A diary is more than just a diary. It's part of his soul, part of his life [Penelope]

FT.    @Penelope Featherington     

Colin était perturbé. Bien qu'il continue à démontrer de sa nature joviale, il était perturbé. Ce n'était  pas dans son habitude de l'être. C'est comme être en colère. Il était bien rare de le voir en colère. Vous ne verrez jamais Colin Bridgerton en colère, du moins jusque là personne ne l'avait vu... Pourtant, depuis la soirée étudiante organisée à laquelle il avait invité Penelope, il était perturbé et s'il avait essayé de se montrer jovial avec tout le monde depuis ce jour (y compris avec Tom), il y avait pourtant quelque chose dans son attitude qui indiquait qu'il était perturbé. Il était « un peu trop jovial. » Un peu trop. Colin ne faisait rien dans le peu, il était souvent dans le « trop »... Pourtant, seuls les personnes qui le connaissaient vraiment (donc sa famille) savait quand leur frère était perturbé. C'est donc une bonne chose qu'il n'avait retrouvé que deux membres de sa famille. Il n'avait pas rencontré son cher frère Anthony depuis sa dernière rencontre avec, ayant été occupé par ses études ou son écriture, et donc il ne pouvait que s'en réjouir. Il était sûr que son frère aurait décelé quelque chose dans son comportement.

Dès le lendemain, Colin était allé voir Tom pour lui parler. Après le coup qu'il lui avait fait, il lui devait quelques explications. Et après sa conversation, il était encore plus perturbé. Ainsi, Tom s'intéressait à Pénélope de manière sentimentale. Il ne saurait dire si Pénélope l'appréciait mais elle ne le connaissait pas vraiment... L'avait-elle revu depuis ? Comment l'avait-elle trouvé ? Pourquoi la simple pensée de savoir si elle l'avait revu le perturbait autant ? Cela ne devrait pas le perturber, or, il ne faisait qu'y penser. Il essayait de se convaincre que s'il y pensait c'était en qualité de grand frère. Après tout, n'avait-elle toujours pas été comme une sœur pour lui ? Il s'intéressait à cela uniquement parce qu'il ne voulait que le meilleur pour elle... En qualité de grand frère. Comme il le ferait avec Eloise, Francesca ou même Hyacinthe !

Il n'était pas allé voir Pénélope pour l'interroger à ce sujet malgré sa curiosité. Il ne voulait pas la gêner. Après tout, elle était bien en âge de se débrouiller toute seule et en plus ils n'étaient plus dans leur époque. Elle n'avait pas besoin d'un chaperon. La manière dont elle avait pris congé pendant la soirée étudiante le perturbait déjà assez. Elle avait bien laisser entendre qu'elle n'avait pas besoin de chaperon, ni en la qualité de Tom ni de Colin. Il ne savait pas qu'en penser et il ne savait pas non plus ce qu'il avait fait de mal, mais s'il y avait vraiment un problème, alors elle viendrait sûrement lui en parler, non ?

Colin s'était levé vers neuf heures ce matin, s'était régalé d'un petit-déjeuner copieux avant d'aller faire une marche dans le parc du quartier puis était revenu pour écrire. Ce matin-là, il n'avait aucun cours et avait donc pu en profiter. Allant s'asseoir dans son salon, il prit place dans le sofa avant d'ouvrir son journal et de s'installer pour écrire. Parfois, il avait envie d'autre chose. Il avait envie d'un but réel dans sa vie. Le seul bémol de cette vie était qu'on ne pouvait sortir de là. On ne pouvait pas aller au-delà du périmètre de l'île. Etait-ce un île ? Un continent ? Cela semblait grand mais pas suffisamment pour Colin. Il avait besoin de grand air, de grands espaces. Il se souvenait encore des paysages Grecs qu'il avait visité par le passé et il aimait se complaire dans leur souvenir. Il pensait encore se rappeler la température exacte de l'eau ou celle du sable qu'il avait foulé de ses pieds. Bien plus chauds qu'en Angleterre. Les paysages étaient différents de l'Angleterre et quelque part, cela lui rappelait son pays. Son pays vers lequel il aimait y revenir après de longs mois. En revanche, Colin s'ennuyait rapidement. Colin n'était pas de nature à aimer s'ennuyer. Il lui fallait toujours quelque chose, toujours un but.

