Prodigal sons don't exist [Papa & Maman]

Prodigal sons don't exist

feat.    @Walburga Black  @Orion Black

L’euphorie avait bientôt cédé sa place à l’angoisse la plus absolue. Dans les bras de Peter, à l’abri de tout jugement, Regulus s’était senti pousser des ailes, intouchable… au point même de faire précisément ce qu’il excluait toujours de faire jusqu’alors. Certes, c’était Peter qui avait posé un genou au sol mais c’était bel et bien le sorcier qui l’y avait largement encouragé. Parce qu’il le ressentait ainsi, parce qu’il venait de traverser une période difficile, parce qu’il avait été agressé violemment et aurait bien pu y passer. Parce que la vie est courte et précieuse. Parce qu’il est d’une facilité dangereuse de s’oublier en présence de Peter. Est-ce qu’il regrette ? Non… Mais il est terrifié. Il est terrifié car en quelques secondes seulement, il a refermé sur lui un piège terriblement dangereux, et à la pensée de ce qui adviendra, il sent que son cœur peine à battre.

A plusieurs reprises, il avait songé à parler de sa relation à ses parents. Toujours, il s’était trouvé la meilleure des excuses pour reculer l’échéance… Mais avec une décision si certaine d’officialiser… il ne peut plus se permettre d’agir si légèrement. Et puisque la nouvelle finira par se répandre comme une traînée de poudre, Peter veut être le premier qui le leur dira… Au prix… qu’il ne devine que trop. Ce n’est pas pour rien s’il s’était contenté, jusqu’alors, de demi-vérités à l’adresse de ses parents. Il se souvient de ce qui s’était passé pour son frère, et pour bien moins que ça. La trahison de Sirius était bien moindre en comparaison du profond coup de canif que Regulus plante dans tous les préceptes de la famille Black… des préceptes dont lui-même s’est éloigné, certes, mais qui restent profondément ancrés en lui…

Regulus n’est pas Sirius. Regulus a eu beau prendre conscience des dérives de leurs principes, il n’avait pas eu pour autant le cœur de tourner le dos définitivement aux siens. Il ne peut pas tirer un trait définitif et radical sur sa famille. Regulus aime sa famille. Il est profondément attaché à ses parents. L’idée de les décevoir, de leur faire du mal, d’être à son tour rayé de la tapisserie vertigineuse lui est si douloureuse qu’elle lui donnerait presque la nausée. Il ne peut pas le supporter, et pourtant, c’est lui-même, avec une application manifestement suicidaire, qui avait creusé sa propre tombe. Elle est prête, maintenant… et quand bien même il veut se convaincre que dans ce monde aux codes un peu différents, ses parents prendront les choses un peu différemment, il ne se leurre pas véritablement. Il sait que l’appui d’Alphard voire même de Kreattur ne pourront pas grand-chose pour lui… et il ne sait pas s’il peut être prêt. Regulus ne fait jamais qu’une chose qui est plus qu’attendue de sa part, et depuis longtemps, mais il a le sentiment de se jeter dans le vide… Cette pensée est insupportable.

Il a écrit à ses parents sans spécifier le motif de sa venue, il avait seulement suggéré qu’ils devraient se voir… c’est tout. Et il imagine que ses parents doivent déjà envisager les pires scénarios… Ce qui ne le rassure pas, c’est que les pires scénarios sont encore en-deçà de la vérité, au bout du compte.

