fond de lui anéanti. Mais il ne l’avouerait jamais, créant un gouffre encore plus profond dans ses entrailles.
Mais… taper sur les morts n’était pas suffisant pour lui, pas assez pour libérer sa frustration. Dans sa logique totalement influencée, voire empoisonnée par la haine, il se dit que s’il n’était jamais venu ici, jamais il n’aurait découvert la vérité. Et qui l’avait arraché de son orphelinat et amené à Poudlard ? Dumbledore. Sans lui, il aurait pu continuer de vivre tranquillement dans son illusion et ne jamais apprendre la trahison de ceux qui l’ont mis au monde. Si cette colère était totalement injustifiée et illogique envers Dumbledore, l’inconscient de Jedusor l’avait choisi comme bouc émissaire parfait parce que, d’une certaine façon, le professeur comptait dans le cœur si rigide et froid de Tom. Il était la figure d’autorité qu’il respectait et craignait à la fois. Un référent dans sa solitude auquel il s’était attaché malgré lui et à sa manière. Il se haïssait encore plus pour cela, pour s’être laissé aller dans de tels sentiments aussi bas, dans une telle vulnérabilité auprès d’Albus. Ses sentiments contradictoires entraient en guerre et menaient une bataille sans merci dans ses entrailles. Voilà pourquoi Tom Jedusor s’était dirigé d’un pas déterminé vers le bureau de Dumbledore ce soir-là : pour qu’il soit le réceptacle de sa haine.
Il sortait de l’ombre dans laquelle il était plongé et s’avançait vers Dumbledore. Tout le charme et la candeur de Tom s’étaient envolés depuis que la fureur avait tordu son visage. Le masque disparaissait peu à peu et il offrait à son professeur la réalité du monstre qu’il tenait captif en lui depuis si longtemps. Ses mots, il les crachait avec verve. Ils n’étaient que l’expression la plus pure de sa souffrance à la hauteur de l’effondrement de son monde. La vérité n’était jamais bonne à entendre, surtout quand on avait de telles œillères… et Tom était la victime de cette cruauté qu’il s’était infligée tout seul au final en construisant ce mythe autour de son père. « Le nom de mon père devrait être ici. Et pourtant, aucune trace de lui. NULLE PART ! Pourquoi n’y est-il pas professeur, mh ?! Des pages et des pages pour d’autres sorciers pathétiques et pour moi ? Pour ma famille ? RIEN. » Maître de certains pouvoirs, les flammes des bougies bougeaient vivement, au rythme de l’intensité de sa rage. Certaines finissaient même par s’éteindre, écrasées par les poids de tous ses ressentiments qui rayonnaient d’une négativité folle. Mais au-delà de sa colère, quelque chose d’important s’était brisé en Tom au point d’inoculer en lui une certaine tristesse qu’il n’avait jamais ressentie auparavant. Jusqu’ici, ce sentiment lui avait été totalement étranger. Une faiblesse à ses yeux qu’il contenait tant bien que mal, mais ses prunelles rougeoyantes le trahissait. Il contractait durement sa mâchoire pour interdire à ses sentiments de s’échapper — il en montrait déjà trop, pour son plus grand regret. Il s’avançait d’un pas encore vers Albus, totalement dévoilé par la lumière qui révélait l’éclat triste dans ses yeux bleus. « Les livres sont censés transmettre un savoir sacré. Pourquoi sont-ils remplis de mensonges en niant le nom de mon père ? » Son ton était toujours aussi tranchant, ses mots pleins de reproches et massacreurs. Sa voix se cassait sur la fin, ses lèvres tremblaient malgré lui. Il n’attendait pas de réponse à cette question parce qu’il l’avait déjà — cette réponse qu’il refusait d’accepter, qu’il rejetait à coup de poing au fond de ses entrailles chaque fois qu’elles eurent le malheur de remonter le long de ses tripes, de son cœur. Il n’y avait pas et il n’y aurait jamais de Tom Jedusor Snr. inscrit quelque part sur les murs de l’école parce que Tom Jedusor Snr était un moldu. Un être banal, très, très loin d’être aussi spécial que son fils. Sa mère, cette lâche, était malheureusement celle qui lui avait transmis ces gènes sorciers. Cela tournait en boucle dans sa tête et ces pensées n’étaient pas près de le quitter. Il se sentit profondément trahi. Profondément trompé. Toutes les bougies finirent par s’éteindre, soufflées par son ire intenable. À l’image de la pièce, il n’y avait plus rien de lumineux en Tom.
