Depuis qu'il avait attéri ici, sans savoir pourquoi et comment après avoir fini par fermer les yeux dans son monde, se sentant mal comme pas possible. Après ce funeste moment dont il n'aura pas de conclusion, Elvis s'était retrouvé projeter dans ce lieu, dans cette époque, un corps plus jeune et moins altéré par les medocs et le surmenage, il avait vu une chance que Dieu lui donnait.

Etait-il mort ? Que faisait-il ici ? Etait-ce le paradis ? Il ne savait pas trop, mais en tout cas, il ne voulait pas faire fi de la chance que le destin lui donnait.

Un corps en meilleur santé mais l'esprit... L'esprit restait. Suite aux nombreuses trahisons, suite à ses addictions aux médicaments qu'il prenait. Les amphétamines l'appelaient encore. Il ne voulait pas replonger là dedans. Mais il était Elvis, il devait aller de l'avant. Le Colonel Parker n'était plus là, plus aucun contrat n'existait. Il n'y avait plus de menaces.

Oui, c'était une nouvelle vie, un nouveau départ, une nouvelle chance.

Mais d'abord, il devait retrouver qui il était. Il repensait beaucoup à Priscilla et sa fille. Il ne sait pas ce qu'elles étaient devenus, elles ne semblaient pas être ici. Mais les paroles de sa femme raisonnaient en lui comme cette voix de la sagesse qu'il aurait dû écouter.

Donc, il a décidé de la faire cette foutue thérapie. Il fait ce qu'il faut. Ca n'est pas évident, mais Elvis en veut, il est déterminé comme toujours. Ses ambitions, cette vie qu'il avait retrouvé, il ne pouvait pas la gâcher. Il en a vécu des choses... Mais tout ca, il n'aurait jamais pu y arriver sans le Dr Bloom. Sa psychiatre qui le suivait depuis son début de thérapie.

Elle connaissait beaucoup de choses d'Elvis, ses secrets les plus profonds, elle avait vu dans son âme les failles et elle l'aidait à ce qu'il répare tout ca.  Même si certains points restaient difficile.

Se remettre sous les feux des projecteurs, celà voudrait dire que la parano pouvait s'installer de nouveau. Il le savait, c'était un risque à prendre. Mais face à la machinerie du Colonel... Il y avait des traumatismes qui ne se soignaient pas si facilement. Une menace de mort, et l'engrenage pourrait bien repartir.

Car le Colonel avait créé des menaces de mort plus violentes les unes que les autres pour avoir Elvis sous son couperet. Et plus il sentait Elvis fuir son joug, plus il avait redoublé d'effort dans des mises en scène effroyables pour que Presley ne s'en aille pas. Manque de sommeil, plus surmenage... Sa poule aux oeufs d'or devait se produire quoi qu'il arrive. Et même s'il était à deux doigts de s'effondrer avant de monter sur scène, on lui faisait une piqûre d'adrénaline pour qu'il reparte. Interdiction de manquer un spectacle.

C'était son passé, son autre vie. La fin de sa vie... Et peut être qu'il en avait une autre mais aujourd'hui, ca le hantait encore. Des cauchemars, il en faisait encore. Des nuits blanches ? Il en passait toujours. Dormir avait toujours été compliqué pour lui... Même si aujourd'hui, il avait fait déjà une très grande partie du chemin. Tout n'était pas totalement gagné. Elvis savait qu'il en était sorti grandit et il s'était promis de ne plus avoir affaire à aucun escroc. Il montera sa prod, il produira des jeunes gens, et utilisera sa propre prod pour se produire aussi. Il sera le maitre du jeu et personne d'autre l'en empêchera. C'était sa raison de vivre sa raison d'être. Il ne pouvait pas arrêter d'être ce qu'il est et l'appel de la scène, de son public, de la créativité était trop forte.

Mais aujourd'hui, il doit voir le Dr. Bloom et il reste particulièrement de bonne humeur. Il rentre dans son cabinet incognito et retire ses lunettes de soleil en arrivant dans la salle d'attente vide. Posant son regard sur les divers tableaux qui le décorent. Il attend que le Dr. Bloom vienne le chercher.

Il venait de reprendre, de sortir de l'ombre et il savait qu'il était nécessaire de faire le point avec son psy. Il l'avait lui même demandé. Une porte s'ouvre, il fait volte face doucement, un léger sourire en coin.

" Bonjour Dr. Bloom. "

Il s'avance vers elle dans un sourire, il en avait des choses à dire aujourd'hui et c'était limite devenu un rendez vous agréable pour Elvis que de pouvoir échanger et faire le point avec elle. Car elle l'avait sorti de toute la merde où il avait pu être.

Il entre, et s'assoit à sa place habituelle, comme si elle l'attendait.

