( abandonné ) (( NSFW )) “dancing with the devil” ▴ (( jynnic )) – fb part (ii).

Elle l’a bien eu, arnaqué même. C'est de la faute cette robe magnifique, de cette coupe d’alcool pétillant – il est tout simplement incapable de céder à la tentation d’un verre d’alcool – et de ses yeux de biche. Il l’a prise pour une aristocrate, partisane du régime impérial, sans doute une amie proche de Lady Tarkin. Qu’aurait-elle pu être d’autre ? Une opposante à tout ce que l’Empire représente, une espionne sans doute, qu’en sait-il. Tout ce qui importe, c’est le fait qu’elle ne soit pas de son côté. Cette petite garce n’est en rien une fanatique du régime. Pendant qu’il s’entretenait avec elle, flirtant et paradant sur ses réalisations et sa place dans la hiérarchie impériale, la salle de réception était prise d’assaut par une troupe d’opposants au régime. Fort heureusement, ils avaient été assez mal informés sur le nombre de soldats d’élite, et l’invasion fut parfaitement maîtrisée, non sans toutefois quelques pertes humaines. Krennic déplore encore à ce moment précis que Wilhuff Tarkin ne fasse pas partie desdites pertes. Et maintenant, les voilà tous les deux dans une toute autre situation. Une ambiance plus sinistre et moins propice aux confidences. Elle et d’autres font partie des prises de l’invasion, mais Orson s’est réservé le droit de s’entretenir avec elle personnellement dans l’une des salles de son vaisseau de transport personnel. Il a insisté pour la transporter avec lui, et nulle ne peut s’opposer à sa volonté. Pas même Tarkin. Ils voulaient tous les éliminer, mais Krennic avait encore des choses à régler avec elle. Elle l’a bluffé, elle s’est attaquée à lui, et cela lui a paru bien trop personnel pour être occulté. Elle a quelque chose contre lui. Qu’aurait-il bien pu lui faire qu’il n’a déjà fait à tant de monde ? Il aurait fait fusiller son fiancé ? Il aurait ordonné la destruction de son village ? Qu’importe, finalement. Ce ne sont que des pertes insignifiantes pour Orson Krennic. Selon lui, nous sommes en temps de guerre et la guerre excuse absolument tout. Tous ses péchés n’en sont pas, ce ne sont que des actes de loyauté et de bravoure au nom du grand et puissant Empire galactique. Un Empire qu’il espère un jour voir lui appartenir.

Krennic repense aux derniers mots qu’elle lui a dit avant qu’ils ne retournent dans la salle principale, et qu’il ait perdu sa piste entre les flashs des lasers et les cris. Il y repense de manière compulsive. En entrant dans la salle de détention, quelques temps après le décollage de sa navette, Krennic force les personnes présentes à s’écarter sur son passage. Elle est là, assise. Elle est toute à lui. Prête à être interrogée. « Sortez. » dit-il sans jeter le moindre regard aux officiers qui l’entourent. Krennic les dédaignent, qui n’ont à son sens aucun intérêt. Il marche d’un pas digne, les pans de sa cape flottent derrière lui avec grâce. Orson vient prendre le dossier de l’une des chaises entre ses mains, avant de refermer lentement chacun de ses doigts sur le dossier. Il la dévisage avec un amusement à peine déguisé. On croirait presque qu’il s’agit d’un jeu pour lui. Il l’observe tout en lui souriant. Son sourire est beaucoup trop doux pour ne pas être inquiétant. Une table métallique les sépare, large et circulaire, elle constitue l’unique rempart entre eux. Lorsqu’il s’installe sans un mot, ses jambes se croisent sous le meuble et son dos se laisse retomber durement contre le dossier de la chaise. Pendant quelques minutes, ils ne se disent rien. Krennic l’observe silencieusement, cherchant à deviner ses pensées d’après l’expression de son visage. Puis, il se décide à rompre le silence en premier, tout en reposant sa main sur la table et l’autre à sa ceinture. Krennic est fier de sa situation, et la présence de ce blaster est le signe qu’il est la personne qui contrôle la situation. « Je sais ce que vous vous dites. » affirme-t-il d’une voix suffisante. Ses rides, celles qui se trouvent au coin de sa bouche s’étirent dramatiquement pour se fondre en une expression dédaigneuse. « Je suis un officier impérial, donc je représente le mal à vos yeux. Mais je ne suis qu’un homme, comme tant d’autres dans cette immense galaxie. Je ne fais que mon travail, comme vous faites le vôtre. Vous auriez tort de me juger à travers mes actions. Je ne suis qu’un idéaliste. J’œuvre, tout comme vous, pour le bien commun. Disons que… je représente la paix et l’ordre. » Que de belles paroles. Des mensonges. Orson ne recherche nullement la paix dans la galaxie, puisqu’il revendique un règne de terreur depuis des années. Ses aspirations sont cruelles et sans état d’âme : museler les rébellions grâce à son arme de destruction massive. Il aspire à être réputé dans toute la galaxie comme le destructeur des planètes. « Est-ce un crime ? » s’interroge-t-il en levant la main qui se trouve à sa ceinture pour l’agiter quelques secondes dans les airs. Son sourire a disparu, laissant place à une moue boudeuse. Orson Krennic est dévot. Un fanatique et admiratif du régime dictatorial imposé par l’Empereur Palpatine. Malgré le fait qu’il ne porte pas ce dernier dans son cœur, en raison de son affiliation à la Force – tous les forceux ne sont finalement que des insectes à ses yeux, voire des aberrations –, il se montre d’une dévotion redoutable. Orson aime le régime impérial, le seul qui mérite d’être appliqué à la galaxie toute entière. C’est pourquoi il a déployé tant d’efforts à gravir les marches du pouvoir pendant des années.