Une page se tourna et il entreprit de continuer sa lecture. Il n'était pas assuré non plus vis-à-vis de son écriture. Il n'avait jamais osé montrer ceci à quiconque. Etait-ce bon ? Mauvais ? Tout ce qu'il faisait c'était écrire ses ressentis et ses pensées face à ses voyages. Colin laissait voir de lui une personne assurée en tout ce qu'il faisait, mais au fond comme chacun il avait ses insécurités. Tournant une nouvelle page, il entendit alors sonner à la porte. Relevant les yeux de son cahier, il fronça les sourcils. Se demandant qui cela pouvait-il l'être à cette heure du matin, il se leva pour aller ouvrir. Un œil à la pendule du salon lui indiqua qu'il était dix heures et demies. Quelle ne fut pas sa surprise de voir Pénélope s'encadrer dans la porte lorsqu'il ouvrit le battant !

« Pénélope, quelle heureuse surprise ! » s'écria t-il non sans dissimuler du tout sa joie ni sa surprise. « Que faites-vous ici de bon matin ? Entrez je vous en prie.  Avez-vous faim ? » Parce que la première chose que Colin Bridgerton demandait à quelqu'un, c'était s'il voulait manger. Cela voulait certainement dire que lui aussi commençait à avoir faim mais la politesse avant tout, cela ne serait pas correct qu'il le lui dise... Même si cela ne faisait que deux heures qu'il venait de terminer son petit-déjeuner.  Il avait faim ! Il avait toujours faim.

Il souriait. De ce sourire aimable que Colin Bridgerton savait si bien faire. Il ne pouvait s'empêcher de constater qu'elle était radieuse dans cette robe bleue qu'elle portait. Le bleu était définitivement l'une de ses couleurs... Même si le mot radieuse n'était pas un mot qu'il se serait un jour imaginé donner à Pénélope Featherington, mais c'était pourtant vrai. Elle était radieuse, ou était-ce lui qui en avait l'impression ? Pourquoi n'avait-il jamais trouvé Pénélope radieuse ?  Avait-il changé ? Quand est-ce que le regard qu'il portait sur elle avait changé ? A moins que ce soit elle qui avait changé ?

FT.    @Penelope Featherington     

Le sourire de Colin en voyant Pénélope sur le pas de sa porte n'était pas feint. Il était réellement content de la voir surtout après ce qui s'était passé à la fin de la soirée où il l'avait emmenée. (qu'il n'avait d'ailleurs toujours pas compris). Elle lui avait semblé contrariée mais il ne savait pas pourquoi ! Il avait beau tourner et retourner tout dans sa tête, il ne voyait pas ce qu'il avait fait de mal et pourquoi elle pourrait être contrariée. Tom lui avait-il dit quelque chose qu'elle n'aimait pas ? Il avait bien interrogé ce dernier mais celui-ci n'avait rien lâché. Tom lui avait-elle dit que Colin était ensuite venu lui parler au sujet de Pénélope par la suite ? Il n'en savait rien et peu lui importait s'il l'avait fait. Il était juste inquiet par la possibilité que Pénélope soit contrariée avec lui et sans même comprendre pourquoi c'était pire. Pénélope avait passé toute sa vie à être dans l'ombre, à être invisible par les autres hommes lors de bal – personne, pas un seul ne pensait à l'invitait à danser et cela avait toujours agacer Colin. Par sympathie, dès que les Bridgertons arrivaient, Colin l'invitait toujours mais. Elle n'avait jamais été invisible à ses yeux mais il ne l'avait jamais vue autrement que pour une petite sœur. Elle avait de l'esprit et était pour le moins intelligente car ses conversations l'avaient toujours surpris à lui. Il se demandait comment et pourquoi elle semblait ne pas pouvoir engager la conversation avec d'autres hommes de la salle de bal comme elle le faisaient avec lui (ou plus largement avec tous les Bridgertons). Il ne comprenait pas pourquoi personne d'autre ne voyait comme lui qu'elle avait de la conversation. Mais depuis qu'il avait pris conscience qu'elle pouvait vraiment plaire à quelqu'un d'autre et bien cela l'avait fait réfléchir.

