Si les promesses d'Alexander étaient irréalisables, elles avaient quelque chose de particulièrement irrésistible. Avec lui, Elizabeth avait envie de croire en absolument tout. Avec lui, Elizabeth était prête à imaginer l'inimaginable. S'il ne pouvait lui offrir ni la lune, ni une autre planète, il pouvait au moins lui offrir de rêver et d'écouter les histoires qu'il avait entendues depuis qu'il était dans ce monde. C'était aussi une façon de s'évader, après tout. Différente, mais parfois tout aussi efficace. Alors, Alexander, après lui avoir assuré qu'il fallait garder espoir, lui promettait de lui raconter tout ce qu'elle aurait envie d'entendre. Et il le ferait, elle le savait. Mais, comme pour le lui confirmer, il lui donnait déjà un premier exemple de ce qu'il savait. Malheureusement, il concernait Tarkin - et autant dire que les circonstances actuelles ne lui donnait pas vraiment envie d'entendre son nom pour autre chose que des représailles méritées et justifiées. Il lui expliquait que ce dernier prétendait venir d'ailleurs, d'une autre galaxie, d'un endroit qu'il gouvernait - ce qui expliquait, selon Alexander, le comportement de Tarkin dans cette ville. Il se pensait très certainement au-dessus de tout le monde. « Il peut avoir gouverné toutes les galaxies qu'il veut, il peut venir d'ailleurs, il peut avoir été ce qu'il veut, il ne t'arrivera jamais à la cheville. » Même si elle ne connaissait rien de cet homme, elle était persuadée qu'Alexander valait bien mieux que lui - elle n'était certainement pas objective, mais à ses yeux Alexander resterait toujours le meilleur candidat pour diriger cette ville - parce qu'il offrait une vraie liberté, une vraie justice, un idéal.

Elizabeth n'avait jamais eu la moindre intention de s'investir dans cette ville. Jusqu'à sa rencontre avec Alexander, elle vivait recluse et s'éloignait de tout ce qui pouvait être une menace aux yeux de Mary. La politique était, tout naturellement, tout en haut de cette liste. Si Elizabeth s'y intéressait de trop près, sa cousine imaginerait tout de suite qu'elle cherchait à récupérer la place de dirigeante de cette ville. C'était signer son arrêt de mort, elle en était persuadée. Pourtant, même si elle restait dans l'ombre, discrète, elle tenait à être présente pour Alexander, à l'aider de son mieux et à sa façon, à le conseiller. Elle oubliait ses craintes, elle oubliait Mary et elle s'ouvrait - même si ça restait toujours bien peu à côté de ce qu'elle aurait aimé faire, parfois - pour rester aux côtés d'Alexander. Alors, même si elle ne devait toujours rester que dans l'ombre d'Alexander, même si elle ne devait jamais se montrer, elle continuerait de le soutenir, de travailler avec lui, ensemble, main dans la main, et sa réussite deviendrait la sienne. Parce qu'ils réussiraient. Le contraire n'était ni envisageable, ni même imaginable. Alexander était fait pour ça. Il méritait d'obtenir tout ce qu'il voulait. Cette ville méritait de l'avoir. Il travaillerait pour elle, pour ses habitants, il ferait toujours de son mieux pour offrir un monde juste, où chacun trouverait sa place. Il n'était pas parfait, son programme avait des failles et des limites, qu'Elizabeth soulignait parfois tant leurs conceptions, sur certains points, étaient différentes, mais rien n'était jamais parfait et ça n'enlevait rien aux nombreuses qualités qu'il possédait. Ses adversaires n'étaient qu'un obstacle sur leur chemin. Un obstacle qu'ils franchiraient, s'ils s'y prenaient bien, tous les deux.

Alexander tentait de voir le bon côté des choses, le côté pratique. Puisque ses ennemis le pensaient affaibli, ils ne se méfieraient sans doute plus autant. Et c'était là qu'Elizabeth devait intervenir. « J'ai déjà affronté bien pire, j'en suis certaine. » Si Elizabeth avait pour habitude de se terrer, de se cacher, de se protéger des menaces de sa cousine, elle avait aussi, autrefois, été capable d'affronter bien des menaces. Elle avait lutté contre ses propres conseillers, elle avait passé sa vie à se battre contre sa cousine et à s'en protéger, elle avait lutté contre ceux qu'elle croyait être des proches, elle avait mené des guerres... Alors, les ennemis d'Alexander étaient redoutables, mais ce monde impitoyable ne lui était pas inconnu. La peur, cette fois-ci, ne l'empêcherait pas d'avancer et d'agir. « Je te promets d'être prudente. » Elle exigeait ce genre de promesses de sa part, alors elle pouvait bien faire la même chose. Et, prudente, elle le serait réellement. Généralement - il y avait des exceptions, ces fois où elle s'emportait, où elle agissait sous le coup de la colère et où elle oubliait toute logique et toute prudence - elle était raisonnable et elle ne se mettait pas inutilement en danger - la vie qu'elle avait menée depuis son arrivée ici en était une preuve, puisqu'elle n'avait pas eu les moyens de lutter contre Mary, elle ne l'avait pas fait. Elle avait conscience des dangers qui gravitaient autour d'eux, elle avait conscience des risques, elle avait conscience de ne pas être invincible. « Je ferai tout ce que tu me demandes de faire. » Parce qu'elle lui avait promis de tout faire pour lui, pour l'aider à mener à bien ses projets, elle tiendrait ses promesses et ne reculerait devant rien.

