Ce poids sur mon coeur [PV Raiponce de Corona]

Artemis avait toujours considéré ses employées comme une grande famille et elle s’efforçait de faire tout ce qu'elle pouvait pour que chacune se sente le mieux possible dans son travail et dans sa vie de tous les jours. C'était encore plus vrai pour les employées d'origine qui avaient été le fondement de l'entreprise. Elle avait un regard particulier, bien-sûr, sur la jeune Raiponce qui se distinguait de ses collègues par le fait qu'elle n'avait aucune propension à se battre. C’était pour cette raison que la déesse en avait fait la secrétaire plutôt qu'une agente. Mais elle restait une des employées d'origine et Artemis ne pouvait s'empêcher de lui porter une attention particulière.

Ces derniers temps, elle avait l'impression que la jeune fille ne se sentait pas très bien et elle ne pouvait s'empêcher de s'en demander la raison. Plutôt que de se manifester comme une patronne agressive qui lui demanderait pour quelles raisons elle réagissait de la sorte, Artemis préférait essayer d'obtenir ses confidences et de l'aider si elle en avait les moyens. Puisqu’il était l'heure de la pause déjeuner, elle se dirigea vers l'entrée de l'établissement où se trouvait le poste de travail de la jeune blonde. Elle avait l'intention de lui faire comprendre qu'elle ne lui était pas hostile, mais elle n'était pas sûre de ne pas être trop impressionnante.

« Raiponce, Comment allez-vous aujourd'hui ? »

Une question simple à laquelle la plupart des gens ne donnaient pas l'exact réponse. Mais peu importait. La jeune femme n'était pas obligée de lui dire la vérité, elle la découvrirait bien assez tôt. Le but était vraiment qu'elle se sentent à l'aise avec la responsable de l'entreprise et qu'elle puisse lui parler en toute sincérité. Elles avaient toujours pu se parler toutes les deux et Raiponce savait que Artemis était une personne bienveillante qui avait généralement tendance à se montrer à l'écoute et à prendre soin des personnes qui travaillaient avec elles. Mais le reste dépendait exclusivement d’elle.

« Je sors déjeuner. Cela vous plairait-il de manger en ma compagnie ? »

L'heure du temps de midi était arrivée plus vite que prévu et pourtant, j'avais tellement encore de paperasse à faire. Je devais bien avouer que j'avais un coup de mou ces derniers temps néanmoins, il est vrai que je ne pensais pas que ça se remarquerait autant. La patronne s'approcha alors de moi pour me demander comment j'allais aujourd'hui, je fis une tête un peu étonnée parce qu'il fallait bien le reconnaître que Dame Artemis ne venait pas m'adresser la parole sans raison.

- Je vais bien dame Artemis et vous ? Répondis-je avec un sourire. Est-ce que je peux faire quelque chose pour vous ?

C'est alors que cette dernière me dit qu'elle allait sortir pour déjeuner et me proposa d'y aller avec elle si ça me plairait de l'accompagner, il est certain que ça me changerait les idées de sortir un peu, ça m'éviterait de trop penser. Même si j'avais prévu mon repas de midi, je ne dirai pas par non à son invitation, car je pourrai le manger ce soir en rentrant.

- C'est avec plaisir dame Artemis, dis-je avec un sourire tout en rangeant le dossier avec lequel j'étais occupée. Je prends mon sac et je vous rejoins.

Je me dirigeai vers les casiers puis je revins vers ma patronne.

Artemis ne pouvait pas laisser une personne qui travaillait pour elle dans la souffrance. Elle ne remarquait pas toujours l’état d’esprit de ses employées, d’autant que la grande majorité ne travaillait pas à l’agence mais chez les clients, mais dès qu’elle avait connaissance que quelqu’un n’allait pas bien, elle essayait de lui apporter son soutien autant qu’elle le pouvait. Elle ne pouvait pas être sûre que Raiponce allait vraiment mal mais c’était l’intuition qu’elle avait depuis un moment. Dans tous les cas, cela lui permettrait de passer un moment agréable en charmante compagnie, si jamais elle s’était trompée, ce qu’elle estimerait souhaitable.

« Je me porte bien, merci », répondit-elle avant de lui proposer de se joindre à elle pour le déjeuner.

La seule de ses employées avec laquelle Artemis déjeunait régulièrement, c’était Regina et c’était principalement parce qu’elle la considérait comme une amie au-delà de leur partenariat professionnel. Mais elle n’était pas certaine que Raiponce ait connaissance de cette habitude, et puis, elle était un peu naïve. Elle ne devait pas se douter que Artemis se faisait du souci pour elle. Mais elle le découvrirait bien vite. Sa patronne l’entraîna à l’extérieur, sans plus de cérémonie. Elle avait un regard doux et un sourire aux lèvres. Quoi qu’il se passe, elle n’en voulait pas à son employée. Elle voulait seulement son bien.