Il ne parvenait pas exactement à sortir le bon bilan de ses réflexions mais cet événement avait fait naître autre chose en lui et quelque chose qu'il n'aimait pas forcément. Pénélope avait toujours été là, semble t-il ; ça avait été toujours comme une constante dans sa vie. Elle venait si souvent leur rendre visite ou rendre visite à Eloise. Elle comptait presque comme au même titre que n'importe quel membre de sa famille. Il la respectait beaucoup et appréciait discuter avec... Mais peut-être un jour viendrait où elle ne serait plus là ? Cela semblait impossible à Colin, cela avait toujours impossible. Lorsqu'il était partit en voyage en Grèce, il lui avait même écrit des lettres pour lui parler de ses voyages et elle lui avait répondu. Peu l'avait fait, mais Pénélope oui. Elle était même là par écrit. Cela lui aurait semblé si étrange qu'elle ne l'aurait pas fait. Même en lisant ses lettres il était content de pouvoir compter sur elle.

Mais trêves de tergiversations. Colin commençait vraiment à avoir faim et il ne pouvait penser et réfléchir correctement que lorsqu'il avait le ventre plein. Pas même à demi plein. Juste plein. C'est ainsi qu'il avait proposé à Pénélope de manger aussi. Qu'elle soit là ou pas il terminerait sûrement le plateau, mais qu'elle soit là rendrait assurément son goûter plus agréable car alors ils pourraient discuter en même temps. (généralement, les gens prenaient un goûter par jour en plus du déjeuner et du dîner sans parler du thé). A Colin, il lui fallait au moins trois goûters par jour. Certaines personnes se demanderaient sûrement comment il faisait pour manger autant sans grossir. Et bien notre Colin international aimait faire du sport aussi et il en faisait dès qu'il en avait l'occasion que ce soit avec ses frères ou pas. Que ce soit de l'escrime, du cheval ou autre chose.

Pénélope expliqua les raisons de sa présence devant chez lui de si bon matin et elle lui dit qu'elle avait le désir de le voir pour lui parler. Colin était toujours heureux de lui parler. Elle accepta également de manger un petit peu avec lui et cela ne fit qu'accentuer sa joie. « Vous accompagner ? Ah ! Mais évidemment que oui, dès qu'il y a de la nourriture d'impliqué, je suis là et je reste tant qu'il y en a ! Je comptais manger quelques petits sandwichs au fromage et des toasts au saumon. Ainsi que de la salade de fruits. Si cela vous convient, c'est donc noté. Vous restez manger avec moi. » Il se déplaça ensuite de l'encadrement de la porte pour la laisser passer puis referma la porte derrière lui. Il tendit un bras, attendant qu'elle ôte son manteau pour qu'il puisse le prendre et l'accrocher au porte-manteau. Elle lui dit encore qu'elle espérait ne pas le déranger et qu'elle aurait peut-être dû envoyer un message pour le prévenir de sa venue. Colin s'empressa de la rassurer d'un sourire. « Vous ne me dérangez jamais voyons Pénélope ! Je suis toujours content de vous voir. » Il l'invita d'un bras à le suivre jusqu'à son salon et l'invita à prendre place là où elle voulait, le choix se réduisant à un des fauteuils ou le canapé. Il avait momentanément oublié à propos de son journal qui trônait sur la table basse et qui se trouvait encore à moitié ouvert. « Justement, je me demandais comment vous alliez depuis la dernière fois où l'on s'est vus. » Il n'osait mentionner le nom de Tom. Cette seule pensée lui tordait l'estomac et il sentait que cela allait lui couper l'appétit. Il vaudrait mieux qu'il mange quelque chose avant qu'il ne parle de lui. Du moins, s'il venait dans la conversation. Cela lui allait très bien s'il ne parlait pas de lui... Même si une partie de lui aimerait quand même savoir si elle l'avait revu ou pas.