Regulus, au moment de sonner à la porte de la résidence parentale, a fait les choses bien : il est tiré à quatre épingles, élégant… il a même apporté des fleurs à l’attention de sa mère. Il en fait trop ? Peut-être bien… mais c’est peut-être la dernière fois qu’il les voit, alors… Bon sang, est-ce qu’il est possible d’avoir encore plus mal au cœur ? Regulus voudrait qu’on le lui arrache… purement et simplement. La porte s’ouvre, et le sourire que le jeune Black accroche à ses lèvres sonne atrocement faux…

« Bonsoir, je ne suis pas en retard, j’espère ? »

Prodigal sons don't exist

feat. @Regulus Black  @Orion Black

L'initiative venait si rarement de Regulus que Walburga n'avait pu, dans un premier temps, que se réjouir de cette lettre qui leur était adressée et qui réclamait la permission d'une visite. Mais les réjouissances n'avaient duré qu'un temps. Car tout comportement inhabituel de la part de leur fils si secret, si énigmatique, ne pouvait qu'être mauvais signe. Il avait une annonce à leur faire… de quel ordre ? Et pourquoi en face ? Certes, Walburga était ravie d'accueillir son fils dans leur demeure. Ce n'était qu'un juste retour à la normale. Orion, Regulus et elle-même, sous le même toit. C'était ainsi que les choses auraient toujours dû rester, et toujours être. Mais une telle initiative ne pouvait pas être sincèrement spontanée. Elle connaissait son fils, même si celui-ci s'acharnait à multiplier mystères et secrets. Elle savait comment il fonctionnait… Et se méfiait de ce qu'il n'avait jusqu'ici pas oser leur avouer. Elle se méfiait plus encore de ce sursaut de bravoure qui ne pouvait qu'avoir une origine extérieure. L'idée venait-elle de Sirius ? C'était possible, mais Walburga espérait que non. Un fils rebelle était déjà de trop, il ne faudrait pas que Regulus se laisse bercer par les scandaleux idéaux de son frère.

Ses inquiétudes, elle les avait partagées à Orion. Retrouver son époux avait été libérateur, pour Walburga. Ils étaient désormais deux à affronter les aberrations de cet étrange petit monde peuplé de moldus, d'hybrides et d'anormalités. Elle lui partageait tout. Ses doutes, ses espoirs, ses inquiétudes et ses coups de sang. Son inquiétude vis-à-vis de Regulus avait été son sujet principal, ces derniers temps. Plus encore depuis qu'elle avait reçu la visite de leur ancien Elfe de maison, Kreattur. Ce dernier avait été égal à lui-même, à la différence près qu'il n'était désormais qu'un vieil homme. Dont le franc-parler lui était devenu intolérable. Mais elle avait été adoucie par un constat frappant : l'ancien Elfe tenait sincèrement à Regulus. Ce lien entre maître et serviteur n'aurait pas dû exister, mais… elle avait été incapable le considérer d'un mauvais œil. Pour le bien de son dernier fils, elle était prête à passer outre de nombreuses choses qui l'auraient profondément outrée en temps normal. Malheureusement pour Regulus, il y avait en revanche d'autres sujets, d'autres domaines où elle était et resterait intransigeante. Notamment la personne avec qui il passerait le restant de sa vie.

Au moment d'entendre la sonnette de leur résidence, la sorcière passa machinalement ses doigts dans ses épais cheveux sombres, se recoiffant. Elle tenait à être présentable pour son fils. Elle tenait à ce qu'il soit fier d'avoir une mère aussi élégante et irréprochable. Elle ne souhaitait rien tant que le retour de la manière dont il la regardait étant petit, lorsqu'il pensait encore que sa parole était d'or. Elle n'avait pas suffisamment chéri ce regard plein de confiance et d'admiration, à l'époque… et le regrettait amèrement à présent.

Refoulant ses indésirables pensées dans un coin de son esprit, Walburga ouvrit elle-même la porte, restant dans l'encadrure le temps de détailler son fils des pieds à la tête. Il avait fait un effort d'élégance, ce qui lui plut. Quant au bouquet, s'il lui fit arquer un sourcil, elle l'accepta avec plaisir.

« Non, tu es juste à l'heure. Entre, Regulus. »

Elle s'écarta, et attendit qu'il soit passé pour refermer la porte sur eux d'un coup de baguette magique. D'un geste de la main, elle lui fit signe de s'avancer dans le salon, où fauteuils et canapé en cuir les attendaient déjà. Au passage, elle adressa une œillade insistante à Orion, lui transmettant sans un mot son inquiétude croissante quant à ce que Regulus avait à leur annoncer.