Elizabeth n'était pas stupide au point de sous-estimer ce monde dans lequel ils vivaient et les ennemis qu'il renfermait. Elle savait les dangers qui les guettaient à chaque coin de rue, elle devinait la force et la puissance de ces adversaires prêts à tout pour obtenir la ville et le pouvoir. Si elle savait tout ça, elle savait autre chose également : que rien ne résisterait éternellement à l'homme qu'elle aimait. Son avis n'était certainement pas le plus objectif de tous, mais elle restait persuadée qu'il n'était pas homme à rester au second plan éternellement. Il avait l'intelligence, la ténacité et la détermination pour y arriver. Mieux encore, il avait les idées et les rêves. Il se battait avec force - même si Elizabeth aurait préféré le voir se battre en utilisant d'autres méthodes, parfois, tant pour se protéger que pour faire taire de façon radicale et définitive ceux qui méritaient d'être réduit au silence par leurs actions et leurs influences néfastes - et Elizabeth resterait à jamais un soutien pour lui. Elle l'aiderait, tant qu'il en aurait besoin et tant qu'il le voudrait. Elle resterait à ses côtés et lui donnerait tout ce dont il avait besoin.

Et elle commencerait aussitôt qu'il en exprimerait le besoin. Coincé dans ce lit d'hôpital, il avait besoin de temps pour se remettre de cette agression - quoi qu'il en dise. Elizabeth n'était pas ignorante de cette vie, des dangers ou des menaces. Autrefois, elle avait affronté son lot d'adversaires et elle avait combattu. Aujourd'hui encore, elle devait affronter sa cousine - même si leur guerre n'avait plus rien de politique. Pour rassurer Alexander, pour qu'il ne recule pas, elle lui assurait ne pas avoir peur et avoir affronté bien pire que tout ce qu'il pourrait bien lui demander. En réalité, elle avait peur de bien des choses, mais la peur pouvait la paralyser autant que la faire avancer et se battre avec force et détermination - plus encore lorsqu'il s'agissait de défendre les intérêts d'Alexander et le rôle qu'il était prédestiné à jouer un jour ou l'autre. « Je n'irai pas jusque-là. » Soufflait-elle, le regard presque amusé par cette réflexion. Un jeu d'enfant... Elle aurait aimé que ce soit aussi simple, mais elle restait consciente que les adversaires d'Alexander étaient puissants et impitoyables. C'était pourquoi elle lui promettait d'être prudente - promesse qu'elle tiendrait tant que possible, mais Elizabeth se connaissait et lorsqu'elle se sentait emportée par quelque chose, lorsqu'elle se sentait en danger ou lorsqu'elle était déterminée à réussir quelque chose, elle oubliait bien souvent la prudence qu'elle s'imposait pourtant avec tellement de soin depuis son arrivée en ville. Alexander en était le premier exemple, ses sentiments l'avaient emporté sur sa raison.

Attentivement, Elizabeth écoutait Alexander lui expliquer comment il entendait qu'elle procède. Comme ils en avaient déjà discuté, la première chose à faire était de récolter des informations, dans la plus grande des discrétions. Trouver des indices, des éléments incriminants tel ou tel adversaire serait compliqué, mais qu'importe si cela devait leur prendre des mois, ils seraient patients et, étape par étape, ils récolteraient toutes les preuves nécessaires. Et alors, Elizabeth était bien déterminée à lui faire entendre raison sur les méthodes à employer pour résoudre ce problème et faire disparaître cette menace, tant pour Alexander que pour la ville, de manière définitive.

Ici, contrairement à chez elle, Elizabeth n'avait pas de contacts particuliers, pas d'espions. Ici, elle s'était coupée de tout et tout le monde, son réseau était donc inexistant. Puisqu'elle ne plaçait sa confiance en personne en dehors d'Alexander, cette tâche se révélerait difficile, qu'importe les contacts de ce dernier. Cependant, elle ne doutait pas de trouver le meilleur moyen de procéder en se laissant le temps de la réflexion. « Je serai discrète, ça aussi, je te le promets. » Discrète et prudente. Tout à la fois ce qu'elle s'était toujours évertuée à être, avant de se laisser dépasser par son coeur, ses envies ou ses peurs. « Et lorsque nous aurons suffisamment de preuves, nous agirons comme il se doit. » répondit-elle lorsqu'il assurait qu'ils aviseraient ensuite. Aux yeux d'Elizabeth, quoi faire était déjà tout décidé. Ils ne s'en sortiraient pas après ce qu'ils avaient fait à Alexander, c'était une évidence. Elle ne se montrait patiente que parce qu'il fallait suffisamment de preuves pour ne pas abattre le mauvais ennemi et parce qu'il lui fallait suffisamment de temps pour convaincre Alexander. « Tu sais aussi bien que moi que tu y arriverais très bien sans moi. Tu as de nombreux soutiens ici. » Mais elle lui serait toujours la plus fidèle et la plus dévouée. « Mais j'aime imaginer que je te suis indispensable. » Affirmait-elle, un sourire tendre et amusé aux lèvres.

