(Terminé) Les moments spéciaux d'aujourd'hui sont les souvenirs de demain ▿ Mary.

Attablée à l'une des tables extérieures de ce café, Jasmine observait avec attention les rues alentours. Son regard se posait, tour à tour, sur les rues et sur sa montre. Il n'y avait aucune urgence, mais elle avait hâte de retrouver Mary, une bénévole du centre associatif où elle travaillait. Les deux femmes s'étaient rencontrées ainsi et avaient fini par créer des liens d'amitié. Elles se voyaient très peu en dehors de l'association, chacune vaquant à ses nombreuses occupations - d'autant que Mary avait un enfant, ce qui demandait un temps considérable, Jasmine en avait conscience - mais elles avaient décidé de se voir pour boire un café et discuter dans un cadre différent. Elles s'étaient donc donné rendez-vous au milieu de l'après-midi, dans ce café. Mary n'était pas encore en retard, Jasmine était simplement arrivée avec quelques minutes d'avance, mais déjà la jeune femme s'impatientait et s'agitait pour chercher son amie des yeux.

Au départ, elle n'avait pas voulu commander, mais au bout de cinq petites minutes, la jeune femme avait commandé un premier café, histoire de patienter. Il n'était pas fréquent pour Jasmine de s'autoriser ce genre d'activité. Son arrivée ici avait été synonyme de bien des choses, mais pas vraiment de se faire des amis et d'avoir une vie sociale des plus actives. Elle en avait quelques-uns, dont certains avec qui elle s'entendait très bien, mais elle les voyait finalement assez peu - vieille habitude d'une vie passée presque seule, sans aucun doute. La solitude se faisait ressentir parfois, mais sa vie était bien remplie et elle trouvait toute sorte de choses à faire pour ne pas trouver le temps trop long.

Alors qu'elle se perdait dans ses pensées déprimantes, son regard avait enfin croisé celui de Mary. Aussitôt, un sourire avait pris place sur son visage. Heureuse de la voir, Jasmine s'était levée pour accueillir son amie correctement. « Je suis heureuse de te voir, Mary. » Avait-elle annoncé après l'avoir saluée, tout en se réinstallant. « Je me suis permis de commander quelque chose en t'attendant, je suis arrivée avec un peu d'avance. » S'excusait-elle, se trouvant tout à coup bien impolie de ne pas avoir attendu. « Alors, comment vas-tu ? » Enchaîna-t-elle presque aussitôt, impatiente d'entendre Mary lui raconter ce qui avait bien pu se passer pour elle ces derniers jours.

Dans ce monde, Mary n’avait que peu d’ami. Ayant beaucoup de mal à accorder sa confiance, elle préférait côtoyer peu de monde, ainsi, personne ne pouvait la trahir. Parmi ses quelques amis de confiance, il y avait Sophie, sa voisine. La jeune femme était parfois maladroite et enfantine, mais Mary savait qu’elle pouvait être sérieuse quand il le fallait et elle savait qu’elle pouvait lui accorder toute sa confiance. Il y avait également Jasmine. Une jeune femme qu’elle avait rencontrée dans une association luttant pour le droit des femmes. À force de se croiser et de discuter, les deux femmes avaient fini par sympathiser et développer un lien d’amitié. Mary tenait à cette amie, mais elle ne la connaissait pas depuis assez longtemps pour lui faire pleinement confiance. Avec le temps, si tout se passait bien, il était fort possible, voir même fort probable, que l’ancienne reine, finisse par lui faire confiance à elle aussi. Mais cela risquait de prendre beaucoup de temps. Après tout, les deux femmes ne se voyaient que peu souvent, même si Mary se sentait bien en sa présence.

Puisqu’elles s’entendaient bien à l’association, Jasmine avait proposé à l’ancienne reine d’Ecosse de venir prendre un café pour discuter un peu, dans un cadre différent de celui de l’association. Mary avait eu cette habituelle hésitation, mais avait finalement accepté. La brune avait commencé à reprendre une vie plus ou moins normal. Elle avait compris que sa cousine n’était peut-être pas un réel danger pour elle, plus dans ce monde en tout cas. Enfin, c’est ce qu’elle avait cru pendant quelques mois. En effet, depuis plusieurs semaines, l’ancienne reine se méfiait de nouveau. Avec l’arrivée d’Alexander dans la vie d’Elizabeth, Mary craignait les représailles de sa cousine. Elle craignait un regain de courage qui la conduirait à se former sa propre armée, capable de combattre Mary et peut-être de causer sa perte. Alors la moindre sortie, seule sans protection devenait vite dangereuse à ses yeux.

Malgré tout, elle avait accepté de venir voir Jasmine, tentant de se convaincre qu’elle ne craignait rien en présence de tout se monde. Et puis elle avait appris à se défendre à la cour de France et avait de quoi se défendre sur elle.

En arrivant au lieu de rendez-vous, Mary avait aperçu Jasmine, installée à une table, un café à la main. La brune avait cru, l’espace d’un instant, être en retard, avant de jeter un coup d’œil à l’horloge qui indiquait qu’elle était tout juste à l’heure. L’ancienne reine s’était avancée vers Jasmine, un sourire aux lèvres, contente de la voir. « Moi aussi, je suis heureuse de te voir. » Cette sortie lui faisait réellement du bien. Tout comme Jasmine, Mary s’installa sur l’un des sièges se trouvant juste en face de son amie. « Il n’y a aucun problème. » Ajouta-t-elle, un sourire aux lèvres. Si elle était arrivée en avance, elle avait bien eu le droit de commander un petit quelque chose pour l’aider à patienter. D’ailleurs, Mary ne tarda pas à appeler un serveur pour lui demander d’avoir un café elle aussi. « Je vais bien et toi ? » Aussi bien que possible en tout cas.

