Fomenter sa vengeance ▿ Violet

Mary réfléchissait. Elle avait passé une bonne partie de la matinée à réfléchir. La présence de sa cousine l'a tourmenté. Pourquoi était-elle là ? Était-ce une chance qui lui était offerte ? Une chance de se venger ? Même si ce n’était pas le cas, Mary allait le faire. Elle devait le faire. Surtout, elle avait envie de cette vengeance. Depuis ses retrouvailles avec son bourreau Mary avait réfléchi à comment nuire à sa cousine. Elle savait qu’elle devait être discrète, car ici, elle n’était plus reine. Elle n’avait plus les privilèges qui lui était autrefois accordés. Mais elle savait qu’Elizabeth avait une stagiaire. Une certaine Violet. Mary l’avait remarqué quand elle avait retrouvé sa cousine. Dans ce monde, Mary ne connaissait que cette personne qui était en contact avec sa cousine. Donc, en attendant, c’était la seule personne qui pouvait lui apporter des informations concernant Elizabeth. Mary devait être subtile et discrète. Elle devait se montrer gentille, aimable, agréable et appréciable avec cette jeune fille, car elle devait être appréciée. Elle devait gagner sa confiance. Mais surtout, elle ne devait pas se faire repérer. Elle ne savait pas comment était cette fille, elle ne savait pas si elle était fidèle à sa cousine ou non. Mais Mary ne devait pas être dénoncée. Elizabeth ne devait jamais apprendre ce que complotait Mary dans son dos.

Mary avait effectué le même trajet que quelques jours plus tôt. Elle était déterminée. Elle devait se venger. Pour cela, elle était prête à tout. La jeune mère attendait dans un coin de la rue, les yeux fixaient sur la porte du cabinet de sa cousine. Elizabeth devait quitter le cabinet pour l’heure du déjeuner, normalement. Mary avait attendu une quinzaine de minutes avant que sa cousine ne parte. Elle pouvait désormais s’avancer pour voir si Violet était là. Elle devait faire vite, car elle ne savait pas quand sa cousine allait rentrer. Mary venait d’ouvrir la porte, même si normalement le cabinet était fermé, après tout, elle n’était pas là pour une visite médicale. Une jeune femme était là, de dos, elle ressemblait à Violet. « Excusez-moi. Violet, c’est bien ça ? » Mary s’avançait tout sourire vers la jeune femme, avant de reprendre la parole. « Je ne sais pas si vous vous souvenez de moi, mais nous nous sommes vues, il y a quelques jours. Nous n’avons échangé que quelques mots, mais j’avais envie de faire plus ample connaissance avec vous. » Toujours très souriante, Mary enchaînait les mots avec une telle douceur. Elle devait être appréciée par Violet. « Si vous avez le temps, j’aimerai vous inviter à déjeuner. Enfin, si vous en avez envie bien évidemment. » Mary s’efforçait de sourire, mais au fond d’elle, elle ne faisait que penser à sa vengeance, elle espérait que Violet allait accepter.

Le moment du déjeuner approche mais tu n’es pas prête pour aller déjeuner. Il te reste encore une énorme de papiers à trier et à ranger dans leurs dossiers respectifs. Elizabeth est ce qu’elle est, et en l’occurrence, elle n’est pas très ordonnée. À croire qu’elle n’a jamais eu à ranger de sa vie. Dans tous les cas, tu t’es donnée cette mission pour ce matin, et bien que la tache soit bien plus ardue que ce à quoi tu t’attendais en te lançant, et bien maintenant que tu y es, tu y restes. C’est pour ça que quand Elizabeth te dit qu’elle va manger et qu’elle te demande si tu veux l’accompagner tu déclines poliment. Tu as du travail et tu n’aimes pas faire de pause tant qu’il n’est pas terminer. Tu entends donc la porte claquer et te focalises à nouveau sur ta tache.

Quinze minutes plus tard, voilà qu’à nouveau la porte s’ouvre. Tu fronces les sourcils, perplexe. Elizabeth aurait-elle oublié quelque chose ? Son porte monnaie ? Tu te redresses, observant un bref instant tous les papiers qui jonchent le sol sur des piles ordonnées. Tu n’as pas le temps de te diriger vers l’entrée que déjà une voix se fait entendre. Une voix que tu as déjà entendue, et qui n’est pas celle d’Elizabeth. Le cabinet est fermé pendant la pause déjeuné, mais cela n’a pas empêché la jeune femme de venir. Et tu comprends pourquoi quand elle te demande toi, personnellement. Tu acquiesces en silence quand elle prononce ton prénom. Oui, c’est bien toi. Qu’est-ce qu’elle te veut, au juste ? Tu n’as pas le temps de poser la question qu’elle semble lire dans tes pensées et s’explique plus amplement sur la raison de sa présence en cette heure décalée. « Vous êtes Mademoiselle Stuart, que tu réponds avec politesse et d'une voix neutre. » Tu as une très bonne mémoire, ce qui t’est utile dans bien des domaines. Elle te demande si tu souhaites déjeuner avec elle, ce qui te surprend étant donné que, comme elle le dit, vous vous êtes à peine adressées la parole. Tu n’as pas l’habitude que les gens t’abordent comme ça, sans réelle raison, pour vouloir faire connaissance avec toi. Mais peut-être que dans ce monde les coutumes sont différentes. Tu jettes un regard à ta pile de dossiers, te disant que de toute manière tu as presque fini. « D’accord, mais il ne faudra pas que ce soit trop long. J’aimerai avoir fini ce travail avant que le Docteur Tudor revienne. » Tu remets ton bustier en place, attrapes ton sac à main qui est posé dans un coin de la pièce, puis te diriges vers la sortie. « Je suis prête. Tu ouvres la porte et lui fais signe de passer devant. Où voulez-vous aller ? » avant de refermer une bonne fois pour toute derrière vous et de fermer à clés.