« J’ai beaucoup d’influence dans l’Empire. » Simple constatation qui n’appelle aucune réponse de sa part, simplement un ralliement silencieux. Il reprend alors le plus naturellement du monde, tout en agitant ses mains en parlant : « Joignez-vous à notre cause. L’Empire récompensera honorablement cet acte de bravoure. » Conneries. Krennic se persuade de ses propres mensonges. Il est doué pour les envelopper à la manière de très belles vérités. Sa décision est d’ores et déjà prise en son âme et conscience. Une fois qu’elle aura balancé les responsables de cette invasion, son cœur pur et courageux cessera de battre de ses propres mains. « Que voulez-vous, hm ? De l’argent ? Du pouvoir, peut-être ? Vous recherchez quelqu’un ? » Un éclair traverse les yeux de sa captive, et Krennic comprend immédiatement qu’il vient de viser juste dans ses insinuations. Ses lèvres s’étirent en un large sourire satisfait, d’une condescendance rare. « Ah… c’est donc ça. Vous recherchez quelqu’un. » Et il est de très loin d’imaginer la vérité, même dans ses fantasmes les plus fous. « Oh… J’aime réunir les gens. Ces instants touchants sont d’une rare beauté. Voir ces sourires et ces yeux larmoyants… Ces corps qui se touchent et s’étreignent par… amour. » Amour. Ce mot s’échappe de ses lèvres sur un ton de reproche, malgré la forte portée symbolique de ce mot, il sonne dans sa bouche comme une insulte. Du dégoût transparaît clairement dans sa voix. Krennic arbore un regard momentanément vide. Le fait de prononcer ce mot lui inspire de la mélancolie. L’amour… Un sentiment capable de transforme les rois en pauvres fous. L’amour. Orson le méprise depuis longtemps. Depuis qu’on l’en a privé, car dans son esprit complètement malade et psychotique, c’est quelque chose qu’on lui a cruellement arraché des mains. Avant que Lyra n’entre sur scène, Galen n’avait d’yeux que pour lui. Ils étaient des amis très proches. Une amitié biaisée d’un côté, mais une amitié tout de même. Ils auraient pu faire des choses formidables, mais pas dans le sens qu’il aurait espéré. Depuis que Galen en a choisi une autre, le monde s’est écroulé sous les pieds d’Orson. En représailles, Krennic a pris soin de massacrer la vie entière de l’objet de ses convoitises sans l’ombre d’un remord. Pourquoi regretter de détruire ce qu’il considère comme… une abomination ? Ce que traverse Galen Erso n’est que le juste retour des choses, ce n’est rien en comparaison d’un cœur brisé – le sien, depuis plus de vingt ans –. Sa souffrance n’a eu d’égale que sa cruauté dans le traitement de la famille Erso. « Je les regarde de loin lorsque je les vois passer. » précise-t-il avec ironie.

Krennic tapote ensuite le métal de la table du bout de ses doigts avec impatience. Ses mains sont larges, puissantes et surtout impatientes. Ses tics nerveux trahissent la nervosité qui s’engouffre progressivement en lui. Qui est-elle ? Que faisait-elle au manoir Tarkin ? Qu’était-elle venue chercher ? Tant d’interrogations qui l’obnubilent et tracent un véritable brouillard dans son esprit. Il effectue une brève pression à l’aide de sa paume, s’en servant d’appui, afin d’attirer son dos en avant. « Dites-moi… » chuchote-t-il en flirtant avec ses yeux. « Quel effet cela vous fait d’avoir manqué votre cible ? » Orson recherche quelque chose en particulier dans les yeux de sa captive. La vérité, et rien d’autre. Cette fois, il la veut pleine et entière. Orson le dissimule merveilleusement bien, mais cette femme lui a fait une très forte impression au cours de la réception. Familière. Brûlante comme une marque faite au fer rouge. Ce n’est pas n’importe qui. Une petite voix dans sa tête chuchote de se méfier d’elle. Il ne parvient malheureusement pas à reconnaître cette étrange familiarité… Plus il la regarde et plus il se noie dans le bleu de ses yeux, et donc plus ses doutes s’intensifient. Orson plisse ses yeux en voulant impressionner sa captive par le ton sérieux et grave de leurs échanges. Cette lueur de détermination dans son regard, ce sourire intelligent et insolent… Une impression de déjà-vu le ramène brutalement à la réalité. « C’est douloureux, n’est-ce pas ma chère. Comme le fait de mentir. » se moque-t-il en plaçant ses coudes sur la table. Orson l’observe longuement, et détaille chaque particularité de son visage parfait, en insistant sur son regard. Les yeux ne sont rien d’autre que les fenêtres de l’âme. « Parce que c’est bien ce que vous avez fait ce soir. » dit-il sur le ton du reproche. Un sourire amer s’installe alors qu’il vient joindre ses mains entre elles, en creusant un espace entre chaque doigt pour venir le combler. « Vous m’avez menti. » Un reproche froid, cinglant. Tout est encore fortement imprégné en lui : le goût de sa bouche, la chaleur de sa voix, la douceur de ses cheveux contre le marbre glacé de l’une des colonnes de la demeure. Est-ce qu’elle mentait également, en gémissant contre son oreille, alors qu’il la ravageait ? « Je ne veux pas vous tuer. Je n’y vois aucun intérêt. » C’est un mensonge et une vérité. Orson meurt d’envie de la tuer, parce que son égo est blessé, mais elle éveille en lui des émotions très contrastées. Cette femme l’amuse fortement, tout en déclenchant chez lui des pulsions meurtrières.

