Looking for our friends

feat. Peter

Il ne devrait pas être là. Bien sûr qu’il ne devrait pas être là. Avoir reçu une invitation officielle de la part de son géniteur, bien cartonnée comme il faut ne rend pas l’idée plus ingénieuse, et prétendre que ce sera pire s’il ne se pointe pas n’est jamais qu’un prétexte pour ignorer cette dualité qui accompagne chacune de ses actions quand il doit être question de son géniteur. Il ne sait tout simplement pas couper les ponts. Il s’en sent incapable. Chaque tentative s’accompagne quasi-simultanément d’un mail, d’un appel téléphonique ou encore, comme aujourd’hui, d’une invitation, là pour lui rappeler le rôle qu’il est supposé tenir auprès de son géniteur et qu’il aura eu tendance non pas à oublier, mais à négliger. Tiraillé entre l’emprise violente d’un père qui ne lui a jamais voulu de bien et ses promesses envers Peter, et envers tous ceux qu’il décevra quand ils comprendront qu’il ne vaut sans doute pas mieux que ce qu’il prétend, en fin de compte.

Harry n’a pas la moindre idée du sujet sur lequel son père compte s’exprimer, il se sent seulement soulagé de constater que l’événement semble se jouer en suffisamment petit comité pour qu’il ne se retrouve pas acculé… En peut-être trop petit comité, cela dit, pour qu’il passe inaperçu, ce qui ne l’arrange pas, en revanche. Peu importe, il est ici, et même s’il a peut-être encore l’occasion de rebrousser chemin, il décide de rester à une distance plus ou moins respectueuse du lieu où doit avoir lieu l’événement.

C’est davantage pour s’occuper l’esprit et les mains que par appétit que Harry se dirige vers un stand de hot-dogs. Il a l’estomac dans les talons et n’est pas sûr de pouvoir manger grand-chose, mais ce sera toujours mieux que de tourner en rond, surtout qu’il a déjà sauté le petit déjeuner et le déjeuner. Alors qu’il attend son dû, un jeune homme, qui ne doit pas avoir loin de son âge, l’aborde afin de lui demander les raisons de sa présence, visiblement les mêmes que les siennes.

« Oui », confirme Harry sans être sûr de bien faire que de répondre plutôt que de se murer dans un silence réconfortant. « Norman Osborn est mon père », confie-t-il, encore moins certain d’avoir raison de confier une information pareille. « Tu es journaliste, c’est ça ? » fait-il en désignant du doigt l’appareil photo de son interlocuteur.

S’il couvre l’événement, peut-être s’est-il déjà fait une opinion au sujet de son géniteur. Peut-être également qu’il n’en est rien et qu’il se contente de venir sur les lieux parce qu’on le lui a demandé, et sans forcément chercher plus loin. Toujours est-il qu’en cet instant, il ne sait s’il doit encourager les investigations de son interlocuteur (qui n’est peut-être pas du tout journaliste et aime juste prendre des photos) ou s’il doit au contraire le dissuader. Il sera sans doute bien assez rapidement fixé.

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feat. Peter

Harry se fige légèrement au moment d’entendre la question que lui adresse son interlocuteur. Peut-être s’est-il seulement suffisamment renseigné sur Norman Osborn pour savoir son nom, mais la nature plus précise de sa question, et surtout le ton qu’il emploie au moment de la poser lui laisse imaginer quelque chose de bien différent. Quoi, exactement ? Il ne saurait le dire, mais à force de situations alambiquées qui l’avaient placé face à tant de protagonistes d’univers alternatifs qui avaient vent de son nom, il y a de quoi devenir un rien paranoïaque. Voire même beaucoup. Malgré tout, il hoche la tête et accepte de répondre sincèrement à la question de son interlocuteur.

« C’est ça », confirme-t-il simplement d’une voix blanche.

Il ne sait pas sur quelle question parmi la multitude qu’il se pose rebondir après cette confirmation, mais c’est finalement son interlocuteur qui lui facilite la tâche en lui confirmant qu’il est photographe et qu’on l’a envoyé prendre des clichés du communiqué de presse avant d’ajouter ces mots qui, tout naturellement, doivent directement le faire tiquer.

