Il était une fois...
• Rei avait toujours été guidé par ses émotions. Enfant il exprimait sa colère grâce à ses poings, car les mots n’étaient jamais écoutés ; il essayait tant bien que mal de prouver aux autres enfants que malgré son teint mat, ses yeux bleus et ses cheveux blonds, il était bel et bien japonais. Souvent blessé lors de ces bagarres, il put faire la rencontre d’une charmante infirmière qui lui appris que sous toutes les peaux coulaient la même couleur – l’un des souvenirs qu’il chérissait le plus. Son seul ami était un enfant de son âge, Hiromitsu, qui le surnommera « Zero », une des lectures possibles du prénom « Rei ».
• A l’école de police, Rei fût mis en équipe avec son ami d’enfance, et trois autres élèves. Ils formèrent un groupe étrange, assez hétéroclite, mais capable de travailler efficacement. Ce fût avec ce même groupe qu’il s’engagea dans la police métropolitaine de Tokyo. Malheureusement, au fil des années, il ne resta que Rei et Hiromitsu, les autres étant décédés tragiquement.
• Rei et Hiromitsu eurent pour mission de s’infiltrer dans une organisation mafieuse surnommée « les hommes en noirs », sous les noms de code Bourbon et Scotch. Bourbon était différent de Rei. Plus vicieux, usant de tactiques psychologiques, extrêmement secret même pour les plus hauts placés. Rei pouvait mettre de côté les sentiments si cela signifiait protéger son Japon adoré.
• Leur duo fût rapidement rejoint par un tireur d’élite, Rye. Rei ne l’appréciait pas, Bourbon voyait en lui un formidable outil. Tandis que Rei tentait de découvrir sa véritable identité, Bourbon se réjouissait des réussites des missions qui leurs été confiées.
• Ce qu’il craignait arriva – la vraie identité d’Hiro avait été découverte. Rei avait relu son sms, encore et encore, avant de se mettre en mouvement. Il n’avait jamais couru aussi vite. En haut du bâtiment, il découvrit le cadavre de son ami d’enfance, une balle dans le torse ; et la figure de Rye, cruelle, s’éloignant non sans laisser une moquerie à l’égard de celui qu’il venait d’assassiner.
• Et soudainement toute la rage cachée derrière son masque refit surface. Rei le haïssait plus que tout. Rei allait se venger. Rye obsédait ses pensées, jour et nuit. (Et si Rei apprenait qu’en réalité Rye, agent du FBI nommé Akai, avait essayé de sauver son ami d’enfance ; si Rei apprenait qu’il avait entendu ses pas dans les escaliers de fer et craignant de voir débarquer un homme en noir s’était suicidé, il ne s’en remettrait jamais).
• Quelques années plus tard, l’organisation des hommes en noir lui donna pour mission d’espionner le détective Kogoro. Sous le nom de Tōru Amuro, il travailla au café situé en dessous de l’appartement du détective et devint son apprenti.
• Tandis qu’Amuro apprenait à devenir un bon enquêteur, que Bourbon commettait ses méfaits avec brio, Rei enquêtait sur Akai. Après un long travail acharné, il avait réussi à découvrir sa véritable identité. Une grande victoire qui le rapprochait un peu plus de son objectif. Akai, agent du FBI qui n’avait rien à faire sur le sol japonais, souffrira.
• Mais il ne fût pas le seul à faire cette découverte. Bourbon avait ricané, Rei n’arrivait pas à croire que les hommes en noir s’étaient débarrassés du traitre. Il ne voulait pas y croire. Il ne pouvait pas être mort ; c’était à lui de le tuer. Personne d’autre. Alors Rei le chercha. Il y passa des jours, des semaines, des mois...
• Et il finit par le trouver, planqué sous une autre identité dans la maison de l'oncle et tante de Conan, cet enfant mystérieux et bien trop intelligent qui l’aidait parfois à enquêter... Il ne restait plus qu'à le forcer à tomber le masque.
• • •
Le coucher de soleil prend soudainement une teinte carmine tandis qu’il s’apprête à fermer le café, et le voilà transporter dans une autre ville, un autre monde, loin de son Japon. Son apparence aussi a changé ; un teint clair, des yeux foncés, comme ces cheveux qu’il a plus tard teint en blond afin que son reflet dans le miroir paraisse moins étrange. Il n’a même plus sa voiture. En tant qu’agent sous couverture, c’est dans sa personnalité de savoir composer avec les imprévus. Pourtant Rei, lui qui semble avoir une solution à tout, hésite sur le premier pas à faire dans cette nouvelle vie. Il ressent l’amertume de ne pas pouvoir mener à bien sa mission ; pis encore, sa revanche personnelle. Des années de travail soudainement envolées – bien qu’il espère pouvoir un jour regagner son vrai chez-lui.
Il commence par remanier ses identités. Il se débarrasse rapidement de Bourbon, dont il haïssait la cruauté, et sous le nom de Tōru et sa personnalité joviale – impossible pour lui d’utiliser sa véritable identité -, il devient serveur au salon de thé Anavrin, ignorant tant bien que mal les histoires de chacun pour ne pas être tenté de s’en mêler. Il tient trois mois avant de commencer à rechercher ses connaissances, amis et ennemis ; à collectionner toutes les informations qui pourraient se révéler être utiles. Puis cinq mois encore et Rei capitule : trop amoureux de l’adrénaline, il n’est pas fait pour être simple serveur.
Il devient détective privé durant son temps libre, s’étant fait connaitre grâce aux réseaux sociaux. Les affaires d’animaux perdues, se transforment en objets, se transforment en vols, se transforment en filatures, se transforment en hacking, se transforment en meurtres… Comme planifié, il parvient à attirer l’attention de la police – difficile de passer à côté d’un japonais aux cheveux blonds habillé avec style. Il refuse de les rejoindre mais accepte de travailler avec eux. Après tout, avec un double poste, il aurait davantage de chance (ou malchance) de trouver quelqu’un qu’il connait.
(Et puis Rei se demande, si dans ce monde où tout lui est étranger, il pourrait retrouver la figure familière d’un ami d’enfance…)