« Nous pouvons repartir sur de nouvelles bases. Je peux vous donner ce que vous recherchez en échange de votre collaboration. » Encore un mensonge, destiné à amadouer son interlocutrice avant d’obtenir ce qu’il désire d’elle et décide de mettre un terme à son existence. Krennic est si absorbé par son monologue, qu’il arrive même à faire abstraction des sons autour de lui durant de longues minutes. « Je suis particulièrement doué pour… » Un bruit. Krennic n’y fait pas attention une première fois. « …retrouver les gens. » Ce bruit se répète ensuite, et très rapidement, les évènements s’enchaînent sans qu’il ne puisse les contrôler. Krennic s’efforce de garder pour lui ses inquiétudes, mais son cœur se met à battre de plus en plus fort. Quelque chose cloche. Cela le contrarie qu’un événement extérieur et qu’il n’avait nullement anticipé, vienne troubler la quiétude de leur conversation. Il relève la tête et se détourne de la jeune femme pour observer un point fixe à droite, et enfin à gauche. Cette fois, le bruit fait même trembler les murs. « Qu’est-ce qui se passe encore ! » s’insurge-t-il en assénant un coup de poing contre le bureau. Orson se trouve à deux doigts de se métamorphoser en une bombe à retardement. L’impérial adresse alors des regards perçants que des lasers sur ses hommes, s’impatientant de ne pas avoir d’explications. Personne ne prononce le moindre mot. Personne ne sait. Ce silence gênant est bien la dernière chose dont Krennic a actuellement besoin. Le fait de ne rien contrôler le rend fébrile et ses hommes le savent, tout le monde en a conscience, Orson n’est pas doué pour dissimuler la violence de ses émotions. « Vous êtes sourds ?! » jure-t-il en montant dans les tons. Il se lève d’un bond en réalisant ce qui se passe sous ses yeux impuissants. Il s’agite quelques secondes, en déployant des trésors de self-control pour se retenir d’exploser devant elle. Orson serre si fortement les poings que ses phalanges se mettent à blanchir sous le cuir noir de ses gants. Sans plus attendre, la tornade qu’il est en train de devenir se précipite vers les portes coulissantes en acier. « Vous deux ! » siffle-t-il d’une voix froide et autoritaire. D’un geste de la main et le regard rivé droit devant lui, il missionne deux death troopers de surveiller la captive en son absence. La silhouette élégante d’Orson Krennic vient alors de disparaître dans un dernier bruissement de cape. Orson est partisan du dicton selon lequel on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Une fois derrière la salle de détention, une main encore sur l’écran tactile afin de refermer les portes dans son dos, il se fait interpeller par une voix familière. « Directeur ! Directeur Krennic ! » Un officier, apparemment de dix ans plus jeune, se précipite vers lui avec la peur au ventre et le teint blafard. Dans sa course, il manque même de glisser et de se fracasser la tête contre la poitrine du directeur. Ce dernier lève les yeux au ciel, avant de retrousser ses lèvres en un rictus narquois devant tant d’amateurisme. L’officier est apeuré, secoué de légers tremblements à l’idée d’être considéré comme l’oiseau de mauvais augure auprès d’Orson Krennic. C’est ce qu’il est, apportant son lot de mauvaises nouvelles en craignant d’éveiller les tendances dramatiques et colériques du directeur de l’un des bureaux de la sécurité intérieure de l’Empire. « Oui ? » répond Krennic dans un soupir las. L’une de ses mains vient se loge au niveau de la ceinture en cuir qui encercle ses hanches. Du bout des doigts, il se met à effleurer le manche de son blaster, ce qui représente chez lui un tic nerveux trahissant souvent son agitation mentale. Celui-là commence déjà à lui taper sur les nerfs, alors qu’il n’a encore rien révélé. Orson apprécie très peu d’être dérangé en plein travail, et encore moins en charmante compagnie. Orson Krennic n’est pas quelqu’un de calme. Il est même l’inverse de la patience. C’est une tornade drapée de blanc, hurlant et insultant à tout va, tant imbu de lui-même que nul être dans toute la galaxie ne trouve grâce à ses yeux ou à ses aspirations irréalisables. Sauf Galen Erso. « Nous avons un problème avec l’un des réacteurs principaux ! » déblatère l’officier d’une traite en oubliant même de respirer entre deux syllabes. Il donne l’impression de craindre les réactions intempestives de son supérieur hiérarchique comme du pire fléau de l’humanité. « Quoi ? » crache l’intéressé agressivement, à deux doigts de lui sauter au cou. Il plante ses deux orbes glaciers qui lancent des éclairs sur le visage de son cadet. Orson ne veut pas croire ce que son adjoint lui raconte. Il est dans le déni pendant quelques secondes, ses yeux déviant de droite à gauche, sans réellement avoir de but, avant de s’ancrer intensément dans ceux de son interlocuteur. Un éclair d’insécurité traverse le bleu océan de ses prunelles, et bientôt, une vague de doute lui recouvre sa colonne de frissons. Des sueurs froides le prennent de court, alors que le sol du vaisseau commence doucement à trembler, sous l’impact qui s’approche de seconde en seconde. Krennic a envie de hurler, de défouler toute ses frustrations en attrapant son officier par le col de son uniforme et de le projeter contre le mur le plus proche. Il n’en croit pas ses