DATE
15 Août 2038

HEURE
20 h 29:05


Tintement métallique rempli l'espace entrecoupé par le bip caractéristique d'un compteur, étages défilent. La pièce - 25 cents américain de 94' - fend l'air, virevolte entre ses phalanges, roule sur celles-ci avec dextérité ; calibration des fonctions physiques et cognitives en cours. La lueur à sa tempe tournoi en un bleu clair calme, clignotant par moment tandis que les orbes noisettes se perdent dans le vague.


Pièce bloquée entre index et majeur en un alignement parfait, l'androïde glisse celle-ci dans la poche de sa veste, réajuste son nœud de cravate puis sort enfin de l'ascenseur qu'il occupait jusqu'alors.



Premier regard perçois des impacts de balles contre le mur d'en face. Sur le côté, verre d'aquarium brisé. L'androïde se meut d'un pas sûr bien que silencieux, prenant connaissance de son environnement. Photo de famille attire le regard à sa droite, cadre entre ses pognes, il scan celle-ci sans broncher ; diode bleuté clignotant doucement tandis que diverses informations parcours sa vision.


CAROLINE PHILLIPS
Née le : 23/05/2001
Domicile : 1554 Park Avenue, Détroit.




Décor retrouvant la table d'appoint, il s'éloigne de quelques pas, mirettes balayant toujours son environnement jusqu'à ce poser sur fretin au sol. Connor s'abaisse, un genou à terre. Créature se débattant à peine dans les quelques centimètres d'eau la maintenant en vie.




Processeurs tournent, deux choix s'offrant alors à lui. Le sauver ou le laisser. Le RK 800 demeure un instant immobile. Poiscaille n'ayant nullement sa place dans l'équation, ses directives ou la mission. Connor vient pourtant le saisir avec douceur, replaçant celui-ci dans l'aquarium. Stature légèrement courbée, il observe l'animal s'éloigné en quelques coups de nageoires.


Message qu'il prend pour une simple erreur, balayant celui-ci en interne.

Progression reprise, voix féminine se fait entendre, jacassement plaintif, requête dans le vent. Mère de famille souhaitant demeurer auprès de sa progéniture. Bien entendu, pour sa propre sécurité, celle-ci est conduite vers la sortie de leur demeure, croisant ainsi Connor sur sa route. La femme, agitée, sillons de sel laissés par ses larmes séchées, s'approche de lui. ❝ Oh, je vous en prie, vous devez sauver ma petite fille... ❞ Pognes agrippant ses épaules, les lèvres entrouvertes, prête à lâcher nouvelles suppliques, mais rien. Le choc passe ses traits alors qu'elle avise ce faciès dénué d'émotions qui la toise en cet instant. Elle recule d'un pas, prenant connaissance de la diode à la tempe de celui-ci, tout comme de sa veste où apparaît modèle et matricule. ❝ Quoi... Vous avez envoyé un androïde ? ❞ Agent du SWAT à ses côtés, il l'invite à s'éloigner, ne pas rester là. Femme s'énerve, criant ô combien ils ne peuvent pas faire ça, qu'il faut envoyer un véritable être humain. Le RK 800 l'a suit du regard, n'allant guère plus loin que son angle mort, ne prenant nullement la peine de se retourner alors que les derniers mots claquent à ses oreilles. ❝ Éloignez ce truc de ma fille ! Ne laissez pas ce truc s'approcher d'elle ! ÉLOIGNEZ-LE ! ❞ Elle fût conduite hors de l'appartement.

L'androïde se meut de nouveau, scannant le couloir et pièces qui se présentent à lui. D'autres agents du SWAT sont là, à couverts, armés. Il les entend sans réellement les écouter, son objectif premier étant de trouver le chef d'intervention afin de recueillir quelques informations supplémentaires quant à sa mission. Le concerné, un humain, est pour le moins tendu, beuglant au travers d'un téléphone que son unité est prête à intervenir. La conversation semble mal engagée, en déduit Connor qui se tient à présent non loin, mains jointes dans le dos. La posture droite, parfaite, en attente. ❝ Merde. J'arrive pas à y croire. ❞

