Innocent ▿ Sabrina.

Depuis qu'Ambrose avait retrouvé Sabrina, il passait énormément de temps avec elle. Ce n'était plus comme autrefois, lorsqu'ils vivaient sous le même toit et qu'ils pouvaient se voir dès qu'ils le voulaient, mais c'était toujours mieux que de ne plus la voir du tout. Sabrina s'était construit une vie ici. Elle avait des amis, elle étudiait et elle regagnait ses pouvoirs. Ambrose, lui, n'avait toujours aucun pouvoir. Assez peu d'amis proches. Une vie presque semblable à celle qui s'était imposée à lui lorsqu'il avait été emprisonné chez les Spellman. Mais maintenant que Sabrina était de retour, il avait l'impression de retrouver une nouvelle raison de vivre. Sa cousine avait toujours tenu une place particulièrement importante dans sa vie et, après avoir cru la perdre pour toujours, il se sentait le devoir, plus que jamais, de la protéger.

Comme bien souvent, Sabrina était venue lui rendre visite après les cours. Il aimait la savoir là, chez lui, près de lui. Dans son petit appartement, Sabrina avait l'habitude de s'installer sur la table de cuisine ou dans le canapé pour potasser ses bouquins ou travailler tranquillement. Parfois, lorsqu'elle n'avait pas d'autres obligations, ils mangeaient quelque chose puis elle rentrait chez elle. Il aurait préféré la savoir là, chez lui, mais elle avait sa vie et il ne voulait pas tout bousculer. D'autant qu'elle avait déjà été bien chamboulée d'apprendre sa mort et la mort de Nick. Mieux valait laisser les choses se faire tranquillement, petit à petit.

Tandis que Sabrina était en train de lire un bouquin pour la fac, Ambrose, de son côté, était installé sur une autre chaise, face à sa cousine, un livre de magie dans une main, un crayon de bois dans l'autre. S'il n'avait plus aucun pouvoir, il ne perdait pas espoir ni de les retrouver, ni de résoudre le mystère qu'était cette ville pour eux. Alors, il lisait tout ce qui lui passait sous la main - et plusieurs fois, parfois, pour tromper son ennui en prétextant que, peut-être, une information lui avait échappé. Depuis leurs retrouvailles, c'était une fin d'après-midi qui ressemblait à toutes les autres jusqu'à ce moment où, en un clignement d'yeux, l'espace autour d'eux avait changé. Ambrose n'était plus tranquillement installé chez lui en train de bouquiner. Il était debout, chez lui, dans la morgue des Spellman - il n'avait aucun doute là-dessus, il reconnaîtrait cet endroit les yeux fermés - couvert de sang. Les vêtements qu'il portait, ce sang, l'ambiance qui régnait... Aucun doute pour lui, il savait très précisément à quel instant de leur ancienne vie ils étaient retournés : il était accusé et pourchassé après la mort de l'anti-pape. Son regard avait croisé, aussitôt, celui de sa cousine. La panique l'envahissait et tout son corps se tétanisait face aux risques. Il n'était pas seul, mais il était sans pouvoir et sans pouvoir, il ne pouvait pas protéger sa cousine. Si tout se passait comme dans ses souvenirs - d'ailleurs, qu'était-ce ? Un souvenir ? Un rêve ? Une hallucination ? Un retour dans le passé ? Et comment était-ce seulement possible ? Que s'était-il passé ? - Blackwood n'allait pas tarder à apparaître et alors les choses sérieuses commenceraient. « Si c'est ce que je crois... » Avait-il soufflé, les yeux grands ouverts à cause de la panique, sans terminer sa phrase. Si c'était ce qu'il croyait, Sabrina avait plutôt intérêt à avoir tous ses pouvoirs ou ils seraient morts dans deux minutes.

La panique d'Ambrose était palpable. Il était terrifié par le cauchemar qu'il était en train de vivre. Etait-ce réel ? Etait-il en train de rêver ? Rentrer chez lui, il aurait pu en être heureux, évidemment. Néanmoins, il n'était pas juste chez lui. Il était chez lui à l'époque où l'anti-pape avait été assassiné et où il avait été accusé par Blackwood d'en être responsable. Cet événement était resté marqué dans son esprit. Les vêtements qu'il portait, le sang qu'il avait sur lui et ce qu'il ressentait au plus profond de lui, tout ça ne laissait pas le moindre doute quant à ce qui était en train de se passer. Il avait des questions, bien sûr : comment était-il arrivé de son salon, dans cet autre monde, à ici ? Comment avait-il pu faire un bond dans le temps et retourner dans le passé ? Il n'avait malheureusement pas le temps de se pencher sur ces dernières pour y répondre. S'il ne se trompait pas, Blackwood allait débarquer d'un instant à l'autre. Sabrina était là également, il fallait la protéger - même si, sans pouvoir, cela risquait de compliquer grandement les choses - alors il ne pouvait pas rester là bêtement à paniquer.