L’entreprise était bien placée et à longueur de marche, il y avait un certain nombre de restaurants de niveau plus ou moins huppé. Elle en choisirait plutôt un abordable, car elle ne voulait pas que Raiponce se ruine en frais de repas. Elle lui sourit tout en marchant. Finalement, elle se dit que le plus simple était encore de laisser son employée choisir l’endroit où elle aurait envie de déjeuner. Ainsi, elle serait sûre de ne pas faire d’impair. Et puis, Raiponce serait sûrement de cette façonplus à l’aise pour pouvoir discuter. Artemis voulait s’assurer de ses bonnes dispositions.

« Où avez-vous envie de déjeuner ? »

Je me posais tout de même la question du pourquoi elle m'invitait à déjeuner alors que ma patronne me répondit qu'elle allait bien. Peut-être que j'en saurai sûrement un peu plus lorsqu'on ira manger à l'extérieur, d'ailleurs où voulais-je aller ? Telle était la question de dame Artémis… Je ne mangeai pas beaucoup dehors toutefois, je me souvenais d'avoir été mangé avec Emma pas loin du boulot avec Noël.

- Pourquoi pas chez pop's ? Répondis-je avec un sourire. J'y suis allée manger une fois avec une de nos collègues et j'ai trouvé que c'était délicieux.

D'ailleurs, je ne savais même pas si la PDG de l'entreprise mangeait certainement dehors et qui plus est, avec d'autres employées. Il faut bien le dire, je n'observais pas forcément les va-et-vient même si j'étais la secrétaire d’accueil et donc pas loin de l'entrée. J'allai ensuite chercher mes affaires dans mon casier comme je venais de le dire puis je revins vers mon interlocutrice.

- Voilà, je suis prête, dis-je, toujours souriante.

Une sortie ne me ferait probablement pas de tort au vu de mon état d'esprit actuel d'ailleurs en y réfléchissant, peut-être que ça se voyait dans mon travail. C'est probablement pour cette raison que cette dernière m'a proposé ça.

Artemis connaissait un peu le Pop’s. C’était l’un des restaurants qui se trouvaient dans le quartier de la société et elle savait que plusieurs des jeunes femmes qui étaient hébergées dans les locaux en étaient des habituées. Dans la journée, elles assuraient leur emploi chez leur client et y dînaient parfois ou y déjeunaient le matin avant de prendre leur poste. La déesse elle-même n’en était pas une. Mais elle ne mangeait pas facilement au restaurant. Ce n’était pas une des choses auxquelles elle prenait plaisir. Elle aimait préparer elle-même ce qu’elle mangeait comme elle le faisait quand elle voyageait avec ses Chasseresses.

« Très bien, je vous attends. »

Raiponce ne fut pas longue à prendre ce dont elle avait besoin. Artemis mit ce temps à profit pour réfléchir à la manière dont elle allait présenter les choses. Elle n’avait pas l’intention de transformer ça en rendez-vous pré licenciement et elle ne voulait surtout pas que la jeune secrétaire le croit. Elle était présente en toute bienveillance. Et elle tenait surtout à ce que les membres de son personnel se sentent bien et ne se sentent pas peser par leur travail et leur quotidien. Elle ne pouvait tout gérer toute seule, mais elle pouvait simplement être là pour les jeunes femmes qui lui étaient toutes chères.

« Eh bien, si vous êtes prête, allons-y. »

Elles se rendirent jusqu’au restaurant, ce qui ne prit pas longtemps. Artemis demanda une table pour deux et se fit installer avec son employée. Elle regarda distraitement la carte et songea à briser la glace. Il était toujours compliqué de lancer la conversation. Une fois que ce serait chose faite, elle aurait moins de difficulté à embrayer sur la situation compliquée de la secrétaire et notamment, son état émotionnel actuel. Elle ne savait pas pour quelle raison la jeune femme ne se sentait pas bien, mais elle était certaine que c’était légitime. Raiponce ne l’avait pas habituée à manquer de professionnalisme, ni même de joie de vivre. Elle commença par une mise en bouche assez neutre.

« Vous mangez souvent ici ? »

Lorsque je revins vers ma patronne, nous nous mimes en route vers le restaurant que je lui avais proposée. Une fois sur place celle-ci demanda une table pour deux personnes à laquelle on prit place. Je regardai tout de même la carte, car je prenais souvent le même hamburger et j'avais envie de changer pour une fois. Dame Artemis repris la parole en me demanda si je mangeais fréquemment « Chez Pops ».