La vie de Jasmine n'était pas passionnante, ni même emplie de mille activités différentes, mais elle tentait de faire au mieux pour se plaire dans ce nouveau monde. Ses journées étaient plus que bien remplies, et c'était déjà une très bonne chose, elle n'avait pas le temps, au moins, de s'ennuyer. Elle passait énormément de temps à l'association ou à s'intéresser à la politique de cet endroit. Il y avait tellement à apprendre, à assimiler, à comprendre. Si un jour elle se lançait en politique - et le si devrait davantage être un quand, en toute franchise - elle devait savoir où elle mettait les pieds et comment les choses fonctionnaient ici. Mais cette fois-ci, il n'était ni question d'association, ni question de politique. Non, cette fois-ci, elle tentait d'avoir une vie personnelle un peu plus développée que ses rares échanges au travail. Alors, Jasmine avait proposé à l'une des femmes qui travaillaient parfois avec elle, et avec qui elle s'entendait plutôt bien, de boire un café. Ce n'était pas grand-chose, mais c'était déjà ça. Il fallait bien commencer quelque part après tout.

Arrivée en avance, la jeune femme avait commandé un café et avait commencé à réfléchir à un peu tout et n'importe quoi en attendant l'arrivée de son amie. Amie qui ne tarda pas à arriver. Aussitôt à sa hauteur, la jeune femme s'était empressée de la saluer et de prendre de ses nouvelles. Elle était sincèrement heureuse de la voir. C'était si rare qu'il fallait en profiter. Puisque Jasmine avait déjà commandé quelque chose en attendant son amie, Mary appela un serveur pour commander à son tour. Les choses débutaient tranquillement, les deux femmes s'intéressaient l'une à l'autre en prenant des nouvelles, comme le feraient n'importe quelles amies qui se croisaient. « Pareil de mon côté. » Sa vie n'était pas incroyable, elle était toujours aussi loin des gens qu'elle aimait, mais globalement, elle allait bien - quand bien aller, après tout, s'il fallait toujours prendre en compte ces détails, qui n'en étaient pas ? « Tout se passe bien pour toi ? » Jasmine n'était certainement pas la femme la plus douée pour faire la conversation - il n'y avait même aucun doute là-dessus - mais elle essayait. « Tu me sembles préoccupée ces derniers temps. » Lança-t-elle, curieuse, et pour l'inciter à se confier si elle le souhaitait - et elle comprendrait parfaitement qu'elle ne le veuille pas. Après tout, elles se connaissaient encore bien peu, peut-être, pour se faire des confidences. Peut-être était-il préférable, pour l'instant, de rester sur une conversation plus en surface et moins personnelle ?

Est-ce que tout se passait bien pour Mary ? Pouvait-elle répondre sincèrement à cette question ? Non, tout ne se passait pas bien pour elle. L’ancienne reine avait cru pouvoir vivre plus tranquillement durant un temps. Elle avait cru que sa cousine n’était peut-être plus un danger pour elle, ni pour son enfant. Même si elle était restée prudente, elle l’avait sincèrement cru. Après être retournée dans son monde pour quelques heures. Après avoir parlé avec Elizabeth comme elle l’avait fait. Après avoir conclu un accord, une alliance. Mary avait pensé qu’une paix entre les deux femmes étaient possibles. Elle l’avait déjà pensé par le passé, à chaque fois que les deux femmes s’étaient retrouvées à devoir faire front ensemble pour se sortir des situations dangereuses dans lesquelles elles étaient mises. Mais ce retour dans un passé qui n’était pas vraiment le leur, avait fait comprendre à Mary que les deux cousines ennemies, pouvaient, avec le temps, devenir autre chose. Elle avait cru pouvoir vivre une nouvelle vie, loin des machinations, des complots et des méfiances. Mais voilà. Pendant que Mary avait eu ces doux espoirs, Elizabeth, elle, montait une armée contre elle. L’Anglaise avait profité d’une baisse de vigilance pour reprendre le dessus. Mary en était certaine. Elle n’avait aucune véritable preuve, mais elle connaissait Elizabeth, elle savait que tout ce qu’elle désirait, c’était d’avoir la tête de sa cousine une fois encore. Elizabeth reprenait peu à peu confiance, elle était doucement en train de refaire sa vie, de se trouver de nouveaux alliés. Il n’y avait aucun doute à avoir, si Elizabeth osait se comporter ainsi, c’était parce qu’elle savait qu’elle finirait, tôt ou tard, par avoir la tête de sa cousine. Alors, oui, Mary était bien préoccupée ces derniers temps. L’idée de mourir une fois encore, l’idée de perdre son enfant à nouveau, oui tout cela la travaillait. Mais malheureusement, Jasmine n’était pas une amie assez proche pour entendre de telles confidences de la bouche de Mary. « Oui, tout se passe bien pour moi. Quelques petits soucis familiaux, rien de plus, ne t’en fais pas. » C’étaient bien plus que des petits soucis familiaux, mais c’était ce qui se rapprochait le plus de la vérité. « Mais je suis certaine qu’être ici, en ta compagnie, me fera penser un peu à autre chose. » Ajouta-t-elle un sourire aux lèvres. C’était en partie vrai. Mary ne pouvait pas totalement oublier ses problèmes avec Elizabeth, mais discuter avec Jasmine et se trouver dans un endroit comme celui-ci, ça ne pouvait lui faire que du bien.