oreilles. Maintenant ? Faut-il que quelque chose d’aussi absurde lui arrive dans un moment pareil ? Un putain de complot. « Nous devons atterrir de toute urgence. Asseyez-vous – Directeur ! » Malgré ses explications pitoyablement soufflées à son intention, l’officier n’obtient aucune réponse de la part du directeur Krennic, qui se trouve déjà sur le départ. Faisant volte-face et affichant sa plus belle face de joueur de poker, Orson reprend sa route, le menton fièrement levé. Le monde peut bien s’écrouler autour de lui, les réacteurs peuvent bien exploser, rien ne viendra contrecarrer ses plans. Orson Krennic n’échoue jamais. « Directeur ! » Les appels de l’officier demeurent sans réponse. Krennic retourne dans le corridor, avec la ferme attention d’obtenir des réponses de la part de la rebelle qu’il a ramené du manoir des Tarkin. De gré ou de force. Elle parlera, elle lui dira tout. Elle lui révélera enfin son nom, son but et son implication dans cette mascarade sordide. Cette garce a voulu se jouer de lui au manoir des Tarkin, en osant le bercer de mensonges et d’utopies. Et pour cela, cette fille en paiera le prix au centuple. Personne ne ment à Orson Krennic. Quelle ironie, lorsqu’on y pense. Il a menti presque trente ans à son père, sans scrupules et regrets, comme aux autres personnes qui gravitent dans sa vie. Il ment comme il respire depuis toujours, afin de se construire un mythe. Lui, se permet en revanche de mentir et d’endormir les esprits les plus brillants de ses paroles enjôleuses, mais l’inverse est intolérable à ses yeux. Orson ne décolère pas, il est incapable de digérer le fait que cette femme se soit bien moqué de lui quelques heures plus tôt. Il est furieux, le sang bat violemment au niveau de ses tempes, faisant même l’écho des battements frénétiques de son palpitant, tandis que les pans de sa cape virevoltant rageusement au rythme de ses pas. Le bruit de ses talons claque contre le sol d’acier, dans un bruit régulier et parfait. Orson jure intérieurement, maudissant tous ces représentants d’une liberté absolue dans toute la galaxie, vaine utopie. Ce sont eux. Quelqu’un a saboté son vaisseau pour attenter à sa vie. C’est elle. Qui d’autre ? Sale garce. Sale petite garce. L’expression de son visage reflète son profond agacement : une mine sévère, les yeux cernés et les rides accentuées par l’agitation de ses pensées. Krennic l’insulte sur le chemin, et bien qu’il soit seul et silencieux, ses pensées sont actuellement en ébullition. Il veut la voir ramper devant lui à genoux, implorant sa pitié avant que le coup de blaster ne parte entre les deux yeux. Il va la tuer, c’est clair et certain. Il va s’occuper personnellement d’elle. Peu importe qui elle est, ce n’est qu’une rebelle parmi des milliers. Ce qu’il ignore, c’est que c’est la fille de Galen.

Le silence revient quelques instants. Un silence presque religieux, comparable à l’instant de calme qui précède une violente tempête. Orson garde les yeux rivés vers les officiers qui se trouvent dans les couloirs. Ils donnent l’apparence de se détendre, tout comme Krennic, alors que ces bruits étranges faiblissent en intensité. Son premier réflexe est de rire doucement, en songeant que cela n’est qu’une fausse alerte. En se tournant vers les portes coulissantes avec la ferme intention d’appuyer sur l’interrupteur, tout bascule autour de lui dans un bruit assourdissant et strident. L’instant d’après, une nouvelle détonation, bien plus forte que les précédentes, vient percer ses tympans. L’inquiétude s’engouffre comme un raz-de-marée, la peur de mourir aussi, alors qu’il s’écroule sous un dernier un coup de tonnerre provenant de l’aile où se trouve la salle des machines. Ses yeux se ferment par réflexe lorsque l’arrière de son crâne se heurte au mur situé derrière lui. Un hurlement de douleur s’échappe ensuite de ses lèvres en sentant que son épaule blessée vient d’entrer à son tour en collusion avec un coin de mur en métal. Il attrape sa blessure dans la paume de sa main recouverte de sang, à travers le tissu blanc de son uniforme et compresse aussi fort qu’il le peut. La douleur est glaçante, tout comme les bruits d’explosion et les cris des membres de l’équipage. Dans ce véritable capharnaüm, Orson ne pense qu’à une seule chose ; c’est qu’il ne sera peut-être plus de ce monde pour apprécier toute l’étendue de son projet enfin finalisé. Ce projet, son projet représente tout pour lui. Quelle injustice. Trente ans de recherches, de travail pour ne pas en récolter tous les lauriers. C’est son projet, quoique Tarkin en pense. Il n’entend même plus les voix inquiètes des officiers qui se précipitent autour de lui pour assurer sa sécurité. Directeur. Directeur ! Directeur Krennic ? Ces voix s’éloignent peu à peu, et se fondent dans un bruit qu’il ne parvient pas à identifier. Krennic essaie de rouvrir les paupières, mais cela lui demande presque un effort surhumain, tant il sent que ses forces l’abandonnent. Sa vue se trouble doucement, s’obscurcissant jusqu’à ce que le visage de ses officiers ne se mue en une forme grossière de plus en plus floue. Alors que le vaisseau se met à perdre de la vitesse pour se préparer à un atterrissage forcé, Orson se laisse tomber dans un sommeil momentané, avec la pensée que sa dernière heure est peut-être arrivée. Puis, c’est