Le mot qu'avait prononcé sa cousine confirmait difficilement sa pensée et un frisson l'avait parcouru juste à ce dernier. Sabrina pensait la même chose qu'Ambrose et c'était mauvais signe. Très mauvais signe même, parce qu'ils ne se trompaient sans doute pas, alors. Comme s'il fallait refaire exactement les mêmes choses, Sabrina proposait d'aller chez Dorian et attrapa le bras d'Ambrose pour se téléporter. Au moins, la sorcière avait conservé ses pouvoirs, c'était déjà une bonne chose. Parce qu'à deux, sans pouvoir, ils n'avaient évidemment aucune chance. « Ça va aller ? Je suis accusé d'avoir tué l'anti-pape, Sabrina ! Je suis couvert de son sang ! Blackwood est à ma poursuite ! Et je n'ai plus aucun pouvoir... » Disait-il en agitant les mains, les yeux écarquillés face à la situation désespérante qui leur faisait face, même si Sabrina ne tentait que de le rassurer.

La situation était quelque peu différente de la première fois, néanmoins. D'abord, Nicholas n'avait pas été celui qui avait conduit Ambrose ici. Ensuite, Dorian ne semblait pas être présent pour l'aider. C'était véritablement leur jour de chance, décidément. Malgré l'absence évidente du propriétaire des lieux, Sabrina tentait de l'appeler, en vain. Ambrose, lui, tentait désespérément de trouver une autre solution, une main sur le front. Il leur fallait un plan B, ils ne pouvaient pas se contenter de reproduire le même schéma que la première fois. « Il n'est pas là ! Je... Et Blackwood va débarquer d'une minute à l'autre en ne me voyant pas à la maison. » Il fallait réfléchir à toute vitesse, c'était sans doute le plus difficile. « On ne peut pas rentrer à la maison, on ne peut retourner à l'Académie... Il faut qu'on ait accès à des livres si on veut espérer comprendre ce qui se passe et rentrer. » Pourtant, Ambrose n'avait pas la moindre idée d'où trouver ces fameux livres dont ils avaient besoin parce que son esprit était trop concentré sur les problèmes plutôt que sur les éventuelles solutions.

Ambrose avait confiance en Sabrina. Il savait qu'elle était sérieuse lorsqu'elle lui promettait de le protéger pour que rien ne lui arrive. Sauf qu'elle avait beau être une puissante sorcière, elle ne pouvait rien faire contre Blackwood et ses sbires s'ils débarquaient en nombre ici. « Tu ne feras pas le poids. » Souffla-t-il. Ce n'était pas pour la démotiver, mais pour la mettre face à la réalité de la situation. « Et je t'interdis de te mettre en danger pour moi. Tu m'entends, Sabrina ? » Il connaissait sa cousine et il savait qu'elle se mettrait en danger pour respecter sa promesse, sauf qu'il refusait de la perdre. Si Blackwood débarquait, si le combat était perdu d'avance, alors Ambrose se rendrait sans discuter en échange de la sécurité de Sabrina. Il était hors de question qu'il lui arrive quoi que ce soit par sa faute. Il ne le permettrait pas. Et, en même temps, il savait très bien qu'elle lui dirait qu'elle ne se mettrait pas en danger pour le rassurer, mais qu'elle n'en ferait qu'à sa tête, comme d'habitude.

Dorian n'était pas là. La situation était de plus en plus compliquée à gérer. Ils ne pouvaient pas revivre les choses exactement de la même façon, ils devaient improviser - avec Ambrose qui n'avait pas de pouvoirs pour arranger le tout, évidemment. Le sorcier paniquait, il voyait les risques arriver et tous les dangers leur tomber dessus. Il avait peur. Clairement. Pour espérer s'en sortir, il proposait ce qu'il faisait de mieux : trouver des livres pour trouver une explication à tout ceci et espérer s'en sortir. Mais où ? Ils ne pouvaient ni retourner chez eux, ni se rendre à l'Académie. Sabrina, un peu trop bruyamment d'ailleurs, eut une idée : Lilith. Il fallait donc se rendre au lycée - un endroit où on les chercherait forcément à un moment donné. Sans qu'il n'ait le temps de répondre quoi que ce soit, la voix de Blackwood se fit entendre. Ambrose se mit à paniquer davantage et il sentit son coeur accélérer. Instinctivement, ses yeux s'étaient tournés vers l'endroit où se trouvait la voix, mais Sabrina l'attrapa et le téléporta avant qu'il ne puisse voir quoi que ce soit.

