(Terminé) When you're a snake charmer, you're gonna get bit. [Alucard]

When you're a snake charmer, you're gonna get bit.

feat. Alucard

Elle sait sans savoir la sensation que l’on éprouve quand on se retrouve piégé en ses propres chairs, elle sait sans savoir ce que l’on ressent quand on découvre que plus jamais on ne reviendra à qui l’on était. Quand on admet que le monstre a pris toute la place. Pour de bon. Elle sait, parce qu’elle a conscience de l’avoir déjà vécu, quand bien même ses souvenirs restent flous, diffus… Peut-être parce qu’au fond, la Maledictus n’est pas réellement pressée de se souvenir. Plus elle récupère de bribes de sa vie passée, plus elle est contrainte de les contempler avec angoisse. Elle essaie parfois de se rassurer en se répétant à elle-même qu’elle n’était plus exactement elle-même, mais elle ne saurait dire si cette affirmation est bien réelle ou seulement une manière pour elle, facile et lâche de se rassurer… elle le saura probablement bien assez vite quoi qu’il en soit, car son sort dans ce monde ne saurait être différent de celui qu’elle avait connu autrefois, souvenirs refoulés ou non.

Depuis le retour de ses capacités et surtout depuis le retour de son maître dans sa vie, Nagini a la sensation que la machine s’emballe, toujours plus vite, toujours plus incontrôlable. Ses transformations sont de plus en plus nombreuses et de moins en moins décidées. Le moindre sursaut d’angoisse, le moindre accès de rage… en bref, la moindre émotion forte est susceptible de faire surgir le monstre. Sans oublier ses transformations chaque fois que ses yeux se ferment et qu’elle cède au sommeil. Un jour, elle se réveillera… et elle ne sera plus capable de se retransformer… Elle est tout à fait certaine de cela. Ce n’est qu’une question de temps. De jours, de semaines… de mois dans le meilleur des cas… Elle ne donne définitivement pas cher de sa peau – de ses écailles.

C’est probablement pour cette raison que, ces derniers temps, elle recherche si assidument la compagnie de son maître. Elle sait reconnaître les efforts de Jacob vis-à-vis d’elle. Sa patience et sa gentillesse sont des dons précieux, qu’elle ne néglige pas le moins du monde. Mais la pression et les épreuves qu’elle lui fait subir ne sont pas justes… Il se bat pour une cause perdue. Tôt ou tard, elle reviendra auprès du seul qui sera capable de la protéger et de la comprendre. Celui qui l’a couvée si précieusement de ses attentions, au point de lui confier un fragment de son âme, qu’elle conserve en elle avec angoisse, oui… mais avec fierté, également. L’ambivalence de ses sentiments et de ses émotions la tiraille, mais à la fin, c’est toujours vers lui qu’elle se dirige, comme en cet instant, alors qu’après une transformation subreptice et incontrôlée, son premier réflexe avait été de se réfugier au serpensortia, où elle espérait le trouver.

Sous sa forme serpentine, l’immense reptile rampe à même le sol, aux abords de la fameuse boutique, que son attention est attirée par la silhouette d’un rongeur apeuré. Dans un sifflement appréciateur, Nagini focalise dorénavant son attention sur lui. Son instinct l’invite à chasser. Son instinct la prévient également d’une certaine familiarité, qu’elle décide pour commencer d’occulter, alors qu’elle tourne autour de sa proie et s’enroule lentement autour d’elle.

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De son regard reptilien, Nagini peut assister à un changement remarquable. Un chien à l’allure terrifiante devient un homme de taille imposante… Comme elle, la Malédictus, pourrait à tout instant, si elle se concentre bien, si elle ne se laisse pas ronger par sa seule inhumanité, si elle ne laisse pas sa monstruosité lui dérober la part la plus dangereuse d’elle-même… Il est à la fois créature monstrueuse et humain. Comme elle. Ce constat l’intrigue étrangement, suffisamment pour que le serpent, en dépit de toutes ses réticences et de sa défiance naturelle, choisisse de ramper jusqu’à cet individu hors du commun. Il semble réellement être fasciné, et ne pas seulement le prétendre. Il voudrait être capable d’emprunter la même forme qu’elle… Oh, comme elle échangerait sa malédiction contre tout l’or du monde. S’il suffisait qu’un autre désire être à sa place pour être débarrassée une bonne fois pour toutes de cette affliction, elle le ferait sans l’ombre de la moindre hésitation, immédiatement. S’il lui plaît de jouer avec ses proies, soit… Nagini voudrait n’être ni prédateur, ni proie, oubliée et vue en même temps, en proie à ses multiples contradictions.