Jasmine appréciait Mary parce qu'elle lui semblait être une personne agréable, à l'écoute, dévouée à ses amis et aux causes qui lui tenaient à coeur. Elles ne se connaissaient pas encore beaucoup, mais elle pressentait qu'elles pouvaient devenir de véritables amies. Et Jasmine avait besoin de véritables amis. Longtemps - pour ne pas dire toujours - la jeune femme avait vécu seule, isolée dans le palais de son père, protégée de l'extérieur. Aujourd'hui, elle était libre. Libre d'être celle qu'elle voulait. Libre de faire sa vie comme elle l'entendait. Libre d'avoir des proches qu'elle aimait et de se créer une famille. Sauf que ce n'était pas aussi simple que cela. Il ne fallait pas juste vouloir pour avoir. La vie serait bien facile, dans ce cas.

Alors, Jasmine faisait des efforts pour se lier avec d'autres personnes qui lui paraissaient agréables. Mary en faisait partie. Il était question, désormais, d'apprendre à être une vraie bonne amie. Il était question de prendre ce café, de discuter, de rire ou de se confier, peut-être ? Qu'étaient-elles censées faire lorsqu'elles se parlaient si peu et se connaissaient si peu ? Alors, bien sûr, avant d'être proches, il fallait passer par ces étapes, mais était-ce déjà le moment de lui dire qu'elle semblait préoccupée et de la questionner à ce sujet ? Un peu tôt, peut-être ? Pas encore assez proches, n'est-ce pas ?

La réponse de Mary le lui confirmait. Cette dernière assurait que tout allait bien, qu'elle n'avait que quelques petits soucis familiaux. C'était peut-être la vérité, Jasmine ne pouvait rien en savoir, mais elle sentait bien que la raison donnée était aussi vaste pour éviter que Jasmine ne pose trop de questions, ne soit trop curieuse. « J'espère que tout ira mieux pour toi, dans ce cas. » Une façon de lui dire qu'elle la soutenait, mais qu'elle comprenait qu'il n'était pas nécessaire d'insister. Mary avait tout à fait le droit de ne rien vouloir dire. C'était son choix. « Je crains de ne pas être d'une compagnie particulièrement joyeuse, tu sais. » Souffla Jasmine, en souriant, après la réflexion de son amie. Elle n'était pas triste, mais elle n'avait pas les codes, l'habitude de parler pour distraire ou pour ne rien dire. Serait-ce suffisant alors, pour lui faire véritablement oublier ses problèmes l'espace d'un instant ?

« Dis-moi, alors, comment va ton fils ? » C'était un premier pas vers une discussion normale, non ? Puis, il fallait bien discuter un peu. Elles n'allaient tout de même pas se regarder dans le blanc des yeux pendant des heures. « Et ton travail ? » Des questions banales, habituelles, presque obligatoires lors de ce type de rendez-vous, non ? C'était en tout cas ainsi que Jasmine voyait les choses - à tort ou à raison, elle n'en savait rien. Il fallait simplement un petit temps d'adaptation, puis les discussions deviendraient plus naturelles, plus spontanées, la jeune femme en était certaine.

Ces derniers temps, Mary était préoccupée. Après s’être retrouvée dans son monde durant une journée, aux côtés d’Elizabeth, Mary avait appris à lui faire confiance. Plus ou moins. Elle avait compris qu’entre elle et sa cousine, rien n’était impossible. Elle avait compris qu’une paix était possible. Alors Mary avait cru, naïvement, qu’elle allait enfin pouvoir vivre une vie normale avec son petit garçon. Elle avait même baissé sa garde. Bien évidemment, elle n’avait pas pu se résoudre à tout arrêter du jour au lendemain, elle faisait toujours suivre sa cousine, par exemple. Mais elle y mettait moins de cœur. Elle lui laissait plus de liberté, cherchait à moins en apprendre sur elle. Parce qu’elle avait essayé de passer à autre chose au fur et à mesure. Une erreur qu’elle payait aujourd’hui et qui la préoccupait terriblement. Et Mary aurait aimé pouvoir en parler. Elle aurait aimé pouvoir en parler avec Jasmine, mais elles n’étaient pas assez proches pour cela. Autant être honnête, Mary ne lui faisait pas encore confiance. Après tout, elle pouvait se servir de ses paroles contre elle. Elle était peut-être liée à Elizabeth, peut-être qu’elle tenait avec elle. Ce rendez-vous était peut-être arrangé par Elizabeth. Jasmine avait peut-être pour mission de faire parler Mary le plus possible, afin d’en apprendre le plus possible. Mary n’en savait rien, alors elle préférait rester prudente. Trop peut-être.

L’ancienne reine avait souvent eu du mal à accorder sa confiance, plus encore depuis son arrivée dans ce monde. Et depuis qu’elle s’était sentie trahis par sa cousine, elle l’était encore plus. Mais si Mary avait décidé de ne pas évoquer les soucis qui la préoccupaient, elle avait tout de même envie de passer un moment agréable en compagnie de Jasmine. Parce qu’elle avait besoin de penser un peu à autre chose. Elle avait besoin de parler, de se changer les idées. « Je te remercie. » Jasmine semblait sincère, mais Mary ne pouvait lui confier la moindre chose. Cela allait peut-être arriver avec le temps. Une fois qu’elles auraient appris à mieux se connaître. Une fois que Mary n’aurait plus à se méfier d’elle. « Ne dis pas de sottises. » Il était vrai que Jasmine n’était pas la personne la plus enjouée, mais elle était d’une compagnie très agréable. Et comment juger la compagnie de Jasmine, quand on était soit même une mauvaise compagnie ? Mary n’était plus la jeune femme souriante et pétillante qui sortait à peine du couvent. Elle avait vécu des choses qui l’avaient changée, endurcie et désormais, elle n’avait plus vraiment l’envie de sourire et de rire comme elle le faisait si bien autrefois.