« Installe-toi. Tu prendras bien une tasse de thé ? »

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feat. @Regulus Black  @Walburga Black

Orion fait grise mine aujourd’hui. Il aurait pourtant de quoi se réjouir, mais un pressentiment l’oblige à renforcer son autorité sur les membres de sa noble famille. Il doit incarner l’image du patriarche. Il doit se préparer à tout. Il doit surtout se préparer à tout solutionner et avec la plus grande dignité. Lorsque la sonnette de la porte d’entrée dévoile son doux tintement entre les murs épais de leur noble bâtisse, Orion préfère ne pas bouger d’un cil. Il demeure installé sur son fauteuil en cuir, les jambes croisées dans ce costume trois pièces taillé sur mesure par des… il n’ose en prononcer le sobriquet de cette race inférieure, tant l’idée éveille en lui nausées et vertiges. Orion a mis du temps à s’adapter à cette nouvelle vie. Sans magie. Au milieu de ces êtres qu’il n’a cessé de haïr durant toute son existence. Encore à ce jour, Orion ne s’est pas familiarisé à cette nouvelle vie et déplore chaque jour de ne pouvoir retourner d’où il vient. Dans son vrai monde. Le monde magique. Il veut retrouver ses semblables et fuir tous ces rats sans pouvoirs. Il en devient presque dépressif. Nerveux, excessivement anxieux, et sombre. Tous les jours, il se sent accablé par des pensées noires. Orion ne bouge pas, se contentant de décroiser, puis de recroiser ses jambes. L’une de ses mains reste étendue sur l’accoudoir gauche, ses doigts venant taper assez rageusement le bord comme pour calmer cette boule d’angoisse qui menace à tout bout de champ de lui éclater au visage. L’autre main tient un verre d’alcool très fort. Un whisky de plus de vingt-cinq ans d’âge, à la saveur iodée et miellée. Orion n’a pas lésiné sur le choix de l’alcool. Il sait qu’il aura besoin de quelque chose de fort pour avaler la pilule que s’apprête à leur rapporter leur fils bien-aimé. Il n’est pas devin, mais il sait. Il sait ce qu’il va se passer, du moins à peu près. Il pense savoir. Il a des soupçons. Il a la tête pleine à craquer de doutes, de suppositions, de théories fumeuses et de contre exemples. Il se prépare au pire, car pire, il y aura forcément. La manière dont Regulus entend les convoquer aujourd’hui ne comporte aucun élément rassurant pour les deux Black.

Il voit Walburga se précipiter pour ouvrir la porte à leur enfant, qui ne s’annonce pas de manière inattendue pour eux. La visite courtoise de Regulus avait été prévue quelques temps plus tôt. Il aurait soi-disant une grande annonce à leur faire. Orion s’était résolument enfermé dans un mutisme familier au moment de lire les quelques notes manuscrites rédigées de la main de son seul et unique enfant. (fuck Sirius) Il ne lui avait rien dit pour ne pas accabler Regulus, pour ne pas inspirer le chagrin et la honte dans les yeux de sa chère et tendre, mais Orion, le grand patriarche de cette branche traditionaliste des Black, flaire la mauvaise nouvelle de très loin. Il entend ensuite des éclats de voix, — Regulus qui s’annonce devant sa mère, et cette dernière qui spontanément le remercie. Il ne prononce aucun mot et guette le pas du salon avec une excitation malsaine. Son corps se tend au moment d’entendre les pas combinés de sa chère épouse et de leur fils depuis le parquet du hall d’entrée. Pendant que les deux approchent, il boit une nouvelle gorgée de son whisky. Pour se donner du courage. Beaucoup de choses le frustrent, en-dehors de l’absence de ses pouvoirs. Ce qu’il a appris de la bouche de Regulus, le jour où il s’est présenté à lui en dissimulant son identité. Ce qu’il n’a pas renseigné à Walburga au sujet de cette fameuse rencontre, de peur qu’elle ne meure de chagrin en comprenant que leur éducation avait, pour la seconde fois, échouée en beauté. Ce que Regulus s’apprête à leur dire aujourd’hui. Il n’a rien dit pour protéger Walburga en se disant qu’il réglerait ce problème de lui-même avec son fils, mais le poids de ses illusions pèsent de plus en plus lourd en lui.