Nagini, intriguée, impressionnée, décide finalement de rassembler suffisamment de calme et de contrôle pour reprendre sa forme humaine. Cet individu fasciné et fascinant veut à l’évidence mieux la connaître, intrigué, et Nagini aura bien des difficultés à communiquer sous sa forme de serpent. Alors progressivement, le reptile se redresse, et bientôt sa silhouette se métamorphose pour laisser place à celle d’une jeune femme frêle à l’air en partie apeuré, qui fixe cet homme surprenant de ses grands yeux sombres, incapable de savoir précisément quoi en penser.

« Je n’avais pas l’intention de vous mordre », dit-elle seulement de sa voix douce, presque éthérée, semblable à un souffle quand elle n’est pas un sifflement, et avec laquelle elle a pour habitude de s’exprimer.

Elle laisse passer un long temps de silence après avoir prononcé ces quelques mots. Sa vision, à présent qu’elle a repris sa forme humaine, est différente et lui permet de mieux appréhender le gabarit de cet homme au physique imposant… A vue d’œil, il doit faire plus de deux mètres… elle a rarement vu un homme aussi grand. Elle se sent aussi fine et ridiculement petite qu’une brindille en comparaison. Elle songe à l’animal qu’il était un peu avant, et à toutes les questions qui s’imposent à son esprit à cette pensée.

« Qui êtes-vous ? »

La question devrait probablement plutôt être : qu’est-ce que vous êtes ? Mais une question appelle l’autre, et Nagini espère seulement que son interlocuteur daignera lui répondre avec transparence, même si elle n’en est pas tout à fait sûre.

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Nagini sourit, légèrement mal à l’aise néanmoins, quand son interlocuteur lui assure que pour sa part, il adore être mordu. Il le dit de bon cœur, en riant, mais de son côté, la jeune femme a bien du mal à trouver la chose véritablement amusante, malgré tout, elle apprécie le détachement dont sait faire preuve son interlocuteur qui est bien loin de l’inquiéter et qui, bien au contraire, semble l’intéresser, voire même le fasciner. Même si elle n’est pas tout à fait sûre de savoir apprécier ce qu’elle lit dans le regard de son interlocuteur, elle songe qu’il est plaisant d’y lire autre chose que de la terreur pure, ou même encore de la pitié… Qu’il s’agisse de l’un ou de l’autre, Nagini en a suffisamment soupé comme cela pour apprécier le comportement très singulier d’Alucard comme une sorte de vent d’air frais, qui ne fait pas nécessairement de mal. Alucard, c’est son prénom, un nom qu’elle garde à l’esprit sans trop savoir dans quelle catégorie de sa mémoire il lui faudra le ranger. Cet Alucard l’inquiète, mais il la fascine également un peu… Elle suppose que le plus simple sera encore de poursuivre cette conversation afin de déterminer où celle-ci pourra bien les mener.

« Nagini », se présente-t-elle d’une voix timide.

Elle ne donne pas toujours son nom à la légère, elle sait que dans l’esprit de certains, il est connoté – et ce n’est certainement pas sans raison. Ceci dit, la Maledictus ne pense pas qu’au stade où ils en sont, elle ait le moindre intérêt à nier son identité alors même que cet homme lui-même très étrange et hors du commun a assisté aux premières loges à sa transformation. Il s’écarte légèrement, s’appuie contre le mur. Même ainsi, il reste particulièrement impressionnant aux yeux de Nagini, qui a bien du mal à passer outre combien elle se sent véritablement intimidée en cet instant.

Il est un vampire, voilà ce qu’il lui apprend, ce qui éclaire Nagini à ce sujet sans totalement soigner sa curiosité car quand bien même il appartient à une catégorie de créatures qu’elle est supposée connaître… quelque chose lui échappe.