le trou noir. Krennic s’effondre avec une sensation de froid. Certains souvenirs restent profondément imprégnés, comme l’odeur du métal qui chauffe, la vision d’un épais brouillard de fumée et les flashs aveuglants des lumières qui s’éteignent et se rallument aléatoirement. Lorsqu’il se réveille, Krennic est interpellé par une odeur familière, celle du sang et de la fumée. C’est précisément l’odeur de ses blessures au bras qui sort enfin de sa torpeur. Il se redresse en s’appuyant péniblement sur l’un des murs du vaisseau, tout en grimaçant sous la douleur de sa blessure à l’épaule. Saloperie, pense-t-il. Cette blessure remonte à l’attaque sur Phelarion, un coup de blaster, mais elle s’est accentuée avec la chute du vaisseau. Orson porte son autre main à ses tempes, s’étranglant à moitié dans un gémissement de douleur, accentuée par l’étau invisible qui enserre sa tête. Depuis qu’il est tombé au moment de l’impact, son crâne le fait atrocement souffrir. Sur ses doigts, il retrouve un peu de sang frais. Tout en maudissant ses migraines, Krennic encaisse les faiblesses de son corps pour quitter son vaisseau. Il ne lui faut pas plus d’une minute pour comprendre qu’il se trouve sur la terre ferme, quelque part sur la planète Phelarion. En se déplaçant dans l’obscurité, Orson remarque la présence de corps non loin du vaisseau, soit abattus soit tués au cours de l’atterrissage forcé. Il en déduit rapidement que la rebelle s’est enfuit, non sans avoir éliminé quelques soldats sur son passage. Krennic soupire avant de tirer son blaster de sa ceinture d’une main, et d’enlever cran de sécurité de l’autre d’un coup sec. Ce simple geste lui arrache une grimace de douleur, mais Orson en fait abstraction, tant il est pris dans une poussée soudaine d’adrénaline. Celle-là, une fois qu’il l’aura retrouvée, elle n’aura que ses yeux pour pleurer.

Il déambule alors comme un droïde en évitant les obstacles qui se dressent sous ses bottes cirées. Il s’avance péniblement, en toussant par moments, entre les rochers qui jonchent cette large étendue d’eau où, fort heureusement pour lui, il a pied. Krennic se maudit une fraction de seconde, après avoir longuement maudit toutes les personnes ayant croisé sa route pendant cette réception au manoir Tarkin sur Phelarion. Il aurait dû suivre son intuition et décliner l’invitation de lady Tarkin. Il avait eu des arrière-pensées, et c’est en quelque sorte le karma qui s’est abattu sur lui. Il avait voulu parader, vanter ses exploits et l’avancée du projet devant tout le gratin de l’Empire. Pendant une fraction de seconde, son esprit complètement parasité par sa paranoïa débutante et sa haine envisage sérieusement l’idée que Wilhuff Tarkin soit derrière cette mascarade. A tous les coups, c’est lui qui a demandé que l’on sabote les réacteurs de son vaisseau de transport personnel. A tous les coups, c’est même lui qui a engagé cette créature démoniaque (PARDON JYN) pour le distraire toute la soirée, et sans doute pour le tuer. A tous les coups, c’est encore lui qui a recruté des rebelles pour semer le désordre à cette foutue soirée guindée. « Merde ! » grogne-t-il en gardant le coude devant ses yeux pour les protéger, aveuglé à la fois par ce brouillard encore fumant qui se disperse dans l’air autour de lui et par les débris de cendres. Orson baisse son bras, une fois suffisamment éloigné du vaisseau, et plisse ses yeux bleu océan pour forcer sa vision à se stabiliser. La chaleur irradie de la carcasse du vaisseau jusqu’à ses joues creusées par les années de stress, de travail intensif et de sacrifices. Il désespère pendant quelques minutes de ne pas retrouver la trace de son otage, avant que subitement, son visage ne s’éclaire en reconnaissant une silhouette féminine non loin de ce qui ressemble de loin à l’entrée d’une clairière. Elle s’enfuit. Hors de question.

« Vous ! » hurle-t-il à plein poumons en dégainant sans plus attendre son précieux blaster lourd DT-29. Il tire contre un arbre, à quelques mètres d'elle afin de la contraindre à s'arrêter, sous peine que le prochain coup lui soit porté en plein dos. Sous le hurlement et le coup de laser, l’interpellée se retourne. Leurs regards se croisent longuement, et avant même qu’elle ne reprenne sa course, il élève son arme dans sa direction. Il s’avance précipitamment vers elle, tout en la gardant en joue avec son blaster. Krennic se dépêche en espérant ne pas la voir prendre la poudre d’escampette à travers la forêt. Il ressemble à un automate, le visage sinistre et blanc comme la neige. Toutes ses pensées sont haineuses, mais nuancées par un besoin cruel de réponses. Une pensée effleure son esprit, elle lui intime de la tuer sur-le-champ, mais Orson se ravise. Cela l’obsède, il veut savoir qui elle est, et ce qu’elle fait ici. La curiosité est l’un des pires défauts au monde, et Orson s’apprête à en faire l’expérience. Ses sourcils se froncent de colère, tandis que ses pas le conduisent jusqu’à elle. Son bras reste fièrement levé avec l’arme pointée sur elle. Il se donne un air vaguement hystérique en criant à tout bout de champ et en marchant presque solennellement, mais ne l’est-il pas après toutes ces provocations ? Cette trahison. Pour une raison qui le dépasse, Orson se sent trahi. Il a cru en ses mensonges, en ses