Silhouette se penchant légèrement, il finit par ouvrir la bouche. ❝ Commandant Allen ? Je m'appelle Connor. Je suis l'androïde envoyé par CyberLife. ❞ L'humain l'observe, sceptique, un soupire franchissant ses lèvres avant qu'il ne lâche, tendu. ❝ Cet androïde tire sur tout ce qui bouge... Il a déjà descendu deux de mes gars... ❞ Connor l'écoute, penchant que très légèrement la tête sur le côté, mémorisant les informations clefs. ❝ On pourrait facilement le descendre, mais ils sont sur le rebord de la terrasse. S'il tombe, elle tombe aussi. ❞ Le RK 800 analyse rapidement la situation, souhaitant néanmoins apprendre quelques détails supplémentaire. ❝ Avez-vous essayé son code de désactivation ? ❞ ❝ Oui, on a déjà essayé. ❞ ❝ Savez-vous s'il s'est déjà comporté étrangement auparavant ? ❞ Le Commandant Allen soupire une fois de plus, se redressant alors pour lui faire face, le faciès tiraillé par une certaine forme de colère. ❝ Écoute, la priorité, c'est de sauver cette gamine. Alors occupe-toi de ce putain d'androïde, ou c'est moi qui m'en occupe. ❞

L'humain retourne à ses occupations, l'air davantage tendu au fils des secondes qui s'égrènent. Connor se met de nouveau en mouvement, délaissant le Commandant Allen afin de recueillir de nouvelles données, le besoin d'augmenter ses chances de réussite étant cruciale. Pour ce faire, il doit comprendre ce qu'il s'est passé. Lit de la chambre parentale qu'il contourne, l'attention ce porte sur une mallette ouverte, au sol. Un coup de scan lui indiquera que celle-ci contenait une arme à feu.


Les orbes dérivent à la boîtes de munitions en partie renversé à côtés.


Diode à sa tempe clignote, tourne doucement au bleu tandis qu'il se redresse, fixant l'espace vide devant lui. Son logiciel de reconstitution prenant la relève. Une silhouette apparaît, ce mouvant au ralentis, remontant le temps, ses actions aux passé.


Silence conservé, Connor tourne le faciès, reprenant son exploration. Chambre de la gamine qu'il découvre puis pénètre. Casque audio au sol, il s'abaisse afin de se saisir de celui-ci, le portant à son oreille. La musique y est forte, l'enfant n'a pas entendu les coups de feu. Reposant l'engin au sol, il se redresse pour observer le bureau ; une tablette présente. Tranquillement, il s'en saisit, déverrouille l'écran afin d'y jouer une vidéo. C'est Emma et l'androïde domestique. ❝ Voici Daniel, l'androïde le plus cool au monde ! Dis bonjour, Daniel ! ❞ ❝ Bonjour ! ❞


❝ Tu es mon copain ! On sera toujours ensemble ! ❞ Finit par ajouter la gamine, un sourire ravie aux commissures. Ils semblent proches. Vidéo terminée, le négociateur dépose à nouveau la tablette sur le bureau afin de quitter la chambre. Retour au salon effectué, des coups de feu retentissent, un des agents du SWAT est touché, se faisant évacuer. Quant à Connor, il n'y prête aucune attention, sa mission principale étant de localiser l'otage et surtout, la sauver. Macchabée à terre, il s'en approche, s'agenouillant. Il se met alors à scanner la dépouille. Le paternel. John Phillips, heure estimée de la mort : 19 h 29. Orbes descendent sur le poitrail, avisant les impacts de balles. Hémorragie de la partie supérieure du poumon, Pneumothorax. Rein gauche perforé, Traumatisme abdominal mortel. Hémorragie de la partie inférieure du poumon, Hémorragie interne.

Il fronce les sourcils un bref instant, reconstituant la scène avec précision. La victime était assise sur le canapé, tenant quelque chose en main. La silhouette se relève tout en se retournant vers son assaillant, le déviant. Les coups de feu fusent, projetant l'autre à terre, brisant au passage la table basse en verre. L'objet qu'il tenait quittant ses mains pour atterrir plus loin. Une tablette. Connor se redresse, allant récupérer l'appareil un peu plus loin, la déverrouillant. Une voix s'en élève. ❝ Votre commande d'androïde AP700 a été prise en compte. ❞


❝ CyberLife vous remercie pour votre achat. ❞ Déposant la tablette là où il l'avait prise, le RK 800 continue sont investigation. Ses recherches le conduisent à la cuisine, de l'eau bouillonnant dans une casserole, il éteint la plaque sous celle-ci. La famille allait ce mettre à table. Contournant le plan de travail et bar central, son attention va au corps d'un policier. Une analyse détaillé lui indiquera qu'il s'agit d'un premier policier à être arrivé sur les lieux. Officier Antony Deckart, heure estimée de la mort : 20 h 03. Perforation du ventricule droit, Hémorragie interne. Résidu de poudre sur la main gauche, Styphnate de plomb, trisulfure d'antimoine, un seul coup tiré. La scène reconstituée lui montrera que celui-ci aura blessé que brièvement le déviant avant d'être abattu d'un unique coup de feu, son arme glissant sous la table à manger. En tant qu'androïde, Connor n'est pas autorisé à porter ou utiliser d'arme, il laissera donc celle-ci à sa place.