Ces histoires n'avaient rien d'un jeu, même pour quelqu'un qui avait affronté des nations entières. Alexander et Elizabeth avaient chacun affronté bien des choses, bien des épreuves, bien des difficultés dans leur vie passée, mais ils n'en étaient pas devenus invincibles pour autant - contrairement à ce qu'Elizabeth aimait penser lorsqu'il s'agissait de l'avenir politique d'Alexander ici, si certain à ses yeux. A chaque instant, chaque adversaire pouvait leur être fatal. Alors, Elizabeth prendrait ses précautions et resterait prudente. Pour lui, pour qu'il ne revienne pas sur sa décision de la laisser intervenir, pour qu'elle n'ait pas à intervenir dans son dos. Alors, sans que ce ne soit un jeu d'enfant et avec prudence, Elizabeth ferait au mieux pour obtenir ce dont Alexander avait besoin parce que, malgré tout, même si ce n'était pas quelque chose de facile, c'était une chose pour laquelle elle avait tout de même de l'expérience.

Et, contrairement à ce qu'il sous-entendait, beau parleur qu'il était, elle ne lui était pas indispensable. Sans elle, il réussirait. Elle en était persuadée parce qu'elle était persuadée qu'il avait ça en lui, comme une évidence. C'était inscrit quelque part, Alexander réussirait ce qu'il entreprendrait. D'autant qu'il avait su trouver du soutien dans cette ville. Du soutien indispensable pour se battre, pour se faire un nom et pour réussir. Cependant, même si ce n'était pas réellement le cas, Elizabeth aimait s'imaginer indispensable aux yeux de celui qu'elle aimait. Et elle aimait qu'il le lui dise. Comment ne pas se sentir flattée par de telles paroles, après tout ?

Et il l'admettait. Il admettait qu'il pouvait y arriver sans elle, mais qu'il n'en avait pas envie. C'était presque plus plaisant à entendre encore, dit de cette façon. Elle ne lui était pas indispensable parce qu'il avait besoin d'elle pour réussir. Elle lui était indispensable parce qu'il avait envie qu'elle soit là pour réussir. « Je resterai auprès de toi aussi longtemps que tu le souhaiteras. » Alors, elle resterait un soutien pour lui aussi longtemps qu'il en aurait envie et il pourrait entreprendre tout ce qu'il voudrait, Elizabeth à ses côtés. Elle serait sa présence rassurante, sa conseillère, son soutien à toute épreuve, sa raison, sa motivation... Tout ce dont il aurait besoin aussi longtemps qu'il en aurait besoin.Et aussi longtemps qu'il lui répéterait qu'elle lui était indispensable et qu'il avait besoin d'elle.

Elle le rendait donc raisonnable ? Elle ? Celle qui essayait sans cesse de le pousser à faire ce qu'il n'avait pas envie de faire pour régler ses problèmes ? Celle qui avait une vision des choses parfois si différente de la sienne, au point où il était difficile pour eux de trouver un compromis face à leurs désaccords ? Malgré tout cela, elle était donc capable de le rendre raisonnable ? Sur certains points, peut-être. Mais lui aussi la rendait raisonnable. Il diminuait ses peurs, calmait sa paranoïa. Grâce à lui, elle était plus raisonnable face à ses craintes. Elle réussissait à voir les choses autrement et à se raisonner suffisamment pour vivre. Il l'empêchait d'être trop radicale dans ses solutions, en lui opposant des arguments et en l'empêchant d'agir trop vite. En réalité, ils se complétaient merveilleusement bien sur tous ces points. Elizabeth était réfléchie, la plupart du temps, mais il savait la calmer et la raisonner lorsque c'était nécessaire. Il savait lui faire voir cette vie d'un meilleur oeil et il savait faire taire ses peurs pour profiter des instants qui leur étaient offerts. Il avait ce don aussi de réveiller en elle ce qu'elle était, de l'exaltée, de la passionner, de la faire sourire. Quant à elle, elle savait le calmer et le raisonner lorsqu'il se laissait emporter par ses idées ou par son travail, inconscient de cette réalité qu'il ne pouvait pas changer, malgré toute sa bonne volonté. Elle savait lui dire stop lorsqu'elle jugeait qu'il allait trop loin et elle lui faisait voir les choses d'un autre oeil, sur certaines de ses idées bien trop arrêtées et radicales.