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Albus Dumbledore
▿ Ton univers : Fantastic Beasts
▿ Date de naissance : 30/08/1975
▿ Age : 49
▿ Métier : Professeur d'histoire à l'université
▿ Quartier : Hogwarts Place
▿ Côté cœur :
The trouble is, humans do have a knack of choosing precisely those things which are worst for them...
▿ Dons/capacités/pouvoirs :
▿ Baguette magique
▿ Pacte de Sang
▿ Legilimancie
▿ Transplanage
▿ Fumseck
▿ Magie non verbale
▿ Occlumancie
▿ Pensine
En cet instant plus qu’en aucun autre, si ce n’est peut-être celui de leur première rencontre, à l’orphelinat, où l’enfant qu’il était alors n’avait pas encore composé son si parfait masque social, Albus a conscience d’observer le vrai visage de son jeune élève : déformé de rage, d’incompréhension et de colère. L’intense sentiment de trahison duquel il s’estime victime, il le décharge sur celui-là même qui, peut-être, sera le seul à ne pas être complètement surpris d’un tel revirement. Le Tom Jedusor qu’Albus a sous les yeux n’a pas grand-chose à voir, si ce n’est rien du tout à voir avec ce jeune homme charmant, poli, courtois, coqueluche de ses enseignants, qu’il prétend être en temps normal. Le professeur se redresse légèrement sur sa chaise tandis que son interlocuteur évoque le nom de son père, un nom qui n’apparaîtrait donc nulle part… le nom d’un père qu’il avait voulu considérer en modèle qu’il ne pourra à présent plus jamais suivre. Albus se souvient encore leur première conversation (comment l’oublier ?) : « Ma mère n’avait sûrement pas de pouvoirs magiques, sinon elle ne serait pas morte », avait-il alors déclaré sans détour. Albus n’avait rien pris la peine d’affirmer ou d’infirmer alors. Et pour cause, alors que Tom lui demandait si son père avait été un sorcier et qu’il lui répondait que non : le fait est qu’il n’en savait effectivement rien… la quête de ses origines avait dès les premiers instants eu son importance aux yeux de Tom… et à l’évidence, il en est arrivé à une conclusion qui lui déplaît profondément.
A la rage manifeste de Tom s’oppose le calme du professeur, qui l’observe avec mesure, ne l’exhortant pas pour autant à plus de calme. Des manifestations d’émotion les plus vives découlent parfois les vérités les plus éloquentes, et dans le cas de Tom, il serait presque rassurant, en réalité, de lui découvrir la capacité à éprouver dans une telle ampleur, même une émotion négative… en revanche, la violence susceptible d’en découler est elle bien plus alarmante. Albus ne prend pas la peine de répondre à sa question directement, parce que cette même question ne peut être que rhétorique. Tom a déjà compris. Il a nécessairement compris.