« James va parfaitement bien. Il doit être en train de s’amuser et surtout, il doit être en train de profiter de mon absence pour se gaver de sucreries. » Répondit-elle un sourire aux lèvres. À chaque fois qu’elle parlait de son enfant, elle ne pouvait s’empêcher de sourire. Il était tout ce qu’elle avait dans ce monde. Il était tout ce qui comptait pour elle. « Pour le travail, c’est assez calme en ce moment. J’ai toujours des rendez-vous réguliers pour les investissements. En revanche, la salle des fêtes est un peu calme ces derniers temps. » Mary investissait sa fortune dans différentes entreprises, associations… Ce travail lui prenait pas mal de temps, entre les rendez-vous, les études de dossier… Si Mary avait une certaine aisance financière, elle se devait d’étudier les projets avant d’y investir. Il était bien évidemment hors de question d’investir dans des projets qui n’aboutiraient pas ou qui s’essouffleraient à peine ouvert. Quant à sa salle des fêtes, elle était plutôt calme en ce moment. Quelques réunions s’y déroulaient, quelques mariages s’y fêtaient parfois, mais rien de très important en ce moment.

Se faire des amis, se lier, apprendre à connaître les gens autour de soi, ce n'était pas une affaire facile. Surtout lorsque ce n'était pas quelque chose d'habituel. Surtout lorsque l'on tentait de faire tout ça avec quelqu'un d'aussi discret et distant que pouvait l'être Mary, parfois. Bien sûr, Jasmine ne pensait pas que Mary lui dévoilerait toute sa vie en quelques heures de discussions, mais elle se demandait si cette relation mènerait quelque part - une partie d'elle en était persuadée, une autre avait l'impression de foncer droit dans un mur.

Mary était secrète, elle ne se confiait pas facilement. Jasmine non plus. La déduction la plus simple et la plus rapide à faire était qu'elle cachait des choses ou qu'elle était d'une méfiance extrême - ce qui pouvait très facilement se justifier, en réalité. Jasmine comprenait donc que Mary ne se confiait pas, mais elle espérait simplement qu'elle ne s'attendait pas à ce que Jasmine se laisse particulièrement aller à des démonstrations de joie ou à la faire rire. Elle n'était pas particulièrement joyeuse, malheureusement. Elle préférait être de corvée repassage des journées entières - et elle détestait ça, pourtant - que de devoir faire rire, volontairement, les gens autour d'elle - si elle y était forcée, tout du moins - parce qu'elle se sentait vite mal à l'aise et dépourvue.

Alors, plutôt que de discuter éternellement de ce qu'elle était ou n'était pas, Jasmine la questionnait, comme le ferait n'importe quelle amie. Son fils - dont elle avait oublié le prénom - son métier... Ce qui pouvait être intéressant et discutée sur la vie de tous les jours, simplement. « Je lui en apporterai un sachet, la prochaine fois. Ou tout un panier. » Affirma Jasmine lorsque Mary évoqua son fils, qui devait profiter de son absence pour se gaver de sucreries - quoi de mieux pour un enfant que les sucreries ? Ils n'avaient que faire, eux, des richesses, de l'argent ou des diamants. Des jouets - ceux qui clignotent, ceux qui font du bruit - et des friandises, et ils étaient heureux. Le sourire radieux qu'elle avait sur les lèvres parlait pour elle et lui montrait à quel point elle aimait son fils. La grandeur de ses sentiments ne pouvait se mesurer, elle devait l'aimer plus que tout, plus que tous. Ce devait être ainsi lorsque l'on était mère, après tout, et c'était beau à voir. Ses aïeux auraient sans doute aimé la voir mère, elle aussi, mais sans Aladdin, elle ne s'imaginait pas faire sa vie et construire une famille. Alors, elle préférait chasser cette idée d'un revers de la main.

Son fils évoqué, les deux femmes parlèrent du travail de Mary. Plutôt calme, notamment pour la salle des fêtes, expliqua-t-elle. Peut-être était-ce la période qui voulait ce calme. « C'est à cause de la période, tu penses ? » La questionna-t-elle, explicitant à voix haute sa pensée. En vérité, elle n'y connaissait rien, mais elle émettait une hypothèse. « Ou cette ville, qui nous rend complètement fous, ne nous donne pas envie de fêter quoi que ce soit. » Tentait-elle de dire, en souriant. Cette ville avait le don particulier de vous faire perdre la tête. Elle vous amenait à vos pires cauchemars, elle était impossible à cartographier, se promener était devenu un exercice périlleux - les habitants devraient la faire passer à la caisse, pour tout ce qu'elle leur faisait, dommage que cela ne soit pas possible. Les colonnes des journaux regorgeaient d'articles en tout genre à ces sujets. Parfois, Jasmine découvrait ces nouveautés avec stupeur - et avec la joie de ne pas être la victime, aussi. Mais peut-être que Mary ne partageait pas ce point de vue ? Peut-être n'était-elle pas victime de cette ville ? Peut-être que son compteur, à elle, était encore à zéro ?