Ils se raisonnaient mutuellement, atténuaient les défauts l'un de l'autre. Et c'était cet équilibre presque parfait qu'Elizabeth craignait de détruire, un jour ou l'autre. A cause de Mary, à cause de son égoïsme, à cause de ses peurs, à cause de son besoin d'agir... Elle avait gâché tant de choses, tant de fois qu'il était difficile d'imaginer que ça n'arriverait plus jamais. « Ton corps t'aurait forcé à être raisonnable, tu n'aurais pas fait trois pas avant de revenir te mettre dans ce lit. » Rétorqua-t-elle. Peut-être aurait-il pu forcer un certain temps, mais son corps l'aurait rappelé à l'ordre - trop tard, peut-être, en revanche. « Promets-moi que tu ne feras rien de stupide avant d'être entièrement rétabli et je saurai que je te rends vraiment raisonnable. » Parce qu'elle craignait de le voir s'agiter à l'instant où il s'agacerait d'être immobile - au point de se faire plus de mal que de bien. « Je t'aime. » Elle espérait que ces mots achèveraient de le convaincre parce qu'ils étaient sincères, parce qu'ils lui montraient à quel point elle tenait à lui et à quel point elle avait besoin, en effet, qu'il se montre raisonnable dans cette situation pour ne pas l'inquiéter et pour ne pas qu'il lui arrive pire encore.

L'idée de rester auprès de lui aussi longtemps qu'il en aurait envie n'était pas pour lui déplaire. Elle saurait se contenter d'une éternité à ses côtés. Elle savait comme les choses pouvaient vite changer, comme les promesses pouvaient se transformer en fonction des circonstances et des événements, mais elle avait envie de croire qu'ils n'éprouveraient jamais l'envie de s'éloigner l'un de l'autre, elle avait envie de croire qu'ils surmonteraient tous les obstacles ensemble, main dans la main. Dès qu'Alexander parlait pour lui promettre quelque chose, elle avait beaucoup de mal à ne pas le croire sur parole. Il parlait si bien. Il savait si bien lui parler, à elle. Il était capable de comprendre ses besoins, capable de la rassurer, capable de lui dire ce qu'il fallait à l'instant où il le fallait. Ainsi, il devenait facile pour elle de croire en chacun de ses mots aveuglément, sans se poser de questions, sans avoir peur. La réalité finirait peut-être par les rattraper, un jour ou l'autre, mais elle n'avait aucune envie d'y penser à cet instant. « Je resterai toujours à tes côtés. » Parce qu'il n'était pas question, de son côté à elle, de l'abandonner ou de se passer de lui, c'était une promesse facile à faire alors.

Depuis qu'Alexander était entré dans sa vie, elle se sentait capable de tellement de choses, elle se sentait plus forte et en sécurité, capable de surmonter toutes les épreuves et de franchir tous les obstacles. Il lui donnait cette force qu'elle pensait avoir perdu en arrivant dans ce monde. Il réveillait ce qu'elle était, ce qu'elle avait été. Il lui offrait beaucoup. Beaucoup plus que tout ce qu'elle aurait pu espérer. Comme elle semblait lui offrir beaucoup, d'après ce qu'il disait. Elle était un véritable soutien pour lui. Un soutien à toute épreuve. Un soutien dont il semblait ne pas vouloir se passer. Sans elle, Elizabeth restait persuadée qu'il n'aurait aucun mal à réussir, à faire de ses ambitions et de ses rêves une réalité. Pourtant, il ne voulait pas réussir seul. Il voulait réussir avec elle. Ensemble. Comme s'ils ne formaient plus qu'un, désormais.

Mieux encore, elle semblait le rendre raisonnable - et de ce qu'elle connaissait de lui, la raison n'était définitivement pas sa qualité première. Les limites de son corps l'auraient rendu raisonnable, elles aussi. Alexander était humain. Il avait des limites, comme tout le monde. Des limites qu'il tentait bien souvent de dépasser ou d'ignorer. Cependant, elles finissaient toujours par le rattraper, comme elles rattrapaient tout le monde. « Je n'ai jamais tort, Alexander. » Rétorqua-t-elle, un sourire tendre et malicieux aux lèvres. En réalité, elle avait tort, comme tout le monde, mais elle détestait l'admettre - c'était un point qu'ils partageaient tous les deux, d'ailleurs - et elle appréciait, au contraire, entendre Alexander l'admettre. Et elle appréciait plus encore l'entendre lui dire qu'il l'aimait plus que tout parce qu'elle se sentait, en effet, aimée comme jamais personne ne l'avait aimée. On l'avait aimée, pourtant. Et elle avait aimé, elle aussi. Passionnément. Avec force. Avec cette conviction que ce serait éternel. Pourtant, rien n'était comparable à ce qu'elle ressentait pour lui aujourd'hui. Elle ne saurait expliquer pourquoi, mais elle le ressentait au plus profond d'elle-même : tout était différent avec Alexander. Plus fort. Plus intense. Plus profond. Plus sincère. Il y avait ce quelque chose en plus. Ce quelque chose qu'elle ne savait pas expliquer parce que ce quelque chose était inexplicable.

