Après sa rencontre intrigante et bouleversante avec le jeune Malefoy, Harry avait mis des journées, et surtout des nuits, à s’en remettre, ça l’avait pas mal secoué au point que ses cauchemars sont remontés d’une flèche. Il y avait bien trop d'informations à digérer, démêler le vrai et du faux, bien que tout cela sonnait vrai au fond de lui. Scorpius lui avait donné une adresse sur un papier pour voir l’homme qui saura régler son “petit” souci d’amnésie ; Albus Dumbledore. “Monsieur Potter, vous êtes un sorcier.” lui avait dit son “gendre”.  Harry ne se sentait pas sorcier, il avait surtout envie qu’on lui foute la paix loin de la célébrité et tous les problèmes à venir, mais avait-il vraiment le choix ? Il y a quand même un fou psychopathe qui a assassiné son fils de sang-froid, un fils qui porte le prénom de ce professeur, Albus Dumbledore devait être quelqu’un de très important dans sa vie, voilà pourquoi il se sentait obligé d’aller à sa rencontre.

Il avait repoussé l’échéance au maximum, ayant toujours un prétexte d’avoir quelque chose de plus urgent à faire, comme… Rien, en fait. Et puis un beau jour, quand la culpabilité grandissant d’avoir le sentiment d’abandonner son fils -du moins son cadavre- aux mains de ce Voldemort, il se pointa devant l’université, prêt à affronter son destin. Le plan était simple ; voir le professeur pour savoir comment arrêter ce “sorcier”, récupérer le corps de son fils, l’enterrer, s’enivrer et retourner dans les méandres de ses cauchemars Levant les yeux vers la grande bâtisse et baissant le regard sur le papier, d’après l’adresse que Scorpius lui avait indiqué, c’était bien ici.  C'était évident. Il s’imaginait bien un vieux professeur avec une longue barbe et des lunettes en demie-lune donnant des cours, c’était du moins ce que ces rêves -cauchemars- lui indiquaient sur son physique.

Harry entra donc dans la bâtisse. Perdu, il demanda son chemin à quelqu’un qui passait par là. Une fois la fameuse salle trouvée, il attendit sagement, adossé à un mur, que le cours se termine. L’attente ne fut pas longue et les élèves sortirent en masse de la classe. Rassuré que tout le monde soit bien sorti, il toqua à la porte. « Professeur Dumbledore ? »  Demanda-t-il avec une pointe hésitation. Il avait un doute, il ne s’attendait pas à une version jeune, bien fringuant, des rides et de la barbe en moins. Pour vérifier qu'il ne s'était pas trompé de salle, il jeta un coup d'œil vers la porte.  « Pardonnez-moi de vous déranger, on m’a dit que je pouvais vous trouver ici… et que vous pourriez m’aider. » Harry se sentait nerveux, l’homme en face de lui dégageait un certain charisme tout en imposant un respect rien qu’avec un regard. Il se rendit compte qu’il ne s’était pas présenté, il se passa une main derrière la nuque comme pour cacher sa gêne. « Je suis Harry Potter. »

I'm here now

feat. Tom

Se choisir un travail qui ne tolère guère l’anonymat et favorise le bouche-à-oreille n’était pas un geste calculé de sa part, mais le moins que l’on puisse dire, néanmoins, c’est que cela lui aura rendu le plus fier des services. Il n’est pas rare qu’il découvre sur le seuil de sa salle de classe ou d’un amphithéâtre où il enseigne la silhouette d’un ancien élève qui aura voulu lui rendre visite. La plupart de ces personnes lui sont inconnues, beaucoup attendent de lui qu’il soit un homme que les circonstances ne lui ont jamais permis de devenir, pour autant, il prend toujours le plus grand plaisir à s’approprier, non sans la plus grande curiosité, ces bribes remarquables d’un futur qu’il ne connaîtra jamais, et qui ont fait de lui, au regard de nombreux sorciers, un symbole qu’il est loin de penser incarner.

Découvrir, donc, qu’un jeune homme sur qui son regard n’avait jamais eu l’occasion de se poser l’attend à la fin de l’un de ses cours ne le surprend guère. C’est un jeune homme aux cheveux sombres, aux lunettes rondes, mais ce n’est pas ce qui attire en premier lieu le regard et l’attention d’Albus. Ce jeune homme semble hésitant… pour des raisons évidentes – il ne s’attendait pas à ça. Il ne s’attendait pas à ce qu’il ait cette apparence… Quant à Albus… Sans jamais avoir eu l’occasion de rencontrer ce jeune homme, il est pourtant persuadé de le connaître, et son regard hautement curieux le transperce. Oui, il sait qui il est. Non parce qu’il a déjà eu l’occasion de le rencontrer, mais parce qu’il a tant entendu parler de lui qu’il a le sentiment de le connaître déjà par cœur.

« Harry Potter », répète-t-il alors qu’un sourire sibyllin orne ses lèvres. « J’ai beaucoup entendu parler de toi. »

Et cette phrase, il a dû l’entendre tant de fois. Et pour cause, Harry Potter est une véritable légende. Tous ceux qu’il a retrouvés de ses vies ancienne et future lui ont tous, à un moment ou à un autre, parlé de lui, l’Elu. Le garçon qui a survécu.

« Je suis ravi de faire enfin ta connaissance », ajoute-t-il afin de lui faire comprendre que celui qu’il est, ici et maintenant, le rencontre pour la toute première.

