Ébène. (Alucard)

Lisière de Mirkwood, Lockwood Hill
≈ 01h40 am, @Alucard Hellsing.

Finalement, traîner aussi tard le soir avait eu raison d'elle.
Finalement, ce qu'elle savait être une très mauvaise idée depuis le début, l'avait rattrapée au moment où elle s'y attendait le moins...
C'est drôle, tout de même, comme les gens peuvent facilement sentir lorsqu'ils sont face à quelqu'un de vulnérable. Et à ce moment précis, elle l'était, vulnérable. Il y avait ce type quelconque qu'elle avait rencontré dans un petit pub pas très loin de Mirkwood. Une personne assez ordinaire, qui, de prime abord semblait assez inoffensive. Un peu timide, un peu pataud mais suffisamment généreux pour l'abreuver toute la soirée. Une aubaine, hein ? Sans doute la pire de ses décisions, oui. La pire de tes conneries... Rares étaient les fois où Fenris s'était trompé sur le compte de quelqu'un, rares étaient les fois où son instinct n'avait pas su fonctionner au moment où elle en avait le plus besoin. L'alcool avait probablement son rôle à jouer là-dedans mais, quoi qu'il arriverait, quoi qu'il se passerait ce soir, c'était bien l'unique et dernière fois qu'elle se laisserait aussi facilement berner.
Alors donc, d'une soirée relativement calme, - presque ennuyante passée avec un bougre qu'elle croyait sans cervelle - Fenris était passé à son total extrême : se retrouvant perdue au beau milieu de nul part, encerclée par une bande de 5 énergumènes dont les intentions mauvaises pouvaient aisément se lire sur leurs visages. N'étant pas de celles qui s'écrasaient facilement, la louve avait bien évidemment opposée résistance, allant même jusqu'à mordre l'un des bras de ses assaillants. Malheureusement pour elle, ses mâchoires étaient bien moins puissantes qu'autrefois et, un coup de poing en plein dans la figure suffit à lui faire lâcher prise. Qu'est-ce qu'ils voulaient déjà ? De l'argent ? De la drogue ? Du sexe ? Un peu de piment dans leurs vies merdiques à souhaits ? Si les pensées de Fenris s'étaient déjà grandement troublées avec le contact du poing fermé contre sa joue, elles devinrent encore plus défaillantes au moment où une lame froide et contondante transperça son flanc gauche. A quel moment avait-il sorti son couteau ? A quel moment as-tu perdu à ce point le contrôle, idiote. La femme hurle, pousse un cri déchirant que ses agresseurs s'empressent de surjouer. Elle se fait un peu malmener, la brune, désormais poussée à droite à gauche comme un ballon que des enfants se passent en riant. Relayée au statut d'un vulgaire jouet, elle s'écrase finalement contre le sol, le trou béant laissé par l'arme ne cessant de se vider. Quelques hurlements à son égard, quelques ordres claqués avant que finalement elle ne soit saisie et remise debout. Elle titube, cherche un point d'appui tout en tentant vainement de contenir le sang qui s'écoule jusqu'à ce que, dans un nouveau râle d'agonie, elle ne termine par s'effondrer à genoux. Eux, s'en fiche pas mal, et on lui annonce même le début d'un nouveau jeu. Un jeu auquel elle va devoir survivre, un jeu dans lequel elle va devoir faire preuve de finesse et de rapidité. Mon cul. Une partie de chasse ? Bah voyons. C'était l'hôpital qui se foutait de la charité....