« Je ne le sous-estime pas. » Elle avait conscience d'avoir un certain pouvoir sur lui - qu'il l'accepte malgré tout ce qu'elle avait été en était la preuve la plus évidente à ses yeux, qu'il accepte d'être plus raisonnable ou de faire attention, également - mais peut-être n'avait-elle pas conscience de la force de ce pouvoir ? « Alors, dis-moi celui que tu étais avant, dis-moi tout ce que j'ai changé en toi. » Afin qu'elle prenne conscience de tout ce qu'il était en train de lui dire, afin qu'elle comprenne l'impact qu'elle avait peut-être eu sur lui. Il n'y avait rien qu'elle ne désirait plus au monde que tout connaître d'Alexander, de sa vie, de son passé, des événements qui l'avaient forgé. Elle l'aimait à un point où chaque aspect de sa personnalité devenait une chose de plus à aimer chez lui - ce qui avait sans doute tendance à fausser son jugement puisqu'elle n'arrivait pas à lui trouver le moindre défaut.

Chacun leur tour, ils se promettaient de rester l'un auprès de l'autre, pour toujours. Il ne s'agissait que de mots, et les mots étaient si faciles à oublier, mais Elizabeth avait envie de croire en ceux-là comme elle n'avait jamais cru en aucun autre, parce qu'ils étaient rassurants. Qui ne rêverait pas de se savoir aimé au point de pouvoir compter sur l'autre pour toujours et à jamais ? Qui ne rêverait pas de pouvoir avoir une confiance absolue en celui qui partageait sa vie ? Qui ne rêverait pas d'entendre ce genre de promesse, rassurante, qui laissait penser qu'on ne serait jamais seul, quoi qu'il advienne ? Dans cette promesse, Elizabeth voyait bien plus que des mots et, dans ces mots, elle voyait bien plus que ce qu'ils disaient. Peut-être que ce n'était qu'une façon pour elle de se rassurer, de se convaincre qu'elle était en train de faire le bon choix... Peut-être. Ou peut-être que cette conviction profonde avait du sens.

Derrière ces promesses de rester ensemble éternellement, il y avait toutes les raisons qui les poussaient à le faire. Ils se complétaient. Ils étaient ce que l'un avait besoin pour l'autre. Elizabeth appréciait chaque instant passé à ses côtés parce qu'elle savait comme ces instants étaient précieux. Elle appréciait chaque détail parce qu'elle avait conscience de tout ce qu'il lui apportait comme bonheur, comme liberté. Alexander lui assurait que ces choses étaient réciproques. Elle lui apportait autant qu'il lui apportait. Elle le changeait. Elle le rendait raisonnable. Il la rendait curieuse de comprendre en quoi, elle l'avait changé. Sa réponse, d'abord, la fit sourire. « Tu sais bien que je pourrais t'écouter pendant des heures. » Alors, ces heures, elle les avait devant elle. Pour lui, elle aurait toutes les heures qu'il voudrait, même si c'était pour l'entendre dire tout et n'importe quoi parce qu'à ses yeux, tout ce qu'il disait méritait d'être entendu - d'autant plus lorsque c'était pour entendre ce qu'elle avait pu faire pour lui, depuis qu'ils étaient ensemble.  

Puis, plus sérieusement, il avait repris. Elle lui avait appris à aimer. Mieux. Différemment. Il lui rappelait qu'elle avait su bouleverser ses convictions, faire d'elle sa priorité, même face à ses projets politiques - et connaissant Alexander, ce n'était pas rien. Elle aimait entendre chacun de ses mots, elle avait l'impression qu'il la rendait importante, essentielle. Elle était touchée de l'entendre se livrer ainsi. Touchée de savoir qu'elle était sa priorité et qu'il avait su changer pour l'aimer mieux. Sa main dans la sienne, ses mots... Elizabeth sentait son coeur se serrer. Elle était heureuse. Véritablement. Heureuse comme elle ne l'avait sans doute jamais été auparavant. « J'aimerais qu'il s'arrête pour que nous n'ayons jamais à nous séparer. » Souffla-t-elle, presque dans un murmure. Elle aurait aimé pouvoir arrêter le temps pour qu'ils puissent avoir l'éternité devant eux, ne jamais avoir à craindre le lendemain, ne jamais avoir à se séparer... Leurs instants ensemble seraient toujours trop courts, quoi qu'ils fassent.

« Tu sais m'aimer. Tu me le prouves chaque jour. Je ne te demande rien de plus. » Elle qui était si exigeante ne pouvait pas en exiger davantage, alors elle tenait à le rassurer sur ce point. Il savait l'aimer. Elle ignorait comment il avait aimé les femmes de sa vie, avant elle, mais il savait l'aimer, elle. Il lui prouvait chaque jour par ses actions, par ses gestes, par sa tendresse, par ses promesses et par ses mots. Elizabeth n'avait pas le droit de se plaindre parce qu'il lui offrait le plus beau des cadeaux : il la rendait heureuse. Et si elle l'avait déjà changé pour en faire celui qu'il était aujourd'hui, sans jamais l'avoir fait volontairement, elle n'en attendait pas davantage de lui.

