The best nights are usually unplanned, random, ans spontaneous
Un grain de folie, une envie soudaine de changement... Je ne peux dire exactement ce qui m'a poussé à passer les portes de ce nightclub duquel je n'avais jamais mis les pieds auparavant. Peut-être serait-ce simplement la lassitude du quotidien et ce besoin de renouveau, d'un air différent que celui que je connais depuis toujours ? Il est difficile de déceler la raison de ma venue ici mais il était maintenant trop tard pour faire demi-tour. J'avais plutôt l'habitude de me rendre dans un autre club, plus select, plus centré sur l'élégance que celui-ci même si selon les rumeurs il était reconnu dans l'entièreté de la ville. Mais beaucoup moins sélectif sur ses clients... heureusement, je ne m'étais pas vêtu comme à l'accoutumée avec un costume, un chapeau ou encore une cape. J'avais pris la bonne décision d'être plus classique, un pantalon noir, une chemise blanche et un air faussement décontracté. Il y avait bien longtemps que je n'avais pas pris le temps de m'amuser, si longtemps que je me demandais parfois si j'en étais encore capable. Edmond,lui était beaucoup plus jovial, motivé et entreprenant. En réalité c'était peut-être juste lui qui avait envie de sortir ce soir. Encore plongé dans cette dualité, il m'était difficile de le laisser prendre le contrôle, de le laisser essayer d'être lui-même. Edmond... Tu n'es plus, tu n'es plus depuis bien longtemps maintenant.
Même si je n'étais pas forcément à ma place, j'essayais de me faire assez discret et de "profiter" de cette soirée. Beaucoup de monde se déhanchait sur la piste de danse pendant que d'autres buvaient à en perdre la raison. Deux choses qui me dépassaient un peu pour être honnête. Je m'étais contenté de m'assoir à une table, seul, un verre encore rempli posé sur celle-ci. Mon regard se baladait dans la totalité du club, me demandant encore pourquoi je me trouvais ici à une heure aussi tardive. Mais une sensation me poussait à rester là, à profiter, à regarder la débauche que je n'ai jamais pu connaître dû à ma condition ou même à cette période de l'histoire pendant laquelle j'ai vécu. Ce monde était bien différent que celui que j'avais connu, avec une technologie que j'avais parfois du mal à cerner mais qui pouvait se montrer fort utile en temps voulu. De temps à autre, des gentes dames venaient m'accoster, me demandant de leur payer un verre ou de les inviter sur la piste de danse mais chacune accusait d'un refus catégorique de ma part. J'avais bien du mal à partager ce genre d'instant avec la gente féminine, encore frais de cette relation passée et disparue avec Mercédès. Les nombreux refus semblaient s'être éparpillées dans le club, le mot était passé que j'étais juste un homme seul présent pour reluquer sans toucher. J'entendais même certains dire que j'étais un curé ou quelque chose dans ce style là. Cette idée m'amusait quelque peu alors que je prenais enfin le temps de boire le contenu de mon verre, un whisky, pur, sans glace ni autre arôme.
Je soupirais quelque peu, peut-être qu'il était temps que je m'en aille avant que la populace me remarque même si je m'étais rasé pour l'occasion, je n'avais pas spécialement envie que l'on me reconnaisse surtout si on me prenait pour un pervers ou un homme d'église. Mais mon regard se posa sur un homme qui sortait du lot, un homme bien loin de tout ce que j'ai pu connaître dans ma vie. Un homme libre, pour sûr. L'espace d'un instant, je croisais son regard alors que mes yeux changèrent bien vite de direction. Je ne voudrais pas avoir des ennuis inutiles, ne connaissant aucunement la nature de celui-ci mais il semblait bien plus s'amuser que moi. Un regard sur ma montre alors que l'heure affichée s'approchait des une heure trente du matin. La nuit ne semblait que commencer pour certain mais au vu de la situation, il serait plus judicieux qu'elle touche à sa fin pour moi. Avant toute chose pourtant, je devais terminer ce verre.
— A toi mon cher Edmond, à toi qui aurais pu t'amuser ici, dans une autre vie...
Que j'avais chuchoté à moi-même en portant un toast à une personnage invisible, à moi-même en réalité. Et d'un mouvement vif et contrôlé, je terminais mon verre d'une seule traite, bien décidé à quitter les lieux tout bientôt. Et je n'avais pas remarqué, bien entendu, que l'homme que j'avais aperçu quelques instants auparavant, s'approchait dangereusement de ma table.
Un homme libre ou un homme qui n’a rien à perdre. Est-ce différent ? Pas vraiment. Après tout, la vraie liberté est certainement de n’avoir rien à devoir à personne, pas de famille à protéger et encore moins l’inquiétude de crever du jour au lendemain. T’avais été un dieu libre car un dieu abandonné par ceux qui jugeaient l’apparence avant tout autre chose et t’avais fini par accepter cela en compagnie de ton meilleur ami, même si ta nature même t’empêchait de profiter réellement de la vie sans devoir t’imposer pour avoir quelques secondes d’amour. Amour factice certes, mais on se contente de ce qu’on a. T’avais fini par trouver une place plus ou moins correcte et t’avais traversé le temps ainsi, veillant sur les hommes du mont où t’étais né, te gorgeant d’alcool et de fêtes avec Dionysos.
Et puis l’humanité. Quelle surprise de se réveiller soudainement dans le corps d’un humain. Exit le bouc, exit les pouvoirs, exit beaucoup trop de choses. T’avais déconné, t’avais profité et t’avais été rattrapé par une humanité qui était capable du meilleur comme du pire, tout comme les dieux. Le fait que n’être plus fuit par ta laideur t’avait permis d’apprendre pas mal de choses qui t'empêchait de finir en prison, mais tu restais quand même un mec un peu trop nature et cela dénotait pas mal. Que ce soit ton style femme/homme avec tes cuissardes, ta jupe et ton crop top élimé démontrant bien que t’es un mec ou ton caractère.
Normalement t’es plutôt au donjon ou sur scène à cette heure là de la nuit mais pour une fois t’es au Lux. Ah t’as pas trop le style de l’endroit mais tu commences à être assez connu pour qu’on te laisse quand même entrer parce que ça ramène du monde et que le boss n'est pas débile. C’est quand tu récupères ton verre que tu croises un regard qui t’intéresse. Faut dire que ça murmure des tonnes de trucs sur le beau brun ténébreux qui repousse toutes les avances, donc difficile de faire la sourde oreille. Si les autres sont respectueux de sa demande, tu connais absolument pas la définition de ce mot donc tu prends un verre au hasard sur le bar, te moquant de prendre la commande de quelqu’un d’autres -et le barman aussi comme il se fera payer quand même à la fin- et te dirige avec les deux verres vers sa table. De ta démarche fluctuante, démontrant que t’es bourré ou bien que les jambes humaines sont pas ta référence -voir les deux-, tu fends la foule avant de t’écrouler sur la chaise à côté du mec.
« Salut sexy. T’sais qu’il y a des paris sur toi ? Moi j’dis que t’as pas la gueule d’un curé, juste que t’as peut être pas envie d’assumer qu’t’as envie de t’faire draguer. »
Tu te marres en lui filant un des deux verres au hasard, très envahissant et ne te posant absolument aucune question sur le fait que tu l’emmerdes. Après tout, si on n’a pas envie de parler aux gens, on ne vient pas dans un club.