- Non, c'est rare, lui répondis-je en la regardant. Et vous, Dame Artemis étiez déjà venue avant aujourd'hui ?

Je portai à nouveau mon attention sur la carte du restaurant afin de me décider avant que la serveuse n'arrive. Une fois que celle-ci arrive, je décidai de commander de l'américain avec des frites puis laissé la PDG de l'entreprise dire ce qu'elle prenait. Je devais bien avouer que je me demandais s'il y avait quand même une raison pour que ma patronne m'invite comme ça. Je refermai ensuite la carte et portai mon attention sur ma patronne avant de dire :

- Excusez-moi, mais... Est-ce que j'ai fait quelque chose qu'il ne fallait pas ?

Ce petit restaurant avait l'air bien sympathique, mais il n'était pas familier à la déesse, d'autant moins qu’elle ne mangeait au restaurant qu’en de rares occasions et généralement, davantage avec un client. Ça ne lui déplaisait pas outre-mesure de le faire avec une employée, et notamment la jeune Raiponce, qui faisait tout de même partie de ses premières protégées. Il n'empêchait que cela ne faisait pas vraiment partie de ses habitudes et qu'elle ne savait pas vraiment si elle faisait les choses comme il convenait ou non. Elle n'avait pas voulu faire peur à la jeune femme, mais elle ne savait pas à quel point celle-ci connaissait ses habitudes.

« Je crois que c'est la première fois. À vrai dire, je ne vais pas souvent au restaurant, sauf avec des clients et ce n'est généralement pas le lieu que nous choisissons. Mais c'est une bonne chose de découvrir des lieux qu'on ne connaît pas, n'est-ce pas ? »

Elle sourit gentiment à son employée. Elle avait sincèrement envie de la mettre à son aise, mais il fallait reconnaître qu'elle n'était pas certaine de s'y prendre de la bonne façon. Elle pouvait prétendre déborder d'assurance, mais la réalité, c'était que cette assurance n'était pas totalement la même dans cet endroit où elle se sentait affaiblie et démunie de certains de ses pouvoirs. Pourtant, elle avait bien l'intention de continuer à épauler tous ceux qui l'entouraient comme elle se devait de le faire en tant que déesse.

« Je compte sur vous pour me donner votre avis et me conseiller sur ce qui est le meilleur dans ce genre d'endroit », lança-t-elle avec un sourire.

Mais elle ne devait pas être très convaincante dans sa nonchalance. Son employée sembla comprendre que quelque chose clochait. Elle semblait avoir peur d'avoir fait une bêtise, mais ce n'était pas du tout le cas. La déesse était un peu mal à l'aise à l'idée d'avoir induit son employé en erreur et elle se demandait si elle avait fait le bon choix en essayant de donner à cette rencontre un contexte un peu plus agréable et un peu moins formel. L'objectif n'était certainement pas d’effrayer son employé ou de la faire douter d'elle-même. Il lui semblait normal de s'inquiéter pour son bien-être, pas de lui causer du souci.

« Pas du tout, ne vous en faites pas. Si j'avais des reproches à vous faire, je ne vous les ferais pas à la table d'un restaurant mais en privé dans mon bureau. Cela dit, j'éprouvais effectivement le besoin de vous parler. Je vous ai toujours connue avec un sourire débordant et votre humeur semble avoir décliné depuis un certain temps. Je voulais m'assurer que vous n'aviez pas d'ennuis. »

C’était la première fois que ma patronne venait “Chez Pop’s” au moins, j’ai pu lui faire découvrir quelque chose. Cette dernière m’avoua aussi qu’elle n’allait pas beaucoup au restaurant hormis avec des clients et encore, ce n’était pas dans ce lieu. Elle piqua ma curiosité sur le coup puisque sur cette île, je n’avais pas vraiment tenté de découvrir les autres lieux où manger.

- Dame Artémis, dis-je, hésitante. Vous savez me conseiller d’autres restaurants où l’on mange bien ?

Elle comptait sur moi pour que je lui conseille un bon repas du restaurant pour manger, cependant, je ne connaissais pas les goûts de mon interlocutrice. Ça compliquait tout de même un peu les choses. Comme je n’avais pris qu’un hamburger avec les frites jusqu’à présent, je ne savais si ma patronne aimait ce genre de chose.

- À vrai dire, dame Artémis, répondis-je. Je n’ai pris qu’un seul repas jusqu’à présent, un hamburger avec des frites qui était très bon. Cependant…

J’hésitais à continuer, je ne m’étais jamais retrouvée dans cette situation avec la PDG de l’entreprise où je travaillais. De plus, le fait qu’elle m’ait invitée de ce fait, je lui demandai si j’avais quelque chose qu’il ne fallait pas. Ce n’était pas le cas, je suis soulagée de l’entendre néanmoins, dame Artémis avait remarqué que je n’étais plus comme avant et voulait savoir si j’allais bien.