Il était évidemment plaisant pour Elizabeth d'entendre tout ce qu'Alexander avait à dire à propos de leur relation, de ce qu'il éprouvait pour elle ou de ce qu'elle avait fait pour lui. Il y avait quelque chose de rassurant à l'entendre lui répéter ces choses, ces preuves qu'il n'était pas lassé ou qu'il ne regrettait pas ses décisions, même avec les mois qui passaient. En retour, Elizabeth ne pouvait que lui assurer qu'il réussissait à merveille à l'aimer. La jeune femme avait déjà eu la chance d'être aimée, mais jamais ainsi, jamais de cette façon, jamais avec cette impression d'être devenue essentielle pour quelqu'un - peut-être parce que, malgré les obstacles, ils n'étaient pas aussi nombreux que lors de ses précédentes relations, celles dans son monde ? Avec Alexander, malgré la présence pesante de Mary, Elizabeth avait le droit d'imaginer un futur. Ils n'avaient pour limites que celles qu'ils s'imposaient - et Alexander n'était pas tellement du genre à s'imposer des limites.

Avec Alexander, Elizabeth était heureuse. Vraiment. Il l'aimait et il le lui prouvait chaque jour. C'était bien assez pour elle qui jugeait déjà avoir une chance extraordinaire - mais ça, c'était son côté raisonnable puisque d'un autre côté, toujours trop exigeante et jamais satisfaite, elle en voudrait toujours davantage. Et ce davantage, il proposait de lui offrir en lui offrant l'éternité - en plus de lui décrocher la lune, bien évidemment. Elle souriait, heureuse et amusée de le voir ainsi, malgré la situation, toujours prêt à lui promettre l'impossible comme si les limites et les contraintes n'existaient pas. « Tu as un programme chargé, es-tu certain de pouvoir encore trouver du temps pour moi ? » Décrocher la lune, arrêter le temps... Autant dire qu'il en avait pour une vie entière - et sans résultat, malheureusement. Avec un tel programme, comment trouverait-il le temps d'être avec elle ? « C'est précisément pour cette raison que je t'aime tant. » Et pour bien d'autres, en réalité. Mais celle-ci en faisait partie. Il n'arrêtait jamais de vouloir lui en donner plus. Il n'arrêtait jamais d'être là pour elle. Il n'arrêtait jamais de vouloir lui offrir le meilleur. Si elle ne voulait rien exiger de plus de sa part, elle aimait le voir se dépasser pour lui offrir toujours plus, toujours mieux. Et même s'il devait échouer à cette tâche, elle continuerait de l'aimer parce que ce qu'elle aimait tant chez lui, c'était qu'il essayait, encore et encore, sans jamais baisser les bras - après tout, au tout début, il lui avait fait la promesse de ne jamais rien considéré comme acquis et, cette promesse, il la tenait.

A sa question, elle s'était, dans un premier temps, contentée de sourire en baissant les yeux. Complètement satisfaite ? Elizabeth ne serait certainement jamais complètement satisfaite, malgré tous les efforts d'Alexander, malgré tous ses propres efforts. Ce n'était pas de la faute de ce dernier, simplement, c'était dans sa nature de penser qu'il était toujours possible de faire mieux, d'espérer mieux - mais elle savait aussi se contenter d'être heureuse de ce qu'elle avait, en mettant ses exigences de côté pendant un certain temps. « Ce n'est pas ce que j'ai dit. » Elle n'exigeait rien de plus de sa part parce qu'elle savait qu'elle n'en avait pas le droit, pour autant, elle aimerait voir bien des choses changer. « Il y a bien des choses que j'aimerais changer. » Dans leur vie, en général, plus que dans leur couple. Pour qu'ils se sentent en sécurité, pour qu'elle n'ait plus peur en permanence, pour gagner en tranquillité, pour pouvoir mener la vie qu'elle désirait mener sans jamais craindre qui que ce soit... Mais lui n'y pouvait pas grand-chose - puisqu'il refusait catégoriquement de régler leurs problèmes de manière aussi définitive qu'Elizabeth l'envisageait, il n'était pas en mesure de régler une bonne partie de leurs problèmes. Concernant leur couple, plus particulièrement, Elizabeth était capable de se satisfaire de ce qu'il lui offrait parce qu'il lui offrait déjà tellement qu'elle craignait de tout perdre à trop en demander. « Je sais la chance que j'ai et j'essaie de me montrer raisonnable, de ne pas en vouloir toujours davantage. Alors, tout n'est pas parfait... » Notamment à cause de difficultés extérieures, en réalité, parce que lui la rendait heureuse. « Mais j'aime cette vie que nous sommes en train de construire. » Alors, même si elle n'était pas pleinement satisfaite, elle voulait se montrer raisonnable et s'en contenter - bien que ce n'était pas toujours une chose facile de mettre ses exigences et ses envies de côté.

Face à ses promesses insensées et irréalisables, Elizabeth affirmait qu'il n'aurait plus suffisamment de temps pour elle. Décrocher la lune et arrêter le temps devaient demander un certain travail et, surtout, beaucoup de temps. S'il n'y avait rien de sérieux, ni dans le ton qu'elle avait employé, ni dans la réflexion qu'elle avait faite, Alexander lui avait répondu avec un sérieux qui ne l'étonnait même pas - il pouvait l'être un peu trop dans les moments les plus inattendus, parfois.

