[Terminé] Quand on réalise enfin qui on est ft. Clarke

Clarke, comme presque tous les jours, se trouvait à l'hôpital. C'était sans doute l'endroit où elle passait le plus de temps, avec son appartement bien sûr. Elle était encore étudiante, elle se contentait de suivre les médecins la plupart du temps, n'étant pas autorisé à faire grand chose. Pas encore. Elle espérait que les choses changeraient vite, tant elle se lassait de cette situation. Puisqu'elle n'avait encore choisi aucune spécialité, elle se retrouvait dans différents services, dans différentes situations. Aujourd'hui, elle devait accompagner des médecins qui avaient été appelés pour un accident de la route. De ce qu'on lui avait dit, il s'agissait d'un homme en moto qui avait eu un accident avec une voiture. Silencieuse, elle attendait d'arriver sur le lieu de l'accident. Elle était toujours angoissée avant de découvrir ce genre de scène, se demandant sur quelles horreurs elle allait tomber. Elle en avait pourtant vu des horreurs dans son ancienne vie, mais elle n'était pas devenue insensible pour autant.

La route fut brève et rapide, comme à chaque intervention. Il ne fallait pas être du genre à mal supporter la route ou la vitesse dans ce genre de situation. Le médecin en charge demanda à Clarke de bien observer, mais de ne rien faire si on ne lui demandait rien. En effet, elle avait cette sale habitude de ne pas obéir et de ne vouloir en faire qu'à sa tête, ce qui risquait de lui poser de gros problèmes un jour ou l'autre. Elle promettait de se tenir à carreaux, s'avançant avec les autres médecins vers la victime. Elle écoutait attentivement toutes les informations qu'on leur donnait, s'approchant de la victime. Comme les autres, elle s'agenouillait près de cette dernière. Les médecins posaient les premières questions, vérifier l'état de conscience de la victime, faisaient les premiers examens pour connaître son état... Clarke restait silencieuse et inutile, observait comme elle devait le faire à chaque fois, se contentant d'aider en donnant ce qu'il fallait si c'était nécessaire. Puis, elle fut distraite lorsqu'elle croisa le regard de l'homme. Ses yeux étaient remplis de larmes. Il était éveillé, mais ne parlait pas. Sans doute était-il choqué, ne comprenait-il pas ce qui était en train de lui arriver ! Ou peut-être était-ce à cause de ses blessures ? Après tout l'accident avait été d'une sacré violence. Cela devait être affreux. Clarke, sans réfléchir, était venue mettre sa main sur celle de la victime. A défaut de pouvoir faire quelque chose, de pouvoir l'aider, de pouvoir le soigner, elle pouvait toujours essayer de le rassurer. « ne vous inquiétez pas, ça va aller, je vous le promets ! » souffla-t-elle, sans savoir s'il l'entendait réellement ou s'il faisait suffisamment attention pour l'écouter. Après tout, de voir autant d'agitation pouvait le stresser davantage et ce n'était pas une bonne chose.

Clarke se sentait si inutile. Pourquoi n'avait-elle aucun droit ? Elle ne pouvait prendre aucune décision, elle n'avait pas le droit de réagir comme son instinct le lui dictait. Elle n'était là que pour observer et obéir bêtement. Ce monde n'était décidément pas fait pour elle. Elle avait déjà fait bien pire dans son monde, elle avait déjà vu bien plus grave... Et pourtant, elle ne pouvait rien faire, contrainte d'attendre le moindre petit ordre, la moindre petite autorisation ! Agenouillée auprès de la victime, Clarke avait rapidement oublié l'agitation qui les entouraient, elle n'écoutait même plus les médecins, se concentrant sur la victime alors qu'elle avait croisé son regard apeuré.

Alors puisqu'elle ne pouvait pas l'aider en le soignant, elle essayait de l'aider en lui parlant et en le rassurant. Elle déposa l'une de ses mains sur celle de l'homme blessé. S'il pouvait se concentrer sur elle et sur sa voix, peut-être qu'il oublierait un peu sa douleur ou sa part. Il tenta de parler, mais ce fut un échec. Clarke pressa un peu plus sa main sur celle de la victime, ajoutant doucement un : « chut, n'essayez pas de parler.. » inutile qu'il se fatigue ou qu'il puise dans le peu de forces qu'il devait avoir. Clarke restait concentrée sur l'homme, sourire rassurant aux lèvres, sans plus du tout prêter attention aux alentours. Ses supérieurs pouvaient lui dire ce qu'ils voulaient qu'elle n'y ferait pas attention. De toutes façons, elle en avait marre de se contenter de répondre à des questions, de se contenter d'actes qu'elle savait faire depuis une éternité, de se contenter d'observer... L'homme reprit alors la parole. Elle ne comprenait pas facilement, mais elle réussissait à comprendre qu'il parlait de sa fille. Il n'y avait aucun enfant impliqué dans cet accident, alors soit il délirait, soit sa fille était en sécurité, autre part. Mais surtout, Clarke remarqua ces larmes, et elle ne pouvait pas rester là à ne rien faire. D'autres médecins s'occupaient déjà des douleurs physiques, elle s'occupait d'autre chose, elle. Il était, selon elle, tout aussi important de le rassurer. « calmez-vous, je suis certaine que votre fille est quelque part, en sécurité. » souffla-t-elle, pour le rassurer. Aucun besoin pour lui d'avoir un stress supplémentaire. « on va vous soigner et vous pourrez la retrouver très vite. » assura Clarke en levant enfin les yeux vers les médecins qui continuaient leurs premiers soins avant de pouvoir l'emmener à l'hôpital le plus proche.