- Eh bien… Dis-je en réfléchissant quelques secondes. Ses derniers temps, c’est vrai que je ne me sens pas très bien. Ne vous inquiétez pas, ça ne concerne pas le travail, dame Artémis.

Quand elle mangeait avec des clients, Artemis ne regardait pas vraiment à la dépense et il était donc fort peu probable que ce soit quelque chose dans les moyens de sa jeune secrétaire. L'endroit où elle se trouvait était sans-doute ce qu'il y avait de plus abordable dans les environs, mais cela ne l'empêchait pas de lui donner éventuellement les bonnes adresses parmi quelque chose d'un peu plus élaboré en un moment ou à un autre. Elle pouvait avoir quelque chose à fêter, ou même se faire inviter par un jeune galant.

« Je vous donnerai les adresses que j'ai, mais on peut pas vraiment dire que ce soit abordable. »

Quant à la conseiller sur le menu, il semblerait que de son côté, la jeune fille n'ait pas goûté beaucoup de plats différents. Le seul qu'elle avait mangé était très bon. La déesse se contenta donc de suivre son instinct et de choisir quelque chose sur le menu dont elle pensait que ce serait à son goût. Elle passa commande, avant que la déesse n'interroge son employée, confirmant le fait qu'elle ne semblait pas au mieux de sa forme ces derniers temps. Artemis ne se voulait pas menaçante, mais elle était réellement inquiète. Elle ne savait pas pour quelle raison son employée ne se sentait pas bien, mais elle voulait lui faire savoir qu’elle était ouverte à lui donner un coup de main.

La première chose que fit immédiatement la jeune fille, ce fut de la rassurer sur le fait que cela ne concernait pas le travail. mais sur ce plan-là, Artemis n'avait jamais eu de doute. Elle s'inquiétait seulement de ce que son mal-être se propage et s'amplifie au risque de s'aggraver. Elle tenait beaucoup trop à Raiponce pour permettre qu'il lui arrive du mal, et elle tenait beaucoup à ce que son employée sache qu'elle pouvait compter sur la déesse pour l'écouter et l'aider si elle en avait besoin.

« Votre travail a toujours été parfaitement impeccable, ma chère. Là n'est pas la question. Je tenais à ce que vous sachiez que je suis là si vous avez besoin d'en parler. Vous savez que vous pouvez me faire confiance, n'est ce pas ? »

Ma patronne accepta de me passer les adresses des restaurants qu’elle fréquente bien que cela soit moins abordable. Je m’en doutais un peu, mais je voulais tout de même voir par moi-même. Je décidai de commander ce que j’avais conseillé à Dame Artémis, un hamburger avec des frites.

En attendant que l’on nous apporte nos repas, nous commençâmes à discuter et mon interlocutrice avait remarqué que je n’étais pas comme d’habitude. Je la rassurai en lui avouant que je n’étais pas bien, mais que ce ne concernait pas le boulot. La PDG en était très satisfaite ce qui me soulageait quand même. Je savais que je pouvais lui parler sans craindre, mais je ne voulais pas trop la déranger quand ça n’avait rien à voir avec la société.

- Je sais bien Dame Artemis, lui répondis-je. J’aimerais bien retrouver des membres de ma famille, mais je n’ai abouti à rien en quatre ans. Pourtant, je connais beaucoup qui ont trouvé des personnes de leur monde.

Il n'était jamais facile d'être seule dans un monde inconnu et étranger. Raiponce n'avait pas été seule très longtemps, puisqu'elle avait rapidement été prise en charge par des individus sans scrupules qui avaient tenté de la prostituer, mais on ne pouvait pas appeler ça une véritable famille. Artemis, en revanche, l’avait accueillie comme une mère ou une sœur aurait pu le faire. Artemis était persuadée que la jeune fille savait à quel point elle avait des sœurs au sein de la société de sécurité. Son orgueil aurait même voulu que cela soit suffisant et que rien d'autre ne compte autant que le groupe qu'elle avait forgé.

Mais au fond, elle comprenait le désir de retrouver des membres de sa famille ou de ses amis proches provenant du monde d'origine dont on venait. Artemis n'avait elle pas elle-même envie de reconstituer l'Olympe ? Elle avait retrouvé son père, évidemment, mais c'était bien léger pour ce qu'elle aurait voulu faire dans ce monde, sans compter que la présence de son frère jumeau lui manquait infiniment plus cruellement que celle de n'importe quel autre Dieu. Elle pouvait donc comprendre qu'il existe des personnes que Raiponce avait envie de retrouver par-dessus tout.