" Je pense que vous souhaitez savoir comment ca s'est passé ? "

Elvis prend place dans sa place qui lui était réservé et un sourire aux lèvres, il sentait que cette séance allait être plus joyeuse que d'autres. En réalité, il ne savait pas par où commencer. Sa rencontre avec Dolores ? Le fait qu'il avait eu l'impression de se retrouver sur scène ? Il pouvait se dire qu'on lui donnait une nouvelle chance. Ca n'était que le début, même si sa psy lui avait déjà confié que c'était surement trop tôt pour lui.

" Et bien... " Dit-il cherchant par où commencer. " Ce fut... rafraichissant ? " Dit-il dans un large sourire. " La scène m'avait manqué, et cette adrénaline. Les gens m'ont reconnu et j'ai trouvé que ca n'était plus si oppressant qu'à l'époque. "

Il baisse le visage, se frotte la nuque, pensant à sa rencontre avec Dolores Madrigal.

" Je pense que je suis prêt. C'était un essai mais je me suis retrouvé là dedans. " Il marque une pause, ne voulant pas faire de cachoteries, il continue. " Et peut être que j'ai fait la rencontre d'une personne différente là bas. " Et le mot est faible. Dolores avait laissé sur lui une très forte impression à vrai dire. Il réajuste sa position dans son fauteuil avant de continuer. " Elle ne m'a pas reconnu. Elle ne connait pas mon nom et... Ca a changé la donne. Ca m'a fait du bien d'être considéré comme n'importe qui au final. Et je l'ai écouté chanter... Elle est... incroyable. Je vous assure. Mais... "

Car il y a un mais dans son histoire. Tout ne peut pas être parfait n'est-ce pas ?

" D'abord... Je l'ai perdu de vue, et je n'ai pas de moyen de la recontacter. Vous savez aussi que je reste un homme marié... Du moins sur les papiers... La réalité est toute autre. Avec Priscilla on a rompu, j'ai eu d'autres femmes dans ma vie, mais... J'ai peut être toujours cherché à retrouver mon idylle avec elle dans mes autres relations... " Il se secoue la tête. " Avec Dolores, je ne pense pas que ca soit pareil. C'est... différent et c'est bien ? " Il ne le sait pas forcément lui même. " Je lui ai fait comprendre que... j'étais intéressé... Elle a refusé mes avances, c'était clair. Mais avec le recul, j'ai peut être été un peu trop... rapide pour le coup. Mais à force d'être une star, on pense que toutes les filles vous courent après... " Il rit doucement à ce souvenir. " Et quand je lui ai proposé de venir travailler avec moi, elle a aussi refusé. Enfin qu'elle réfléchirait mais elle a disparu sans laisser de trace... Vous vous rendez compte ? Moi Elvis Presley ? On refuse mon coup de pouce. " Il n'est pas en colère, ca l'amusait, ca le touchait. Car Visiblement la jeune Madrigal ne s'intéressait pas à son argent ou la gloire. Elle s'en fichait bien. D'autres se seraient jetés sur l'occasion. C'est ce qui rendait la situation encore plus particulière.

C'est la raison pour laquelle, il aimait beaucoup le Dr Bloom, car elle mettait toujours en lumière certains points dont Elvis n'avait pas noté avant qu'elle ne lui fasse voir. Et celà lui donnait clairement une étendue plus large de la situation. Mais c'était bel et bien ce qu'un psy faisait. Alors il réfléchit à sa première question. Il s'y plonge, se revoit sur scène. Est-ce qu'il a chanté pour lui ? pour son plaisir ou pour Dolores Madrigal ? A vrai dire, il avait été porté par l'euphorie du moment. Oui, il avait été excité de rejoindre cette scène mais avec Dolores...

" Humm... " Fait-il, portant un doigt à ses lèvres en signe de réflexion. " C'est intéressant ce que vous me dites. "

Elle parle alors du fait de replonger si celà ne se passe pas correctement. Oui, c'était un risque. Il le savait, il en avait conscience.

" J'en ai conscience, mais est-ce que celà doit m'empêcher de vivre ? "

C'était une grande question. Car Elvis se refusait de se retenir de vivre à cause des risques qu'il encourait.

" Je veux vivre Dr Bloom, j'ai assez patienté. Je veux vivre ma vie, et j'ai retrouvé des rêves. "

Car il avait fini par baisser les bras, se laissant submerger par des rêves qui ont été englouti par un surmenage. Ne voyant plus que le fond du trou et celui du bout de ses chaussures, tellement il avait été vouté par toute cette merde. Et ca n'est pas que les médicaments. Le surmenage aussi. Le fait qu'on ait abusé grandement de sa confiance, et ca n'est pas cette confiance éphémère mais celle de ses proches. Devoir faire face à des menaces de mort.