Clarke tentait de le rassurer comme elle le pouvait. Elle aurait aimé faire plus. Elle aurait aimé soigner ses douleurs physiques. Sauf qu'elle en était incapable. Elle n'en avait pas le droit et elle n'avait, sans doute, même pas les capacités pour le faire. L'homme répondait, bien que Clarke lui demandait de ne pas le faire. Il devait économiser ses forces. Parler allait le fatiguer inutilement. Clarke essayait de le rassurer quant à son état et quant à sa fille lorsque ce dernier l'évoqua. Il n'y avait aucun enfant sur le lieu de l'accident, c'était déjà un bon point. Elle n'était pas impliquée et était sans doute en sécurité, quelque part. Il lui fallait alors guérir au plus vite pour la retrouver, mais il pouvait être rassuré de la savoir en sécurité. La main toujours posée sur celle de l'homme blessé, elle reprit lorsqu'il assura que sa fille avait besoin de lui. « Elle a besoin d'un papa en pleine forme et c'est ce qu'on va faire, on va lui rendre un papa en pleine forme. » si ça pouvait le convaincre de rester calme et de ne pas s'épuiser davantage, elle le tentait. Et puis, en même temps, ce n'était pas un mensonge. Dans un tel état, il ne pourrait rien pour sa fille. Il fallait qu'il se soigne et qu'il guérisse.

Clarke se releva, se poussant légèrement au passage tandis que l'homme était soulevé pour être transporté dans l'ambulance. Clarke essayait de suivre le rythme, se désintéressant de l'homme quelques secondes pour essayer d'écouter les médecins parler de l'homme et de son état. Apparemment ce n'était pas rien, mais ça elle l'avait déjà compris bien avant qu'on le lui dise. Lorsqu'elle se reconcentra sur l'homme, qui la fixait, elle entendit un mot qu'elle mit un certain temps à comprendre. Elle était loin d'être une spécialiste des différentes phobies et des noms qu'elles portaient, mais à force de réflexion, celle-ci lui était revenue. Il ne supportait pas d'être touché. Alors elle, qui avait posé sa main sur lui dans le but de le rassurer, c'était totalement planté. Et tous ces médecins qui s'affairaient en le touchant, ça devait être insupportable pour lui. « Je suis désolée... » souffla-t-elle pour excuser son geste, pourtant innocent parce qu'elle ne pouvait pas savoir. Puis elle se détourna de l'homme un instant pour parler à l'un des médecins et expliquer ce qu'il venait de dire. Mais le médecin semblait dire qu'ils n'avaient pas le temps de prendre ça en considération. Évidemment, ils ne pouvaient s'empêcher de le toucher pour le soigner, Clarke n'était pas stupide, mais peut-être pouvaient-ils éviter de tous s'activer en même temps, de faire attention ? Elle n'en savait rien... mais peut-être pouvaient-ils faire quelque chose. « Nous allons vous conduire à l'hôpital pour vous soigner et vous remettre sur pieds. Vous voulez que je prévienne quelqu'un pour votre fille ? » Demanda-t-elle après un temps, tandis que le véhicule démarrait pour le conduire à l'hôpital.

Clarke tentait tant bien que mal d'être présente pour cet homme. Les médecins s'occupaient de ses blessures physiques, elle, elle tentait de soulager ses craintes. Ce n'était pas simple. Il était sous le choc, la douleur et le bruit autour de lui ne devaient pas aider. Pourtant il avait été capable de parler de sa fille. Fille pour qui il avait peur, ce que la jeune femme comprenait. Évidemment. Alors elle lui demanda s'il y avait quelqu'un pour s'occuper de cette petite. D'abord pour le rassurer, puis l'information était importante s'il arrivait quelque chose à cet homme. Elle enregistrait l'information mentalement lorsqu'il prononça un nom inconnu pour Clarke. Elle retiendrait l'information parce que c'était important et elle tenterait de contacter cet homme dès qu'elle en aurait l'occasion pour le prévenir de tout ce qui était en train de se passer.