Peut-être cela sera-t-il un choc pour lui. Peut-être également que non. Albus a pu constater à bien des égards que les réactions à son sujet pouvaient être aussi enthousiastes qu’épidermiques, en tout cas jamais neutre.

« Que dirais-tu d’une tasse de thé ? » puisque c’est, aux yeux d’Albus, le préambule idéal à n’importe quelle situation digne de ce nom.

C’était avec le cœur battant d’une étrange excitation mêlée à une certaine d’angoisse de l’inconnu, parce qu’il ne savait pas réellement ce qui lui attend lors de cette rencontre qui se tient devant ce fameux professeur. L’homme qui se tenait devant lui avait déjà entendu parler de lui, il leva les sourcils surpris, puis il se rappela qu’il était quand même sacrément populaire, tout le monde avait entendu parler de lui et de ses exploits et ça le mettait un peu mal à l’aise, trop même. En effet, la seule réussite dans sa vie de tous les jours depuis son arrivée sur l’île était de savoir comment finir les fins de mois et s’il allait bien dormir cette nuit… Et pourtant, malgré tout, il y avait des enfants à protéger, ses enfants à protéger ! Et il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour garantir leur sécurité et leur bien être. Plus encore, ce besoin vital de sauver le monde entier était gravé en lui, il se battrait pour cela ; il ferait n’importe quoi pour n’importe qui, trou de mémoire ou non.

Curieux, ses yeux verts parcoururent les alentours à la recherche d’un détail qui retiendrait son attention. Les chaises, les pupitres, les tableaux noirs, toute cette ambiance studieuse lui semblait si familière. Sur cette pensée, il reporta son attention vers l’homme. « De même, également… Enfin de vous connaître. » Il s’emmêlait un peu dans ses mots, il se rattrapa vite. « De vous revoir plutôt, je ne sais plus trop… bref. » Arrête-toi là Harry, il vaut mieux. La discussion n’a même pas commencé qu’il est déjà en train de se noyer dans un tourbillon de pensées.

« Je penserais que vous seriez plus…. » Comment pourrait-il dire ça sans paraître trop impoli ? « Plus vieux ? » Il n’eut finalement pas d’autres termes qui lui vinrent en tête et il s’empressa de détailler le fond de sa pensée. « Dans mes rêves, vous l'étiez, en tout cas. » Il fit un petit sourire. Vraiment, il s’attendait à vieil homme avec la robe d’un sage, la longue barbe et les lunettes en demi-lune. Il n’était pas déçu, au contraire, se retrouver face à un homme d’apparence ordinaire était moins impressionnant.

Enfin, le professeur l’invita à boire quelque chose et Harry ne pouvait pas refuser. « Volontiers, j’imagine que ça sera du thé au citron ? »

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feat. Tom

Albus adresse à Harry son sourire le plus indulgent alors que, confusément, il cherche à exprimer une pensée diffuse et perturbée par les circonstances qui les place l’un et l’autre dans une sorte de flou temporel quant à leur propre histoire. Dans une vie moins compliquée, ils se sont connus et ont joué un rôle important dans la vie l’un de l’autre. Le fait est pourtant qu’Albus sait ne l’avoir jamais rencontré, et qu’Harry, de son côté, est probablement tout aussi confus quant à ce qu’il devrait connaître ou non de l’homme qui se trouve en face de lui… D’une certaine manière, cela les place tous deux sur un pied d’égalité pour la toute première fois depuis… pour ainsi dire très longtemps.

« On me le dit souvent », répond Albus avec amusement quand Harry remarque qu’il s’attendait à le retrouver plus vieux que cela.

Il n’est pas le seul à lui en faire la remarque. Certains avaient peut-être fait preuve de plus de tact, mais au final, le résultat était toujours le même. Et il ne le leur reprochait pas. Il avait beaucoup entend de choses concernant cet homme qu’il n’avait jamais eu l’occasion de devenir… et qu’il ne deviendrait probablement jamais. Certaines l’avaient intrigué, d’autres éprouvé, mais il en a retiré quelques leçons pour l’avenir… un avenir qui ne saurait être complètement à l’identique de ce devenir auquel il n’accèderait jamais. Pour le meilleur… et pour le pire.

« Je suis ravi de constater que tu me connais bien », remarque-t-il d’un ton léger en s’affairant à leur préparer effectivement un thé à la saveur citronnée – il y a, fort heureusement, des choses qui ne changent pas (et qui offrent ainsi un espace de réconfort à ceux que l’absence d’habitude ou des bouleversements trop violents pourraient souffrir de ne pas savoir regarder en face. « J’ai conscience des questions trop nombreuses qui accaparent à juste titre tes pensées. Je peux m’efforcer de répondre à la plupart d’entre elles, mais j’ai bien peur de ne pas toujours être en mesure de t’apporter satisfaction », commente-t-il, toujours sur le même ton. « Tu as évoqué tes rêves, à l’instant », commente-t-il en tendant sa tasse à Harry avant d’apprécier lui-même la sienne, fumante, et d’y tremper les lèvres avec la plus grande précaution. « Est-ce que tu accepterais de m’en dire plus à ce sujet ? »

Ce serait un bon point de départ, même si Albus ne sera pas forcément toujours à même de dissocier fragments de mémoire et pur onirisme.