Il continue d'écouter Alana et encore une fois elle a raison, mais ca, Elvis l'avait vu. Et oui, il avait aimé ne pas être vu comme cette icone. Cette femme n'avait pas eu d'attente envers lui et c'était... vivifiant ? Il avait l'impression de revivre une vie passée ?

" Vous savez que je ne lui ai pas donné mon identité tout de suite ? Je sais pas pourquoi mais... j'ai menti sur l'instant ou plutôt. " Il marque une pause. " Je lui ai donné mon second prénom parce que... pour une fois, je t'étais pas ce tableau que tout le monde connaît. La célébrité, je l'ai voulu et je l'accepte mais quand il s'agit de votre vie personnelle, ca devient compliqué. Beaucoup me recherche pour mon nom, mais pas pour la personne et je confirme vos dire: ca m'a fait du bien. "

Il hausse les épaules pour la suite, Elvis verra ce qu'il fait. Oui, les deux ne faisaient pas bon ménage, mais pour l'heure ca n'était qu'une rencontre rien de plus.

" Je connais les risques du métier Docteur. Je la protégerai de tout ca. Si tel est son choix de faire une carrière musicale, je ne suis personne pour l'empêcher de voler. " Et il le dit avec le coeur. " Mais pour l'heure, ca n'est qu'une rencontre et si ca se trouve, rien ne se fera. " Il restait incroyablement réaliste sur la chose.

Elle lui propose de refaire un essai scénique mais loin de tout ça. Elvis connait déjà la réponse. Ca n'est pas la scène le soucis, c'est ce qu'il y a autour. Car sur scène, il se sentait complet et vivant. Et c'était une addiction aussi pour lui. Il ne pouvait pas vivre sans. Pas vivre sans cette foule avide d'en voir plus, et de sa présence.

" Je connais déjà la réponse. " Dit-il dans un sourire. " Mon addiction pour la scène et pour mon public ne me quittera jamais. Quelque chose se passe quand je suis sur scène, c'est surtout... ce qu'il y a autour. " Finit-il. " Et si ca peut vous rassurer, je ne me suis pas soucié une seule fois d'une envie de prendre ces foutus cachets. "

Dans son ancienne vie, Elvis n'avait plus eu de rêves, il s'était laissé mourir, c'était le constat. Il avait fini par se laisser plonger dans une très grosse dépression... Et personne pour l'aider à sortir la tête hors de l'eau. Mais ici, il avait l'impression de revivre. Il avait un nouvel entourage, de nouveaux amis. Et peut être pourrait-il se reconstruire une relation.

Mais il sait qu'il doit être méfiant. Il ne l'avait pas été assez. Elvis avait toujours été un type abordable. Qu'il soit inconnu ou célèbre. C'était aussi ce qui faisait sa force auprès de son public. Peut être en faisait-il des tonnes dans ses prestations, mais derrière, il y avait toujours eu un chic type avec un coeur énorme. Et peut être un peu trop gros pour un monde qui n'était pas prêt à lui rendre celà.

Le surmenage, c'était le soucis d'Elvis. Mais sans le Colonel, il sera surement plus apte à connaitre ses limites ? Il ne le sait pas. Il préfère poser la question.

" Vous savez Docteur... Je peux dire que mon surmenage fut à cause du Colonel mais... j'en suis en parti fautif. J'ai tendance à trop en faire. Comment est-ce que je peux me rendre compte que... j'en arrive à un tel extrême ? " Il sourit. " Ca peut paraître stupide mais c'est comme avoir la tête dans l'eau. Je suis dans ce que je fais et je n'arrive pas à... me détacher de çà. " Elvis avait tendance à partir dans les extrêmes.

La suite, Elvis est d'accord. Mais comment trouver une telle équipe ? C'était complexe. Il se rappelle des mots de son ami B.B. qui lui souffle qu'il doit être celui qui mène la barque. Il ne l'avait pas écouté à l'époque. Mais ce Studio est un renouveau et il n'avait pas envie de faire les mêmes erreurs.

" C'est dur d'être bien entouré quand on s'appelle Elvis Presley. " Dit-il un sourire en coin. " Le soucis, c'est que soit je suis trop méfiant, soit je fais confiance trop facilement. Pour l'instant... je préfère faire cela seul. Je verrai qui je peux embaucher par la suite. " Il marque une pause. " J'ai un vieil ami qui m'a toujours dit d'être celui qui devait tenir la barque. Eviter de me faire bouffer... Malheureusement à l'époque je ne l'ai pas écouté. Et il avait raison ce brave B.B. King. Ce studio... Je veux le faire comme je le pense et c'est moi qui déciderai. Je dois être mon propre patron. "

Elvis avait un soucis avec les limites, il le savait. Il avait du mal à s'arrêter. Il était souvent porté par l'engouement ou simplement parce qu'il aimait aller jusqu'au bout des choses. Celà l'avait conduit à sa gloire mais aussi à sa déchéance et à sa mort. Il ne voulait pas répéter les mêmes erreurs du passé. Dieu lui avait donné une nouvelle chance, il devait la saisir et faire ce qu'il faut pour aller de l'avant et se recréer une vie en adéquation à ce qu'il voulait. Réussir vraiment sa vie. Pas la subir. Non, la célébrité ne rendait pas un homme heureux.