Ils étaient désormais dans l'ambulance qui fonçait en direction de l'hôpital. Il n'y en avait pas pour très longtemps. L'hôpital n'était pas bien loin, alors il devait résister jusque là, au moins. Il était plus simple de le soigner et de prendre soin de lui une fois là-bas, avec tout le matériel, la place et le personnel. Mais juste avant d'arriver à l'hôpital, l'homme fit un arrêt cardiaque. Clarke s'éloigna un peu, n'étant là que pour observer, laissant les médecins faire leur boulot. Tout se passa très rapidement. En quelques minutes à peine, moins d'une dizaine. Ils avaient réussi à le ramener. Clarke soupira discrètement de soulagement. Puis ils l'emmenèrent hors de l'ambulance pour le mettre dans une pièce et lui procurer tous les soins dont il avait besoin. Clarke fut envoyée ailleurs pendant un temps et ce n'est qu'un certain temps après qu'elle put aller retrouver l'homme afin de prendre de ses nouvelles. Son état s'était stabilisé selon les médecins, et il était normalement éveillé bien qu'encore faible. « Je ne sais pas si vous vous souvenez de moi ? » demanda-t-elle. Il n'était pas impossible vu son état au moment de la présence de la jeune femme qu'il ait oublié, alors elle préférait demander. « Vous avez besoin de quelque chose ? » C'était étrange, si ce n'était pas nécessaire, elle revenait rarement vers un patient qu'elle n'avait vu que si peu ou à qui elle n'avait prodigué aucun soin. Pourtant, lui, elle avait envie de prendre de ses nouvelles. L'accident avait été d'une rare violence et puis il l'avait touché en évoquant sa fille ainsi. Clarke n'était pas mère, du moins pas vraiment, elle savait qu'autrefois une fille comptait sur elle comme sur une mère, mais elle avait perdu les souvenirs de ce temps-là, elle n'avait le droit qu'à des morceaux qui ne l'aidaient pas à comprendre, alors elle préférait ne pas y penser.

Spoiler:

Clarke ne savait pas très bien ce qu'elle faisait ici. A vrai dire, elle ne revenait que rarement voir les patients qu'elle avait suivi, sauf pour une raison médicale, évidemment. Cette fois-ci, ce n'était pas le cas. Elle était là parce qu'elle avait été touchée par cet homme et l'inquiétude qu'il éprouvait pour sa fille. Elle voulait prendre de ses nouvelles et s'assurer qu'il se sentait mieux, même si les médecins l'avaient déjà renseigné quant à son état de son santé.

Dans un premier temps, elle demanda à l'homme s'il se souvenait d'elle. Il était totalement possible que non vu l'état dans lequel il était à ce moment-là. Il pouvait très bien l'avoir oublié et ce n'était rien. Il répondit néanmoins par l'affirmatif, alors elle continua, demandant s'il avait besoin de quelque chose. Si médicalement elle ne pouvait rien pour lui, n'ayant aucun pouvoir, elle pouvait au moins répondre à ses angoisses et ses inquiétudes ou lui tenir compagnie quelques minutes s'il le souhaitait.

A sa demande, Clarke s'avança vers la petite table à côté du lit. Une carafe et un verre s'y trouvaient. Elle attrapa alors la carafe pour verser un fond d'eau dans le verre. Inutile de lui en donner plus pour le moment, elle n'était même pas certaine que ça passe. « Tenez. » dit-elle en approchant le verre de ses lèvres sans oser l'aider à relever légèrement la tête, n'ayant pas oublié qu'il ne voulait pas être touché, et sans savoir s'il avait la force de boire seul. « Vous vous sentez mieux ? » demanda-t-elle ensuite, elle ne voulait pas l'embêter avec ses questions, elle ignorait même si sa présence le dérangeait ou non. « Je ne veux pas vous déranger longtemps. Je voulais encore m'excuser pour ce que j'ai fait tout à l'heure. » lui prendre la main alors qu'il ne supportait pas ça. Bien sûr, l'étudiante n'en savait rien du tout, elle avait fait ça pour le rassurer, pour qu'il se sente mieux et en confiance, mais il avait dû faire face à quelque chose de désagréable à cause d'elle alors elle s'excusait. Rien de plus normal.