« Il y a des vampires, d’où je viens », dit-elle en se permettant un peu plus franchement de le détailler de haut en bas, au risque de paraître indiscrète. « Mais aucun qui ne ressemble à ce que vous semblez être », ajoute-t-elle alors, toujours aussi intriguée, à la fois par sa carrure et par ses talents de métamorphose. Est-ce qu’elle doit s’inquiéter de ce qu’il lui apprend ? Est-ce qu’elle ne devrait pas prendre la fuite ? Si, peut-être… Mais même si elle reste sur ses gardes, elle n’a pas le sentiment que cet homme lui veuille du monde. « Je suis une maledictus. Ce que je suis, ce que je fais… » Elle tremble légèrement. « Ce n’est pas un don, c’est une malédiction. Ce magnifique reptile, comme vous dites, c’est tout ce que je serais, à la fin », commente-t-elle dans un souffle ému.

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Dracula… Il en existait un aussi, dans le monde des sorciers, mais Nagini ne s’est jamais vraiment intéressée à son histoire, à vrai dire. Elle ignore ce que cela fait, de se découvrir plusieurs versions de soi-même… Elle trouve cela particulièrement improbable – et elle ne souhaiterait à personne d’être une autre version d’elle-même –, mais son interlocuteur semble le prendre avec une certaine philosophie, probablement parce que les pouvoirs qu’il évoque et dont la Maledictus devine n’avoir aperçu que quelques bribes, lui permettent de prendre sur sa situation (et la situation dans son ensemble) une distance dont la jeune femme, elle, n’est en rien capable. Il parle de lui-même avec une philosophie surprenante, y compris quand il parle de son immortalité, et du fait que – constat peu intuitif –, cette dernière prend toujours fin à un moment ou à un autre.

A ce sujet, Nagini ne peut pas réellement faire de commentaire, elle se contente d’écouter et de hocher vaguement la tête, à la fois incertaine et surprise. Incapable de savoir comment se situer par rapport à un tel discours… Incapable de savoir comme se situer par rapport à lui de manière générale… C’est qu’elle se sent particulièrement décontenancée par sa personne… Par son caractère. Par son verbe facile. Par son aisance, son assurance. Décontenancée, oui… mais aussi un rien fascinée en réalité.

Nagini a peut-être un discours larmoyant, mais elle ne cherchait pas véritablement à apitoyer son interlocuteur en exposant sa situation. Elle se contentait d’énoncer un fait. Malgré tout, elle est une fois de plus décontenancée face à sa réaction, alors qu’il se met à rire… Se moquerait-il ? Peut-être trouve-t-il son sort très amusant, après tout. Bien sûr, c’est là un humour auquel Nagini ne pourrait goûter que difficilement de son côté, mais elle ne dit rien pour commencer.

On est tous maudits, dit-il. Est-ce vrai ? Probablement que oui, en réalité. Après tout… Au-delà de leurs afflictions respectives… Leur simple présence ici n’est-elle pas une malédiction en soi ? Chacun peut décider de l’apprécier à sa manière, cela reste un sort qu’ils n’ont à l’évidence pas décidée, et cela reste une chose qu’ils doivent absolument noter. Il lui dit être devenu un vampire, et n’avoir certainement pas désiré cela… Mais… Il a su apprécier sa condition, surtout, il ne s’est pas appesanti sur son sort comme elle a tendance à vouloir le faire elle-même… Avant tout et surtout parce qu’elle sait comment l’histoire est supposée finir, même si, de sa vie passée en tant que serpent, elle n’a plus que des souvenirs très diffus.

« Je ne chouine pas », rétorque-t-elle par fierté, mais probablement sans être franchement convaincante, car elle se rembrunit presque aussitôt. « Qu’est-ce que je devrais faire, selon toi ? Pour profiter de la vie ? »

Probablement qu’elle ne devrait pas poser la question trop directement à un vampire buveur de sang, mais il est un peu trop tard à présent pour revenir sur ses dires.