Ils étaient au lycée. Lycée qui semblait particulièrement vide, ce qui n'était pas rassurant. La jeune femme ferma la porte à clé et Ambrose ne put se retenir de faire une réflexion : « Tu crois que ce serait une si mauvaise chose si Lilith nous trouvait ici ? » Au moins, elle pourrait leur apporter son aide. Mais il était vrai qu'il existait aussi une petite probabilité pour que d'autres les découvrent dans ce bureau. Sabrina attrapa les livres et les divisa en deux tas. Elle en donna un à Ambrose et ce dernier s'empressa d'ouvrir le premier livre de la pile pour fouiller dedans. Néanmoins, il n'y prêta qu'une très courte attention puisque Sabrina reprit la parole pour lui expliquer que ces bonds dans le temps n'étaient pas nouveaux pour elle. « Vingt-quatre heures... » répéta-t-il. Vingt-quatre heures, ça pouvait être long. Très long, même, dans leur situation. « On ne va pas pouvoir se téléporter d'un endroit à l'autre en boucle, il faut qu'on trouve un plan. » C'était une évidence, mais il fallait parfois dire les choses pour mieux y réfléchir. « Changer d'apparence ? Trouver un endroit où Blackwood ne nous retrouvera pas ? Se battre ? Prouver mon innocence ? » Les solutions n'étaient pas infinies et, pour ne rien arranger, beaucoup représentaient de gros risques. Néanmoins, il craignait que cet endroit ne les laisse pas se cacher durant la journée que devait durer leur aventure, alors, il était préférable de trouver autre chose et de prier pour qu'ils retournent bel et bien dans leur nouveau chez eux.

La promesse de Sabrina ne suffisait pas à le rassurer. Ambrose connaissait Sabrina mieux que quiconque et il l'avait déjà vu se sacrifier une première fois afin de sauver tout le monde. Sabrina avait de bien nombreux défauts, mais elle avait aussi la plus grande de toutes les qualités : elle aimait profondément sa famille et était prête à absolument tout pour elle. C'était une bien belle chose, évidemment, mais Ambrose refusait de voir sa cousine se sacrifier pour lui. La cause était désespérée et son sacrifice serait vain. De plus, il ne pourrait pas vivre en sachant qu'elle était morte à cause de lui. Alors non, il interdisait à Sabrina de faire quelque chose de stupide. Pourtant, malgré cette promesse qu'il avait exigée, il ne la croyait pas. Sabrina était la pire des menteuses. Pour elle, le mensonge n'était qu'un jeu, une solution envisageable à n'importe quel moment, même le pire. « Je t'interdis de rompre cette promesse. » Parce qu'il irait la chercher jusqu'en enfer pour le lui faire payer, s'il le fallait. « Sabrina... » Souffla-t-il, désespéré, lorsqu'elle lui assura qu'elle les protégerait de Blackwood. Bien sûr qu'elle le devrait, puisqu'Ambrose n'avait aucun pouvoir, mais il n'aimait pas l'entendre dire ça. « Pas de risques inutiles. » Répéta-t-il, tenant, à sa façon, à protéger sa cousine. Il se sentait déjà si impuissant, si en plus elle se mettait en danger pour lui, il ne pourrait pas s'en remettre. C'était à lui de protéger Sabrina, à ses yeux, pas l'inverse. Elle, elle n'était encore qu'une enfant. Une jeune sorcière. Et elle avait la vie devant elle - vie qu'elle avait déjà perdue une fois et c'était suffisant.

La situation était désespérée. Blackwood allait arriver d'un instant à l'autre et il ne serait pas seul face à une sorcière et un sorcier sans pouvoir. Le combat était, bien évidemment, inégal. Une chose se confirmait : ils ne pourraient pas faire comme la première fois puisque Dorian n'était pas là pour les protéger. Il fallait trouver autre chose. Ambrose proposa les livres - sa solution, à chaque fois - et Sabrina trouva où s'en procurer. Elle les téléporta donc dans le bureau de Lilith - cachée sous les traits de la professeure de Sabrina. Ils n'auraient peut-être pas un grand choix, mais c'était toujours mieux que rien. La sorcière vérifia les couloirs et verrouilla la porte. « Tu as raison, mieux vaut que personne ne nous trouve ici. » Il se doutait, quelque part, qu'elle ne se protégeait pas de Lilith - elle serait d'une grande aide dans leur situation, en réalité - mais des autres étudiants ou des autres menaces possibles qui pouvaient pénétrer dans ce bureau à tout instant.

Sans perdre davantage de temps, la sorcière avait séparé les livres en deux piles. Ambrose se chargeait de l'une d'elles. Il fallait chercher vite, mais bien. Ne pas perdre de temps, sans se précipiter. Alors qu'ils fouillaient, Sabrina lui en apprenait plus sur les bonds dans le temps. Ils étaient donc là, semblait-il, pour vingt-quatre heures. Ce n'était pas rien, surtout dans leur situation. Il fallait trouver une solution, une vraie. Ils n'allaient pas pouvoir fuir Blackwood éternellement en se téléportant encore et encore. Ambrose énumérait alors certaines possibilités, sans se convaincre lui-même d'avoir trouvé une véritable bonne solution. « Sauf si je réussis à convaincre suffisamment de gens de mon innocence pour arrêter Blackwood. » mais en vingt-quatre heures, c'était parfaitement utopiste d'espérer cela et il le savait. Il ne l'avait dit que parce qu'il l'avait pensé, sans y croire une seule seconde pour autant. « Je crains que le combat ne soit inévitable à un moment ou à un autre. » Soupira-t-il après le constat alarmant de sa cousine. Oui, Blackwood et ses hommes avaient leurs pouvoirs, certainement, quand eux en étaient privés, en partie - lui complètement, même. Pire encore, si tout était comme autrefois, Zelda serait du côté de Blackwood, ce qui compliquerait davantage la situation. Pourtant, Ambrose craignait que le combat ne finisse par être impossible à éviter - même s'il ferait tout pour - et ils devaient donc s'y préparer.

