Besoin d'aide ? ⊹ Alice.

Clarke sortait d'une longue journée à l'hôpital où elle travaillait désormais en parallèle de ses cours. Elle n'aimait pas ce système qui limitait bien trop ses initiatives à son goût. Elle ne se souvenait plus de toute sa vie, mais elle savait qu'en arrivant sur Terre, elle avait eu à faire des opérations bien plus compliquées que tout ce qu'elle était autorisée à faire aujourd'hui, c'est-à-dire, presque rien du tout. Pourtant, elle n'avait pas le choix et elle devait se plier aux règles si elle ne voulait pas se faire remarquer. Ce monde n'était pas le sien, tout était différent. Elle avait dû s'y adapter loin de tous ses amis et de son peuple. Avec les mois, elle avait appris à se fondre dans la masse, à passer pour l'une d'eux.

Franchissant le pas de son immeuble, les clés en main, elle grimpa les escaliers un à un. Clarke, au milieu des escaliers, entendit des éclats de voix. La jeune femme n'entendait pas clairement ce qui était en train de se dire, mais elle reconnaissait parfaitement l'une des deux voix ; c'était celle d'Alice, l'une de ses étranges voisines dans ce nouveau monde. Elle se hâta alors un peu plus jusqu'à arriver en haut des escaliers. Elle observa la scène du coin de l'oeil durant une seconde en s'approchant de sa porte d'entrée. Pendant un instant, elle s'était questionnée : devait-elle intervenir, ou non ? Alice ne semblait pas ravie de la visite et semblait être plus en mauvaise posture qu'autre chose, alors Clarke ne pouvait pas la laisser se débrouiller toute seule. « Tu as besoin d'aide Alice ? » demanda simplement la jeune femme, jetant un coup d'oeil à l'homme qui se tenait à ses côtés.

Épuisée, Clarke rentrait chez elle après une longue journée. Elle n'avait qu'une hâte : se glisser sur son canapé, feuilles et crayons en mains pour dessiner et se détendre. Pourtant, en montant les escaliers, Clarke entendit des éclats de voix, lui signalant la présence d'au moins deux personnes qui discutaient. Ou se disputaient, plutôt. La voix féminine n'était pas inconnue à Clarke. Il s'agissait de sa voisine, Alice. La voix masculine, en revanche, lui était complètement inconnue. En tout cas, elle ne la reconnaissait pas. Elle se hâta alors pour arriver plus vite. Pendant un court instant, elle hésita à intervenir, ne voulant pas se mêler de ce qui ne la regardait pas. Sauf qu'elle ne pouvait pas laisser Alice se débrouiller toute seule, surtout si elle avait réellement besoin d'aide.

La jeune femme demanda alors à sa voisine si tout allait bien, préférant demander avant d'agir, au cas-où sa voisine n'y tenait pas. Son sourire indiquait à Clarke qu'elle allait bien, malgré la discussion tendue qu'elle semblait mener avec son interlocuteur. Au moins, il ne semblait pas lui avoir fait le moindre mal. Il semblait uniquement l'ennuyer, rien de plus. Ce fut d'ailleurs ce qu'elle affirma, rassurant aussitôt Clarke. L'homme paraissait surtout collant, et refusait de partir, malgré les demandes insistantes de la jeune femme. Il était bien étrange. Il ne parlait désormais plus, refusant simplement de partir avec un non de la tête et un regard étrange qu'il posait sur Alice. L'homme paraissait clairement et tout simplement fou. Étrange. Et ce simple fait mettait mal à l'aise Clarke. Son silence était pire que s'il refusait de partir en criant.

Clarke restait là, assistant à ce combat de regards en silence. Elle attendait, sans agir. Soit il partait et Clarke rentrait chez elle tranquillement. Soit, il insistait et ne partait pas, et dans ce cas-là, Clarke agirait. La jeune femme sentait l'agacement chez Alice qui ne faisait qu'augmenter, son regard changeait du tout au tout. Il semblait être le moment d'agir puisque l'homme refusait de bouger et de partir. Clarke s'approcha alors d'Alice, puisqu'elle avait gardé ses distances jusqu'à présent, pour se mettre à ses côtés, faisant face à l'homme à son tour. « Tu sais, tu ne devrais pas la mettre en colère... » commença Clarke, le provoquant à son tour pour le dissuader de continuer ce petit jeu. « ou me mettre en colère moi. » Ajouta la blonde, poussant un long soupir comme si la situation la désolait. « mais si vraiment tu refuses de partir, on va être obligées d'utiliser la force pour te faire dégager, ce serait pourtant bien plus simple si tu partais gentiment, n'est-ce pas Alice ? » S'il le fallait, les deux filles le jetteraient d'ici par la force, mais si elles pouvaient le dissuader, autant le faire.