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Nagini ne répond rien, déstabilisée par les paroles de son interlocuteur quand ce dernier la qualifie de « sexy », un adjectif qu’elle n’est pas habituée à entendre, car la jeune femme a tendance à se dérober à tous les compliments, et plus encore quand ils sont aussi… personnels ? Pour autant, elle réalise que ce n’est pas si déplaisant que d’être perçue de la sorte, comme une créature un tant soit peu attirante. La maledictus n’a jamais eu trop le sentiment de l’être, mais elle apprécie de se ressentir ainsi au regard de son interlocuteur… même si ce dernier n’est jamais rien d’autre qu’un beau parleur.

Touchée, cet homme voit clair en elle et la perce à jour avec une facilité déconcertante. Car oui, il a raison, Nagini ne s’autorise pas à avoir la moindre passion. Tout ce qu’elle attend, c’est bel et bien non pas la fin, mais l’accomplissement de sa malédiction. A quoi bon espérer et se projeter quand son destin, quoi qu’il en soit, est déjà tout tracé. Pour cause, elle l’a d’ores et déjà vécu. La franchise d’Alucard la désarçonne, mais elle le laisse faire, parce que quelque part, ça lui fait du bien d’entendre quelqu’un lui parler très franchement comme son interlocuteur le fait. Trop souvent, on utilise des pincettes avec elle, trop souvent, on l’abreuve de vains espoirs. Elle préfère encore, à ce stade, que l’on se montre aussi direct qu’Alucard sait l’être, quand bien même son attitude a pour effet de la déstabiliser à plus d’un titre.

« Tu serais surpris de tout le sang que j’ai pu faire couler », répond évasivement Nagini.

Quoiqu’elle parle d’une vie qui n’est plus qu’un souvenir, et dont elle n’est pas tout à fait certaine qu’elle lui appartient encore. Nagini a tué, dévoré, torturé de nombreuses victimes, elle a également le souvenir d’avoir aimé ça, d’y avoir définitivement pris goût… Est-ce qu’elle peut parler de passion pour autant ? Pas vraiment, mais c’est une manière pour elle de laisser entendre à son interlocuteur qu’elle n’est pas intimidée par lui… ou pour s’en convaincre elle-même, car en réalité, c’est loin, très loin d’être vrai.

« Je ne peux pas retarder l’échéance », ne sait-elle s’empêcher de dire, sur la défensive, alors qu’il suggère qu’elle le pourrait. Avant d’ajouter qu’elle aura tout le temps de trouver quelqu’un qui sera capable d’apprécier les jolies serpentines… Comme lui… Nagini baisse les yeux. « Je n’aime pas danser… En revanche parler me manquera, oui », dit-elle, un peu embarrassée, alors qu’il l’interroge sur ce qu’il lui manquera quand elle n’aura plus sa forme humaine. « Et je n’ai jamais… »

Nagini sent le rouge lui monter aux joues. Non, vraiment, elle préfère ne pas parler de ça, en réalité. Elle veut occulter le sujet. Et en même temps, elle se sent dépassée par la curiosité et l’intérêt que son interlocutrice lui porte.

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Lui raconter… par où commencer ? Et comment faire alors que, de sa vie de serpent, elle garde des sensations plutôt que des souvenirs ? Et en réalité, pourquoi se sent-elle comme l’obligation de lui en parler ? Elle n’a pas à le faire, non… Elle n’a pas à le faire, mais elle en a l’envie malgré tout, parce qu’elle ressent comme l’envie de l’impressionner, et de ne pas se donner l’air aussi faible qu’elle ne l’est réellement. Elle réfléchit donc à une manière de lui répondre, et se contente de quelques mots, qu’elle veut les plus percutants possibles, dans l’espoir qu’il ne la prenne plus pour une petite chose fragile… ce qu’elle est, en réalité, faute de savoir véritablement assumer ce qu’elle pourrait bien être.

« Quand je n’étais plus qu’un serpent, c’était mon rôle. Ceux qui désobéissaient au maître me servaient de repas. »

Au moment de faire mention de son « maître », Nagini comprend bien qu’elle en a déjà trop dit, mais elle ne revient pas sur son discours néanmoins, peu importe ce que son interlocuteur décidera d’en retirer – s’il doit décider d’en retirer quoi que ce soit au demeurant. En attendant, elle n’est pas encore un serpent à part entière. Elle est une humaine, une humaine terrifiée, et qui n’ose mener sa vie pleinement, consciente pourtant de tout ce qu’elle laissera derrière elle en faisant constamment le choix de se tenir à l’écart de ce qu’elle pourrait être. Quand Alucard suggère seulement qu’elle le fasse, qu’elle savoure pleinement les plaisirs que l’humanité peut bien avoir à procurer, elle reste interdite… ce n’est pas comme s’il était si simple que cela de faire une chose dont on a seulement été curieux jusqu’ici. Est-ce qu’elle serait seulement capable d’aller jusqu’au bout, en réalité ? Elle-même est loin d’en être tout à fait certaine.