Alors, la cachette semblait encore être la meilleure possibilité. Mais où ? Blackwood et les autres sorciers avaient énormément de pouvoirs, suffisamment pour les retrouver où qu'ils aillent, certainement. Ils auraient pu changer d'apparence pour apparaître devant Blackwood sans qu'il ne puisse les reconnaître, mais Sabrina n'avait pas récupéré ce pouvoir. Malchanceux ? Oui, ils l'étaient. Sabrina lista donc leurs possibilités - ce qui était particulièrement déprimant - et demanda à Ambrose s'il avait une idée. Difficile de trouver la cachette idéale ou la solution idéale quand il n'y avait pas vraiment le temps pour réfléchir. « Si on prend en compte tes expériences, chercher à partir serait inutile. » Donc, pour le moment, inutile de perdre de l'énergie en se focalisant là-dessus. Il était préférable d'attendre, tout simplement et si au bout d'une journée ils étaient toujours là, ils commenceraient à chercher de ce côté-là. « Attendons que les vingt-quatre passent et si nous sommes toujours là, on pourra commencer à s'inquiéter. » Ou pas, après tout, ils étaient de retour, une chance, non ? - non, pas dans ces circonstances. « On doit se préparer à lutter contre Blackwood, juste au cas-où. » Ils ne pouvaient pas juste se cacher et attendre passivement que le temps passe, ce serait trop risqué. « L'Enfer, c'est risqué, mais est-ce que Blackwood oserait s'y rendre ? » Ils risquaient d'y rencontrer d'autres dangers, c'était ça le problème, bien sûr. Etait-ce prudent d'ajouter des problèmes à leurs problèmes ? « Les mines Kinkle ? » Ce n'était pas l'endroit idéal, mais en existait-il un ? « Chez un de tes amis mortels ? » Etait-ce prudent de les mettre en danger et n'iraient-ils pas les chercher là-bas, malgré tout ? « Rah, je ne sais pas. » S'agaça-t-il en se passant une main sur le visage. Il n'avait pas le plan idéal qui les protégerait tous les deux et ça le rendait fou. « Il faut trouver le bon endroit, un endroit que l'on saura protéger. On va embarquer tous ces livres et on pourra faire nos recherches calmement. » Ou pas, mais ils pourraient essayer, toujours. Il fallait, désormais, trouver l'endroit idéal, ce qui n'allait pas être simple puisque la moindre erreur pouvait leur être fatale - et il n'était pas convaincu par ses propositions, loin de là même.

« Ne le prends pas mal, mais je ne suis pas assez stupide pour te faire aveuglément confiance. » Ce n'était pas destiné à être méchant, mais c'était la pure vérité. Croire aux promesses de Sabrina et lui faire confiance sans se poser de questions, c'était stupide. Sabrina avait une vision bien à elle des promesses qu'elle faisait et de son droit à ne pas les tenir pour des raisons qu'elle jugeait, bien évidemment, légitimes. Alors Ambrose préférait se montrer prudent et se méfier des actes de sa cousine. Il était hors de question qu'elle meure pour lui ou qu'elle prenne des risques parfaitement inutiles.

Leur priorité absolue était de trouver une cachette pour échapper à Blackwood. Le temps, au moins, de trouver comment lutter contre lui - avec un sorcier sans pouvoir et une sorcière qui n'en possédait que la moitié, les choses risquaient d'être compliquées. Néanmoins, Ambrose restait persuadé que le combat serait inévitable et qu'ils ne pourraient pas échapper à Blackwood durant vingt-quatre heures - en espérant que cet événement ne dure pas plus longtemps et que Sabrina disait vrai, évidemment. Paniqué, Ambrose cherchait à trouver une solution et, surtout, une cachette où se réfugier le temps de fouiller les livres qui venaient du bureau de miss Wardwell. Il proposait donc ce qui lui passait par la tête, notamment l'Enfer, les mines de la famille d'Harvey ou encore chez l'un de ses amis mortels. Difficile de déterminer quelle cachette serait la meilleure. Où Blackwood n'irait pas fouiller ? Où serait-il susceptible de ne pas les trouver ?

Sabrina refusait catégoriquement de se rendre chez ses amis mortels, ce qu'Ambrose comprenait parfaitement. Il ne rediscuterait pas de son choix. Il était légitime et compréhensible qu'elle ne veuille pas mettre ceux qu'elle aimait et qui n'avaient pas les moyens de se protéger en danger. Il restait alors deux options, sauf si Sabrina avait une meilleure idée - et Sabrina était douée pour trouver des idées, même si toutes ne se terminaient pas forcément bien. Elle avait, dans tous les cas, raison sur une chose : Blackwood était prêt à tout et il ne renoncerait pas facilement. Il voulait la peau d'Ambrose - et accessoirement, celle de toute la famille Spellman - et il n'arrêterait pas avant de l'avoir eu. Il avait déjà vécu ça une première fois, il le savait, il n'avait aucun doute sur la suite des événements s'il ne se battait pas ou s'il ne lui échappait pas.