Clarke était venue surtout pour prendre des nouvelles de l'homme. Il avait eu un accident plutôt violent et ce n'était pas rien. Les médecins avaient fait de leur mieux, mais il lui faudrait plusieurs semaines avant d'être de nouveau en pleine forme. Clarke lui proposa alors son aide, peut-être avait-il besoin de quelque chose ? Il lui demanda un verre d'eau. La jeune femme lui servit donc et l'aida à boire, en pensant bien à ne pas le toucher. Les mouvements de l'homme semblaient difficiles, douloureux. Il n'y avait rien de surprenant à cela, en réalité. Il venait de vivre une véritable épreuve, quelque chose qui aurait pu finir d'une bien plus triste façon. Mais cet homme ne semblait pas du genre à abandonner, il se battait pour sa fille, Clarke l'avait rapidement compris sur les lieux de l'accident.

Clarke lui demanda ensuite s'il se sentait mieux. Les médicaments devaient sans doute faire effet et il devait se sentir mieux. Un minimum du moins. Clarke jugea ensuite qu'était venu le moment où elle devait s'excuser pour ce qui s'était passé sur le lieu de l'accident. Elle n'aurait pu l'éviter puisqu'elle ne le savait pas, mais elle tenait à s'excuser de lui avoir fait vivre une chose qu'il détestait. Mais l'homme ne semblait pas d'accord. Il tenait plutôt à la remercier. Elle n'avait rien fait d'exceptionnel, juste son métier, comme il le disait lui-même, et juste ce que n'importe quel être humain devrait faire dans ce genre de situation : être présent et soutenir. Elle n'ajouta rien, se contentant d'un sourire pour le remercier. Clarke ne savait quoi ajouter, imaginant qu'il était sans doute préférable de le laisser dormir et se reposer, mais il reprit la parole, se présentant. La jeune femme avait du temps à lui accorder, un coup d'oeil sur l'horloge lui avait déjà indiqué il y a plusieurs minutes que sa journée de travail était terminée. A vrai dire elle connaissait déjà son identité, mais elle ne releva pas, se présentant à son tour. « Clarke Griffin. » se présenta-t-elle. « Je peux... rester un peu ici avec vous si vous le souhaitez ? Je sais que ce n'est pas amusant de rester seul ici. » elle avait l'impression qu'il n'avait pas envie de rester seul, mais peut-être se trompait-elle. Dans ce cas-là, il suffirait simplement qu'il lui dise et elle sortirait, évidemment. Mais il n'était pas toujours simple de supporter la solitude après un accident ou une opération dans ces chambres bleues et blanches, vides et tristes.

Clarke ignorait pourquoi elle était là, à prendre des nouvelles de cet homme. Pourtant, elle était là. Elle voulait prendre de ses nouvelles, savoir si tout allait bien pour lui et s'il n'avait besoin de rien. Ils se présentèrent donc rapidement et l'homme en profita pour glisser un compliment qui fit sourire, amusée, la jeune femme. « J'ai aussi beaucoup de défauts qui peuvent faire de moi un médecin affreux. » répondit-elle donc pour plaisanter. A vrai dire nombre de ses défauts pouvait vraiment poser problème, à commencer par son impatience et son envie de tout faire vite et seule. Sauf qu'il ne s'agissait que d'une plaisanterie et pas d'un exposé sur les principales qualités et les principaux défauts de Clarke en lien avec son métier, donc elle se contenterait de ça.

Si Clarke venait de terminer sa journée, elle n'avait aucun problème à rester là pour discuter avec l'homme. Il était seul et sans doute un peu perturbé par tout ce qui venait de lui arriver. Puis elle, elle n'avait rien de spécial à faire. Personne ne l'attendait. Personne n'était là pour elle. Et elle n'avait rien de spécial à faire. A la réponse de l'homme qui ne semblait pas contre le fait que Clarke reste, elle attrapa l'une des deux chaises de la chambre pour l'approcher du lit et s'y asseoir. Même si ce n'était que pour quelques minutes, ce n'était rien et c'était toujours plus agréable pour discuter. « C'est normal, ce n'est pas simple ce que vous venez de vivre. Il est normal d'avoir besoin de quelqu'un. » elle tentait toujours de le rassurer, même si elle pensait ce qu'elle disait, évidemment. « Votre fille va bien, soyez rassuré. Elle a juste besoin que son papa se repose et lui revienne en pleine forme. » Plus facile à dire qu'à faire, elle le savait et puis elle lui avait déjà dit, mais ça ne faisait pas de mal de répéter. Si elle n'était pas mère, elle avait la sensation de l'être ou d'être tout comme une mère pour Madi. Cette fille qu'elle voyait, sans la connaître. Elle ne se souvenait de presque rien. Elle ressentait simplement le vide que provoquait son absence depuis son arrivée dans cette ville. « Quel âge a-t-elle ? » Elle ignorait si discuter de la petite était une bonne idée, mais peut-être que cela pouvait lui faire du bien. « Si vous préférez ne pas parler d'elle, je comprends, bien sûr. » précisa-t-elle tout de même.