Clarke n'avait pas envie de perdre son temps avec ce type qui ne comprenait pas le sens du mot non, mais si elle n'avait pas le choix... Il ne semblait vouloir aucun mal à Alice, mais il insistait et c'en était agaçant. La blonde ne comprenait pas grand chose à ce qu'il se passait n'étant pas là depuis le début, elle assistait donc bêtement à leur face à face. Finalement, à la demande d'Alice, Clarke entra donc dans le jeu de sa voisine, précisant à l'inconnu qu'il n'était pas bon de les mettre en colère et que s'il refusait de partir, elles utiliseraient la force pour le faire. Au moins, c'était clair et il était prévenu. Il savait à quoi s'attendre. Clarke devait avoir été plus menaçante qu'elle ne le croyait puisqu'elle semblait lire dans le regard d'Alice, qui venait de tourner la tête vers elle, la surprise. Sans doute ne s'attendait-elle, tout simplement, pas à cette réaction de la part de Clarke. Sauf que cette dernière n'avait nullement envie de convaincre l'homme avec des politesses. Lorsqu'on lui demandait de dégager, il dégageait.

L'avantage était que l'homme semblait convaincu qu'il était dans son intérêt de partir désormais. Et il avait raison, Clarke étant on ne peut plus sérieuse. S'il avait fallu le faire sortir d'ici par la force, elle l'aurait fait sans hésiter. Après tout, elles n'allaient pas passer des heures à discuter et le convaincre. Alice la soutenant, l'inconnu avait fini par partir, se retournant malgré tout une dernière fois pour adresser quelques mots à Alice. De quel passé parlait-il ? Se pouvait-il qu'Alice cache des choses de son passé ? Après tout, qui ne le faisait pas dans ce monde étrange ? Ces mots intriguèrent Clarke, mais elle n'en disait rien pour le moment puisque son amie la remercia. « Cette ville toute entière est étrange... » souffla Clarke, un sourire amusé aux lèvres. Les gens étaient étranges, oui, mais la ville en elle-même n'était pas mieux.

Bien que fatiguée, la proposition d'Alice fit plaisir à Clarke. Il était temps qu'elle tente d'avoir une vie comme celle des autres, de trouver des amis, de sortir ou d'aller boire un café, tout bêtement. Puis, ça ne pouvait pas lui faire de mal de faire autre chose qu'être chez elle ou à l'hôpital. Ce monde offrait bien moins d'action que le précédent, peut-être devrait-elle s'y habituer et en profiter ? « Il n'y a pas besoin de me remercier, mais j'accepte avec plaisir. » ça la détendrait et ça ne pouvait lui faire que du bien. « Tu le connaissais ? Tu sais ce qu'il te voulait ? » demanda finalement la blonde, gardant en mémoire les mots de l'inconnu. C'était sans doute indiscret de demander ça, mais elle cherchait juste des réponses. Réponses qu'Alice n'était même pas obligée de lui donner si elle ne le voulait pas.

Clarke ne s'était pas imaginée terminer sa journée ainsi. Elle s'était imaginée retourner chez elle, seule, et faire ce qu'elle faisait chaque jour lorsqu'elle était trop fatiguée pour partir à la recherche de ses amis. Pourtant, elle était venue en aide à Alice et cette dernière l'invita à boire quelque chose. Si Clarke n'avait pas spécialement noué de relations avec ses voisins, elle se disait que ça ne pouvait pas être une mauvaise idée et puis, ça ne lui coûtait rien d'accepter. Au contraire même, sans doute passerait-elle un moment plus agréable que seule chez elle devant la télé, un livre ou une feuille blanche.