Sabrina ne semblait pas emballée par les idées que lui suggérait Ambrose, ce qu'il pouvait comprendre. Comme elle le répétait, il fallait être plus malin que le Grand Prêtre et trouver l'endroit auquel il ne penserait pas. Ambrose réfléchissait. Il avait bien une idée, mais elle était particulièrement risquée et peut-être totalement stupide. Oh ça oui, elle était complètement stupide. C'était même n'importe quoi, en réalité. « J'ai une idée... » Commençait-il en se passant une main sur le visage, se demandant s'il faisait bien de la proposer à sa cousine qui n'avait pas toujours conscience de tous les dangers qui les entouraient. Cette idée ne les mettrait-elle pas davantage en danger, finalement, avec Sabrina dans les parages ? « Cependant, elle est plutôt risquée, alors je ne sais pas... » Continuait-il, sans pour autant parler de son idée elle-même - mais maintenant qu'il avait commencé, il n'avait plus vraiment le choix, Sabrina voudrait savoir. « Si on se cachait là où il ne penserait pas nous voir ? A l'Académie ? » Après tout, comment imaginer qu'Ambrose oserait se cacher là où le crime avait été commis ? Comment imaginer qu'il y retournerait ? Bien sûr, une fois à l'Académie, il faudrait trouver un endroit tranquille, où les étudiants ne se rendaient pas, afin de ne pas être découverts - même si, dans ce cas, il leur suffirait d'être assez rapides pour se téléporter à nouveau - et les cachots lui semblaient être une idée aussi intéressante qu'insensée. Se rendre là où l'on était censé finir si l'on se faisait attraper, quelle bonne idée, n'est-ce pas ? Soit c'était une idée de génie, soit c'était une folie sans nom.

Échapper à Blackwood n'était pas une aventure évidente. Il fallait se protéger d'un sorcier puissant, capable des pires choses, entouré et déterminé. Ce n'était pas une chose facile lorsqu'on était un simple mortel sans pouvoir et une sorcière avec une toute petite partie de ses pouvoirs. Autrefois, peut-être auraient-ils pu le battre une fois encore, s'ils avaient été en pleine possession de leurs moyens, mais là... C'était utopiste que de croire qu'ils pourraient lui échapper éternellement. Pourtant, il n'était pas question de se rendre. S'ils devaient perdre, ils perdraient après s'être battus jusqu'au bout. Ils rendraient leur dernier souffle en se battant parce qu'ils étaient des Spellman et que les Spellman n'abandonnaient jamais.

Ce bureau n'était qu'un refuge provisoire, le temps pour eux de réunir des grimoires divers. Il fallait trouver mieux, mais où ? Ambrose proposait quelques idées, mais aucune ne semblait satisfaire pleinement sa cousine. Alors, il faisait travailler son cerveau à fond, à la recherche de la solution. Une idée lui était venue, mais elle était particulièrement risquée et surtout complètement insensée. On les cherchait partout pour les emprisonner, n'est-ce pas ? Alors, pourquoi ne pas se rendre à l'Académie, dans les cachots, là où personne ne penserait les voir ? Pourquoi se rendraient-ils là où l'on voulait les voir après leur capture après tout ? Si Ambrose était mitigé, Sabrina semblait enchantée par l'idée, qu'elle jugeait géniale. Et elle complétait même l'idée d'Ambrose en ajoutant ce qu'il avait en tête lui-même : les cachots. En effet, il leur fallait un endroit sûr à l'Académie pour ne pas être découvert et il s'agissait certainement du meilleur d'entre tous. « Personne ne nous y trouvera. » Ajouta-t-il, un sourire presque rassuré sur les lèvres. Peut-être tenaient-ils enfin une véritable piste ? Le moyen de se protéger et de s'en sortir ? Peut-être même le moyen de nuire à Blackwood pour l'éliminer directement de l'équation ?

A la demande de sa cousine, Ambrose avait pris autant de livres qu'il pouvait en porter puis il l'avait laissée les téléporter dans les cachots. Ils déposèrent les livres sur le sol et Ambrose s'installa lui-même, prêt à commencer ses recherches sans perdre de temps. Néanmoins, à la question de sa cousine, il avait relevé la tête, soucieux et inquiet. Il lui devait la vérité. « Je ne sais pas Sabrina. On ne sait même pas ce qu'on cherche, alors... » Alors comment le dire avec certitude ? Comment affirmer qu'ils trouveraient quelque chose ou que la situation était déjà perdue d'avance ? Il fallait chercher, fouiller, pour le savoir.