« Allez. Cours, petite souris. » Si fuir n'avait jamais fait partie de ses habitudes, il fallait bien admettre qu'en cet instant, Fenris était en très mauvaise posture. Seule, faible et blessée. Faire face à ses assaillants et goûter à une mort sans doute inévitable ne lui faisait pas peur mais, l'idée même de disparaître dans cet univers sans peut-être aucune possibilité de revenir un jour n'était clairement pas envisageable pour elle. Alors elle se redressa, malgré cette douleur horrible qui lui scié l'abdomen, malgré toute la haine et toute la rage qu'elle avait envers ses 5 hommes. Il était hors de question qu'elle meurt ici, dans cette forêt, sans ne serait-ce l'avoir revu, elle, au moins une fois. Fenris se mis à courir, aussi vite qu'elle le pouvait, boitillant maladroitement en direction de la lisière de la forêt sombre qui menaçait d'engloutir quiconque pénétrerai en son sein. « Cours. » Son agresseur principal venait d'essuyer le sang de sa lame contre le pan de son t-shirt, observant la jeune femme s'éloigner de lui et de sa petite bande. Où comptait elle aller cette cinglée ? Est-ce que, réellement, elle pensait pouvoir s'en sortir aussi facilement ? Un rictus mauvais se dessina à la commissure de ses lèvres et, après avoir fait signe à ses acolytes d'avancer à sa suite, se dirigea vers la pauvresse qui tentait toujours de s'enfuir. « C'est ça, petite souris. Essaye de t'enfuir. » Fenris bouillonnait, fulminait de rage. Une rage si folle et si dévorante qu'elle aurait pu la faire s'embraser quasi instantanément. Si seulement elle pouvait rétorquer, si seulement elle pouvait tous les tuer.... Mais ce corps... ce corps était si fragile, si faible.. si... inutile qu'à peine la seconde lignée d'arbres franchies, elle s'effondra une nouvelle fois sur le sol tel un poids mort qui chute d'une grande hauteur, à bout de forces, à bout de souffle. Ainsi donc, voilà comment Fenris allait mourir. Pas ici. Tuée par de simples mortels. Pas comme ça.. Le corps endoloris elle se recroquevilla sur elle même, gémissant de douleur et de colère tandis que, plus loin, elle pouvait entendre leurs rires. Gras, prétentieux et insolents. Maudits soient les Hommes. Qu'ils brûlent tous dans les flammes d'Hela. Que son courroux soit terrible et qu'elle fasse déferler sur ce monde une fureur que jamais encore aucun des 9 royaumes n'avait connue... qu'ils meurent, tous autant qu'ils étaient.
Mais... alors qu'elle sentait son heure approcher. Alors qu'elle s'imaginait déjà partir, une puissante et violente douleur transperça son corps, du sommet de sa tête, jusqu'au au bas de ses chevilles. Un courant électrique si brutal qu'il vint secouer son frêle petit corps tout en lui arrachant un hurlement terrifiant. Et, tandis que le flot d'électricité se rependait au travers de ses membres, une chose d'inattendue, d'inespérée ce produit. Ses pâles mains couvertes de sangs devinrent soudainement noires et puissantes. Ses fines jambes nues se changèrent en masses imposantes et velues. Elle se métamorphosait, se transformait en cette créature qui l'avait toujours représentée. Enfin. Elle revenait. Enfin. Fenris ressuscitait.

Si le loup aurait pu sourire, il l'aurait aisément fait. Car, plus son corps redevenait lui même, plus les 5 hommes s'approchaient. Ils riaient toujours, plus fort encore depuis qu'ils avaient entendus le hurlement qu'avait poussé cette jeune femme dont ils pensaient avoir scellé le sort. « Où est-ce que tu te caches, petite souris ? » Petite souris, oui... Fenris avança d'un pas, contemplant avec une immense joie ces griffes si meurtrières qui ne demandaient qu'à être une fois encore souillées de sang frais. Elle s'extirpa de la forêt de toute sa superbe, un grognement rauque et ténébreux emprisonné entre ses crocs. Les rôles étaient inversés désormais et il y avait bien trop longtemps qu'elle n'avait pas chasser.
Les humains étaient tout d'abord restés figés en découvrant l'imposante bête sortie de l'épaisse forêt noire. Mais, bien rapidement, leurs instincts de survie prirent le dessus et ils se mirent tous à courir dans la direction opposée. Tous, excepté celui qui avait poignarder la jeune femme un peu plus tôt et qui semblait complétement tétaniser par la peur. Fenris grogna, ouvrant sa gueule tout en contemplant de haut ce qui allait devenir son prochain repas. « CoURs, PeTitE SoUrIS. CoURs. » C'était la première fois que Fenris parlais sous forme lupine, la première fois qu'elle parvenait à s'exprimer autrement que par des grognements rauques et caverneux. L'homme au couteau se décida enfin, lâchant d'ailleurs son arme avant de détaller comme un petit lapin apeuré. Fenris, de ses pupilles flamboyantes observait la scène avec contemplation, se remémorant alors toutes ces belles années où elle avait tant endiguer l'effroi dans l'esprit des gens. Quel bonheur que d'entendre à nouveau ces cris de terreurs. Quel bonheur que de voir à nouveau l'épouvante dans les yeux de ses futures victimes. Elle s'étira, la louve, prenant le temps de bien réveiller chaque partie de ce corps qu'elle n'avait cessé d'espérer. Enfin, elle revivait. Enfin, elle redevenait elle même. Comme tout cela lui avait manqué...