« L'autre jour, j'ai eu le malheur d'aller au cinéma... » Elle laissait sa phrase en suspens, un court instant, un sourire se dessinant aux coins de ses lèvres, une pointe d'amertume accompagnant son souvenir. « Je t'épargne les détails, mais cette ville a de drôles de façons de s'amuser. De mon point de vue. » Ajouta-t-elle, en jetant un coup d'oeil à l'horloge installée à l'entrée du café. L'essentiel était qu'elle s'en était sortie entière, mais tout de même. « Pour en revenir à ta salle des fêtes, parfois l'association organise des soirées, peut-être que l'on pourrait faire appel à toi ? » Ce n'était qu'une proposition, elle devait en discuter avec ses supérieurs, mais pourquoi pas, après tout ? Mary était investie, alors s'ils pouvaient lui rendre une partie de ce qu'elle offrait, en faisant fonctionner sa salle, pourquoi pas ?

Ces derniers temps, la salle des fêtes que tenait Mary n’avait pas réellement de succès. Pourquoi ? Mary ne savait comment l’expliquer. Rien n’avait changé. Et du jour au lendemain, les fêtes s’étaient faites de moins en moins nombreuses. « Je ne sais pas. » Avoua-t-elle. C’était la vérité, elle n’en savait rien. Après tout, l’an dernier, durant cette période de l’année, sa salle des fêtes était toujours très attractive. Alors il y avait peut-être une autre solution. « Peut-être aussi, en effet. » Dit-elle en souriant à son tour. Ce monde n’avait rien de joyeux ou de bon. Pas pour elle en tout cas. S’il lui avait offert le plus beau des présents en lui rendant son enfant, il lui faisait désormais vivre l’enfer. Et, elle le savait, c’était la même chose pour beaucoup d’habitants. Qui aurait envie de fêter quoi que ce soit lorsque la vie était si terrible ? Il était peut-être temps pour Mary de mettre la clé sous la porte. Sa salle des fêtes n’allait peut-être plus jamais avoir de succès, elle devait se rendre à l’évidence.

Jasmine, commença à lui raconter une anecdote, un événement qui s’était produit pour elle, alors qu’elle était au cinéma. Concluant finalement par le fait que cette ville avait de drôle de façon de s’amuser. « Sur ce point, je ne peux qu’être d’accord avec toi. » Avec tout ce que Mary avait vécu ici, elle ne pouvait pas dire le contraire. Mary s’était de nombreuses fois retrouver dans d’étranges situations, elle s’était de nombreuses fois retrouvée en danger ou obligée de faire alliance avec sa cousine. Et rien de tout cela ne l’avait amusé, contrairement à ce monde, sans doute. « Oui, bien évidemment. Ça me ferait vraiment plaisir d'accueillir vos soirées dans ma salle. » Et puis ça pouvait l’aider à relever la tête, l’aider à ne pas fermer et à ne pas abandonner ce qu’elle aimait faire. « Merci d’essayer de m’aider. » Mary était sincère. Ce n’était pas l’idée de ne pas gagner d’argent qui l’attristait, c’était simplement le fait de ne plus pouvoir organiser de soirée, lui rappelant ce qu’elle faisait autrefois à la cour.

Jasmine était touchée par les difficultés de Mary. Même si cette dernière ne semblait pas avoir particulièrement besoin d'argent - il fallait tout de même rester prudent, les apparences pouvaient être trompeuses - elle aimait cet endroit et son travail, Jasmine pouvait le sentir. Le fait que sa salle des fêtes avait cessé de fonctionner du jour au lendemain ne devait pas arranger la situation. Evidemment, elle devait se poser sans cesse des questions auxquelles elle n'obtenait pas de réponses. Toutes les deux, elles essayaient de justifier ce manque d'activité, mais c'était difficile. Elles ne pouvaient faire que des suppositions, sans jamais avoir de certitudes. Etait-ce une mauvaise période, simplement ? Etait-ce lié à cette ville qui ne donnait pas ou plus envie de s'amuser ? Peut-être. Comment le savoir ?

Pour prouver ses dires, Jasmine lui raconta sans les détails un événement qu'elle avait vécu au cinéma, la dernière fois qu'elle avait tenté d'y mettre les pieds. Cet endroit était particulier. Fascinant et terrifiant à la fois. Il fallait supporter tout ce qu'il vous imposait et il s'agissait parfois du pire. Dans ces situations, difficile de trouver l'envie de s'amuser ou de se divertir. Puis, il devait y avoir la peur de préparer un événement et que cette ville vienne tout gâcher également, ça ne devait pas aider. Alors pour l'aider, parce que c'était ce que les amis faisaient en temps normal, la jeune femme proposait d'organiser les soirées de l'association chez Mary. Elle devait en parler avec ses supérieurs d'abord, mais elle ne voyait aucune raison pour qu'ils refusent. « Alors, c'est parfait ! J'en discuterai dès demain et je te tiendrai au courant. » Affirma-t-elle souriante, certaine que ça fonctionnerait et que ça relancerait l'activité de son amie. « Tu n'as pas à me remercier pour ça, c'est normal. » Et elle était sincère. « Puis, on trouvera d'autres moyens si ça ne suffit pas, j'en suis certaine. » Et elle était prête à s'investir - dans la limite de son pouvoir et de ses possibilités, évidemment.