Il s’appelle Peter Parker. Et tout ceci n’est jamais qu’une blague de grande envergure destinée à lui faire perdre les pédales, c’est obligé. Un nouveau Peter Parker, et toujours pas son meilleur ami. Harry se retient de dévisager son interlocuteur de façon trop appuyée mais c’est plus fort que lui… Encore un Peter Parker, mais peut-être que celui-ci ne voudra pas lui faire la peau sous le prétexte qu’un lui alternatif aura tué sa petite amie, pas vrai ? Il veut dire quelque chose, lui poser de nouvelles questions, essayer de démêler toute cette situation, mais rien de franchement convaincant ne lui vient à l’esprit en cet instant. Jusqu’à ce qu’une autre sorte de pensée l’envahisse, et dès lors, une idée, terrible, lui traverse l’esprit.

« Si t’es vraiment un Peter Parker, faut pas que tu restes là, faut pas que mon père sache que tu es ici. »

Certes, son père n’aurait aucune raison de savoir qui elle est. Et par ailleurs, en pleine conférence de presse, ce n’était pas comme s’il pouvait faire ou remarquer grand-chose, n’est-ce pas ? Peut-être bien. Mais dans le doute, autant ne pas prendre de risques. Il a déjà fait suffisamment de mal au Peter qui partage son quotidien, s’il pouvait éviter des problèmes à ceux qui jusqu’ici ont été épargné par l’intérêt de son père, sa colère et son désir de vengeance, alors il le ferait clairement volontiers. Oui, Peter ne doit pas rester dans les parages… et d’ailleurs, Harry non plus ne le devrait pas. C’était une erreur de venir ici, et c’est une erreur qu’il est encore en mesure de réparer. D’accord, d’accord, Peter a sans doute un contrat à honorer en tant que photographe, mais aux grands maux les grands remèdes. Peter le remerciera plus tard… Ou pas, mais Harry, dans tous les cas, est convaincu maintenant qu’ils doivent s’en aller.

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feat. Peter

l y a quelque chose d’étonnamment rassurant à entendre son interlocuteur parler d’un Harry Osborn qui ne soit pas lui certes, mais qu’il évoque comme étant son meilleur ami malgré tout. Dans la dimension de ce Peter, l’amitié entre Peter et Harry a survécu. Ça peut n’avoir l’air de rien, mais Harry trouve du réconfort dans cette affirmation. Un réconfort de courte durée, néanmoins, parce que laisser ce Peter ou n’importe quel autre approcher de trop près son père serait chose infiniment dangereuse. Il ne veut pas donner l’occasion à son père de découvrir l’existence d’un autre Peter Parker que celle dont il a déjà eu connaissance par son intermédiaire. Mais qui sait, il est peut-être déjà au courant. Quoi qu’il en soit, oui, il ne peut pas être question pour eux de rester ici. Harry a sous les yeux la réponse à l’une de ses grandes questions : il n’aurait pas dû venir ici, et son interlocuteur ne le doit pas non plus. Tant pis pour ses photos ou son éventuel article, il y a clairement des priorités. Il ne veut même pas s’en justifier, espérant que ce Peter acceptera de le suivre sans poser de questions… Mais des questions, ce dernier en a en réserve… et non des moindres.

Il reste interdit un instant face au discours particulièrement direct de son interlocuteur. Bon, il y a définitivement des choses qui ne changent pas : à ce stade, Harry ne se faisait pas vraiment d’illusions – son père est et restera un connard avéré dans toutes les dimensions possibles et imaginables. Et visiblement, il sera poursuivi par le bouffon vert dans n’importe quelle dimension également. Rien de franchement rassurant à cela. Mais rien de franchement surprenant non plus.

« Euh… Ouais plus ou moins », confirme Harry après un instant d’hésitation.

Bon, s’il est le bouffon vert ou non, il n’en sait rien, mais si le Hobgoblin a pu faire son grand retour si facilement, Harry se doute que son père a dû lui aussi retrouver ses compétences passées.

« T’es d’accord qu’on parte d’ici ? Le plus loin possible tant qu’à faire ? On pourra toujours se poser avec nos hot dogs et tu pourras me parler de ton Harry et moi de ton Peter. » Il marque une pause. « Enfin, si t’es d’accord. »

Ce sera toujours mieux que d’exposer son interlocuteur, qui n’avait rien demandé à personne, aux foudres éventuelles de son père. Certes, ce dernier ne se rendrait peut-être compte de rien, mais ce n’est définitivement pas un risque qu’il veut faire courir à son interlocuteur si ce dernier accepte de se l’épargner également. Ses rencontres successives avec plusieurs Peter l’ont autant éclairé sur leurs points communs manifestes que sur leurs différences. Alors il ne sait pas exactement ce que sera la réaction de ce Peter-là. Peut-être qu’il sera d’autant plus poussé par sa curiosité et voudra rencontrer son père ? Peut-être qu’il voudra le confronter directement ? Harry n’en a pas la moindre idée.

