(Terminé) [Eve & Oksana] ... and I am going to kill it.

Villanelle prend de faux airs offusqués quand Eve la traite de menteuse mais ne cherche pas réellement à la contredire pour autant. Parce que, bien sûr, elle a raison, elle ne peut pas prétendre avoir véritablement cerné Eve dès le premier instant. En revanche, oui, il s'était passé quelque chose, et très vite, au moment de la découvrir, et ça, ça avait presque été intuitif... autant que nécessaire par ailleurs. Villanelle a aimé trouvé la confirmation de ce qu'elle présumait dans les actes d'Eve, elle avait aimé aussi encourager certains d'entre eux, pas pour façonner un tempérament, mais pour le révéler. Ce feu qui se cache sous la cendre, c'est ça qui est irresistible chez Eve aux yeux de Villanelle, et en aucun cas elle ne s'imagine s'en lasser.

"Menteuse...", répond simplement Villanelle, en écho à la propre réponse d'Eve, quand cette dernière affirme que si ses fantasmes avaient été présents dès le premier instant, elle n'avait pas idée de combien elle était dangereuse... Très probablement. Mais pas tout à fait.

A l'évocation de ses bandage, Eve lui répond par un grognement qui en dit long sur son état peu enviable. Elle en bave, de toute évidence, même si elle a réussi jusque-là à occulter ce sentiment. Ce qui ne l'empêche tout de même pas de rire à la réflexion de l'ancienne tueuse à gages. Ce qui est bon signe, pas vrai ? Villanelle hausse les épaules quand Eve la traite de débauchée. Au vu de ce qu'elles viennent de faire, et de ce qu'Eve vient de lui faire, Villanelle a envie de penser que ce n'est honnêtement pas grand-chose, tout compte fait.

"Je ne suis pas si célèbre", répond Villanelle. "Sinon tu n'aurais pas mis si longtemps à me retrouver", réplique-t-elle alors, même si el réalité, il n'y a pas vraiment de logique à cette difficulté que l'on peut avoir à retrouver quelqu'un ou non dans cette ville. Tout ceci semble plutôt obéir à une logique intrinsèque qui s'épargne leurs observations habituelles. "Si on diffusait notre sextape partout, là, je deviendrai vraiment célèbre", ajoute-t-elle avec le sourire le plus amusé qui puisse être. "Et toi aussi."

Elle laisse ces mots en suspens. Elle ne les pense pas sérieusement, ceci dit, elle s'en fiche un peu, comme elle réussit à se ficher de tout, là, tout de suite, complètement inconséquente comme elle a si souvent l'habitude de l'être. L'inquiétude reprendra très probablement le dessus tôt ou tard, parce que toute inconséquente peut-elle être, quand les conséquences peuvent s'observer directement sur Eve, c'est tout de suite une autre affaire. Tout ce qui la concerne devient immédiatement digne de toute son attention... ce que rien d'autre ne sait susciter si vivement chez elle.

"Y a à manger chez toi ? J'ai rien contre le chocolat, mais..."

« Mais oui, mais oui », répond Villanelle d’un ton qui, volontairement, laisse planer un léger doute quand Eve l’avertit de ne surtout rien diffuser d’intime les concernant.

Elle peut parfois (très souvent) se montrer impulsive et irréfléchie, tout de même pas suffisamment bête pour faire ce genre de choses, et surtout, pour faire ce genre de choses à Eve. Donc bien sûr, ce n’est jamais qu’une plaisanterie, et il s’agirait de ne pas la faire durer. Les blagues les plus courtes sont souvent les meilleures. Certes, en attendant, Villanelle, si elle se lasse facilement, ne s’y sent pas encore prête dans ce contexte.

« Décoratrice d’intérieur ? » répond Villanelle quand Eve suggère que c’est plutôt dans ce domaine qu’elle l’aurait imaginé percer. L’idée ne lui a absolument pas traversé l’esprit au moment de chercher à se renouveler, mais elle n’est pas si bête. « Ça aurait été pas mal, j’aurais pu rentrer chez les gens comme je voulais et juger ouvertement leur ignoble déco, ça me plaît. »

Ceci dit, Villanelle aurait peut-être fait une bien piètre décoratrice d’intérieur. Pas parce qu’elle aurait été mauvaise ou aurait manqué de goût (bon, tous les goûts sont dans la nature, évidemment, mais Villanelle, estime avoir un goût bien plus sûr que beaucoup d’autres), loin de là, mais parce qu’elle se serait éperdument moqué de l’opinion de ses clients ou même de leurs budgets… Elle a eu beau obéir à des directives presque toute sa vie, on ne peut pas dire que ce soit une chose qui lui réussisse. Certes, en tant qu’actrice et mannequin, elle reste sommée d’obéir à beaucoup trop d’ordres qui la briment terriblement (plus qu’elle ne l’aurait cru en se lançant dans le métier), mais au moins, elle a facilement accès à des tenues de grands créateurs et peut s’amuser à se glisser dans la peau d’à peu près n’importe qui ce qui est… une relative compensation.