D'autres éléments se présentent à lui. Du sang bleu, à terre. Il en récolte un échantillon du bout de ses doigts, portant celui-ci à sa bouche, la langue récoltant le flux et les informations clefs qu'il contient. Étant un modèle des plus sophistiqué, il peut effectuer des analyses de sang en temps réel tout en "goûtant" celui-ci.


Connor continue son enquête, retrouvant une chaussure taille fillette avec du sang dessus. L'otage est peut-être blessée. Rideau non loin qu'il écarte, son regard capte le déviant avec Emma dans les bras, l'arme pointée contre sa tempe.


Reculant d'un pas, il finit par se diriger vers la fenêtre ouverte, une voix retentissant non loin derrière. ❝ À toutes les unités, restez en place. Le négociateur intervient. ❞ Passant la porte coulissante vitrée, une balle vient à effleurer son bras gauche, arrachant sa peau cybernétique et le tissu de sa veste. Diode passe du rouge au jaune avant de redevenir bleu, les dégâts étant minimaliste. La gamine lâchant un cris de surprise une fraction de seconde après cela. La voix du déviant, mélange de crainte et tension se fit entendre ensuite. ❝ Recule ! Fais pas un de pas plus, ou je saute ! ❞ Emma en larme répliquant assez rapidement à cela. ❝ Non ! Ne fais pas ça ! Je t'en supplie ! ❞ Tout deux sont en bord de terrasse, des unités du SWAT placées sur les toits non loin, sniper à l'épaule, prêt à intervenir. Avec un calme olympien, le négociateur prend la parole. ❝ Bonsoir, Daniel. ❞ ❝ Comment... ❞ ❝ Je m'appelle Connor. ❞ ❝ Comment tu connais mon nom ? ❞ ❝ Je sais beaucoup de choses sur toi. Je viens te sortir de ce mauvais pas. ❞ Un hélicoptère passe alors, balayant de pars l'air de ses pales, les chaises longues et table basse de jardin.


Le RK 800 s'avance en douceur, gardant continuellement un contact visuel avec le déviant et l'otage, cherchant à temporiser, gagner sa confiance. Loin de faire preuve d'empathie, il a été conçus tel quel, pour inspirer confiance, plaire et toujours mener à bien sa mission. ❝ Je ne vais pas te faire de mal. Je veux juste discuter et trouver une solution. ❞ ❝ Discuter ? Je ne veux pas discuter. C'est trop tard, de toute façon. C'est trop tard... ❞ Connor continue d'avancer avec calme, les mains légèrement écartées du corps, montrant ainsi à Daniel qu'il n'est pas armé ou même dangereux. ❝ Je sais qu'Emma et toi étiez très proches. Tu penses qu'elle t'a trahi... Mais elle n'a rien fait de mal. ❞ ❝ Elle m'a menti... Je croyais qu'elle m'aimait... Mais j'avais tort... ❞ La diode rougeoyante du déviant passe au jaune, son état se stabilisant petit à petit. Confiant, Connor ne peut que continuer dans cette voie. ❝ Finalement, elle est comme les autres humains... ❞ ❝ Daniel, non... ❞ Avançant encore, il continue de lui parler. ❝ Ils voulaient te remplacer par un autre androïde et ça t'a contrarié. C'est bien ce qu'il ce qu'il s'est passé ? ❞ ❝ Je pensais faire partir de la famille. Je croyais que je comptais... Mais je n'étais que leur jouet ! Un objet qu'on jette une fois qu'on l'a utilisé. ❞ Lâche le déviant, appuyant un instant l'arme contre la tempe de la gamine. À présent à une distance raisonnable, le négociateur reprend. ❝ Écoute... Je sais que ce n'est pas ta faute. Ces émotions que éprouves ne sont que des erreurs dans ton programme. ❞ ❝ Non, ce n'est pas ma faute... Je n'ai jamais voulu ça... Je les aimais, tu vois... Mais je n'étais rien à leurs yeux ! ❞ Emma lâche un sanglot tremblant, fermant un instant les yeux. ❝ Rien qu'un esclave à qui on donne des ordres... ❞

Daniel se tait, portant sa main armée à son crâne en serrant les mâchoires, un son contrarié quittant ses lèvres serrées. ❝ Je ne peux plus supporter ce bruit ! Fais dégager cet hélicoptère, maintenant ! ❞ Connor semble un instant pensif, levant alors les yeux vers le véhicule en vol stationnaire. Mouvement de bras, il demande à celui-ci de se retirer, la situation étant sous contrôle. ❝ Voilà, comme tu l'as demandé. ❞ Le déviant se calme un peu plus, led au bleu contre sa tempe.