« Je partage votre ressenti. Après tout, mon frère ne semble pas avoir réapparu non plus et il me manque énormément. Malheureusement, il semble que la ville n'accepte de nous rendre nos proches que quand elle le souhaite vraiment. Nous n'y pouvons rien. »

Elle posa une main sur son bras pour lui imprimer le soutien qu'elle avait pour elle. Elle ne pouvait guère faire plus car malheureusement, il ne lui appartenait pas de choisir qui venait ou ne venait pas, mais elle pouvait offrir un semblant de famille et d'écoute à la jeune secrétaire. Celle-ci devait savoir que ce n'était pas simplement un métier qu'elle lui avait proposé, mais qu'elle lui avait offert d'intégrer quelque chose de beaucoup plus grand dans lequel elle avait une place unique, comme chacune de ces chasseresses d'autrefois pouvait en avoir une.

« Sachez que vous aurez toujours une famille chez nous, Raiponce. Je suis fière de vous dans la mienne. »

Ma patronne me comprenait puisque elle-même avait un frère qui lui manquait, c'était le cas de beaucoup de personne. Si cette dernière ne me l’avait pas dit, je n’aurais pas pu le deviner. Est-ce que je suis trop émotive ? Je l’ignorais, cependant il fallait que je trouve une solution pour que ça ne se ressente pas. Dame Artemis avait raison sur un point, cette île nous ramenait ce qu'elle voulait et nous nos désirs.

- Vous pensez que des personnes de nos univers respectifs arriveraient dans cette ville à différents moments de l’année ?

Je ne pouvais pas affirmer que mon hypothèse était la bonne étant donné que je n’ai pas retrouvé Flynn, mes parents ni même Gothel. Quant à la PDG, elle me parla juste de son frère. Je supposais tout de même qu’ils n’étaient pas qu’à deux dans son univers. Celle me donna un peu de réconfort en disant que j’avais une famille dans la société tout en faisant un geste de tendresse.

- C’est gentil Dame Artemis, je ne pourrais pas vous considérer autrement en sachant ce que vous avez fait pour moi.

La façon dont cette ville fonctionnait était encore mystérieuse pour la plupart des gens. Des personnes semblaient apparaître et disparaître mystérieusement et les personnes qui vous étaient chères tout particulièrement. Il avait fallu au moins une année entière avant que Artemis ne retrouve son père et si la complicité qu'ils avaient lui faisait plaisir, elle savait aussi qu'il avait dû beaucoup changer durant cette première année où il n'était qu'un humain et rien de plus. Quand le monde avait commencé à rendre aux gens leur véritable nature d'une manière ou d'une autre, il était possible que cela ait changé quelque chose pour son père, mais il en gardait un respect et une notion du consentement qu'elle ne lui avait encore jamais connue.

Ce dont elle était certaine pourtant, c'était que tout le monde tenait le même discours en ce qui concernait son arrivée en ces lieux. Il y avait eu une lune rouge et ils étaient ici depuis. Cette réalité excluait que les personnes arrivent au fur et à mesure, mais la raison pour laquelle tout le monde ne s'était pas croisé durant ces quatre années restait mystérieuse aux yeux de la déesse. Il était possible qu'une force supérieure soit en jeu qui décidait du moment où les personnes se retrouvaient, mais cette force avait pris en otage même les dieux, ce qui laissait penser à Artemis qu'il s'agissait de quelque chose de puissant et de mystérieux qu'elle ne pouvait ressentir que comme dangereux puisqu'elle ne le contrôlait pas.

« Pas d'après ce que j'ai pu constater. Tout nous indique que l'ensemble de la population de ce monde est arrivé en même temps. En revanche, je ne sais pas du tout pour quelles raisons, mais il semblerait que nous ne puissions rencontrer que certaines personnes, comme si quelque chose jouait avec nos destinées. Je suis toutefois heureuse que cette force m'ait permis de vous venir en aide à votre arrivée ici, comme à bien d'autres jeunes filles. »

Elle sourit face à l'aveu de la jeune fille qui lui disait qu'elle ne pourrait faire autrement que de la considérer comme sa famille pour la même raison que ce que Artemis venait d'évoquer, mais ça ne résolvait pas son principal problème et les troubles qu'elle avait de ne plus pouvoir être avec ses proches. Il y avait peu de personnes pour qui Artemis partagerait ce sentiment de manque mais évidemment, son frère jumeau en était le principal exemple. Et il lui manquait terriblement. Elle ne voyait cependant qu'une seule façon pour aider Raiponce à supporter la situation.