Son regard froid et fixe sur l’entrée du salon se durcit encore plus qu’il ne l’est déjà à la vue de Regulus aux côtés de Walburga. Il pose son verre sur la petite table qui se trouve près du fauteuil. Dans son dos, un feu de cheminée crépite. « Regulus. » Le père salue le fils. Un fin sourire se dessine sur ses lèvres, bien que le reste de son visage reste sans expression. « On ne t’attendait plus. » ironise-t-il. Orion s’essaie à la plaisanterie. Regulus est pile à l’heure. Il aperçoit un bouquet de fleurs entre les mains de sa femme. Il comprend naturellement qu’il s’agit d’un élégant cadeau de la part de leur fils. « Tu as pensé à ta mère. C’est une charmante attention. Je suis fier de ton éducation, mon fils. »  dit-il sans sourire, le visage toujours aussi indéchiffrable. Orion dissimule le tumulte de ses pensées. Il le pense à moitié. Il aimerait être fier, plus que tout au monde, mais quelque chose l'inquiète au plus profond de lui. Il craint que Regulus ne prenne le même chemin que Sirius. Par ailleurs, en parlant de Sirius, le patriarche se fait un plaisir malsain à féliciter les attentions de Regulus pour sa mère. Comme si personne d'autre n'aurait pu y songer. Comme si, Sirius lui-même, aurait bien été incapable d'une telle éducation. C'est aussi un moyen de faire culpabiliser d'avance Regulus pour toutes les absurdités qu'il serait bien capable de leur confesser aujourd'hui... De le mettre en garde. Le plus insidieusement possible, car Orion aime faire les choses en toute discrétion. Il ne dit rien, il ne hurle pas, il laisse à Walburga le soin de punir et d'élever la voix, mais il est toujours là dans l'ombre à tirer les ficelles de leur stratégie de couple. En fin observateur. « Je constate que contrairement aux personnes qui ont malheureusement quittées notre famille il y a peu et que je préférerais ne pas nommer pas sous ce toit... nous avons bien eu raison de t'avoir. Tu es l'erreur que nous n'aurions jamais pu commettre en te donnant naissance, n'est-ce pas, Walburga. » complète-t-il à son arsenal du parfait petit patriarche manipulateur, tout en caressant distraitement le cuir de son grand fauteuil, tel un Roi reposant sur son trône de fer. Dur et implacable. Il ose sourire pour sembler sympathique et avenant en face de Regulus, ce qui ne lui ressemble en aucune façon. Seule sa voix glacée lui ressemble, ainsi que l'arrogance qui lisse ses traits à la fois tirés par la fatigue et par l'anxiété. Ses mots doucereux, aussi sucrés que le miel, cachent une véritable hargne, tout comme une rancune tenace envers leur premier fils, Sirius. Une rancune qui perdure, malgré le poids des années, car elle est à la hauteur de la trahison du fils. Ces compliments à l'encontre de Regulus camouflent les infamies qu'il pense et ose affirmer haut et fort à l'attention du fils aîné ayant fugué leur domicile il y a bien des années. Sirius a été rayé de la tapisserie par Walburga. Il n'en reviendra pas. Jamais. Sirius est l'erreur dont Il a toujours aimé cultiver la rivalité entre ses deux fils. Orion fait le rappel saint, sans s'en formaliser ou même le déplorer, et il le fait sans nommer ladite erreur. Il ne nommera pas leur premier-né sous ce toit. Les erreurs ne méritent pas d'être nommées. Sirius est banni de leur arbre. Walburga acquiesce volontiers à cette politique commune. Ils l'ont décidée d'un commun accord depuis longtemps déjà. Orion et Walburga se félicitent de leur symbiose, particulièrement dans l'expression de leur cruauté et de leurs noires ambitions. 