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feat. Peter

Ce « Je vois » qu’il lui adresse en dit plus long que ces quelques mots. En filigrane, Harry devine une histoire complexe, comme le sont peut-être toutes les amitiés qu’entretiendront tous les Harry Osborn de n’importe quel monde avec tous les Peter Parker de n’importe quel monde. Harry ne pourra pas prétendre être l’exception qui confirme la règle, et il le regrette. En cet instant, il se sent condamné par son propre nom, et c’est loin d’être une pensée agréable. Malheureusement, le jeune homme ne peut prétendre avoir su empêcher ce qui s’apparenterait presque à une sorte de cycle infernal.

Un silence au fond très court mais très pesant les enveloppe tandis qu’ils récupèrent leurs hot-dogs respectifs. Harry reste incertain quant à ce qui va suivre. Il ne serait pas franchement surpris d’entendre son interlocuteur l’envoyer balader. Peut-être qu’il ne voudra pas entendre parler de lui, et ce sera de bonne guerre, mais il espère véritablement qu’il n’en soit rien. Si Peter devait décider de partir, de mettre une quelconque distance de sécurité entre eux, Harry ne le lui reprocherait définitivement pas, mais ce n’est pas ce qu’il fait, en fin de compte. A la place, il semble accepter la proposition de Harry, qui respire un peu face à cette approbation.

Il n’est pas complètement sûr que cela change quoi que ce soit, qu’ils s’éloignent ou bien qu’ils restent sur place, mais tant qu’à faire, Harry préfère limiter la casse. Si son père peut éviter d’apprendre qu’un Peter Parker (encore un) se balade dans les environs, ce sera forcément une bonne décision de prise.

Alors qu’ils s’éloignent, leur repas en mains, à distance de la tour de l’Horloge, Peter admet être curieux de savoir si son Peter lui ressemble ou non. La réponse à cette question est vite trouvée : son interlocuteur ne ressemble à aucun des Peter qu’il a rencontrés jusqu’ici, pas plus qu’à celui de son monde.

« Il y a beaucoup de Peter Parker dans le coin, apparemment. » Il esquisse un fin sourire. « T’es le troisième que je rencontre, et tu ne leur ressembles pas. » Il marque une pause. « Tu ne ressembles pas au Peter de mon monde non plus », ajoute-t-il en laissant le moins possible deviner combien lui pèse l’absence de son meilleur ami.

Il regrette plus que jamais, dernièrement, de ne pas l’avoir dans les parages, mais il s’est fait une raison : quand croiser plus de Peter Parker qu’il ne devrait en exister, il se dit, purement et simplement, que le sien ne lui reviendra jamais. Harry suggère à Peter de s’arrêter dans un parc, sur un banc disponible, afin de pouvoir parler tranquillement tout en poursuivant leur conversation.

« Il est comment, ton Harry ? » demande le jeune homme avec curiosité, appréhendant d’ores et déjà de devoir entendre une description déplaisante, et qui viendrait lui rappeler qu’il ne devait rien attendre de ses lui alternatifs, pas plus que de lui-même.

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feat. Peter

Tout Peter Parker sera visiblement serein avec la perspective de rencontrer un grand nombre d’alter egos. Harry ne peut s’empêcher de trouver ça remarquable – remarquable sans être particulièrement étonnant. Tous les Peter ont cette personnalité forte, optimiste qui leur permet d’accepter une réalité qui inquièterait beaucoup d’autres. Ils appréhendent la situation avec légèreté et la curiosité. Pour la légèreté, Harry est capable de comprendre… en ce qui concerne la curiosité, en revanche, c’est définitivement une autre affaire… pour lui, la perspective de rencontrer un ou plusieurs autres Harry (et il va être servi, clairement), ça a le don de l’angoisser plus qu’autre chose… en même temps, pour sa part, il a toutes les raisons du monde de s’inquiéter de la présence d’autres Harry Osborn… pas parce que cela le confronterait au fait de ne pas être quelqu’un d’unique, mais parce qu’il ne veut pas se confronter aux parcours d’autres lui qui l’obligeraient à accepter de lui-même une image qui ne lui plaît pas – qui ne lui plaît pas parce qu’elle lui correspond un peu trop bien en réalité. Mieux vaut ne pas trop s’attarder sur la question…

… même si Harry ne peut pas s’empêcher de se la poser indirectement malgré tout. Une fois qu’ils sont installés dans un parc à proximité, leur hot-dog à la main, Peter accepte de lui parler un peu plus de son Harry. Visiblement, eux non plus n’a rien à voir physiquement – c’est toujours ça de pris, clairement. Pas le même visage, pas la même carrure. Comme ce Peter n’a pas le même visage et la même carrure que tous les Peter qu’il a déjà connus au cours de sa vie. C’est sans doute pas plus mal, mais ces considérations physiques ne veulent pas forcément dire grand-chose malgré tout… car mentalement, Harry voit très bien quels sont les points communs entre tous les Peter qu’il a rencontrés, et ça, il ne l’oublie clairement pas.