« Parlez-moi de ceux que vous aimeriez revoir, racontez-moi qui ils sont. »

Dame Artémis en avait beaucoup plus que moi apparemment, on serait arrivé tous en même temps. Je devais bien avouer qu’à mon arrivée, je n’avais pas vraiment regardé autour de moi. Ça voulait peut-être que ceux de mon univers seraient déjà sur cette île ? Ce lieu nous priverait de retrouver nos proches tant qu’elle ne le voulait pas. Ce n’était pas très joyeux, ni rassurant d’ailleurs. Ce qui me fit sourire, c’est de savoir que ma patronne était heureuse d’avoir pu m’aider grâce au destin.

- Il n’y a absolument aucun moins d’avoir un indice ou même une piste pour retrouver une personne précise ? J’en suis heureuse aussi et j’aime beaucoup mon boulot, Dame Artémis.

Mon interlocutrice voulait savoir qu’elles étaient les personnes qui me faisait ce poids sur mon cœur. Il y avait mes parents et Flynn Rider, mais il y avait aussi quelque chose que je craignais. Il s’agissait de celle qui m’avait kidnappée et élevée, Gothel. Je ne sais pas si en parler allait aider, mais qui tente rien n’a rien comme on dit.

- Disons que dans mon monde, je n'ai pas eu une vie facile et certaines personnes me manquent. Cependant, il y en a une que je crains, celle qui m’a séparée de mes parents alors que j’étais bébé.

Artemis était quand-même rassurée de constater que Raiponce aimait son travail. Elle n'avait pas vraiment eu de doute sur la question à proprement parler, quand elle l'avait invitée à déjeuner parce qu'elle s'inquiétait de son comportement, mais il demeurait rassurant de se l'entendre dire. Elle était à peu près certaine de faire tout ce qu'elle pouvait pour que la vie de ses employées soit agréable. Mais malgré tout, rien ne pouvait être parfait et elle avait beau être d’essence divine, elle n'avait actuellement guère plus de pouvoir que n'importe quel humain.

Il était évident qu’elle était d'accord pour mettre à disposition de ses employées tous les moyens humains qu'elle pouvait avoir afin qu'ils retrouvent leurs proches. Mais cela ne faisait pas tout. Et cela ne suffirait probablement pas pour que tous soient retrouvés et puissent rejoindre leur famille. Artemis sentait la peine et la douleur de sa jeune employée et elle serait particulièrement ravie de lui donner un coup de main, mais elle ne maîtrisait pas tout les aspects de la chose autant que le ferait une déesse. Et encore, elle avait pu constater que les affrontements impliquant des êtres issus de la mythologie en pleine possession de leurs moyens étaient imprévisibles, même pour les dieux.

« Je sais que certaines personnes ont choisi un métier en lien avec cela et qu'ils essaient de retrouver les gens, mais je sais aussi que même eux ne font pas de miracle. Au final, il existe quelque chose d'autre qui décide et j'ignore ce que c'est. »

Artemis ne connaissait pas l'histoire de chacune de ses employées avec beaucoup de précisions, guère plus que ce qu'elles avaient bien voulu lui dire. Pour certaines, cela pouvait représenter une certaine richesse, malgré tout, mais la plupart étaient des personnes discrètes qui n'avaient pas forcément envie de communiquer à tout le monde leur histoire et ce qu'elles éprouvaient. Artemis respectait cela. C'était la raison pour laquelle elle n'avait jamais obligé qui que ce soit à lui parler de son passé, y-compris lors des processus de recrutement où elle essayait quand même de faire connaissance avec les futurs employées. En l'occurrence, elle se demandait tout de même ce qui s'était passé avec cette personne qui avait apparemment voulu du mal à Raiponce.

« Une femme qui vous a enlevée à vos parents ? Que pouvez-vous me dire à son sujet ? Je pourrais peut-être enquêter discrètement. »

La réponse d’Artemis à ma question ne m’aida pas vraiment, il fallait bien le reconnaitre. Mes parents étaient le roi et la reine de Corona, je ne voyais pas dans quoi ils pourraient travailler. Une pensée me glaça alors le sang, la pensée que Gothel travaille avec des enfants et finisse par les enlever en étant sur l’île.

- Je dois bien avouer que si mes parents sont ici, je serai incapable de dire quel métier ils feraient. Ils étaient le roi et la reine de Corona. Quant à celle qui m’a enlevé, j’espère qu’elle ne recommencera pas en étant sur l’île.

Ce qui m’était arrivée intrigua ma patronne puisqu’elle veut en savoir plus sans pour autant me forcer. Celle-ci proposa également d’enquêter, ce n’était pas une mauvaise idée en soi parce que cela me permettrait d’être fixée si Gothel était ici ou pas.

