Les fêtes de Noël avaient été mouvementées. Pourtant, quand j'étais à l'orphelinat, je me sentais mieux. Ces enfants n'avaient pas eu de chance. J'aimais parfois me morfondre disant que j'avais perdu telle personne ou déçue telle autre. Néanmoins, chaque fois que j'étais ici, j'étais incapable d'y penser, car face à moi, il y avait souvent des gamins qui pouvaient prétendre à bien plus de compassion que moi. En somme, malgré toutes mes pertes, j'avais de la chance. J'ai perdu mes parents, mais d'autres ont pris soin de moi avec une dévotion admirable. Je n'avais plus oncle Ben ou tante May. Mais j'avais été aimé comme peu de personne ont pu être aimé. Je n'avais pas pu sauver mon meilleur ami, mais j'ai pu guider un autre au travers de ses tourments et il m'a sauvé. Je n'ai pas été à la hauteur d'être le seul héros de New-York, mais un nouveau a émergé et a fait de moi un nouveau Spider-Man. J'ai été séparé de mes proches avec la lune rouge, mais j'avais fait de nouvelles rencontres. Bien sûr, ces rencontres ne remplaçaient pas mes anciens amis... Cependant, je n'étais pas seul. Contrairement aux enfants qui avaient été séparés de leurs parents. J'avais perdu mes pouvoirs, mais... En fait, il n'y avait pas de mais, ce point-là était positif à lui tout seul. J'étais faible, mais chaque fois que j'ai eu besoin d'être protégé, quelqu'un est venu me sauver. Donc, pour chaque raison où j'aurai pu me morfondre, me plaindre de mon sort, j'avais une raison de me réjouir. C'était pour cette raison précise que j'étais ici. Pour moi aussi en donner une aux enfants. Je n'étais pas un héros, mais donner un coup de main, un sourire, donner quelques heures de mon temps... Ça, je savais le faire. C'était à la portée de tout le monde, même de la mienne. Or, si on pouvait faire du bien autour de soi, alors c'était notre devoir de le faire. 


Les gamins étaient heureux, car même si les fêtes étaient passées, une kermesse était organisée. Une façon de prolonger cet esprit festif et d'éviter de retomber directement dans la morosité. Cela avait son petit succès. Je m'étais occupé des jeux nécessitants quelques connaissances en chimie et en physique. J'avais même fait un atelier volcan, tôt le matin. Bon, certains étaient trop jeunes pour comprendre ce qu'on avait fait, mais ça ne les avait pas empêcher d'apprécier de voir la lave jaillir de leur construction. L'innocence d'un enfant... C'était si mignon. D'autres s'étaient occupés de stand de nourriture, de jeux... On avait décidé que du tir à la carabine n'était pas une bonne idée pour une kermesse d'un orphelinat. On l'avait remplacé par un dunk tank. Un des surveillants était assis sur une chaise et si quelqu'un touchait la cible, ce dernier tombait dans l'eau grâce à un petit mécanisme que j'avais bidouillé. Étrangement, beaucoup d'enfants voulaient s'amuser à le faire tomber. C'était assez amusant. Vers la fin de la matinée, j'étais pris par le stand de barbe à papa, bien trop populaire pour la santé des consommateurs, mais vu leur sourire, je ne me sentais pas le cœur de leur faire la moindre critique. Certains étaient d'ailleurs inquiets à la vue de mon visage. Petit héritage de mon Noël un peu mouvementé, tout le côté droit bleuté. Cela avait valu le coup. Sans doute ? Le temps nous le dirait. Bref, inutile de trop y penser. De toute façon, ce qui était fait était fait. La seule chose que je pouvais dire, c'était que j'étais tombé dans les escaliers. Bizarrement, je comprenais pourquoi cette phrase ne fonctionnait jamais. Elle n'était pas crédible. Après cette excuse je disais tout simplement que tout le monde n'avait pas l'esprit de Noël. J'avais le droit à un sourire compatissant. À croire que c'était quelque chose d'assez commun. Ce qui relevait du tragique d'ailleurs. 

Alors que j'avais passé le cap des "beaucoup trop de barbe à papa vendues", un visage que je connaissais très bien s'avança vers moi d'un air si heureux qu'il en était contagieux. Sans que je ne le remarque avant même que le moindre son ne sorte de ses lèvres, les miennes commençaient déjà à s'étirer vers le haut. Je ricanais alors qu'il me disait que j'étais partout. Ce n'était pas vrai. J'aurai aimé, bien évidemment, mais ce n'était pas possible. Même Doctor Strange ne pourrait pas être partout à la fois. Quoi que lui son partout... Ce n'était sans doute pas le même que le mien. Bref, j'indiquais à Pete les cartons dans le fond. « Salut Pete. Tu peux m'aider en sortant le sucre des cartons ? Le diabète a besoin de mon aide pour se rependre un peu plus. » Je gloussais. Étais-je devenu un super vilain ? Si oui quel nom est-ce que je porterai ? Captain Diabet ? Sugar Man ? La question des fêtes vint sur le tapis dès le départ. Erm... Comment expliquer sans expliquer ? Je n'avais pas trop envie d'entrer dans les détails de mon Noël, j'avais encore besoin de temps pour y réfléchir. « Disons juste que j'ai eu un Noël... Mouvementé. Mais rien de méchant, tout le monde va bien. La princesse que je suis a été sauvée ! Donc d'une certaine façon... J'ai sans doute passé le meilleur Noël depuis longtemps. » Car d'habitude, c'était moi qui étais de sortie à Noël et je me faisais souvent bien amoché la tête sans qu'on ne vienne me sauver. Rien que d'y penser, je sentais le regard inquiet de MJ se poser sur moi... Le sourire que j'avais jusque-là diminua un peu en intensité. Non, vraiment... Depuis que j'étais arrivé ici, les fêtes de fin d'année étaient bien tranquilles. Et je m'étais senti utile l'autre jour. Oui. C'était positif ! « Et toi alors ? Visiblement, tu as bien mangé... Je rigole ne me lance pas le sucre à la figure ! »