Elizabeth ne doutait pas de ses mots, elle savait qu'il souhaitait lui offrir son temps autant que possible, elle savait qu'il voulait lui accorder toute l'attention qu'il jugeait nécessaire de lui accorder. De tout ça, elle n'en doutait pas un seul instant parce que jusqu'à présent, il avait su lui prouver qu'elle avait toutes les raisons de lui faire confiance à ce sujet - et même pour ses promesses en général. Bien sûr, il lui arrivait de trop travailler, mais il n'oubliait jamais qu'Elizabeth était là et qu'elle avait besoin qu'il se détache de tout cela pour passer du temps avec elle, comme il était normal de le faire dans un couple. Elle savait aussi comme il jugeait son temps précieux, comme il était toujours pressé, comme il ne voulait jamais perdre une seconde tant le temps lui paraissait filer trop vite pour tous ses projets et ses ambitions, mais il avait su faire, malgré tout, une véritable place à Elizabeth dans cette vie déjà bien remplie. « Tu me le prouves déjà chaque jour. » Après tout, rien ne lui interdisait de passer des heures et des heures perdu dans ses écrits, dans ses débats, dans son travail, sauf qu'il revenait toujours vers elle, conscient des efforts qu'il devait faire pour ne pas la délaisser entièrement.

Sur ce point, Elizabeth était donc plutôt satisfaite. L'homme acharné qu'il était avait su faire des concessions pour elle. Pour le reste... Elizabeth n'était jamais pleinement satisfaite. Elle en voulait toujours plus, elle voulait toujours mieux, persuadée que les choses n'étaient jamais totalement parfaites. Se contenter de peu, ça n'avait jamais été pour elle. Elle voulait sans cesse se dépasser, dépasser ses objectifs. Malgré tout, les années passées ici lui avaient appris à se raisonner davantage, à se contenter de ce qu'on lui offrait - s'enfermer dans une vie sans vie y avait contribuer grandement - sans jamais, pourtant, lui retirer ce sentiment d'insatisfaction. Elle le ressentait, mais elle savait le faire taire, le mettre de côté - même si aux côtés d'Alexander, elle avait beaucoup plus de mal à le faire parce qu'il avait tendance à la pousser à s'exprimer sur ce genre de choses, à l'exalter au point de vouloir toujours voir plus grand.

Mais sa vie auprès d'Alexander la satisfaisait réellement. Elle avait conscience qu'ils pouvaient avoir mieux, mais elle était heureuse de ce qu'ils construisaient peu à peu. S'ouvrir à lui, l'accepter auprès d'elle, avait sans doute été l'une des meilleures décisions de sa vie. Depuis qu'il était auprès d'elle, elle se sentait revivre et elle était heureuse. En revanche, certains aspects extérieurs étaient loin de la satisfaire. Des choses qui avaient un impact plus ou moins direct sur leur vie - le refus d'Alexander à réagir face à ses ennemis, Mary qui traînait toujours dans les parages, le danger qu'ils courraient en permanence... Autant de choses qu'Elizabeth aurait aimé supprimer définitivement de sa vie pour goûter à un bonheur qu'elle jugerait presque complet - presque, parce qu'elle trouverait bien autre chose à changer, autre chose qui ne la satisfaisait pas pleinement.

Il avouait alors l'être tout autant qu'elle. Ça, elle le savait déjà. Ce n'était pas l'un de l'autre qu'ils n'étaient pas satisfaits, ce n'était pas leur vie à deux, c'était autre chose. Autre chose qu'Elizabeth comprenait parfaitement. Et il avait raison, de cette insatisfaction, ils pouvaient en faire une force. D'une certaine façon, même, ils le faisaient déjà. C'était parce qu'ils ne se contentaient pas de ce qu'ils avaient qu'ils continuaient de se battre pour cet endroit, pour leurs idées, pour une vie meilleure. Cependant, Elizabeth tentait de se montrer modérée et de ne pas trop en demander - craignant qu'on lui retire ce qu'elle avait déjà, après avoir passé presque quatre ans, sans rien d'autre que la peur et la solitude. « Du moment où tu es satisfait de la vie que nous menons tous les deux, c'est tout ce qui compte. » Parce que c'était bien le plus important à ses yeux, qu'il soit satisfait et heureux de cette vie, qu'elle puisse lui apporter tout ce qu'il désirait. « Et qu'aimerais-tu changer, toi ? » Lui demanda-t-elle, lui retournant ainsi la question qu'il lui avait posée un peu plus tôt, puisqu'il était, tout comme elle, un éternel insatisfait.

Elizabeth avait besoin d'être rassurée. Constamment. Elle avait peur d'être déçue, elle avait peur d'être trahie, elle avait peur de perdre ce qu'elle avait, elle avait peur de le perdre lui, surtout. Dans la vie, elle avait toujours fini par tout perdre - à l'exception de sa couronne, tous ses sacrifices étant voués à la conserver, quoi qu'il arrive. Aujourd'hui, elle était en train de découvrir une nouvelle façon de vivre, elle était en train de construire quelque chose avec un homme qu'elle aimait terriblement, elle goûtait à un bonheur inconnu et elle refusait de perdre tout ça. C'était désormais ça, sa priorité. C'était désormais pour ça qu'elle se battrait. L'entendre lui répéter qu'il était satisfait de la vie qu'ils menaient ne pouvait donc que la rassurer. S'ils étaient deux à se battre pour cette vie, alors il y avait toutes les chances pour qu'ils réussissent à en faire ce qu'ils désiraient et à être heureux, non ?