La cruauté du père est que ce dernier ne ressent aucun remord en repensant à l'abandon de leur premier enfant. Orion accorde bien plus d'importance à ses valeurs qu'aux enfants qui ose les trahir et qui perdent, par ce fait, tout droit d'être considéré comme ses enfants. Ce qui sonne faux dans ses paroles, c'est le fait que Regulus aussi, a commis le crime de les décevoir. Walburga ne sait pas encore à quel point leur fils les a déçus. Orion considère que tant que rien n'est gravé dans le marbre, tout peut être rectifié à coup de paroles sensées (et de doloris). Il n'est pas trop tard pour leur pauvre enfant égaré dans les confins des esprits étriqués Moldus. Orion accorde une chance précieuse à Regulus qu'il n'avait jamais accordé à Sirius de son temps, d'une part, parce qu'Orion n'a jamais éprouvé le moindre lien d'affection envers le premier, et d'autre part, parce que Regulus ne les avait jamais trahis jusqu'à maintenant. Il préfère se voiler la face et dire que l'île a retourné l'esprit de leur fils, plutôt que d'accepter l'idée que Regulus... a tout bonnement grandi hors des clous. Regulus l'a déçu, en réalité, mais Orion s'accroche à ce mince espoir de pouvoir exercer sur lui une emprise similaire à celle qu'il déployait lorsque ce dernier n'était encore qu'un enfant vulnérable et fragile. Alors que Regulus s’installe dans le salon, son regard recherche compulsivement celui de son épouse. Une œillade de sa part l’informe des inquiétudes qu’elle garde sous clé. Il la comprend. Par Salazar, comme il la comprend. Lorsque Walburga propose un thé à leur fils, Orion relève le menton. C’est une excellente idée. Autant le mettre à l’aise. Il est ici chez lui, après tout. C’est ce que Walburga et Orion veulent lui faire éprouver : cette sensation de chez-soi, de bien-être. « Bonne idée. Nous prendrons tous du thé. Cela nous rappellera le bon vieux temps, au manoir Black. » dit-il en espérant se montrer suffisamment enthousiaste. Difficile de l’être. Son ton est rauque, presque inaudible. Il est aussi froid qu’un glaçon. Orion a le regard dur, et la mine sévère. Il est déjà en position. Il sait quelque chose que Walburga ignore, mais il espère que sa conversation avec Regulus aura su… le dissuader de former certaines alliances qui pourraient jeter le déshonneur sur leur famille. « Alors, mon fils. Comment vas-tu ? Qu’avais-tu donc de si important à nous dire, pour nous convier d’une manière… étonnamment formelle ? » Il se redresse dans le fauteuil, et vient glisser ses doigts dans le court espace entre ses phalanges. Orion adopte un ton paternaliste, de manière calculée. Il fixe son fils sans ciller. Que doit-il faire ? Garder un tel secret, se laisser polluer par de tels soupçons est insupportable pour l’esprit.

Prodigal sons don't exist

feat.    @Walburga Black  @Orion Black

C’est Walburga qui vient lui ouvrir, et en faisant le constat de sa tenue élégante, Regulus se félicite mentalement de s’être mis sur son trente-et-un à l’occasion de cette visite. Certes, il n’avait rien appris de particulier à ses parents dans son courrier, mais ces derniers sont loin d’être idiots… Ils doivent naturellement deviner que la situation, exceptionnelle, mérite de l’accueillir comme telles… Et les grandes occasions, qu’elles soient heureuses ou douloureuses, ont toujours encouragé chez eux un soin de leur apparence plus prononcé encore qu’en temps normal. Une apparence digne et irréprochable est une barrière efficace contre toute éventuelle catastrophe… Pas imparable, certes, mais… efficient. Quand ses parents avaient pris la décision radicale de rayer Sirius de leur existence, ils ne s’étaient pas comportés différemment. L’issue, ce soir, à son grand regret… a peu de chances d’être différente.