- Oui, c’est ce qui m’est arrivé malheureusement. Elle s’appelle Gothel, elle a des cheveux foncés et main. Quant à ses vêtements, elle porte une robe rouge dans mon univers. Pensez-vous qu’elle pourrait faire un métier en rapport avec les enfants ? Ils pourront être en danger dans ce cas-là.

J’espérais que ses informations lui seraient utiles.  

Artemis concevait qu'il puisse être compliqué pour des personnes à la tête d'un royaume de trouver leur place dans une ville comme celle-là et de trouver du travail. Ca n'aidait pas à trouver une piste pour les identifier mais elle savait que ce n'était pas la faute de Raiponce. Et puis, c'était justement parce qu'elle n'avait pas de pistes que les choses étaient difficiles pour elle. Mais la déesse n'était pas du genre à renoncer aussi facilement. Elle ferait des recherches et si elle trouvait des réponses, Raiponce serait la première au courant évidemment.

Elle l'avait bien fait pour Emma et Regina. Elle avait fouillé tout ce qu'elle avait pu à la recherche du petit Henry. La tâche avait été compliquée par le fait que le garçon n'avait pas pris son véritable nom. Il y avait un souci avec ses souvenirs et quand elle l'avait compris, tout avait été plus facile. Maintenant, la famille était réunie et si tout n'était pas toujours facile, chacun semblait faire l'effort qu'il fallait pour que les choses se passent le mieux possible. La déesse n'en demandait pas davantage. Elle était prête à faire la même chose pour sa secrétaire.

« Je suis tout à fait prête à tenter des recherches, mais je ne peux rien vous promettre. Pour être sûre d'avoir des résultats, il faudrait que je sois certaine qu'ils sont ainsi, avec le nom de votre royaume. Mais je peux chercher.. »

Si une femme avait séquestré cette jeune personne et avait fait en sorte qu'elle soit séparée de sa famille, il fallait se montrer vigilant. Il y avait justement des enfants qui disparaissaient. Si elle risquait de leur faire du mal, il fallait la stopper à tout prix. Artemis était la protectrice des enfants et il n'était pas question qu'elle laisse quelqu'un leur faire du tort. Il était aussi possible que la réponse soit toute autre. Elle ne pouvait pas en être absolument sûre. Mais elle était prête à mener l'enquête et à protéger les enfants qui pourraient se retrouver en danger.

« J'ai entendu dire qu'il y a effectivement des enfants qui disparaissent. Des enfants tristes ou perturbés. Doit-on craindre qu'elle leur fasse du mal si c'est elle ? »

Ma patronne était prête à tenter des recherches, mais sans certitude qu’elles aboutissent à quelque chose. J’en étais bien consciente qu’il y avait une chance sur deux et que l’effort serait là. Dame Artemis n’était pas obligée de faire tout ça pour moi, elle en avait déjà tellement fait auparavant.

- Même si vous revenez avec aucune information, ça sera déjà très gentil de votre part d’avoir fait ses recherches. Cela dit, je n'aimerais pas qu’elle ait le même nom de famille que moi. Je ne suis même pas certaine qu’elle est originaire de Corona à la base.

Ce que je craignais arrivait, il y avait des disparition d’enfant qui sont tristes ou perturbés, l’idée que Gothel ait recommencé me traverse l’esprit et me glace le sang. Elle ne faisait pas de mal aux enfants physiquement, mais mentalement, c’était une autre histoire. Je ne savais comment expliquer les choses, je restai donc silencieuse pendant quelques minutes.

- Oui et non, ça dépends ce que vous appelez faire mal. Des traces physiques, vous n'en trouverez pas, cependant le mental des enfants en prend un coup. J’ai été enlevée et enfermée dans une tour et je ne pouvais pas en sortir.

Je ne voulais pas faire paniquer la PDG de mon boulot, mais juste lui dire la vérité.

Artemis était prête à aider chacune de ses employées et en particulier les toutes premières qui avaient quelque chose de spécial pour elle. Elles étaient celles qu'elle avait formées personnellement et à qui elle avait tout appris, pour la plupart. Elles étaient ses filles plus sûrement que n'importe laquelle des employées de Artemis Security. Raiponce était la plus fragile et la plus vulnérable d'entre toutes et Artemis avait une façon de vouloir la protéger qui ressemblait beaucoup à celle d'une sœur aînée pour une cadette plus innocente et plus naïve. Faire des recherches pour retrouver sa famille et pour voir si son ennemi se trouvait dans la ville n'était pas grand chose pour quelqu'un qui avait cette importance.