Mary avait beaucoup de difficultés avec sa salle des fêtes ces derniers temps. Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi, alors avec Jasmine, elles émettaient des hypothèses, qui étaient toutes possibles, mais Mary n’allait sans doute jamais savoir laquelle de ces raisons était la bonne. Fort heureusement, l’ancienne reine n’avait pas besoin de cette activité pour vivre plus que convenablement. La salle des fêtes n’était qu’un petit plus, un moyen de se distraire et de s’amuser. Sans oublier qu’elle était ce petit quelque chose qui lui rappelait constamment un des bons côtés de son ancienne vie. Alors, Mary était souvent triste quand elle parlait d’elle, quand elle disait qu’elle ne fonctionnait plus et qu’elle allait sans doute devoir la fermer. Heureusement, il y avait des personnes comme Jasmine. Des personnes qui tenaient à l’aider, même si elle n’avait jamais mis les pieds dans la salle des fêtes de l’ancienne reine. Si cela était possible - puisque Jasmine n’était pas la seule décisionnaire – les soirées de l’association allaient désormais se passer chez Mary, qui en était plus que ravi. « Si, je dois te remercier, tu n’étais pas obligé de me proposer ton aide. » Elles ne se connaissaient que très peu, alors la brune aurait très bien pu se fiche de la situation de Mary et de sa salle des fêtes. Alors, si, elle tenait sincèrement à la remercier. « Ça veut dire que tu es prête à m’aider à relancer ma salle ? » C’était bien ce qu’elle avait sous-entendu. Bien évidemment, Mary était consciente du temps que cela demandé, elle savait que Jasmine ne pouvait pas se donner pleinement à cette cause et elle ne lui en demandait pas tant. Elle n’était même pas obligée de l’aider, Mary n’allait pas lui en vouloir pour ça. Mais si elle voulait lui apporter un peu d’aide, en parlant autour d’elle par exemple, Mary n’était pas contre, bien évidemment.

« Tu veux peut-être quelque chose d’autre ? » Demanda-t-elle en voyant la tasse vide de Jasmine. Elle pouvait bien l’inviter, c’était la moindre des choses, la brune se montrait tellement gentille avec elle. « Alors dis-moi, qu’est-ce que tu aimes faire en dehors de l’association ? » Après tout, elles étaient là pour apprendre à se connaître mieux.

« Alors j'accepte tes remerciements. » Souffla Jasmine, souriante et ravie de pouvoir venir en aide à une amie. Il n'était pas certain que les actions de Jasmine suffisent à faire fonctionner la salle, mais elle se donnerait autant que possible pour ça. C'était le mieux qu'elle puisse faire. « Autant que possible, oui. » Jasmine l'aiderait dans la limite de ses moyens. Elle n'était pas du tout familière de ce genre d'endroits ou de comment il pouvait fonctionner, mais elle se renseignerait, elle discuterait avec Mary et réfléchirait à de nouvelles idées. Jasmine et Mary n'étaient peut-être pas des amies proches - étaient-elles seulement des amies, elles qui se connaissaient si peu ? - mais Jasmine avait à coeur de lui venir en aide. Cela lui faisait plaisir. « Je n'y connais pas grand-chose, mais je ferai de mon mieux. » Précisa-t-elle, jugeant que cette information était importante. Mary ne devait pas s'attendre à une grande spécialiste en entreprise de ce genre parce que ce n'était pas le cas et Jasmine n'avait pas envie que Mary soit déçue du résultat.

Voyant très certainement la tasse vide de Jasmine, Mary lui demandait si elle voulait autre chose. La jeune femme ne voulait pas abuser de son temps, mais elle supposait que si elle proposait, c'était parce qu'elle n'était pas forcément très pressée et qu'elle avait encore un peu de temps devant elle. « Un jus d'orange, ce sera très bien. » Quelque chose de frais serait parfait et puisque Mary lui demandait, elle la laissait passer la commande auprès du serveur.

Puis, à sa question, la jeune femme avait pris un instant pour réfléchir. Qu'aimait-elle faire ? A vrai dire, elle n'en savait plus grand-chose parce qu'elle ne faisait pas grand-chose en dehors de l'association, depuis qu'elle était dans ce monde. « Je m'intéresse beaucoup à la politique, alors je lis, je me renseigne, autant que possible. » Ce n'était pas forcément le sujet de discussion idéal selon l'interlocuteur, mais Jasmine ne faisait que répondre à la question, elle ne s'apprêtait pas à débattre de la politique de cet endroit. « Et, à part ça, eh bien pas grand-chose à vrai dire. Depuis que je suis ici, je n'ai pas vraiment trouvé de choses à faire... » Se morfondre, parfois, penser à son passé d'autres fois, découvrir la ville et ses mystères, souvent. En dehors de ça, pas grand-chose, vraiment. « Et toi ? » Peut-être que Mary serait plus bavarde à ce sujet que Jasmine.

Les deux femmes étaient là pour en apprendre un peu plus l’une sur l’autre. Elles se voyaient régulièrement à l’association, mais ne parlait que très peu d’elles. Alors il n’était pas question de parler uniquement des problèmes que rencontrait Mary avec sa salle des fêtes, après tout, Jasmine s’était déjà proposé pour l’aider à résoudre, du mieux qu’elle pouvait, ce problème. Mary l’avait d’ailleurs remercié à ce propos, après tout Jasmine n’était pas obligé de l’aider, elle aurait pu se contenter d’un « je comprends » ou d’un « courage », mais elle semblait vouloir trouver une solution pour Mary en essayant d’organiser les événements de l’association dans la salle des fêtes de Mary. « Ne t’en fais pas, tu en fais déjà beaucoup. » Ajouta-t-elle sincère, Jasmine lui était déjà d’une grande aide et c’était déjà bien, Mary ne lui en demandait pas plus en réalité.