Violet avait reconnu l’ancienne reine d’Écosse. Elle ne l’avait pas reconnu pour son titre, non, bien évidemment. Ici, Mary était une fille comme les autres, pas de couronne, pas de privilèges, pas de courbettes, pas de décisions importantes à prendre, pas de guerre, pas de complots contre sa personne et ses proches… Ici, elle n’était que Mary Stuart. Aux yeux de Violet, elle n’était que celle qui s’était emportée auprès de sa patronne. Mais elle devait avoir une autre image désormais. Elle devait se montrer différente auprès de Violet. « Oui, c’est bien cela, je suis Mary Stuart. » La jeune femme affichait un sourire. Avant que Violet ne reprenne la parole. Elle devait, ou plutôt, elle voulait rentrer tôt pour terminer ce qu’elle était en train de faire. Elizabeth là forçait à faire cela ou c’était simplement par amitié, par sympathie envers Elizabeth ? « Ne vous en faite pas. Je ne vais pas vous ennuyer très longtemps. Je promets de vous libérer rapidement. » Où allaient-elles manger ? La question ne se posait pas pour Mary. Elle savait très bien où emmener celle qui allait devenir son amie, celle qui allait devenir son informatrice à ses dépens. Du moins, elle l’espérait. « Je connais un petit restaurant pas très loin d’ici. Ce qu’on y vend est excellent. » Mary y avait de très nombreuses fois mangé depuis son arrivée ici. Elle n’avait pas vraiment l’habitude de faire à manger et savoir qu’elle pouvait encore se faire servir était quelque chose d’agréable pour elle, quelque chose de familier pouvant lui rappeler son ancienne vie. Ses proches. Ceux qu’elle aimait. Son confort.

Après quelques minutes de marche, les deux jeunes femmes étaient arrivées au restaurant. Mary poussait la porte, entrant la première invitant Violet à faire de même. Voyant que la table qu’elle appréciait le plus était encore libre, elle s’y dirigea invitant Violet à s’y installer. « Installez-vous à cette table et choisissait ce qui vous fait plaisir sur la carte. Je vous invite. » Mary souriait, d’un sourire faux, mais elle devait se montrait douce et gentille. Elle devait passer pour une très bonne personne, n’ayant rien de méchant en elle. Elle devait montrait qu’il n’y avait que du bien en elle et qu’elle ne pouvait être qu’inoffensive. En d’autres termes, elle devait jouer la parfaite petite idiote. « Je sais que vous n’avez pas beaucoup de temps, alors je vais aller droit au but. Quand je suis venue voir Elizabeth… Le docteur Tudor. Vous avez certainement entendu quelques cris à travers les murs. Je ne suis pas très fière de moi. Je n’avais aucunement envie de m’engueuler avec elle. Et j’aimerais véritablement me faire pardonner. Nous nous connaissions dans une autre vie. Nous étions de la même famille, mais je ne connais que très peu de chose sur Elizabeth. Et pour me faire pardonner, j’aimerais vraiment frapper là où il faut. Lui faire vraiment plaisir et pour cela, j’ai besoin d’en apprendre un peu plus sur ma cousine. C’est pourquoi je vous ai demandé de venir déjeuner en ma compagnie. Que pouvez-vous m’apprendre sur Elizabeth ? Vous travaillez avec elle, vous la voyez tous les jours ou presque, vous en savez certainement plus sur elle que moi j’en connais. Qu’est-ce qu’elle aime ? Qu’elles sont les personnes qu’elle fréquente régulièrement ? Dîtes-moi tout. Je vous écoute. » Mary n’avait aucunement envie de se faire pardonner, mais ça Violet devait l’ignorer. Mary était parfaite dans l’art du mensonge, elle ne laissait rien paraître, tout était contrôlé et tout semblait vrai. En réalité, si elle voulait en apprendre sur sa cousine, qu’elle ne connaissait pas si bien que cela et qu’elle ne connaissait pas dans ce monde, c’était pour sa vengeance. Mary voulait se venger rien de plus. Se venger de toutes les souffrances qu’elle lui avait fait subir. Pour cela, pour savoir comment la faire au mieux souffrir, elle n’avait pas d’autres choix que d’apprendre à connaître sa cousine. Sans qu’elle ne le sache, pour ne pas qu’elle se doute de ce qui l’attendait. Personne ne devait gâcher la surprise. « Oh, par contre, j’ai omis de vous préciser une petite chose. Pour le moment, j’aimerais que cela reste entre nous. Je voudrais que la surprise soit grande pour Elizabeth. Je ne veux pas qu’elle se doute de quelque chose. C’est très important. S’il vous plaît ne lui dite rien. Je tiens tellement à Elizabeth, que je voudrais lui faire cette surprise. » Tous ces mots résonnaient tellement faux dans l’esprit de Mary. Mais elle devait jouer la comédie. Elle n’avait pas le choix si elle voulait fomenter la plus belle des vengeances. Et Violet allait l’aider à le faire, sans même s’en rendre compte.