Faire l’amour, c’est comme tuer. Quelle drôle de façon de voir les choses… Ceci dit, Nagini reconnaît assez bien certaines de ses propres sensations pour ce qui est de tuer… Elle se souvient de ces émotions grisantes, à chaque vie qu’elle prenait. Elle n’avait pas d’angoisse ni de doute, alors. Elle faisait seulement ce qu’elle était destinée à faire, fin de l’histoire. Elle a envie de répondre quelque chose, ou même de confesser qu’elle ne saurait même pas comment s’y prendre, mais il la prend absolument au dépourvu au moment d’écraser ses lèvres sur les siennes. Quand il s’écarte, elle frissonne et essuie sa lèvre d’un revers de la main.

« Je peux savoir ce qui t’as pris ? Tu te penses à ce point irrésistible ? » elle demande en se reculant d’un pas, le cœur battant et troublée par ce qui s’avère être son tout premier baiser, et qu’elle n’avait jamais, ô grand jamais envisagé se dérouler ainsi.

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Nagini ne réagit pas, faussement impassible quand son interlocuteur affirme qu’il aurait voulu la voir faire, toujours avec cette même franchise désarmante… Quelque part, elle est capable de comprendre ce qu’il dit parce que… elle aurait aimé aimé…. D’une certaine manière… se voir faire elle-même. Elle s’efforce néanmoins de chasser cette pensée morbide, qui s’ajoute à une foule d’autres pensées morbides dont elle n’est pas beaucoup plus fière.

Elle fronce les sourcils, intrigués, peinant à soutenir son regard d’une intensité troublante, impressionnante, quand il ajoute avoir eu le même rôle qu’elle ? Est-ce vraiment possible, ou bien se moque-t-il ? Elle n’en sait trop rien. Avec cet homme, la Maledictus ne sait absolument pas sur quel pied danser. Il lui apprend avoir échoué face à un humain, et avoir été condamné à la servitude… Oui, quelque part, leurs sorts sont similaires… Mais aux yeux de Nagini, pas tout à fait. Elle se leurre à ce sujet, bien sûr, mais Nagini sait y faire pour prétendre avoir eu sa part de décision volontaire dans son choix – qui n’en était pas un – de servir le seigneur des ténèbres. La vérité, c’est qu’elle n’avait tout bonnement pas eu d’autre choix, mais ça… Nagini ne l’admettrait certainement pas.

Elle est fort heureusement – ou pas – tirée très brutalement de ses réflexions au moment pour Alucard de l’embrasser de force, la prenant complètement au dépourvu et en la plongeant dans un état de confusion et de trouble total. Elle déteste la manière dont cet homme est capable de la déstabiliser, en peu de mots, en peu de gestes… c’est… clairement, cet homme ne ressemble à aucun homme qu’elle ait déjà rencontré, et pourtant, en côtoyant de très près Lord Voldemort et le cercle des mangemorts, elle a fait face à un sérieux nombre de phénomènes.

« Je crois que c’est exactement ce que tu penses, oui », confirme la Maledictus en hochant vigoureusement la tête quand son interlocuteur affirme en riant qu’il serait absurde pour lui de se croire irrésistible. Elle ne sait pas s’il le pense ou s’il se joue d’elle… Elle n’est pas sûre de comprendre.

« Mordre ou te manger, je ne suis pas encore décidée », elle rétorque en se donnant des airs menaçants qui ne lui confèrent aucune crédibilité quand son interlocuteur lui demande ce qu’elle fera s’il la coince. La vérité, c’est qu’elle ne le sait pas elle-même. En situation de stress ou de panique, elle sait seulement qu’elle a tendance à se transformer… Et quand c’est le cas, eh bien… elle ne répond tout bonnement plus d’elle-même.