« Mais place avant tout à la nourriture, on ne discute jamais mieux qu'avec le ventre plein ! En tous cas pour moi. Je vais chercher le plateau, je n'en ai pas pour longtemps. Mettez-vous à votre aise Pénélope. » (hj : ce qui ne veut en aucun cas dire qu'elle a le droit de toucher à son journal hahaha!!)

FT.    @Penelope Featherington     

Une chose que Colin avait dû apprendre à faire depuis qu'il était ici, c'était à préparer ses sandwichs préférés – et bien d'autres choses encore. Oh ce n'était pas digne des plus grands chefs, mais il se débrouillait assez bien et le plus important cela plaisait à son estomac très exigeant en matière de nourriture. Ici, il n'avait pas de personnel pour lui préparer ses repas contrairement à chez sa mère dans son époque. Il aurait pu aussi prendre les services d'une cuisinière mais d'un, il était le troisième fils et si une part de la fortune de la famille Bridgerton lui était dû, il n'avait pas des moyens illimités. De plus, il était un étudiant. Les étudiants avaient des moyens limités ici et il avait le loyer de chez  lui à payer. Un  jour, il achèterait son appartement parce qu'il était vraiment bien placé à son avis et il aimait bien cet appartement.

Quoiqu'il en soit, Colin avait appris à faire la cuisine. Du moins, ses petits plats préférés ainsi que certains gâteaux. Il avait appris avec des livres de recettes. Il y en avait plusieurs sur l'étagère de la bibliothèque du salon et si Pénélope regardait bien, elle pouvait aisément les apercevoir.  Après avoir donc dit à Pénélope qu'il allait chercher leur petite collation, il la laissa se mettre à son aise (sans pour autant se douter qu'elle allait se mettre à son aise à ce point!) et il s'en alla vers la cuisine. Il prépara gaiement tout en chantonnant sur un air qu'il avait entendu plus tôt à la radio. Un air de chanson très entraînant et motivant. Il était d'excellente humeur et il ne savait même pas pourquoi. Peut-être cela avait-il à voir avec la présence de Pénélope ou peut-être était-ce autre chose. En tous cas, elle avait eu l'air contrariée la fois dernière au bar et il était heureux de voir que ce n'était plus le cas et qu'elle vienne même le chercher pour discuter. Cela le mettait d'excellente humeur oui ; il n'aurait pas su l'expliquer.

Une quinzaine de minutes plus tard, il avait fini de tout préparer et il installa tout sur le plateau qu'il ramena dans le salon. Il revint vers la table et ce ne fut qu'après qu'il eut déposé le plateau sur la table qu'il se rendit compte de ce que Pénélope faisait. Il ne se rendit pas compte de suite qu'il s'agissait de son journal qui se trouvait dans ses mains, puis il aperçut la couverture et d'un seul coup se figea. Il en aurait fait tomber son plateau si celui-ci avait encore été dans ses mains alors heureusement qu'il l'avait posé.

« Pen ? Je peux savoir ce que vous faîtes là ? » fit-il et sa voix claqua dans le silence de la pièce, le timbre glaçant et il avait perdu son sourire habituel. En réalité, Colin n'était pas souvent en colère et il ne s'exprimait quasiment jamais avec une telle froideur dans la voix. Pénélope n'aurait pas de mal à remarquer qu'elle venait de commettre une indiscrétion sur sa vie privée. « Quand j'ai dis de vous mettre à l'aise je n'ai pas laissé entendre que vous pouviez toucher à mon Journal. C'est personnel. » reprit-il encore sur le même ton que précédemment. Son regard lui aussi s'était durci d'un coup.

En réalité, il avait momentanément oublié son journal posé sur la table mais même s'il y avait pensé, il n'aurait jamais pensé que Pénélope aurait eu l'indiscrétion d'y jeter un œil ! Ce n'était pas dans sa nature de faire ce genre de choses ! Du moins, c'était ce qu'il pensait avant... En deux enjambées, il la rejoignit, lui arracha le journal d'entre les mains tout en le refermant dans un claquement, et attendit ses « explications ». Enfin, quelles genres d'explications allait-elle lui fournir ? Il n'y avait pas d'explications possibles et acceptables à lire ce qui ne nous appartenait pas !