Après avoir commandé deux jus d’orange, Mary interrogea son amie. Puisqu’elles devaient en apprendre plus, que faisait Jasmine en dehors de l’association ? Sa vie ne tournait pas exclusivement autour d’elle, elle faisait bien d’autres choses à côtés. Qu’aimait-elle ? À quoi s’intéressait-elle ? « Je m’occupe de ma salle de fête, même si tu sais déjà que ce n’est pas ce qui me prend le plus de temps en ce moment. » Ajouta-t-elle, un léger sourire sur le coin des lèvres. Les deux femmes venaient d’échanger à ce sujet alors Jasmine était au courant de la situation. « En-dehors de ça, je passe beaucoup de temps à réfléchir et à étudier de potentiels endroits dans lesquels je pourrais investir. » C’était l’une des principales occupations de Mary depuis qu’elle était arrivée ici. « Et bien évidemment, je m’occupe de mon merveilleux petit garçon. » Ajouta-t-elle pour finir, avec un large sourire aux lèvres, montrant tout l’amour qu’elle avait pour James. « Il est encore jeune et a beaucoup besoin de moi. Alors je passe mon temps à jouer avec lui, à l’emmener au parc ou à faire d’autres balades. » Du temps avec James, elle en avait perdu beaucoup, même si ce monde lui avait offert une seconde chance à ses côtés, la mère n’avait pas su en profiter au départ, parce qu’elle craignait Elizabeth. Aujourd’hui encore, elle se méfiait d’elle, plus que jamais même, mais elle savait que son fils était plus important et à ses côtés, il était en sécurité, parce que Mary était prête à tout pour le protéger. « C’est à peu près tout ce que je fais. » Si on omettait Elizabeth et tout ce que cela entraînait, la défense, la protection, la surveillance…

Jasmine n'avait pas beaucoup de passions, de passe-temps, d'activités. Depuis qu'elle était dans ce monde, la jeune femme s'intéressait beaucoup à son rôle dans l'association puisque la cause lui tenait particulièrement à coeur. En toute logique, elle s'intéressait également beaucoup à la politique de cet endroit, si différente de la sienne. C'était tout naturellement, sans trop se poser de questions, qu'elle s'était renseignée et qu'elle avait commencé à s'y intéresser avec un intérêt tout particulier. Si elle ne tenait aucun rôle particulier et si elle n'avait encore rejoint aucun parti - puisqu'ici le pouvoir fonctionnait ainsi - elle comptait bien le faire un jour ou l'autre. Simplement, elle voulait comprendre avant toute chose et prendre les bonnes décisions.

Après avoir brièvement expliqué tout cela à Mary, Jasmine lui avait retourné la question. Et elle, qu'aimait-elle faire ? Sans grand étonnement, Mary avait évoqué sa salle. Bien sûr puisqu'il s'agissait, semblait-il, de son activité principale - ou l'avait été puisque l'activité était au ralenti ces derniers temps. En dehors de cette salle, elle consacrait donc un certain temps à ses investissements. « Tu investis dans des entreprises en particulier ? » Ou touchait-elle à tout ? Mary avait une certaine fortune, Jasmine l'avait compris, alors investissait-elle particulièrement dans de grandes entreprises, des entreprises de luxe ? Ou investissait-elle un peu partout du moment où l'affaire l'intéressait ?

En dehors de ces activités professionnelles, Mary, évidemment, passait beaucoup de temps avec son enfant. Jasmine ne s'en étonnait pas et elle s'attendait à recevoir ce genre de réponse. Une mère répondait forcément ce genre de choses. « Il a bien de la chance d'avoir une mère aussi investie et préoccupée par son bonheur. » Si dans un monde parfait, ça aurait dû être la norme, ce n'était malheureusement pas le cas dans la réalité. « Ce sont des activités qui doivent déjà te prendre un certain temps, à tout ça, il ne faut pas oublier ton investissement dans l'association. » Alors peut-être n'avait-elle pas le temps d'en faire davantage, tout simplement ? « Je comprends mieux pourquoi nous n'avons jamais eu le temps de faire ça avant, tu es débordée. » Ajouta la jeune femme en plaisantant, sans le moindre reproche dans la voix.

Les occupations de Mary étaient nombreuses. Elle avait une salle de fête qu’elle essayait de faire vivre, elle investissait également une partie de sa fortune dans différentes affaires, Mary passait beaucoup de temps à étudier ces endroits, même si elle avait quelques personnes pour l’aider et la conseiller, elle aimait voir les choses par elle-même. Et puis il y avait James. Même si elle ne passait pas autant de temps qu’elle le voudrait avec lui, elle lui accordait tout de même une grande partie de son temps. Sans oublier Elizabeth. Elle aussi, elle lui demandait beaucoup de temps, mais bien évidemment, Mary n’avait pas parlé de cette occupation. Pour des raisons évidentes, elle préférait garder cette histoire pour elle. « J’investis quand le projet me plaît, quand je pense que je pourrais en tirer des avantages. » Bien évidemment, Mary n’était pas une bienfaitrice, elle devait avoir des avantages à investir dans certaines entreprises, sans quoi sa fortune se serait vidé en un rien de temps depuis qu’elle était arrivée dans ce monde. « Mais je n’ai pas de type d’entreprise. Ça peut vraiment toucher à tout. »

D’après Jasmine, James avait de la chance d’avoir une mère aussi investie et préoccupée par le bonheur de son petit garçon. Malheureusement, Mary n’était pas vraiment de son avis. Si elle lui accordait beaucoup de temps, elle jugeait toujours ne pas lui accorder assez. « J’aimerais pourtant pouvoir lui accorder plus d’attention et de temps. » Mais se battre contre sa cousine, c’était également important, pour lui apporter la sécurité, Mary était certaine de ne pas avoir le choix. « Il est vrai que je suis plutôt très occupée et je m’accorde très peu de temps pour moi. Mes amis me reprochent souvent de ne pas être assez disponible. » Dit-elle sans aucun reproche à leur égard. Sophie lui avait déjà, par le passé, reproché le fait de ne pas être assez présente. Un fait que Mary aimerait corriger également, seulement, la brune avait beaucoup de mal à partager son temps plus équitablement. « Alors, oui, ça doit être pour cela que nous n’avions pas encore eu l’occasion de nous voir en dehors de l’association. » Dit-elle en plaisantant à son tour. Si c’était en partie vrai, il y avait d’autres raisons à cela. Mary avait du mal à accorder sa confiance quand elle ne connaissait pas bien, par crainte de tomber dans un piège, celui de sa cousine. Elizabeth était ce genre de personne, elle avait déjà envoyé des personnes se rapprocher de Mary pour essayer de découvrir ses secrets, pour tenter de la nuire, les choses n’étaient sans doute pas très différentes dans ce monde.