« Je suppose que votre esprit brillant aura su de lui-même répondre à ces questions, n’est-ce pas ? » répond Albus, aussi rhétorique dans son interrogation que son élève a pu l’être dans les siennes, alors qu’il ne faisait jamais qu’accumuler des questionnements qui trouvaient d’eux-mêmes un sens et un raisonnement que ne suggérait guère d’aller les chercher très loin. Tom s’est façonné des certitudes à partir de rien. Nul ici, jamais, n’a suggéré au jeune vert et argent que son père était véritablement le grand sorcier que Tom voudrait qu’il soit… en dépit de son talent manifeste – ou peut-être même que ce dernier aurait dû lui mettre la puce à l’oreille (car l’on ne réussit jamais mieux que lorsque l’on a des choses à se prouver) –, il doit accepter que son père n’était pas un sorcier, non… et que sa pauvre mère ne l’avait peut-être pas été davantage. « De même que vous ne sauriez accorder votre seule foi en quelques écrits qui peuvent être aussi mensongers que n’importe quelle parole. » Il marque une légère pause. « Il est très probable en effet que votre père n’ait jamais fait ses classes ici, ni dans aucune autre école de magie. » Son ton demeure très mesurée, encore et toujours, et ce en dépit de la rage si palpable de son interlocuteur qu’elle imprègne l’atmosphère d’une aura peu engageante. Albus le ressent, profondément, la confirmation de crainte jusqu’alors muselées, et l’incertitude quant à ce qu’il pourrait y faire. « Je vous demanderai, Tom, de faire preuve de davantage de calme, la rage et la déception n’ont jamais été bonnes conseillères pour qui que ce soit », reprend posément Albus tout en rallumant, d’un geste, toutes les bougies que la colère irrépressible de Tom venait d’éteindre. Rétablir la lumière en toute obscurité, telle est l’ambition d’Albus, mais la noirceur qu’il découvre dans les prunelles de cet adolescent, à nouveau éclairées par la lueur des bougies, n’a malheureusement rien d’engageante, lui-même doit bien en convenir. « S’il vous tient tant à cœur de connaître l’identité de votre père, je vous conseillerai vivement de poursuivre vos recherches en dehors de ces murs. » Il marque une pause. « Nous ne sommes pas définis par ceux qui nous donnent la vie, Tom. Ce n’est pas notre naissance qui détermine ce que nous sommes. »
Ce son nos choix.
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Albus Dumbledore
Happiness can be found, even in the darkest of times, if one only remembers to turn on the light.
Pendant un laps de temps relativement court, quantifiable en une poignée de seconde, Tom offrait au monde une vision plus humaine de lui-même. « Je suppose que votre esprit brillant aura su de lui-même répondre à ces questions, n’est-ce pas ? » La question supposément rhétorique d’Albus l’avait percuté avec la même violence qu’un coup de poing asséné en plein dans l’estomac. Au fond, la colère n’était pas le seul sentiment qui l’habitait — la tristesse était également là, bien qu’il la niât. Elle se déversait dans chacune de ses cellules, empruntant le chemin tracé par ses vaisseaux sanguins pour envahir les moindres recoins de son corps déjà fort grand pour un jeune homme de seize ans à peine en pleine croissance. Tom n’acceptait pas ce sentiment qui le répugnait plus que tout. Le contenir était périlleux, difficile, parce qu’il ne le maitrisait pas et sentant que cela lui échappait, il en tremblait. Sa respiration passait de tempête à chaos tandis que ses yeux clignaient vivement à cause de ses larmes qui ne demandaient qu’à être libérées. Et contre l’avis de l’hôte de ce corps, elles trouvaient un chemin pour s’échapper de ses yeux, intensifiant le bleu naturellement froid de ses iris. Sa colère ne s’était pas pour autant évaporée : Tom regardait Albus avec ses sourcils froncés tandis que des larmes roulaient sur ses joues, soulignant la ligne de sa mâchoire sculptée avec précision. « Vous savez parfaitement que ma mère ne peut pas être une sorcière. C’est impossible. » Il crachait ses mots, bien qu’ils fussent étouffés par moment à cause de ses sanglots étrangement silencieux. Il était encore dans le contrôle, refusant de s’abandonner totalement à sa tristesse déjà qu’il faisait preuve d’une immense faiblesse face à Albus. Merope recevait tout son dégout quand il appuyait sur le mot qui renvoyait inexorablement à elle. « Elle m’a abandonné. Elle a choisi de mourir plutôt que de… » M’aimer. Ça lui avait presque échappé, mais fort heureusement pour lui il s’était retenu. L’amour était un sentiment que Tom ne maitrisait tout bonnement pas et qu’il ne chercherait jamais réellement à comprendre puisqu’il ne lui inspirait rien d’autre que de la fragilité émotionnelle. Aimer, c’était s’aliéner. Hors de question.