FT.    @Penelope Featherington     

Colin ? Colin?! Qui donc s'attendait-elle à voir revenir hormis Colin ? N'était-ce pas son appartement ? Colin remarqua directement combien elle était troublée de voir qu'elle venait de se faire surprendre en si surprenante situation. Elle était déstabilisée alors qu'elle réalisait son erreur. Et pourtant, il ne pouvait s'empêcher d'être en colère. Chose qui n'était pas dans son habitude. Cela le rendait encore plus furieux d'un coup car il n'avait pas l'habitude d'être ainsi. Il savait qu'il pouvait lui faire confiance. Il s'était toujours dit que Pénélope ne le décevrait jamais, qu'elle ne pourrait jamais le décevoir. Il la connaissait depuis tant d'années. Pourtant, aujourd'hui, elle avait enfreint une règle primordiale dans toute relation amicale : elle avait ouvert son journal ! Qui donc faisait cela ? Qui donc lisait le journal des autres sans leur avis en plus au préalable ? Il n'aurait jamais pensé que Pénélope aurait fait ce genre de choses, quand bien même la curiosité avait été la plus forte il avait l'impression de s'être toujours trompé sur son compte et de ne s'en rendre compte que maintenant.

Un silence, un très long silence s'étendit. Colin savait que s'il ouvrait la bouche à nouveau, son ton ne serait toujours pas habituellement bienveillant. Il attendait une explication sans savoir s'il accepterait la moindre explication. Il ne trouvait pas qu'il y avait une explication quelconque pour lire ce qui n'était pas à soi. Son regard se fixa sur ses mains qui se tordaient nerveusement sur ses genoux, à présent qu'ils n'étaient plus à glisser sur la page du cahier. Elle ne semblait même plus savoir que faire avec ! Debout devant la table, son carnet dans les mains, Colin attendait toujours qu'elle parle, ne cillant pas devant sa décontenance. Il était profondément blessé et déçu par son action. Il vit ses lèvres s'entrouvir pour fournir une excuse... Ce qu'elle sortit était juste pitoyable ! Elle n'aurait pas dû ouvrir le journal et elle le savait en plus?! Alors pourquoi l'avait fait ? Ne pouvait-elle contrôler sa curiosité ? Colin ne répondit rien, attendant qu'elle poursuivre – dans le cas où elle poursuivrait du moins. En espérant qu'elle poursuivrait du moins car Colin ne décolérait pas après une telle « explication ».

Elle ouvrit de nouveau la bouche pour parler – qu'allait-elle dire maintenant ? Oh elle ne voulait pas être intrusive mais comme elle avait vu le journal ouvert alors elle s'était montrée trop curieuse ? Ne pouvait-elle pas résister à la curiosité ? Colin était tellement en colère qu'il n'entendit à peine la fin de sa phrase où elle disait qu'elle avait été trop prise dans la lecture pour se rendre compte qu'elle était impolie. Ses excuses tournaient dans sa tête, et lui semblaient encore plus pitoyables à mesure qu'elles les faisaient. « Je ne vous croyais pas capable d'être aussi intrusive. » lança t-il durement tout en retournant brusquement pour aller ranger son carnet dans un des tiroirs de son bureau situé de l'autre côté de la salle. Il ouvrit le tiroir à clé, glissa le carnet dedans et le referma. En silence.

Dans un silence pesant, il garda le silence. Ses pensées étaient ailleurs, toutes à ce sentiment de trahison qu'il ressentait. Cela faisait mal. En réalité il n'avait jamais réalisé que se sentir trahi par Pénélope ferait si mal... Tout à ses pensées, il ne s'était pas non plus rendu compte qu'il avait posé sa main droite sur son bureau, pile sur un coupe-papier laissé là par inadvertance. Il ne sentit même pas tout de suite l'outil entailler sa paume. Ce ne fut que lorsqu'il vit les premières gouttes de sang s'égoutter sur le tapis qu'il se rendit compte de ce qui venait de se passer et il sentit alors la douleur. Sa réaction première fut de lâcher une expression de douleur. Cela faisait plus mal que ça n'y paraissait ! Il ne pouvait détacher ses yeux du sang qui perlait de la blessure, comme tétanisé, voire même obnubilé par la vue du sang. Tellement qu'il ne songeait même pas à réagir et pendant ce temps, la coupure continuait de goutter sur le sol. Ce n'était pas bien profond mais cela requérait des soins quand même.