Jasmine s'intéressait aux investissements de Mary, par curiosité et parce qu'elle voulait apprendre à la connaître. Apprendre à connaître quelqu'un, c'était aussi passer par son métier, par ses passions, par ce qu'il faisait dans la vie de tous les jours. Alors, Jasmine s'intéressait à son métier. Elle comprenait parfaitement les arguments de Mary. Elle investissait si le projet l'intéressait et pouvait lui rapporter, sans distinction dans le type d'entreprise. Elle devait gagner de l'argent avant tout pour rendre ses investissements rentables, c'était logique. A ça, Jasmine se contenta de hocher la tête en souriant. Elle n'avait rien de plus à ajouter, tout simplement.

Par la suite, elles évoquèrent l'enfant de Mary. Jasmine jugeait que ce dernier avait beaucoup de chances d'avoir pour mère une femme aussi déterminée et investie que semblait l'être Mary. Au moins, cette dernière se préoccupait du bonheur de son fils et de son bien-être, ce qui n'était clairement pas le cas de tous les parents. « Je suis certaine que tu en fais déjà suffisamment et que tu réussiras à te libérer davantage à l'avenir, si c'est ce que tu souhaites réellement. » Disait-elle pour rassurer la jeune femme. Elle semblait déjà accorder beaucoup de temps à James, mais si son souhait était de lui en accorder plus, Jasmine était persuadée qu'elle réussirait à le trouver. Ce n'était qu'une question de volonté, non ? Il y avait bien sûr des tas d'autres choses à prendre en compte, mais la volonté l'emporterait forcément, d'après Jasmine.

« Il est parfois difficile de se rendre compte que l'on néglige ses amis ou sa famille. Il faut apprendre à lâcher prise sur certaines choses pour pouvoir passer plus de temps avec les gens qu'on aime. » Jasmine n'avait pas ce problème, puisqu'elle n'était pas particulièrement débordée et parce qu'ici, elle n'avait plus personne à aimer. Néanmoins, elle savait qu'on pouvait vite se laisser déborder, se convaincre que l'on faisait assez. Certains étaient capables de se remettre en question et de changer, quand leurs proches s'en plaignaient, d'autres, non. Jasmine était certaine que Mary pouvait faire partie de cette première catégorie parce qu'elle semblait réellement tenir aux gens qu'elle disait aimer. La preuve, même si Jasmine n'était pas son amie, elle avait fini par trouver du temps à lui accorder. « J'espère que l'on pourra renouveler l'expérience. » Souffla-t-elle, en souriant. « C'est plutôt agréable de se voir en dehors de l'association, dans un cadre plus tranquille. » Mary semblait être une personne plutôt agréable et Jasmine l'appréciait tout particulièrement, alors pourquoi ne pas tenter l'expérience à nouveau ?

Parler avec Jasmine était plutôt quelque chose d’agréable. Cela changeait des habituelles conversations que Mary avait. Avec Jasmine, elle avait l’impression de pouvoir parler plus ou moins librement – même si elles ne se connaissaient que trop peu. Bien évidemment, Mary taisait certains sujets, comme sa cousine par exemple. Et elle avait douté de Jasmine, pensant qu’elle avait été envoyée par Elizabeth afin d’en apprendre plus sur Mary. C’est pour cela que la brune parlait librement, mais de sujets qui ne pouvaient pas la nuire. Elle parlait de son travail, de ses difficultés avec sa salle de réception et surtout, elle parlait de son enfant, du fait qu’elle aimerait lui accorder plus de temps. À ce propos, Jasmine était certaine que Mary allait réussir à se libérer davantage pour lui. D’après elle, si Mary le voulait, elle pouvait trouver du temps pour James. Seulement, les choses n’étaient pas aussi simples aux yeux de Mary. Son emploi du temps, ses occupations, tout cela n’étaient pas modulables à souhait. Elle ne pouvait pas arrêter de travailler, ne pouvait pas arrêter de surveiller sa cousine, certaine que cela était bien trop dangereux pour elle ou pour son fils. « Peut-être... » Se contenta-t-elle de répondre, peu convainque par ce que Jasmine lui disait. Mary avait déjà fait beaucoup de concessions pour passer plus de temps avec l’être qu’elle aimait le plus au monde, son fils était tout pour elle, mais elle savait que lui accorder plus de temps était impossible, c’est pourquoi elle était peiné à cette idée. Malgré tout, Mary faisait toujours de son mieux, elle faisait toujours en sorte de pouvoir, de se libérer un peu plus, surtout quand son fils avait besoin d’elle.

« J’espère également. » Répondit-elle alors, souriante à son tour. « J’ai trouvé cela agréable également, j’ai beaucoup aimé discuter avec toi. » Même si elles n’avaient pas eu le temps de beaucoup échanger toutes les deux, Mary avait tout de même apprécier. SI l’ancienne reine pouvait se libérer un peu prochainement, elles allaient pouvoir se revoir avec plaisir.