Pourtant, s’il s’intéressait réellement à Merope un jour, il saurait qu’elle a fait bien des choses pour lui par amour — celui de révéler la vérité à son géniteur au sujet du sortilège qui le tenait chevillé à elle afin que leur enfant ne vive pas dans le mensonge, celui de vouloir fuir de chez elle pour ne pas offrir une vie de misère à son fils dans une famille entachée par la violence et l’inceste. Abandonner Tom à l’orphelinat a sûrement été la plus grande preuve d’amour de Merope à son égard, car si elle l’avait laissé entre les mains d’Elvis et de Morfin, pas sûr qu’ils l’auraient laissé en vie. Les preuves d’amour de Merope étaient maladroites, mais elles étaient là. Malheureusement pour elle, où qu’elle soit, jamais Tom n’interprèterait cela comme tel. « Elle était faible. Je ne le suis pas. C’est impossible, vous entendez ? » il préférait conclure plutôt que de laisser ses sentiments prendre le dessus et perdre totalement le contrôle.
Même si Tom considérait cet instant comme une anomalie dans son organisme complexe, elle était pourtant la preuve manifeste que tout n’était peut-être pas perdu pour lui s’il savait faire preuve encore d’un tant soit peu d’émotion. Pendant qu’il ruminait sa colère et sa tristesse, il n’écoutait que vaguement les paroles pleines de sagesse de son professeur. Le peu qu’il captait suffisait à lui donner des maux d’estomac à deux doigts de l’ulcère tant les propos étaient déplaisants à son oreille. Il crachait même entre ses dents, en opposition constante à ce qu’on pouvait lui proposer — comportement typique de l’adolescence. « Croyez-vous vraiment que j’ai envie d’en savoir plus sur lui à l’extérieur alors qu’il n’a été, jusqu’ici, qu’une constante déception ? » Sous-entendu : il n’avait pas la force de subir davantage que ce qu’il s’était infligé ces derniers mois au niveau des attentes et des espoirs qu’il avait fondés sur sa famille qu’il pensait exceptionnelle. « Je ne veux plus rien savoir de lui. » Mensonge éhonté quand on sait qu’il le massacrera des années plus tard. C’est là la preuve qu’il aura malgré tout effectué quelques recherches.
Il ravalait ses derniers sanglots, laissant ceux échoués sur sa peau s’évaporer d’eux-mêmes. Seule trace de ses pleurs récents : ces traces rouges tirant sur le violet autour de ses yeux. Tom semblait avoir retrouvé son calme (suivant peut-être inconsciemment les conseils de celui qu’il prenait en de rares occasions pour un phare dans cette épaisse nuit), mais son stoïcisme n’était qu’une illusion — sa haine pestait encore en lui. La preuve en est avec les propos qui suivirent : « Ma mère ne m’a laissé guère de choix quant à mon avenir. Elle m’a condamné dès mes premières secondes de vie en accouchant de moi dans ce mouroir. Elle m’a donné naissance dans un lieu moldu — c’est une insulte. Vous parlez sans savoir. C’est trop facile de se positionner comme vous le faites : en débitant des lieux communs qui amadouent les faibles d’esprit. Ce que je ne suis pas, Professeur. » C’est ainsi qu’il tentait de se rassurer. Là, c’était le sang des Gaunt qui parlait sans qu’il s’en rende compte. Celui de Serpentard aussi, son illustre ancêtre qu’il ignorait encore être le sien. Les choix déterminaient ce que nous étions — c’est plus qu’une vérité à ce stade — mais Tom n’avait pas foncièrement tort de penser qu’il était maudit depuis sa naissance. Le sang des Gaunt entaché par l’inceste, les déviances et la violence l’avait condamné dès le départ. Lui qui y attache tant d’importance devrait peut-être remercier son père d’être un moldu — faible lueur d’espoir dans cet océan de sauvagerie infecté depuis trop longtemps déjà.