Par curiosité, Elizabeth lui avait retourné sa question. Que voulait-il changer, lui ? Elle savait que cette question pouvait appeler de nombreuses réponses - et des réponses qui dureraient des heures, avec Alexander - mais elle entendait surtout connaître les grandes lignes, en dehors de ce qu'elle connaissait déjà le mieux sur lui : son envie de changer les choses en politique et la façon dont cette ville était dirigée. Sa réponse avait fait sourire Elizabeth, tant elle lui paraissait finalement évidente lorsqu'elle sortait de la bouche de cet homme. Pourquoi se contenter de peu quand on pouvait voir grand ? Pourquoi changer une chose alors que l'on pouvait changer le monde tout entier ?

Quelque part, il n'avait pas tort. A moins d'atteindre, un jour, un monde parfait, où chacun vivrait en harmonie avec l'autre, sans plus manquer de rien, sans plus personne pour prendre le dessus sur l'autre, sans plus de guerre... Les combats pour changer les choses ne s'arrêteraient jamais. Ce paradis n'existait que dans les rêves et dans les esprits les plus fous, la réalité était bien plus difficile - et impossible, malheureusement, à atteindre. Quoi qu'ils fassent, qu'importent les efforts qu'ils feraient, il y aurait toujours des choses à changer et à améliorer - ou était-ce le point de vue de quelqu'un de particulièrement insatisfait ? « Nous changerons tout ce que, à notre échelle, nous pourrons changer. » Lui promettait-elle. Et, à leur échelle, ils ne pourraient sans doute pas grand-chose, mais ils ne baisseraient jamais les bras, parce que c'était dans leur nature. « D'autres continueront nos combats ensuite. » Lorsqu'eux ne seraient plus là pour le faire, et ainsi de suite. « Mais avant de changer le monde, il va falloir te remettre sur pied et guérir. » Une chose à la fois, un pas après l'autre. Pour faire au mieux pour les autres, il devait déjà faire au mieux pour lui. Comment combattre le monde sans être en forme soi-même ? Et Elizabeth comptait bien veiller à ce qu'il soit entièrement rétabli avant de se lancer, à nouveau, dans ses combats.

Elizabeth connaissait cette envie d'Alexander, celle de marquer l'histoire de la bonne façon, celle de laisser quelque chose derrière lui, celle de ne jamais être oublié. Tous les deux, ils avaient déjà marqué l'histoire. Leurs noms existaient toujours dans les livres d'histoire. Chacun à leur façon, ils avaient contribué à des changements, ils avaient laissé une trace de leur vie précédente, ils avaient laissé un héritage. Pour des raisons très différentes et, même, fondamentalement opposées. Il était l'un des pères fondateurs des Etats-Unis, combattant pour la liberté et la justice, luttant contre le pouvoir monarchique, alors qu'elle avait marqué les esprits parce qu'elle avait été reine d'Angleterre. Aujourd'hui, ils espéraient marquer les esprits et l'histoire ensemble - même si Elizabeth n'était pas certaine d'avoir envie d'associer son nom à tout ce qu'ils entreprendraient, préférant rester dans l'ombre pour des raisons évidentes. Ce n'était peut-être pas raisonnable d'espérer laisser quelque chose derrière eux, une fois encore, mais ils étaient si déterminés à réussir, à apporter leur pierre à l'édifice, à changer les choses, ensemble, qu'elle ne les imaginait pas ne pas réussir.

Alexander laisserait sa marque. Il réussirait - et de n'importe où, puisqu'il insistait sur ce point. Ses ennemis ne réussiraient pas à le mettre à terre, à le faire taire, à l'évincer. Alexander étant Alexander, toutes ces attaques ne le rendraient que plus fort et tenace. Rien ne l'arrêterait, elle le savait. « Je sais que tu peux tout réussir de n'importe où. » Répondit-elle en souriant, amusée parce qu'elle savait que s'il ne le disait pas sérieusement, il y avait un sérieux fond de vérité dans ce qu'il venait de dire. Il se croyait capable de tout, peu importe son état, peu importe où il était, et c'était ce qui faisait son charme - d'autant qu'Elizabeth, en dehors des limites que son corps lui imposerait, était persuadée qu'il n'avait pas totalement tort. Sa foi en lui n'avait presque aucune limite.

« Toujours. » Il pourrait compter sur elle à jamais, elle lui viendrait en aide aussi souvent qu'il en aurait besoin, elle serait un soutien indéfectible pour lui, parce qu'elle croyait en lui comme elle n'avait jamais cru en qui que ce soit. « Je reste près de toi. » Promettait-elle alors qu'il souhaitait se reposer - c'était un fait suffisamment rare pour ne pas insister davantage et le laisser faire - parce qu'il en avait grand besoin. « Tu peux te reposer. » Souffla-t-elle en lui déposant un baiser au coin des lèvres. Elle resterait près de lui, sa main dans la sienne, jusqu'à ce qu'il s'endorme.