Tout en entrant chez sa voisine, Clarke, curieuse, lui demanda si elle savait ce que ce type lui voulait. La situation était étrange vue de l'extérieur. L'homme semblait connaître Alice, mais Alice semblait ne pas le reconnaître. Clarke s'était préparée à l'idée que sa voisine ne veuille pas lui répondre, mais elle le fit, avec sincérité sembla-t-il à la blonde. « J'ai l'impression que cette ville a cet effet sur nous, c'est étrange ! » souffla-t-elle, sans en dire trop. Elle-même était privée de ses souvenirs, en partie du moins, et Octavia était privée de tous ses souvenirs, persuadée d'appartenir à ce monde. Il ne semblerait même pas impossible à Clarke qu'Alice ait perdu une partie de la mémoire ou, au moins, que cet homme ne soit pas qu'un inconnu. « C'est la première fois qu'il vient à ta rencontre ? » demanda Clarke, toujours aussi curieuse. Cette histoire l'intriguait, elle devait bien l'avouer. « Avec plaisir. Sers-moi ce que tu veux, ça m'ira très bien. » répondit Clarke, un sourire poli aux lèvres. Ce n'était pas dans ses habitudes ce genre de vie. Elle n'avait pas l'habitude d'aller boire un verre chez une voisine ou une amie. Si cette nouvelle vie pouvait lui apporter tout ça, elle n'en profitait pas, toujours enfermée dans son passé et ses souvenirs. Elle restait persuadée que quelque chose clochait dans cette ville et qu'à tout moment elle rentrerait chez elle. « Merci. » rajouta-t-elle d'ailleurs se rendant compte qu'elle n'avait rien dit et que ce n'était pas polie. « C'est la première fois que tu rencontres quelqu'un qui prétend te connaître alors que tu ne le connais pas ? » Après tout, Clarke vivait la même chose d'une certaine façon. Elle avait retrouvé Octavia et l'avait approché, mais cette dernière refusait de lui parler affirmant qu'elles ne se connaissaient pas. Clarke était donc, peut-être, dans la même situation que l'homme. « Je pose beaucoup de questions, je suis désolée. » reprit-elle, en souriant, se rendant compte qu'elle posait énormément de questions alors qu'elle n'était là que depuis une minute ou deux.

Les deux femmes étaient au moins d'accord sur un point, sans même se connaître réellement : cette ville était étrange et avait des effets étranges sur eux tous. Son arrivée en ville était étrange, ce qu'elle avait vécu en ville était étrange. Tout était étrange. Le problème était qu'il était impossible de comprendre pourquoi, malgré les nombreuses recherches.

Finalement, Clarke en arriva à poser des questions à propos de ce type étrange. Sans doute était-ce indiscret, mais elle avait envie de comprendre ce qui venait de se passer. Alice lui donna donc des explications à propos de cet homme, confirmant qu'elle ne pensait pas le connaître. « Il sait des choses sur toi ? Des choses pouvant te faire penser qu'il a raison ? » Cette situation lui rappelait la sienne, sauf que les rôles étaient inversés. Octavia était dans le même cas qu'Alice. Elle ne se souvenait de rien alors que Clarke se souvenait d'elle. Et c'était un fait difficile à faire accepter.

Finalement la jeune femme lui proposa à boire et se dirigea dans la cuisine. « C'est parfait, merci. » lança la blonde à l'autre femme qui était dans la cuisine. Puis finalement, Clarke se lança et lui demanda si c'était la première fois qu'elle rencontrait quelqu'un comme lui, assurant la connaître. Clarke paraissait-elle aussi folle que cet homme quand elle s'adressait à Octavia ? L'effrayait-elle ou l'agaçait-elle ainsi ?

Évidemment, toutes les questions de Clarke éveillèrent la curiosité d'Alice et elle lui retourna ses questions. Avant de répondre, la blonde attrapa le verre tendue par l'autre femme, la remerciant au passage, en souriant. Puis à sa demande, elle s'installa dans l'un des fauteuils. Elle regarda le liquide dans son verre durant une seconde, silencieuse, avant de relever la tête et d'avouer. « Non, pas à moi. » commença-t-elle. Elle n'allait pas lui mentir, cela ne servirait à rien. D'autant qu'elle ne faisait aucun mal, elle était persuadée de connaître Octavia et ça ne pouvait pas être une erreur. Alors autant dire la vérité, même si Alice pouvait voir Clarke d'un mauvais oeil après ça. « A vrai dire, c'est même plutôt l'inverse. J'ai retrouvé une proche ici, dans cette ville. Sauf qu'elle ne se souvient pas de son passé, elle est amnésique. Alors, j'ai plutôt le rôle du méchant. » précisa-t-elle, en souriant et en faisant référence à l'homme qui avait quitté le palier quelques minutes plus tôt. « C'est compliqué. La vie ici est compliquée. » ajouta-t-elle ne pouvant pas donner beaucoup plus de détails pour ne pas l'ennuyer. « Tu n'as aucun problème avec tes souvenirs, ta vie d'avant, ton passé ? » Après tout, peut-être qu'Alice était dans la même situation qu'Octavia et que Clarke était dans la même situation que l'homme, même si ce dernier semblait s'y prendre vraiment mal pour faire comprendre à Alice qu'elle la connaissait.