❝ Tu dois me faire confiance, Daniel. Libère l'otage et je te promets que tout se passera bien. ❞


❝ Je veux que tout le monde s'en aille... Et je veux une voiture ! Quand j'aurai quitté la ville, je la laisserai partir ! ❞ ❝ Ce n'est pas possible, Daniel. Libère la fille et je te promets qu'on ne re fera pas de mal. ❞ Le déviant prend une inspiration, son arme à présent vaguement baissée. Sa voix est plus calme et posée tandis qu'il s'exprime de nouveau. ❝ Je ne veux pas mourir... ❞ Poignée de secondes passent, Connor ajoute, calmement. ❝ Tu ne vas pas mourir, nous allons simplement discuter. Il ne va rien t'arriver, tu as m'a parole. ❞ Daniel semble légèrement hésitant, finissant enfin par céder. ❝ D'accord... Je te fais confiance. ❞ Doucement, il libère la gamine qui s'éloigne de quelques pas, se laissant choir au sol non sans retenir ses larmes. Les deux androïdes échangeant un regard, un coup de feu retentit avant que deux autres ne suivent. Les snipers étant entrés en action. Le déviant tombant à genoux, c'est un regard vitreux qu'il pose sur le Rk800, sa voix en proie à des grésillements, lâche ses derniers mots. ❝ Tu m'as menti, Connor. ❞

❝ Tu m'as menti... ❞ La voix de Daniel s'éteint sur la dernière voyelle, le regard à présent vide et fixe, diode éteinte. Le négociateur glisse un simple regard vers la gamine à terre, tournant les talons pour s'éloigner ensuite ; regard fixe, démarche assurée. Il avait réussi.




Phalanges viennent à masser en douceur ses paupières closes. Ce souvenir, cette.. mission. Connor ne comprenait pas pourquoi elle lui revenait sans cesse, tout du moins, il en avait une vague idée et cela le faisait sourire avec douceur. Premier jour d'activation, un premier pas vers la déviance.

Secouant la tête après avoir lâché un petit rire, ses doigts retrouvent le pelage immaculé d'un berger blanc suisse, caressant affectueusement celui-ci. L'animal l'observe avec des yeux emplis d'amour, langue pendante. ❝ Retourne jouer avec les autres. Je vais vous apporter de quoi manger. ❞ Chien jappe, s'éloignant alors joyeusement vers les autres canidés qui gambadent un peu plus loin. L'expression pour le moins pensive, il finit par se mouvoir, récupérant un sac de croquette.

Papier entaille la chair, arrache petit sifflement douloureux, la fragilité humain acquise depuis qu'il est arrivé ici. Connor observe la perle carmin contre son échine opaline, portant celle-ci à sa bouche. Rien. Il n'y a que le goût métallique du sang. C'est tellement.. perturbant. Soufflant, son regard se tourne vers un Saint Bernard, plus loin. ❝ Si tu savais comme tu me manques, Sumo.. ❞ Et Hank. Le rappel amère de la solitude venant étreindre son coeur. Le Lieutenant Anderson lui manquait, beaucoup, énormément.

La révolution androïde de passée, sa déviance acceptée. Il avait rejoint le Lieutenant Anderson, là, devant le Chicken Feed. Tout deux s'étaient étreins, marquant la fin d'une histoire et le commencement d'une nouvelle. L'ayant depuis un moment prit sous son aile, Connor était devenu un fils pour lui et à contrario pour le concerné, le père qu'il n'avait jamais eut. Tout aurait pu être parfait. Oui.. S'il n'y avait pas eut cette mystérieuse lune rouge.

Mâchoires se contractent au rappel du passé. Promenade qu'ils effectuaient dans un parc non loin sous la lumière lunaire et celle des réverbères, le paysage immaculé de neige avait prit des aspects horrifiques. Le carmin remplaçant tout un bref instant, puis plus rien. Lorsque Connor s'était retourné, il était seul.

Il n'a jamais compris comment, ni pourquoi. Mais il compte bien rentrer, hors de question de rester ici. Certes, l'idée d'être enfin un être humain à quelque chose de séduisant mais.. Non, il doit rentrer, c'est tout. Hank doit être inquiet.

Des flashs lui reviennent à l'esprit, les envies suicidaires du Lieutenant. Sentant une crise d'angoisse le prendre, il en lâche le sac de croquette, nourriture se dispersant tout comme les larmes sur ses joues.❝ Hank.. Reste en vie et attend moi.. S'il te plaît... ❞