caresses, en ses baisers pendant un court instant. Il a cru qu’elle était ce qu’elle prétendait être, mais ce n’était qu’une rebelle. Il se sent étrangement souillé maintenant. C’est l’effet que cela fait quand on nous berne. « Restez où vous êtes ! » Un ordre. Pas une affirmation, une requête ou une question. Non, un ordre. Le ton de sa voix est sans appel. Il ordonne et hurle qu’elle se range de son côté de la baie, avec les mains bien en évidence. « Approchez. Tout de suite. » Où croit-elle encore aller, loin de lui, vraiment ? Krennic se moque ouvertement d’elle. Son rire est à mi-chemin entre l’amusement et l’énervement. « Ici. » précise-t-il sur un ton dédaigneux. D’un mouvement de tête sur le côté, il lui fait comprendre où se trouve sa véritable place : par terre dans le sable et en position assise. Prête à recevoir un éclat de laser en pleine tête. « C’est vous… Vous qui avez trafiqué mon vaisseau ? Ou bien alors… Vos amis… s’en sont chargés. Vous vouliez me tuer. Pourquoi ne pas l’avoir fait au cours de la réception, très chère ? » vocifère-t-il en plissant les yeux pour mieux distinguer les traits de son visage. « Vous croyez être en mesure de me tuer ? Pauvre idiote ! » s’insurge Krennic en rigolant au beau milieu de sa phrase, mais il n’y absolument rien d’amusant. Ce sont ses nerfs qui craquent. Ce rire n’est pas joyeux, il est hargneux et moqueur. « Vous savez qui je suis ?! » D’un coup, sa voix s’élève et vient cingler l’air ambiant. Oui, elle le sait sans doute, mais la réciproque n’est pas vraie, et cela l’obnubile complètement. Cette situation fait ressortir le pire de lui, toute sa colère et sa frustration. C’est un échec cuisant pour sa garde personnelle, mais particulièrement pour son égo. C’est qu’il y a cru pendant une fraction de seconde. Il a cru qu’elle venait pour lui plaire, elle lui rappelait tellement… quelqu’un. Tout est dans le regard. Son regard a réveillé chez lui un vent de souvenirs brûlants, ses nuits d’étudiant, ses premiers émois. Elle est si jeune, mais elle représente exactement ce qui le fait trembler. Orson sent qu’il délire, probablement à cause de l’excès d’alcool et de chaleur, mais ce peut aussi être le fait qu’il se soit cogné en tombant dans le vaisseau. « Vous êtes satisfaite ? Vous m’avez pour vous toute seule ! » Krennic est douloureusement cynique. Il essaie vainement de mettre de côté cette blessure d’orgueil qui martèle son cœur, personne n’est capable de percer son âme. Son égo est meurtri. Personne ne peut le tromper, l’attraper dans ses filets et lui faire avaler des couleuvres. Personne. C’est lui qui décide, qui mène la danse, qui trompe son monde. Elle… Elle a réalisé l’exploit de le berner complètement pendant une seule soirée. Krennic continue de la maintenir en joue avec son blaster, sans ciller une seule seconde. Il veut garder le contact avec ses yeux clairs, jusqu’à ce que la dernière étincelle de vie ne s’échappe de son corps. Son regard est intense, pénétrant et presque désinhibé. Plus rien ne le gêne à présent. Il l’a vue nue quelques heures auparavant. Il a senti sa peau chaude contre la sienne, son souffle plein de désir contre son oreille. Il en a apprécié chaque instant en pensant qu’elle était… ce qu’elle semblait être. Il l’a touchée, caressée et aimée à sa manière pendant une soirée. Il l’a possédée, elle lui doit tout. Des comptes, mais à commencer par la vérité. Une notion bien abstraite pour quelqu’un comme Orson Krennic. La vérité est un même un concept amusant, qu’il déforme au gré de ses humeurs. C’est douloureux, lorsqu’on nous retourne l’ascenseur. Krennic tombe d’un immeuble de douze étages. Jyn Erso a fait éclater le vernis lisse qui recouvre la personnalité fabriquée d’Orson Krennic pour laisser entrevoir la vulnérabilité de l’homme derrière le monstre, le génocidaire, ne serait-ce qu’un instant. Une soirée. Paisible et excitante. Il refuse d’être attaché à ces souvenirs, alors qu’il n’a été qu’un grotesque clown entre ses mains. Krennic inspire une profonde bouffée d’air, qui est loin d’être pure, puisqu’elle est mélangée aux cendres. Il essaie vainement de détendre ses muscles endoloris, mais surtout de s’empêcher de tirer au moindre coup de sang. « Si votre plan était de me tuer, je suis dans le regret de vous annoncer que vous avez lamentablement échoué. Nous sommes toujours sur Phelarion. Ce n’est qu’une question de temps avant que nous réparions ce vaisseau. Je peux vous conduire quand je veux à Coruscant. » Krennic est excédé et son regard est de plus en plus dur. Il bouge son arme de droite à gauche, tout en parlant, comme l’un de ses énièmes tics nerveux. Vraiment, il ne digère pas le fait d’avoir été berné par une gamine, plus jeune d’au moins du double de son âge. « Croyez-moi très chère, nous nous occuperons bien de vous. » ironise-t-il en agitant ses mains de manière exagérée et faussement dramatique. Cette fois, Orson appuie ses mots avec force en espérant se montrer assez menaçant pour la convaincre de cracher la vérité. Il peut lui faire confiance sur ce point, elle souffrira entre les mains des officiers impériaux. Orson Krennic s’assurera personnellement à ce que l’élite de ses hommes se charge de son cas. Et lorsqu’ils en auront terminé, Krennic obtiendra enfin toutes les réponses à ses questions.