Nagini recule, bien malgré elle, à mesure qu’Alucard s’avance. Elle conserve l’infime espoir qu’il bluffe, mais… Rien n’est moins sûr, au fond…

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Nagini grimace. C’est bien la première fois qu’on lui affirme qu’elle ne réfléchirait pas assez. En règle générale, c’est tout l’inverse, et on lui reprochera plutôt de réfléchir beaucoup trop. Son esprit fragile est constamment assailli de pensées insoutenables, qu’elle peine à organiser, et qu’elle pleine plus encore à supporter tant beaucoup de ces pensées sont douloureuses et morbides… Oui, elle réfléchit trop, mais peut-être aussi, contradictoirement, ne réfléchit-elle pas assez à certaines choses.

Ces deux points peuvent paraître contradictoires, mais ils ne sont pas nécessairement incompatibles, loin de là, même. Elle le sent, elle le voit bien, qu’il la pousse dans ses retranchements… et ça fonctionne, parce que la jeune femme ne sait pas, par conséquent, de quelle manière elle réagira. Il l’encourage à l’imprévisibilité, à l’impulsivité… et ça fonctionne… car au moment de lui suggérer de le faire, de le mordre ou de le manger, elle se sent réagir aussi spontanément que si elle avait reçu cet ordre de Lord Voldemort en personne.

Elle ne saurait dire précisément ce qui induit cette impulsion chez elle. Peut-être une envie de le voir perdre sa suffisance, d’avoir le dessus sur elle… peut-être complètement autre chose, elle n’a pas la réponse à cette question, elle sait seulement que quand les mots ne sont pas suffisants, les actes sont autrement plus parlants. Alors, au moment où il se rapproche, avant son visage vers le sien et se rapproche dangereusement de son cou, quand sa langue longe la veine de son cou, elle se transforme naturellement, dans un long frisson. L’instant d’après, le serpent a repris sa place, et il fond sur Alucard, gueule grande ouverte.

Les crocs du gigantesque serpent se referment autour de son bras. La bête n’a pas l’intention de faire plus de mal que nécessaire, ses instincts primaires, meurtriers, mis en veilleuse par ce qu’elle conserve d’humanité, même sous cette apparence, absolument monstrueuse... Elle a pour lui une certaine… sympathie, mêlée d’agacement et de défiance. Une connivence qui fait qu’elle reconnaît en elle la part cruelle de ce qu’il est également.

Elle veut lui faire mal, oui, elle veut le mordre jusqu’au sang, elle veut faire étalage de sa violence. Mais elle ne veut pas réellement le briser ou lui nuire… et une part d’elle a peut-être même conscience du fait qu’il serait bien susceptible d’y prendre même une certaine forme de plaisir. Le goût du sang l’enivre doucement… Voilà bien longtemps qu’elle ne s’était plus réellement autorisée à faire… ce que sa nature de serpent l’encourage plus que jamais à faire.

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Nagini n’est pas habituée à ce que cette forme qu’elle estime horrifiante et monstrueuse soit contemplée avec quelque chose qui ressemblerait presque à de la pure admiration. Non, ce n’est définitivement pas de cette manière qu’elle se perçoit, ni qu’elle s’est habituée à ce qu’on la perçoive. Certes, il y a eu une exception, notable, celle d’un maître qui l’avait pleinement acceptée pour ce qu’elle était, et était resté capable de communiquer avec elle, mais le seigneur des ténèbres ne la regardait pas ni ne la regarde pas comme Alucard la regarde. Ce dernier se délecte véritablement de l’horreur qu’elle incarne, et de la violence qu’elle est capable de manifester, dans un accès de rage ou d’impuissance, ou sans grande justification entre eux. Elle n’est pas superbe, non, sous aucune forme, mais elle peut admettre éprouver un certain sentiment de satisfaction et de puissance, alors que ses crocs s’enfoncent dans son bras sans que cela ne lui fasse grand-chose. Pour ne pas dire rienn du tout.