Alors il écoute le Dr Bloom lui indiquer des pistes à travailler. Des horaires fixes ? C'était dur avec son travail mais il devrait. Il prend note mentalement. Il faut qu'il se créer des barrières pour éviter de se noyer dans la surcharge de travail.

" J'ai... toujours eu du mal à dormir. " Lui dit-il quant au sommeil. Il soupire. " Normalement je prenais des cachets mais vous savez que j'ai arrêté. J'ai toujours ces soucis de sommeil... J'essaye de prendre des infusions, de l'homéopathie mais c'est compliqué. " Il a un sourire en coin. " Y'a pas idée d'être insomniaque. " Il a une exclamation amusée. Autant le prendre comme ça. " Et c'est qu'il faut que je m'occupe sinon, j'ai mon cerveau qui tourne à pleins régime. Et c'est là que je ne trouve rien de mieux que de bosser... " Il hausse les épaules. " J'ai l'impression que c'est un cercle sans fin parfois. "

Il avait toujours été comme ça. Il avait un mental très actif, et il avait besoin de bouger, de faire des choses. L'inaction ne lui convenait pas. Il avait tendance à s'ennuyer... Celà lui avait coûté pas mal par le passé. Il devait se retrouver un rythme avec la reprise pourtant... Et ne pas se laisser submerger par ses nouveaux projets.

" Je vais y réfléchir. " Quand elle lui dit de déléguer. " Je dois garder les rennes... Je vois bien. J'ai peut être quelques personnes en qui je peux faire confiance. Je vais commencer par peu de gens. Deux ou trois personnes et si ca marche... " Il hausse les épaules avec son éternel sourire charmeur et malin sur le coin des lèvres. " J'aviserai. "

Elvis était quand même beaucoup plus apaisé que ses premiers jours ici. Il se retrouvait. Comme l'ancien Elvis. Le ptit gars de Memphis, avec moins de pression. Il avait pourtant dans son regard la force des expériences de son ancienne vie. Il était clairement plus posé qu'avant. Beaucoup moins nerveux. Il se sentait confiant, comme à l'époque. Mais il devait aussi faire attention à ne pas se brûler les ailes. Il le savait.

Il écoutait ce que sa psy lui conseillait. Mais méditer ? Il avait parfois du mal à tenir en place. Une vraie pile électrique toute sa vie... Ou presque. Car la fin n'était pas très glorieuse. Mais oui, il devait trouver une solution. Mais hors de ses putain de médicaments qui lui pourrissaient la vie. Il refusait d'y remettre le nez dedans de toute manière. C'est ce qui l'avait tué après tout.

" Une séance d'hypnose ? " Demande-t-il. Il a un petit rire. " Vous risquez de ne pas être déçue. " Ajoute-t-il pas du tout sérieux.

Mais il voulait bien se prêter au jeu. Il verrait bien où ca le mène. Elvis restait curieux quand même de ce qu'il pouvait se trouver dans les méandre de son petit cerveau. Même s'il avait aussi peur de ce qu'il pourrait y trouver. Comme la mort de sa mère y avait laissé de profondes cicatrices mentales. Il le sait. Celà avait commencé par ça. Il n'avait jamais réellement réussit à faire le deuil.

Alana lui répète qu'il doit prendre du temps pour lui. Il en est conscient. Il accepte ses paroles, et les comprend. C'est à cause aussi du surmenage qu'il a fini mal en point. Il acquiesce de la tête et lui répond:

" Je ferai en sorte de faire au mieux mais je vais m'y atteler. Me préparer des temps de repos et ne pas me surmener. "

La séance se termine. Aujourd'hui, il se rend compte à quel point il avait bien changé. Ses échanges avec sa psy était bien meilleurs et il se sentait bien mieux. Il se sentait même serein et heureux. Chose qu'il ne pensait plus ressentir dans sa vie. Il va pour se lever et tend la main au médecin.

" Docteur Bloom. Merci de votre aide. Vous m'avez aidé comme jamais. Je vous le redis encore mais vous m'avez sorti de mes démons. " Il a un de ses fameux sourires en coin charmeur. " Mais vous le constatez vous même, c'est vous la spécialiste. J'espère que nos séances s'en trouveront espacé. Celà voudra dire que j'aurai de moins en moins besoin de vous. Ce qui n'est pas un mal. "

Sauf qu'il ne sait pas qu'il risque de plonger plus rapidement que prévu pour des histoires de coeur...