Le canon de son arme se presse un plus durement contre le front de la jeune femme, comme un avertissement. Krennic ancre enfin ses deux orbes glaciers dans les siens, en cherchant à capter une émotion qu’il espère vive. De l’insécurité, n’importe quoi, mais quelque chose qui le conforte dans sa position de dominance. Un signe de terreur. Plus que tout, il rêve de faire disparaître cette lueur de défi dans son regard fier. Pour qui se prend-elle ? Est-ce qu’elle sait au moins qui il est au sein de la puissante machine impériale ? Krennic grimace intérieurement, la réponse est apparemment négative. Peu importe. Il le lui fera comprendre, en bon pédagogue. Il le lui imprégnera douloureusement et profondément, encore et encore, et elle lui révélera tous ses secrets parce qu’elle n’aura pas d’autre choix. Krennic déplore pendant quelques secondes de ne pas retrouver la trace de certains membres de sa garde rapprochée. Leur simple présence suffit généralement à planter un décor angoissant dans l’esprit de ses victimes. Comme une arme de dissuasion massive. Ces armures épaisses et noires suffisent amplement à effrayer les plus faibles d’esprit. Seulement… cette fille. Est-elle vraiment faible ? Elle se dresse devant lui, les yeux fiers et décidés à ne pas lui céder en quoi que ce soit. C’est perturbant. Orson Krennic n’est pas habitué à ce qu’on lui dise non. Elle éveille en lui quelque chose de bien trop familier, une fois encore, il se fait la réflexion mais ne trouve aucune explication. Un jour, il saura. Dans quelques années, il la retrouvera au sommet de la plus haute tour de sa base militaire sur la planète Scarif. Un jour, elle lui révélera son identité, et son nom de famille le frappera en plein cœur, avant que sa vie vienne à être balayée en un éclair vert. Jyn Erso sera la dernière personne sur laquelle ses yeux s’attarderont, avant que la vision de sa précieuse Etoile de la Mort ne lui arrache sa dignité. Jyn Erso sera la dernière personne qu’il adorera détester de toute son âme avant de mourir. Elle sera son dernier souvenir. Le souvenir de « lui ». Sa chair et son sang. Ils lui auront tout pris. Père comme fille.

En attendant, là et maintenant, il est bien loin d’imaginer le terrible secret de la jeune femme. Là et maintenant, il imagine savourer la détresse qui embrasera son corps, avant qu’elle n’émette son dernier souffle de vie. Lorsque l’étincelle disparaîtra à tout jamais dans son regard. Krennic veut être la dernière personne sur laquelle ses yeux clairs se poseront avant de mourir. Son dernier souvenir. Quelle ironie, puisqu’elle sera le sien. « Donnez-moi une bonne raison. » dit-il avec sévérité. Tout dans son regard appelle au crime. Ses lèvres se mouvent à peine, mais le son de sa voix reste perceptible et limpide. Ce qui est le plus frappant, c’est ce ton sinistre. Sa voix gronde comme les éclairs foudroyants dans un ciel noir. Une bonne raison. Il exige une bonne raison. Une bonne raison de ne pas te tuer. Pendant quelques minutes, il reste planté devant elle, avec sa menace en l’air et son blaster. Ses muscles se contractent et son rythme cardiaque s’accélère sous le coup de l’énervement, mais il s’efforce de conserver une stature digne. Il se tient avec le menton levé dans une moue suffisante et le dos bien droit. Cette fille est forcément la cause de tout ça. Orson se moque bien de se retrouver seul avec son vaisseau. Il est familier de la solitude, elle l’enveloppe à la manière des bras d’un amant. Cela fait des années qu’elle a cessé d’être pesante. Les droïdes qui se trouvent dans son vaisseau aideront à remettre son vaisseau en place, ou en tout cas de lui permettre de passer quelques appels par hologramme pour que l’on le fasse quitter cette planète. Pourquoi épargner une rebelle ? C’est ce qu’il pense spontanément, avant de se rappeler que par suite du crash, certaines interrogations ont été laissées en suspens. Il désire plus que tout avoir des réponses sur la rébellion, et il ne les obtiendra pas en mettant un terme à sa vie. Orson sait qu’il doit la garder encore en vie avant qu’ils n’arrivent dans les locaux du département de la sécurité intérieure impériale à Coruscant. Il sait qu’elle doit rester encore en vie, mais elle, elle l’ignore sans doute. L’impérial est d’humeur revancharde à l’idée de lui laisser croire que son existence ne lui est plus d’aucune utilité. Ce n’est que partie remise, après avoir joué avec lui, c’est de bonne guerre de lui faire connaître l’Enfer de ses mains. « Vous croyez que j’aurais pitié de vous ? » Sa voix se fait plus caressante et sifflante. Krennic cherche à asseoir insidieusement son autorité, afin de l’écraser de sa présence. Qu’elle soit physique ou mentale, il se sent omniprésent et donc tout puissant. « Suppliez. » ordonne-t-il sans rougir ou frémir. Orson appuie son regard, renforçant cette intensité presque malaisante. Il exprime beaucoup de sévérité, notamment en raison de l’absence de sourire ou de lueur douce dans son regard. « Suppliez-moi. » Il ne la tuera pas. Il a besoin des informations qu’elle détient pour savoir où frapper, qui traquer dans toute la galaxie. Il promet le feu et le sang à tous les alliés de la résistance, ces ennemis de l’Empire. Il promet de leur faire courber l’échine. Tout comme elle. « Après tout… N’est-ce pas une pratique familière entre nous ? » se moque-t-il, cynique et arrogant. Détestable. Profondément antipathique. Ce rictus est malsain, parce qu’il illustre toute l’obscénité des pensées qui traversent son esprit.