Clarke ne pouvait s'empêcher de se dire que la situation vécue par Alice et cet homme était la même que celle qu'elle vivait avec Octavia. Simplement, les rôles étaient inversés. Elle comprenait à travers Alice ce que pouvait ressentir Octavia. Ne pas se souvenir n'était pas quelque chose de simple et avoir quelqu'un qui insistait pour vous faire comprendre qui vous étiez devait l'être encore moins. Alors Clarke essayait de comprendre si Alice était certaine de ne pas se souvenir de lui, que rien ne pouvait laisser penser le contraire. « Je comprends, ça ne doit pas être simple pour toi d'avoir quelqu'un qui prétend te connaître alors que tu ne te souviens de rien. » Clarke devait donner la même impression à Octavia, celle de la harceler. Il fallait dire qu'elle s'était montrée insistante lors de leurs retrouvailles. La blonde était si heureuse de retrouver, enfin, quelqu'un de son monde et elle imaginait retrouver tous les autres... Même si elle avait essayé de se montrer compréhensive et patiente, ça n'avait peut-être pas été le cas. Ça n'avait même pas été le cas.

Clarke expliqua alors sa propre situation à sa voisine, voisine qui allait peut-être la mettre dehors en la comparant à ce type qui l'ennuyait. Quelque part, Clarke comprendrait. « Ce n'est pas une situation facile. S'il te connaît réellement, je peux me mettre à sa place et je peux comprendre sa frustration, même si ça n'excuse en rien le fait qu'il soit brusque. Mais ce n'est pas une situation facile pour toi non plus, j'imagine. Cela doit être suffisamment compliqué de ne pas se souvenir. » Et pour avoir perdu plusieurs années de sa vie, elle pouvait confirmer elle-même en réalité. Tout dans cette ville semblait compliqué, ce monde semblait compliqué. Si Clarke avait vécu des choses difficiles, la vie ici l'était tout autant. Différemment, mais tout autant. Et lorsque sa voisine lui confirma ce fait, elle se contenta de sourire tristement.

La blonde reprit alors la parole pour en apprendre plus sur Alice et ses souvenirs. Peut-être avait-elle des problèmes avec son passé, sa mémoire ou ses souvenirs ? Elle se montrait curieuse, mais elle avait envie d'aider cette femme. Si elle le pouvait, évidemment. Alice reprit alors la parole. Au départ elle restait évasive, doutant du fait que Clarke allait la croire, précisant qu'elle ne savait pas ce qui était réel ou non. Autant dire que ces quelques mots intriguaient beaucoup la jeune femme. Que voulait-elle dire par réel ou non ? Pourquoi ne la croirait-elle pas ? Allait-elle lui sortir une histoire invraisemblable ? Y avait-il, ici, des histoires qui l'étaient réellement ? Tout semblait possible dans ce monde.

La jeune femme lui raconta donc son histoire. Alice était donc enfermée dans un hôpital psychiatrique avant de venir ici parce qu'elle était perdue entre le rêve et la réalité. Puis elle évoqua les fleurs et les animaux qui parlaient, ce qui avait surpris Clarke sur l'instant. Clarke resta silencieuse, observant sa nouvelle amie baisser la tête, honteuse. Pour être tout à fait franche, Clarke était prête à croire n'importe qui, n'importe quoi. Elle ne faisait pas aveuglément confiance, mais elle avait vécu suffisamment de choses folles pour croire en tout, ou presque. Alors, elle gardait toujours dans un coin de la tête que tout pouvait être faux, mais elle la croyait. Elle semblait tellement sincère qu'il était difficile de faire le contraire.

Sans que Clarke n'ajoute quoi que ce soit, Alice reprit la parole, ajoutant qu'elle avait quinze ans avant d'arriver ici. La nouvelle était un peu plus difficile à imaginer, à accepter, mais elle était prête à croire à ça aussi. Le plus difficile était d'imaginer cette fille devenir une femme en l'espace d'un instant. Comment était-ce possible ? « Je ne crois pas que tu sois folle, je te crois. » commença la blonde en haussant les épaules et buvant une gorgée du verre qu'elle avait entre les mains. « J'ai entendu des tas d'histoires dans ce monde et je suis prête à croire en presque tout. » Ajouta Clarke, un sourire aux lèvres. « Il doit être difficile d'arriver dans un corps qui n'est pas le sien, non ? » Elle était curieuse, mais elle avait eu cette chance d'arriver dans le bon corps et avec le bon âge, ou presque selon ses souvenirs. « Je suis désolée, c'est sans doute indiscret. » reprit-elle, avant d'ajouter, finalement : « Comment pouvons-nous venir, tous, de mondes si différents ? » Au départ, elle avait cru que ça ne touchait que quelques personnes, mais elle était forcée de se rendre à l'évidence : une majorité - si ce n'est tous - était arrivée là mystérieusement, venant de mondes tous plus différents les uns que les autres. « Et ce monde où les animaux parlent, comment était-il ? » Parce que même si elle avait vu plusieurs mondes et voyagé dans plusieurs d'entre-eux - d'après de très flous souvenirs qu'elle avait récupéré -, ça, elle ne l'avait jamais vu.