« Un petit côté obscur ? » répète Harry, mal à l’aise, alors qu’en une phrase, Peter semble confirmer toutes ses inquiétudes les plus fortes.

Est-ce qu’il est surpris pour autant ? Pas vraiment… tout Harry Osborn qui se respecte a probablement sa part d’obscurité… et peut-être cette dernière est-elle plus ou moins inquiétante selon les Osborn. Dans son cas, il ne parlerait pas de « petit » côté obscur. Le sien est gigantesque, monstrueux. Le sien est capable de tout raser sur son passage. Le sien peut détruire des vies. Le sien a détruit des vies.

« Qu’est-ce qu’il a fait ? »

Il sait d’avance qu’il ne va pas apprécier la réponse à cette question. Il le sait, et pourtant, il insiste, ce même s’il voit que c’est un sujet que son interlocuteur n’a pas franchement envie d’aborder, comme il le lui prouve en détournant les yeux, avec ce qui ressemble à de la gêne. Peut-être est-ce le signe qu’ils ne doivent pas creuser le sujet plus loin, mais Harry est incapable de s’en empêcher. Il a besoin de savoir, c’est tout. Il a besoin de savoir à tout prix.

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feat. Peter

Harry sait que sa question était diablement indiscrète, mais tant pis… Il a besoin de savoir, et il ne pense pas que l’on puisse lui reprocher d’être à ce point curieux des méfaits éventuels de ses alter egos, venus d’univers parallèles au sien… Ce pourrait être une manière de se rassurer sur sa propre intégrité mentale, mais ce n’est pas vraiment de cela qu’il est question, en vérité. Non, Harry est à la fois armé d’une curiosité morbide, et de la conviction qu’il n’a pas encore appris le pire concernant ses alter ego… Harry ressent le besoin d’être confrontée à la pire version de lui-même. Au temps que met son interlocuteur à répondre, le jeune homme comprend assez vite que la suite ne va pas être simple à entendre… mais cela aussi, après tout, c’était on ne peut plus prévisible.

Peter tente de préparer le terrain, Harry le sent tout de suite. C’est compliqué… sans surprise, c’est toujours compliqué… Quant au fait que Peter ait vraiment la moindre part de responsabilité dans tout ça, Harry devine d’avance que Peter est surtout en train d’agir comme le ferait n’importe quel Peter Parker… il voudra assumer une responsabilité qui n’est pas la sienne, faute de savoir admettre qu’il n’est pas toujours possible de sauver tout le monde. Non, Peter n’est probablement pas responsable de ce qui est arrivé à son Harry ou de ce qu’il a fait… Mais si ce Peter est comme tous les autres, il ne s’en laissera probablement pas convaincre pour autant.

Il lui parle alors de la mort accidentelle de son père lors de l’un de leurs affrontement… Le cœur de Harry manque un battement… Il se rappelle, inévitablement, de ce qu’il avait lui-même ressenti au moment de croire son père mort, dans son autre vie, par la faute de Peter, avant de comprendre sa méprise… trop tard pour ne pas avoir fait de sérieux dégâts au préalable… Si Harry devine que son histoire et celle de cet Harry demeurent différentes par bien des aspects, il s’y reconnaît aisément. Tous les Peter et tous les Harry du monde auront-ils également entretenu ce rapport étrange mêlé de haine et de fraternité, et qui ne pouvait naturellement que s’achever dans la violence ? A ce stade de la conversation, le jeune Osborn n’a plus vraiment de doute à ce sujet.

« Cette fille, c’était MJ, pas vrai ? » l’interroge Harry avec une esquisse de sourire plus nostalgique qu’amusée en songeant à son ex petite amie, dans une autre vie, qui était pas la suite devenue la petite amie de Peter. Elle avait été quelques fois une source de conflits et de réconciliation entre eux… pas la plus grande, cependant. Harry pousse un soupir. « Je suis sincèrement désolé. Ça a dû être… horrible à vivre. »

Son meilleur ami aussi avait probablement dû souffrir terriblement de sa propre mort… Harry ne le saura certainement jamais… comme il en vient à songer que jamais il ne reverra le Peter de son monde.