Elle était consciente que ce ne serait pas facile de trouver la femme concernée sans aucun autre indice que ce qu'elle avait entre les mains mais elle ferait ce qu'elle pourrait et si cette femme s'approchait un peu trop près de Raiponce et la mettait en danger, Artemis interviendrait. En plus, si elle enlevait des enfants, il y avait toutes les raisons du monde de vouloir mettre fin à ces exactions. Artemis n'était pas prête à laisser qui que ce soit s'en prendre à des enfants. Elle enquêterait et trouverait la réponse, même si cela devait en passer par des moyens un peu onéreux.

« Je ferai ce que je pourrais pour trouver des informations. Et si vous vous sentez en danger, dites-le moi. Je pourrais affecter une de vos collègues à votre protection. »

Il était tout de même rassurant de savoir que cette femme n'avait jamais brutalisé un enfant. On ne pouvait pas être sûr que ce soit elle qui soit à l'origine des enlèvements et peut-être que les enfants étaient véritablement maltraités, ce que Artemis punirait avec férocité. Mais si c'était elle, ils ne se retrouveraient pas roués de coups où blessés physiquement et c'était déjà une bonne chose. En revanche, elle connaissait les effets de la torture mentale et elle ne pensait pas que ce soit une alternative beaucoup plus heureuse. Dans tous les cas, il fallait trouver des solutions au plus vite.

« Ce n'est guère mieux, mais il est à voir ce qui en est exactement. Dans tous les cas, le plus important est de trouver qui nuit à ses enfants et ce qu'ils deviennent exactement. Si quelqu'un leur fait du mal, je jure qu'il le paiera cher. »

Ma patronne allait faire des recherches, mais il n’y avait aucune certitude que Dame Artemis trouverait des informations. Il est exact que j’ignorais actuellement comment je réagirais face à Gothel. Je ne me sentais pas en danger pour le moment puisque je suis loin de celle qui se prenait pour ma mère. Je fus touchée par les paroles de mon interlocutrice concernant une éventuelle protection si je me sentais en danger.

- Merci Dame Artemis pour tout ce que vous faites pour nous.

Je parlais des filles en général, de la société, notre patronne avait été toujours ainsi avec nous. La conversation par rapport à Gothel continua en parlant de ma vie passée et les traces mentales ne sont pas mieux que les physiques. Elle avait raison aussi sur le fait qu’on doit trouver ceux qui font du mal aux enfants. Nous n'étions pas policiers alors comment allait-on faire pour en savoir plus ? C’est assez intriguant et en même temps, ma patronne avait sûrement une idée derrière la tête.

- Vous avez raison. N’hésitez pas à me demander de l’aide si vous avez besoin. Je souhaite autant que vous que les enfants ne soir plus nuit par des personnes malveillantes.

Artemis avait toujours été là pour ses employées, même si celles-ci ne lui étaient pas toutes loyales de la même façon que ses anciennes Chasseresses. La plupart faisaient preuve d'une loyauté à toute épreuve en ce qui concernait le quotidien et la façon dont elle passait du temps a se confier parfois, et à suivre surtout et souvent les directives qu’elle mettait en place dans le cadre de leurs fonctions professionnelles. Elle avait la conviction que ce n'était pas seulement par obligation mais aussi, du fait de la considération qu'elles avaient pour elle.

Malgré tout, et bien qu'elle ne se comporte pas comme ça pour obtenir une récompense ou des remerciements, elle était contente que cette bienveillance et le soutien indéfectible qu'elle donnait à ses employés soient reconnus et appréciés par elles. Il était évident que ce ne pouvait être que de cette façon qu'elle pouvait installer cette loyauté dont elle avait conscience qu'elle était présente et que Raiponce lui rappelait à cet instant. Il n'était pas facile de ce montrer à la hauteur mais c'était un défi qu'elle était prête à remporter dans la mesure où elle était capable de le faire.

« Merci de me proposer votre aide. La seule chose que je tiens vraiment à vous demander, c'est de m'en parler s'il devait s'avérer que vous en appreniez plus avant moi. »

Elle était contente qu'elles en aient discuté. Après tout, il n'était pas facile de mettre des mots sur un mal-être et la seule personne qui pouvait vraiment le faire était celle qui le ressentait, parfois. Artemis sourit à la jeune fille d'un air maternel et protecteur. Elle ne regrettait pas de l'avoir invitée et elle espérait que ses confidences avaient fait autant de bien à sa jeune employée qu’elle-même se sentait flattée de sa confiance. Elle prit une nouvelle bouchée de son plat et décida d'attaquer un sujet un peu moins sordide et un peu plus facile sur lequel échanger, le sujet du repas qu'elles étaient en train de partager.

« Votre plat vous plaît-il ? »