Elle se permet de marquer profondément sa chair, à plus forte raison que ce dernier y reste proprement insensible. Nagini caresse le désir malsain de lui faire du mal, de lui faire vraiment beaucoup de mal, parce qu’elle ne supporte pas ce qu’il réveille de monstruosité en elle, et parce qu’elle ne supporte pas qu’il ait raison… C’est pourtant le cas. Le goût du sang est unique, à nul autre pareil. Quand on y a pas goûté de cette exacte manière, on ne peut pas comprendre. C’est quelque chose de grisant, d’électrisant. Oui, c’est agréable, c’est au-delà d’agréable, même, car dans ces circonstances, la Maledictus parvient à se sentir puissance, véritablement puissance.

Elle voit une langue trop longue s’échapper de ses lèvres, une langue fourchue, une langue qui ressemble à s’y méprendre à la sienne. Le corps du serpent frissonne tout entier quand cette dernier glisse sur ses écailles. Elle ne sait si c’est l’horreur ou l’exaltation qui la traversent en cet instant. Ces deux émotions sont étrangement entremêlées quand il est question de cet homme qui a l’évidence est bien plus qu’un homme. Elle a envie de le laisser faire, elle a envie qu’il arrête, elle est pétrie d’intentions contradictoires qui, sous sa forme de serpent, ne peuvent probablement s’exprimer que dans la violence la plus pure et la plus stricte.

Son corps reptilien ondule et elle lâche son bras maculé de sang non pour prendre la fuite, comme l’intention a pu l’effleurer pour commencer, mais afin de s’attaquer cette fois à son visage, comme une sorte de besoin vital, viscéral, de lui arracher son fichu sourire satisfait, ou bien sa satanée langue.

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feat. Alucard

Nagini aurait probablement plus d’intérêt à simplement s’en aller sans demander son reste, mais sa fierté, ses angoisses, sa colère… le tout mélangé ne l’encouragent pas véritablement aux décisions les plus raisonnables. En cet instant, elle ne s’est jamais senti plus près de ce qu’elle a été pendant de longues années à servir les intérêts d’un maître qui veut à présent la récupérer quand elle-même lutte encore, du mieux qu’elle le peut, pour ne pas renoncer entièrement à son humanité ô combien fragile.

Elle est monstre plus qu’elle n’est humaine, et elle embrasse sa nature avec un mélange de rage et de satisfaction…. Car même si elle s’agace sincèrement de voir cet homme (ou quoi qu’il puisse être) en particulier la percer à jour avec une telle aisance, elle aime également s’approprier pleinement cette nature que ces derniers temps elle a cherché à refouler avec toujours plus de force et de violence.

Oui, elle a envie de lui faire mal. Voilà longtemps qu’elle n’avait pas ressenti un tel besoin, une telle pulsion sauvage et brutale, un désir viscéral d’arracher la chair, de se repaître du sang. Oui, elle a envie de lui faire mal, elle a envie de profiter qu’il soit sa victime consentante pour lui faire du mal, beaucoup de mal… Mais en même temps… elle ne veut pas se le permettre. Elle attaque, mais sans succès, puisqu’il parvient à ploquer sa tête reptilienne dans sa main. Ses crocs fendent l’air contre son visage, lacèrent quand elles peuvent, alors que son corps couvert d’écailles s’agite avec de plus en plus de violence et de force.

Le serpent se fige au moment de sentir sa langue s’enrouler autour de la sienne. Puis elle s’agite, rapidement, violemment, dépassée par cette situation, ses plus bas instincts poussés à leur paroxysme le plus vif et le plus total. Elle devrait se retransformer, maintenant. Mais elle n’en a pas la moindre envie, en réalité. Ses émotions sont si intenses, si violentes qu’elles ne tolèrent aucun autre réceptacle que celui de ce corps animal, monstrueux, dans lequel elle peut révéler une part d’elle-même qu’elle n’accepterait en aucun cas de révéler en d’autres circonstances.

Elle ne réfléchit plus vraiment, en réalité. Son cerveau reptilien remplace toutes ses réflexions humaines, et c’est sur cela, sur cela et rien d’autre, qu’elle se repose alors qu’elle enroule son corps autour de celui d’Alucard dans l’espoir de l’étouffer, avec l’envie de lui broyer les os… Mais bien sûr, il est plus que probable que ses tentatives se soldent par un échec.