Dans le fond, elle n’est pas certaine de ce qui serait totalement susceptible de l’épanouir. Elle l’est, véritablement épanouie, quand elle est avec Eve, et elle n’est pas sûre de pouvoir retrouver ça autrement, loin d’elle. Pour la peine, elle aurait sans doute trop tendance à vouloir la garder avec elle peu importe les circonstances.

Villanelle s’exécute quand Eve l’autorise à explorer le contenu de son frigo, mais rien ne la convainc vraiment dans ce qu’elle découvre. Elle le referme d’un coup sec et commence à explorer l’endroit de fond en comble, jette son dévolu sur un paquet de céréales, dans lequel elle pioche à même le paquet tout en venant se réinstaller sur le lit auprès d’Eve. Son regard se baisse sur l’écran de son téléphone, qu’elle a récupéré au passage.

« Je vais nous chercher une chambre d’hôtel », dit-elle entre deux poignées de céréales. « Tu te sens de préparer tes affaires ou je le fais pour toi ? »

Un peu pragmatique quand même, quand il le faut. Il serait de bon ton qu’elles s’isolent un moment, le temps de réfléchir à la suite, et Villanelle n’aime pas l’idée qu’Eve reste ici, avec ou sans elle, d’ailleurs.

Styliste aussi, c’est vrai que ça lui aurait bien plu, peut-être davantage que décoratrice d’intérieur, d’ailleurs. Quand elle y pense, ce ne serait pas forcément idiot, comme reconversion professionnelle, quand elle n’en pourra vraiment plus de son métier actuel (ce qui peut arriver très vite tant elle se lasse rapidement). L’idéal pour elle serait certainement de bosser à son compte compte tenu de sa difficulté manifeste à supporter les ordres et directives de ses supérieurs, d’un autre côté, elle serait très certainement incapable de se gérer administrativement ou même de s’imposer un agenda si elle décidait de se mettre à son compte. Bref… elle verrait bien ce que le futur lui réserverait. Ces considérations lui paraissent bien accessoires en cet instant. Elle s’en fiche assez, de ces projets-ci, elle préfère s’intéresser, et de très près, au projet Eve Polastri. C’est sur ce dernier qu’elle a la ferme intention de focaliser toute son attention pour le moment. Raison pour laquelle, des céréales plein la bouche, elle fait dorénavant le tour des hôtels de la ville en quête de celui qui pourra les accueillir aussi discrètement qu’il est possible le temps qu’elles se trouvent un pied à terre plus approprié.

Peuvent-elles espérer échapper à la vigilance des Douze pour autant, à présent qu’elles sont dans leur viseur ? Elle en doute fort, mais finalement, ce n’est pas le plus important. Elles règleront cette affaire comme elles le pourront, à leur manière, et ne laisseront clairement pas les Douze décider de leurs moindres faits et gestes (observation inconséquente que celle-ci, mais bien sûr que Villanelle, si elle sait aussi être très sérieuse, est tout à fait inconséquente). Et surtout, elles seront ensemble, et est-ce que ce n’est pas tout naturel ? Depuis qu’elle a retrouvé Eve, les nuits qu’elle passe dans son appartement, ailleurs que dans ses bras, lui apparaissent singulièrement absurdes.

« Pourtant j’ai un goût très sûr, encore plus en matière de sous-vêtements. Mais dans ton cas, il faudrait repartir de zéro, Eve. » Elle l’observe de haut en bas et son sourire s’élargit. « En fait, si je devais m’essayer au stylisme, tu devrais être mon premier cobaye. Il y a tout à refaire dans ta garde-robe. »

Oui, on peut le dire, ça ressemblerait fort à un tacle. C’est dit avec toute l’affection du monde, mais quand même, réviser la garde-robe d’Eve ne lui ferait pas de mal. Villanelle la trouve sublime, elle l’a toujours trouvée sublime – note qu’elle ne l’a quand même jamais été autant que quand elle portait les tenues que l’ancienne tueuse à gages lui avait offertes.

Villanelle la regarde faire tandis qu’elle s’applique à remplir sa valise, luttant contre la douleur qui, bien évidemment, doit l’élancer à chaque effort. Puis finalement, elle reporte son attention sur son écran et se décide pour une chambre évidemment bien trop chère, mais après tout, il faudra bien qu’elles vivent confortablement.

« On peut y aller quand tu veux, c’est réservé. »