(c) SIAL
Albus Dumbledore
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Jamais encore Albus n’avait constaté une telle fragilité chez son interlocuteur. Aussi encourageante que dangereuse, la preuve d’une aptitude à une émotion profondément humaine, mais dont il pourrait faire mauvaise usage. Les émotions exprimées par Tom Jedusor sont si rares qu’elles ne peuvent être libérées que le plus violemment du monde. Albus laisse son interlocuteur dérouler un discours dont il connaît d’ores et déjà les limites sans que le professeur ait à dire quoi que ce soit. Si, bien sûr que sa mère peut être une sorcière, évidemment que c’est possible. La faiblesse, la mort, la fragilité ne sont pas l’apanage des Moldus. Ils sont l’apanage de ceux qui ont en commun cette humanité que Tom rejette tant quand elle pourrait pourtant être sa plus grande force. Tom poursuit encore, toujours sur la même lancée, déterminé à croire qu’il ne peut en être autrement, que l’imaginaire qu’il a construit autour de ses parents ne peut être que le résultat d’une réalité imparable. Déjà à l’époque de leur rencontre, il avait fait ce constat sans sourciller, des déductions qui ne venaient que de préconçus qu’il avait construits lui-même, sans que personne au monde ne les ai jamais encouragés.
« Oh, mais j’en suis convaincu », répond posément Albus quand Tom remet en question la possibilité qu’il veuille véritablement en apprendre davantage au sujet de son père, cette source sans nom de déception. Oui, Albus en est convaincu, en effet, et ses paroles ne le trompent pas. « Et c’est bien normal, au demeurant. Il est tout naturel de vous interroger sur vos origines et d’espérer en apprendre davantage, Tom. Je ne saurais que vous conseiller néanmoins de vous rappeler que contrairement à ce que vous seriez tenté de penser, elles ne vous apprendront rien de qui vous êtes réellement. »
Contrairement à ce que se plaisent à dire et affirmer ces sorciers de sang pur qui placent leur naissance au-dessus de tout au lieu d’admettre que ce sont définitivement nos choix et nos actes qui nous définissent, bien plus que quoi que ce soit d’autre. Et cela, il faudra que son interlocuteur daigne l’entendre s’il veut enfin accepter de se construire indépendamment de ses racines. Plus facile à dire qu’à faire, bien sûr, surtout quand on a soi-même conscience des racines en question, c’est néanmoins une étape importante à franchir, une étape qu’Albus ne paraît pas en mesure de franchir et de dépasser pour le moment.
« Je ne vous ai jamais considéré comme un faible d’esprit, Tom. Bien au contraire, j’aurais même tendance à penser que vous êtes parmi les personnes les plus intelligentes qu’il m’ait jamais été donné de côtoyer – mais cela, vous le savez déjà, bien entendu. » Il marque une pause. « Les lieux communs existent pour de bonnes raisons, ils reposent sur ces vérités inéluctable qu’il n’est pas si terrible de se laisser inculquer. » Il marque une pause. « Vous semblez prétendre que votre avenir serait déjà tout tracé quand j’ai sous les yeux le signe même de toutes les possibilités qu’il vous offre. »
Selon donc qu’il s’abandonne à l’aspect le plus sombre de sa personnalité ou qu’il consente à laisser s’exprimer cette part bien réelle d’humanité qu’il lui révèle en cet instant, et qu’Albus est capable de trouver aussi touchante qu’effrayante.
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