Evidemment, la question de Sabrina n'était pas innocente. Elle avait une idée derrière la tête : aller voir Cassius. Il avait relevé les yeux vers elle, les sourcils froncés face à cette proposition. « Je n'ai pas peur que Cassius nous dénonce, j'ai peur que quelqu'un puisse te voir. » Avoua-t-il, connaissant les penchants de sa cousine et sa fâcheuse habitude de se mettre en danger. Bien sûr, elle lui promettait de rester prudente et d'être discrète, pour l'amadouer et l'inciter à dire oui, mais... était-ce une bonne idée ? Avaient-ils plus de chances de trouver des informations utiles dans la bibliothèque de l'Académie ? « Rah... » Souffla-t-il après un court instant de réflexion, sachant qu'elle avait certainement raison. « D'accord, tu y vas, mais au moindre bruit suspect, au moindre doute, je veux que tu reviennes ici. Aucun risque inutile, rien. » Il avait sa voix la plus sévère, celle qui montrait qu'il n'était pas en train de plaisanter et qu'elle avait plutôt intérêt à faire attention. Non pas pour lui, mais pour elle. « Tiens... » Dit-il en notant quelques ouvrages sur la protection magique et d'autres contenant quelques sortilèges et potions de défense et de combat. « Demande à Cassius ces livres-là et demande-lui s'il n'a pas une idée, un livre qui contiendrait des incantations pour se protéger ou pour se défendre. Dis-lui que c'est une question de vie ou de mort et que... Il nous faut les livres contenant les sorts les plus puissants. » Qu'importe les dangers qu'ils allaient courir en jetant ces sorts ou en faisant ces potions, puisque ne rien faire revenait à signer leur arrêt de mort. Autant prendre des risques pour espérer se sauver la vie, même s'ils devaient la perdre en le faisant qu'attendre la mort bêtement.

Ils avaient un plan. Sabrina devait se rendre dans la bibliothèque de l'Académie pour trouver Cassius et un certain nombre de livres qui pouvaient leur être utile. Bien sûr, ce plan effrayait Ambrose. Il était dangereux. Il pouvait mal tourner à tout instant. Sabrina pouvait se faire repérer, attaquer, tuer. Ambrose pouvait être trouvé. Cassius pouvait refuser de les aider ou les dénoncer. Il y avait tellement de choses qui pouvaient mal se passer qu'Ambrose ne pouvait même pas toutes les citer. Pourtant, il n'y avait pas le choix. Il devait laisser Sabrina essayer. C'était ça ou fuir éternellement.

Le jeune homme mettait en garde sa cousine contre ses penchants à faire des bêtises et cette dernière tentait de le rassurer : tout allait bien se passer. Il fallait l’espérer, en effet. Ambrose, seul et sans pouvoir, ne pourrait pas faire grand-chose, malheureusement. Sabrina lui promettait, mais Ambrose avait conscience du fait que Sabrina avait une façon bien à elle d'interpréter la valeur d'une promesse. Cependant, puisqu'il n'avait pas d'autres choix que celui de lui faire confiance, il lui avait tendu un papier avec des bouquins inscrits dessus. Ceux auxquels Ambrose avait pensés, en tout cas. « Je l'espère. » Que pouvait-il dire d'autres ? Pas grand-chose...

Tandis que Sabrina s'était téléportée, Ambrose patientait sagement. Il tournait en rond. Le temps lui paraissait interminable. Le sorcier s'imaginait toutes les hypothèses possibles. Sabrina en mauvaise posture. Sabrina attaquée. Sabrina qui faisait n'importe quoi. Et, enfin, sa cousine était revenue. Il était soulagé. Il sentait un poids quitter sa poitrine. Elle était en vie, c'était déjà pas mal du tout dans leur situation. « J'étais inquiet. » Répondit-il simplement à sa remarque sur le temps qu'elle avait mis, sans le moindre reproche.

La sorcière lui expliquait que Cassius n'était pas là et qu'elle avait dû se débrouiller seule, ce qui expliquait le temps. De sa liste, elle n'avait trouvé qu'un seul livre. En tout, elle n'en ramenait que trois. Ce n’était pas beaucoup - et sa mine déçue devait le lui montrer - mais il fallait espérer que ceux-là suffisent et contiennent la solution. Après tout, Sabrina avait fait de son mieux, il le savait. En plus du livre d'Ambrose, donc, la sorcière avait ramené un livre sur la dissimulation et un autre sur les mondes parallèles. Pas mal. Elle avait, au moins, réfléchi à des choses logiques et ne s'était pas laissée emporter comme elle le faisait parfois - même s'il doutait pouvoir quitter cet endroit, en effet, jamais la ville ne les laisserait faire.

Sabrina expliquait pourquoi elle n'avait pas pu récupérer autre chose. Aux mots de sa cousine, Ambrose avait ouvert grand les yeux, plein d'inquiétude. Pourquoi n'avait-elle pas commencé par ces informations ? « Comment tu peux être certaine de ça ? Peut-être qu'il a fait semblant de ne pas te voir pour pouvoir te suivre ? Peut-être que tous les hommes de Blackwood savent que nous sommes ici et sont à notre recherche ? » Il paniquait. Il en oubliait les livres. Il voulait d'abord être certain que sa cousine ne courait aucun risque. Et lui non plus. « Alors, en es-tu bien certaine ? » Redemanda-t-il, une fois encore.