FT.    @Penelope Featherington     

Colin ne savait pas s'il aimait ou détestait la vue du sang.  Il ne s'était jamais posé la question. Il était sûrement tombé quand il était enfant et sa mère avait sans aucun doute soigné ses bobos, mais il ne se souvenait vraiment pas s'il aimait ou non la vue du sang. En tous cas, il était tout simplement obnubilé par ses gouttes de liquide rouge qui coulait le long de son doigt, puis tombait une après l'autre sur le tapis de son salon. Il ne pouvait en détacher les yeux. Il décida qu'il n'aimait pas la vue mais ne pouvait en détacher les yeux. Cela lui avait fait oublié toute sa colère qu'il ressentait encore juste une minute plus tôt à cause de la conduite de Pénélope. Il avait oublié jusqu'à son journal. Il se rendit alors compte qu'elle s'était saisi de sa main mais il ne fit pas un geste pour s'en libérer – Pénélope mettra sûrement cela sous l'effet du choc ce qui était en partie vraie. Même s'il se surprit à penser que le toucher de sa main était bien plus doux que ce à quoi il s'était attendu. A quoi s'était-il donc attendu d'ailleurs ? Il ne savait même pas. Pas à cela en tous cas !

Ce fut la voix de Pénélope qui lui disait de la regarder qui le fit sortir doucement de sa contemplation. Il ne releva pas tout de suite les yeux. Ce fut uniquement quand il entendit Pénélope l'appeler par son prénom qu'il s'efforça de détourner les yeux de la blessure et de lever les yeux vers ceux de la jeune femme dont il croisa le regard. Il décida qu'il aimait bien ce qu'il voyait et ne put non plus en détacher les yeux. Toute sa colère était d'un seul coup retombée, comme un ballon de baudruche qu'un enfant avait gonflé et avait brusquement lâché. En quelques secondes, le ballon se retrouvait totalement à plat. Il baissa de nouveau les yeux vers sa main pour constater que Pénélope avait entreprit d'envelopper sa paume à l'aide d'une serviette qu'il avait lui-même apporté avec le plateau de petits en-cas. Une tâche maculait déjà la serviette à l'endroit où se trouvait la blessure, grandissant de seconde en seconde. Il allait falloir changer la serviette bientôt à ce rythme.

Alors qu'elle lui demandait si ce n'était pas trop douloureux, Colin se retint de railler sur un ton moqueur qu'en effet, ce n'était pas la chose la plus agréable au monde ! Il s'efforça d'esquisser un léger sourire avant de répondre d'une voix un peu tremblante : « C'est vraiment plus douloureux que ça n'en a l'air mais je vous donne ma parole que c'est supportable. Demain, ce ne sera déjà plus qu'un vilain souvenir...  Heureusement que ma mère n'est pas là, j'en aurai entendu parler pendant des mois. » Comme un enfant de cinq ans conduit par une grande personne, il s'était laissé guider jusqu'au canapé où il s'assit de même que Pénélope qui, à première vue, semblait un peu pâle. Il espérait qu'elle ne tombe pas en syncope à cause de la vue du sang … Même si c'était un peu de sa faute si cet incident s'était produit. Il lui demanda alors d'une voix anormalement hésitante : « Pénélope, vous... Je dois savoir... Vous pensiez vraiment ce que vous avez dit tout à l'heure ?  Concernant mes écrits. » Il y avait à présent de l'incertitude dans son regard, celle d'un enfant quémandant presque l'approbation d'un adulte sur ses productions artistiques.  Colin se rendit compte qu'il en avait vraiment besoin, et encore plus que l'avis de Pénélope lui était infiniment important.