« Avec plaisir », répond poliment Regulus quand Walburga lui propose une tasse de thé.

En réalité, il n’est pas certain de savoir avaler quoi que ce soit tant sa nervosité lui noue l’estomac, mais il veut faire illusion encore un peu… Juste un peu. Le temps d’un thé, peut-être ? Le temps de profiter encore un peu, juste un peu, de la présence de ses parents… avant qu’ils ne décident de ne plus vouloir avoir quoi que ce soit à faire avec lui… Et comment pourra-t-il le leur reprocher ? Regulus s’avance donc jusqu’au salon, où son regard tombe sur son père. Ce n’est plus seulement son estomac qui est noué, à présent… Regulus a la gorge si serrée qu’il a l’impression de ne plus pouvoir respirer correctement. Sa mère n’est pas dupe, mais il est convaincu que son père l’est encore moins. Accuser simultanément leurs réactions revient pour lui à se jeter de son plein grain dans un puits sans fond. C’est ça, qu’il ressent, oui… et il ne doit cette situation qu’à lui-même. Oh, comme il a envie de faire marche arrière… Ce serait si simple d’être lâche, d’inventer une excuse, de prétendre que tout va bien. Jouer le jeu encore un peu… Juste un petit peu…

Regulus affiche un sourire humble et crispé à l’adresse de son père alors qu’il prend place sur un des fauteuils du salon et que son père suggère qu’on ne l’attendrait plus. Il est parfaitement ponctuel, mais sans doute auraient-ils voulu qu’il fasse acte de présence bien plus tôt… et en s’épargnant une révélation qui brisera à nouveau leur famille… Oh, comme il a envie de prendre la fuite, en cet instant. Mais il ne peut plus fier machine arrière à présent… Il ne peut pas être lâche à ce point. Il ne l’est déjà que beaucoup trop.

Chaque mot prononcé par son père est comme un coup de poignard planté un plein cœur. Alors qu’Orion Black loue son éducation, Regulus guette l’inévitable moment où il décevra profondément… D’ici quelques minutes… Son père enfonce le clou à chaque mot. Qui sait, peut-être qu’il sait déjà. Qu’ils savent déjà. Et que tout ça n’est qu’une mise en scène pour alimenter sa douleur et sa paranoïa… Et si Alphard leur avait tout dit ? Et si… ? Non… En réalité, Regulus n’a besoin d’absolument personne pour alimenter sa paranoïa, il le fait très bien par ses propres moyens… Il le fait même beaucoup trop bien. Il doit être probablement aussi pâle qu’un fantôme en cet instant. Son regard essaie de s’amarrer à n’importe quoi qui ne soit pas celui de ses parents, afin de ne surtout pas perdre la face…

Il est l’erreurs qu’ils n’auraient jamais pu commettre en lui donnant naissance.

C’est faux. Mais ils ne sont responsables de rien. Contrairement à Sirius, Regulus n’a aucune envie de s’en aller, il n’a aucune envie de décevoir ses parents, il ne retirera aucune fierté à être effacé de leur arbre généalogique. Juste une peur et une honte profondes… Comment réussir à leur parler ? Comment ne pas flancher ? Comment ne pas se sentir réduit à l’état de néant. De rien.

« Je… » Tous les discours déjà peu convaincants qu’il avait préparés paraissent encore plus absurdes à présent. Sa voix tremble – non, c’est son corps tout entier qui tremble, et il ne sait pas garder le dos droit, la tête haute, l’attitude digne. « Je voulais vous faire part d’une nouvelle importante me concernant. » Il a le sentiment qu’il ne parviendra jamais à aller au bout de son discours. « Je sais d’avance qu’elle n’emportera pas votre adhésion, et à ce titre je suis profondément désolé. » Au-delà de désolé, en réalité. Il est mortifié, mais que peut-il dire ou faire d’autre ? « Je suis fiancé. »