Ambrose angoissait, tout seul dans cette prison, à attendre sa cousine. A tout moment, elle pouvait se faire prendre. Et comment le saurait-il ? Comment saurait-il que cette dernière ne reviendrait pas et qu'il devait agir pour la protéger ?

Heureusement pour lui, ses angoisses avaient disparu à l'instant où sa cousine était revenue vers lui. Pas avec de bonnes nouvelles malheureusement. Elle n'avait pu rapporter qu'un livre de sa liste et deux autres livres qui lui paraissaient utiles. C'était peu, mais ce n'était pas le pire. Le pire, c'était qu'elle avait été interrompue. Quelqu'un était arrivé dans la bibliothèque, mais elle était persuadée qu'on ne l'avait pas vu. Il l'espérait. Sincèrement. Sinon, ils étaient encore plus dans le pétrin qu'ils ne l'étaient déjà - si c'était possible .

Face aux craintes du cousin, la cousine tentait encore de le rassurer, lui assurant que personne ne l'avait vue. Personne n'était encore arrivé pour les attaquer alors... Peut-être avait-elle raison ? L'homme s'était simplement retrouvé dans cette bibliothèque par hasard et n'avait rien remarqué de suspect. Ambrose allait se contenter de cette version et s'en convaincre pour pouvoir se concentrer sur tout autre chose. « Très bien, très bien... » Souffla-t-il, faussement convaincu, mais prêt à passer à autre chose.

Il devait désormais se concentrer sur tout autre chose. Trouver une solution pour quitter cet endroit, et vite. Il fouillait donc les livres avec rapidité, mais attention. L'idée n'était pas de passer à côté de quelque chose d'important en allant trop vite. Ils ne s'en sortiraient pas davantage dans ce cas-là. « Par Satan, je ne suis pas devin. » Alors il ne pouvait pas deviner le contenu de ces livres comme par magie - malheureusement - il devait les feuilleter et les lire. « Poil au sapin. » Ajouta-t-il dans un murmure, comme pour détendre l'atmosphère ou se détendre lui-même, il ne le savait pas très bien.

Il était bien d'accord, il ne fallait pas perdre de temps, mais il fallait lui en laisser, malgré tout. L'impatience de sa cousine ne l'aidait en rien, bien au contraire. Elle le stressait, lui faisait perdre du temps, le ralentissait. C'était insupportable, même s'il comprenait son état et son inquiétude. C'était en grande partie pour lui qu'elle s'inquiétait après tout, et ça le touchait, bien sûr. Cependant, il avait besoin de calme et de temps. « J'ai ! » S'écria-t-il, peut-être un peu trop fort dans de telles circonstances. « On va se rendre indétectable aux yeux de ceux qui nous poursuivent, en changeant notre apparence et en empêchant notre localisation. » Sorts qu'ils n'avaient jamais utilisé, mais avec les bons livres et les bons ingrédients, ça ne devrait pas être trop compliqué. Il s'agissait de sorts de base, pas de choses hyper compliquées comme il avait déjà été amené à faire par le passé, lorsqu'il possédait encore ses pouvoirs.

Il tournait le livre vers elle en désignant une page de sa main, afin de lui indiquer une liste. « Il faut ces ingrédients. Tu dois aller les chercher le plus discrètement possible, d'accord ? » Elle s'en doutait, mais elle préférait lui répéter. « Le sort aura ses limites, mais il nous permettra d'avoir le temps de réfléchir à une solution plus durable. » Comment quitter cet endroit, prouver son innocence ou combattre Blackwood, par exemple, sans avoir une épée au-dessus de la tête à chaque instant.

Chercher une solution à un tel problème sans posséder le moindre pouvoir, c'était compliqué. Il ne pouvait pas savoir à l'avance si les choses fonctionneraient et si elles ne fonctionnaient pas, il ne pouvait rien faire pour les défendre. Une fois encore, Sabrina était seule sur ce coup-là. Il n'était qu'un soutien, un appui. Il utilisait son cerveau pour leur trouver des solutions. A force de recherches, alors, il avait fini par trouver quelque chose. Une potion qui les rendrait non seulement différents physiquement, mais qui, en plus de tout, rendrait leur localisation impossible. Ils ne prendraient pas seulement l'apparence de quelqu'un, ils deviendraient d'autres personnes en quelque sorte.

C'était, encore une fois, à Sabrina de jouer. Elle devait trouver la liste des ingrédients tout en restant discrète, une fois encore. « Ça ne risque pas... » Soupira-t-il alors qu'elle lui disait de ne pas bouger, qu'elle ferait vite. Il n'avait d'autres choix que de rester coincé ici à attendre, à son plus grand regret. Alors, pendant ce temps, pendant que Sabrina risquait sa vie, le jeune homme stressait à l'idée de tout ce qui pouvait arriver à sa cousine. Il se sentait inutile. Il tournait en rond. Il observait les bouquins.

Et, enfin, Sabrina était revenue. Ambrose restait sous le choc, dans un premier temps. Immobile, il voyait bien que sa cousine avait été attrapée par ses hommes, elle en portait encore les marques. Et il voyait bien qu'elle avait été découverte parce qu'elle se pressait à tout réunir pour pouvoir prendre la fuite rapidement. Ils avaient été découverts. Ils étaient fichus. « Tu vas bien ? » Avait-il quand même demandé en rassemblant également leurs affaires, malgré la panique qui était en train de l'envahir.