Elle s'élança à la poursuite du groupe, les rattrapant avec facilité du fait de ses 4m de hauteur passées. Sautant ensuite par dessus eux, Fenris atterrit à l'entrée de la forêt Nord, unique accès à la route depuis la clarière dans laquelle ils se trouvaient. « AllOnS aLLOns. VoUS n'ALLez tOUt dE MêME pAS Me QUitTEr maINTeNAnT ? » Sa voix n'avait plus rien d'humain et ressemblait désormais à un mélange entre grognements et murmures semblables à ceux des défunts que l'ont entend dans les films. Les 5 hommes hurlaient, suppliant la bête de les épargner, s'excusant pour tout ce qu'ils avaient fait. Pathétiques. Certains - dont les réactions semblaient plus éveillés que celles des autres - avaient déjà fait demi-tour et s'éloignaient désormais de l'autre côté, en direction du cœur même de la forêt noire. D'un coup de patte meurtrier, l'imposante bête décapita l'un des moins rapide qui d'ailleurs semblait être celui qui l'avait tout droit mené dans ce guet-apens. Dommage, elle l'aurait bien gardé un peu plus en vie celui-là.
Après avoir contemplé la tête valser et s'écraser sur le sol dans un bruit sourd, elle repris sa course à la suite des 4 autres. La clarière dans laquelle ils se trouvaient été vaste, et si pour Fenris, il ne fallait que quelques enjambées pour rejoindre l'autre côté, pour les humains, le chemin était beaucoup plus long.
L'un après l'autre, elle vint mettre un terme à leurs vies. L'un après l'autre, les humains périrent. Tous, excepté le dernier. Lui, méritait un traitement bien spécial pour s'être monté aussi prétentieux et odieux. Elle joua avec lui un long moment, le faisant aller de gauche à droite, bloquant systématiquement le passage pour qu'il rebrousse chemin. En plus d'être complétement apeuré, Fenris voyait bien qu'il s'essoufflait, que ses jambes flagellaient et que bientôt, il abandonnerait. Et c'est ce qui arriva. Quelques secondes à peine après. L'homme s'effondra à genoux, suppliant l'immense créature de le pardonner, encore une fois. Il pleurait, et à en juger l'odeur, c'était même uriné dessus. Fenris le contempla un moment, observant avec dédain cette pauvre chose qui s'aplatissait devant elle, cherchant par tous les moyens possibles et inimaginables de s'attirer les faveurs de la louve en face de lui. Il proposa de l'argent, du pouvoir, allant même jusqu'à déclarer qu'il pouvait lui offrir de quoi se nourrir pendant plusieurs lunes. L'offrande de dizaines, de vingtaines de personnes de son espèce en échange de sa piètre et misérable vie, à lui. Fenris lâcha un gargouillis semblable à un rire tout en s'approchant du moustique qui ne cessait de pleurer entre ses pattes. Il était temps d'en finir. Il était temps de mettre un terme à cette vie abjecte et toutes ces jérémiades. Elle s'approcha, ouvrant sa gueule béante, le laissant contempler ses canines aiguisées. Il hurla comme encore jamais il n'avait hurler. Hurla jusqu'à ce que finalement plus aucun son ne retentisse dans la clairière, rien, hormis le craquement de ses os dans la gueule du loup. Elle le mâchouilla quelques secondes à peine avant de le recracher, visiblement dégoûtée.
Pourri.
Jusqu'à la moelle.