Presque machinalement, il fait descendre le canon de l’arme le long de son nez, puis de son arc de Cupidon, de la pulpe de sa lèvre inférieure, de l’ossature délicate de son petit menton, de son cou, avant d’interrompre sa course contre sa poitrine au niveau de son sein gauche, là où se trouve son cœur. Dans un mouvement très lent, et plein de confiance. Au passage du canon, les plis de sa rone se froissent et s’éparpillent tout autour du rond métallique. Orson vient le déplacer, en prenant soin d’appuyer sur le bout de chair surélevé qui se trouve en plein milieu de son sein. Cette intrusion dans son intimité l’amuse assez, parce qu’elle fait écho aux instants qu’ils ont partagé quelques heures plus tôt. Il ne prend pas de gants avec elle. L’acier glacé de son arme se presse dans un coup sec, Krennic espère ainsi arracher un frisson chez elle, voire plusieurs. Il remarque même un détail qui le fait sourire mentalement, alors que vu de l’extérieur, son visage demeure toujours aussi inexpressif. Cette forme gracieuse s’accentue, jusqu’à dessiner élégamment une légère bosse bien ronde et pointue. Dans d’autres circonstances, Krennic trouverait cela flatteur, mais il a conscience que le froid, l’humidité et la pression de son arme rigide contre sa peau sont les seuls en cause. Vraiment ? Il veut croire être suffisamment irrésistible pour déchaîner les passions sur son passage. Toutefois, cela n’arrête pas sa perversion. Ce n’est que de bonne guerre, après la sérénade de cette soirée et toute cette mascarade ridicule. Il s’est senti manipulé, et c’est quelque chose que très peu de personnes ont eu le plaisir de faire. Orson fait redescendre le canon de quelques millimètres pour le positionner à l’endroit le plus stratégique. Sans rompre le contact visuel, le bleu océan de ses yeux s’assombrit légèrement, et ses pupilles commencent doucement à se dilater. Il l’observe fixement en analysant chaque ride d’expression sur son visage de porcelaine. Cette insistance sordide n’amuse que lui. Orson apprécie fortement sentir cette résistance de chair tendre contre son arme, cela lui donne presque envie de continuer pour entendre ses cris de protestation et ses gémissements. Il sait et sent en se heurtant à l’obstacle que rencontre le canon que ce mamelon se remplit de sang au rythme de ses va et viens fermes, mais précautionneux. Il s’enthousiasme de cette situation, elle est à sa merci. Ses seins lui semblent terriblement moelleux, et leurs pointes sont maintenant aussi dures que le plus beau marbre. Il ne baisse pas les yeux, ce moment est si exquis, qu’il en savoure chaque seconde. Il est armé, et au moindre faux-pas, la partie est gagnée. Cette sensation de supériorité est enivrante. Elle expose le plus odieux de ses visages. Le visage d’un véritable enfoiré. « Vos efforts pour m’atteindre sont désespérément braves, mais vains… » murmure-t-il avec arrogance, en levant fièrement le menton dans sa direction. Orson plonge dans les prunelles de la jeune femme, elles sont si brillantes qu’il a presque l’impression de se noyer. Ce mélange de sordidité et de brutalité est terriblement excitant. Il adore être celui qui détient le pouvoir de vie ou de mort sur les autres. Il veut voir ces frissons parcourir son corps et être la cause de cette crainte de vivre ses derniers instants de vie. « Vous avez perdu. Admettez-le et regardez-moi. Je veux que mon visage soit votre dernier souvenir. Je veux que vous l’emportiez dans la tombe. » assure-t-il en approchant lentement d’un pas supplémentaire. Ils sont désormais si proches, qu’il est capable de sentir son souffle sur sa peau. Son sourire carnassier décore ses lèvres au niveau de leur commissure. Un léger rire s’échappe de sa bouche. Il semble fier de sa remarque acerbe en lui rappelant les circonstances exactes de leur première rencontre, il y a quelques heures. Il lui balance au visage ces instants brûlants qu’ils ont partagé, loin des regards des autres convives. Ces images sont fortement imprégnées dans sa mémoire. Il se remémore ces gémissements lascifs répondant aux gestes intrusifs sur chaque partie de son corps. Elle a supplié, d’une certaine manière, pour qu’il ne s’arrête jamais de la posséder. Tu as adoré, ne dit pas le contraire. Orson veut cette fois l’entendre le supplier d’épargner sa misérable vie. Il aspire à se délecter de la vue de ces yeux magnifiques qui se voilent d’inquiétude et d’effroi devant le canon de son blaster. Elle mérite d’être punie, c’est ce que n’importe qui mérite pour oser lui mentir. « A genoux. Mains derrière le dos. » ordonne-t-il en faisant disparaître toute forme d’amusement sur son visage. Son sourire vient mystérieusement de disparaître, laissant place à une moue sévère. « Je déteste me répéter. » cingle-t-il en enfonçant le canon de son blaster dans sa peau avec impatience. Krennic a besoin d’une réponse. Elle l’obnubile d’une manière qui le trouble bien plus qu’il ne veut le laisser paraître. Cette lueur de détermination dans ses yeux, cette bouche insolente et ce ton réprobateur. Tant de détails qui le frappent, sans pour autant lui donner envie de mettre un terme à cette comédie. Elle lui ressemble. Elle lui ressemble bien trop. Il se laisse engloutir dans cette désagréable sensation de familiarité. Une part de lui, profondément enfouie, adore ce jeu. Ils se livrent tous deux à une véritable bataille de regards. L’un comme l’autre refuse de rompre le contact, de sourciller ou d’exhiber la moindre trace de vulnérabilité. S’il ne la tue pas aujourd’hui, ce ne sera pas seulement dans le but de l’interroger dans ses locaux à Coruscant.