Il était risqué de se rendre chez eux, mais s'il manquait une herbe, ils n'avaient pas vraiment le choix. Alors, il ne répondit rien et ne protesta pas. Il laissait Sabrina les téléporter là-bas, même s'il avait conscience du danger énorme qui pesait au-dessus de leur tête. Une fois chez eux, Ambrose avait posé tous les ingrédients sur la table et avait rouvert le livre à la bonne page. Sans perdre une seule seconde, il avait ajouté tous les éléments avec précision, mais rapidité. Ce n’était qu'une question d'habitude, il ne devrait pas faire d'erreur. « Juste une seconde. » Avait-il soufflé en terminant de verser un autre élément. Puis, il avait attrapé l'herbe tendue par Sabrina pour l'ajouter à la potion. Il se passa alors quelque chose d'inattendu. Une petite explosion eut lieu. Explosion qui n’était pas prévue au programme. « C'est pas normal, ça... » Souffla-t-il. Mais il n'avait pas le temps de s'en inquiéter davantage. Leur temps était compté. Il plongea donc deux verres dans la potion et en tendit un à Sabrina. « Tu bois sans t'arrêter et tu prononces ces quelques mots ensuite. » Et Ambrose en fit de même.

A l'instant où il avait fini de prononcer son dernier mot, un bruit lui parvint du salon. Blackwood était là. Cependant, leur localisation devait être cachée désormais - enfin, c'était ce qu'ils pensaient, puisqu'en réalité leur petit sortilège n'avait pas fonctionné, l'erreur d'herbe avait eu un tout autre résultat : ils n'avaient pas changé de personnalité pour se rendre invisible aux yeux de Blackwood, ils avaient échangé leurs pouvoirs et leurs natures. Ambrose était désormais perçu comme le fils du diable et d'une humaine et possédait tous les pouvoirs de sa cousine. Sabrina était une sorcière sans pouvoir, ce qui n'allait certainement pas arranger leurs affaires.

La magie, et surtout la concoction de potion, était un art précis qui ne laissait que peu de place au hasard et à la chance. Ambrose le savait parfaitement. Il ne fallait jamais se précipiter ou mal faire les choses. C'était un risque trop grand. Vraiment trop grand. L'explosion de la potion à l'ajout de cette herbe aurait dû lui mettre la puce à l'oreille et le convaincre de ne pas consommer de cette mixture. Pourtant, désespéré, à court de temps et d'idées, il avait plongé deux verres dedans et en avait tendu un à sa cousine. Ensemble, ils avaient bu jusqu'à la dernière goutte avant de réciter quelques mots pour activer l'effet de la potion.

Aussitôt, Blackwood était entré dans la maison des Spellman, ce qui les poussait à chuchoter et espérer. « Moi non plus. » Chuchota-t-il à sa cousine, inquiet. Ils n'étaient pas très différents. Peut-être qu'entre eux, ils se voyaient normalement ? Peut-être n'était-ce destiné qu'à tromper ceux qui n'avaient pas bu de la potion ? Mais si leur apparence n'avait pas changé, il y avait pire encore. Leur localisation n'était pas cachée. Blackwood, avec une précision incroyable, venait de dire où les trouver. Cette potion était donc complétement ratée ? Comment était-ce possible ? Ambrose aurait dû se douter que les choses ne pouvaient pas être aussi simples, évidemment. Jamais rien ne l'était dans cet endroit maudit. « Je ne sais pas, le sort n'a pas fonctionné, j'en sais rien... » Paniquait-il en chuchotant et en faisant les gros yeux à Sabrina. Comment pouvait-il savoir ce qui était en train de se passer ? Il était aussi perdu et paniqué qu'elle.

La sorcière voulut donc les faire disparaître, mais ça ne fonctionnait plus. Elle avait perdu ses pouvoirs ? Non ! Tout, mais pas ça ! Là, ils étaient fichus pour de bon. Blackwood n'était plus qu'à quelques mètres et eux étaient bloqués dans cette cuisine. La panique d'Ambrose atteignait des sommets. « Chut ! » Avait-il dit, un peu trop fort, à sa cousine qui perdait contenance et qui, dans la panique, parlait trop fort. « Cousine, regarde-moi... » Il paniquait pour de bon. Ses mains dans les siennes, il répétait une fois encore, alors que les hommes de Blackwood et Blackwood entraient dans la pièce, près à les attaquer. « Répète après moi, ça va fonctionner : Lanuae Magicae ! » Il avait voulu lui donner du courage et la motiver, mais ses mots à lui avaient réussi à les transporter ailleurs, ce qu'il ne comprit pas immédiatement. « Ça a fonctionné ? Tu as réussi ? » Il ne l'avait pas entendu dire ces mots qui les avaient conduit dans la maison de la professeure de Sabrina, mais elle avait réussi, semblait-il, puisqu'ils y étaient.