(terminé) Le Silence ▿ Louise

Mathilde se croyait tranquillement installée dans son lit. Elle s'imaginait être sous ses couvertures bien chaudes, la tête posée sur un oreiller moelleux et confortable. Elle croyait même entendre la respiration de son fils, de l'autre côté du mur de sa chambre. Elle l'avait cru, une minute ou deux. Son esprit commençait à s'agiter, s'affoler. Même si elle était toujours endormie, son coeur se mettait en alerte, ses sens s'éveillaient un à un. Une sorte de peur, qu'elle n'avait jamais connue jusqu'aujourd'hui, naissait en elle. Il n'y avait aucune respiration. Il n'y avait d'ailleurs aucun bruit. Elle n'était pas dans son lit et elle n'était pas, d'ailleurs, dans un lit.

Avec une prudence exagérée, Mathilde avait ouvert les yeux, sans bouger. Elle avait battu des cils à plusieurs reprises pour s'acclimater à ce paysage inconnu. Sa main avait agrippé le sol, par réflexe, afin de comprendre où elle était. Sous elle, il n'y avait rien d'autre que de la terre. Il ne faisait pas totalement noir, mais la nuit semblait être en train de tomber. Autour d'elle, d'immenses haies se dressaient et, à cette vision, le coeur de Mathilde accéléra. Elle se sentait prisonnière, enfermée et elle avait l'impression d'être  en train d'étouffer. Par réflexe, la jeune femme avait poussé un cri, avant de venir l'étouffer d'un geste de la main. Ce n'était pas prudent de crier alors qu'elle ignorait où elle se trouvait ou pourquoi. Elle devait se montrer prudente.

Et elle avait eu raison de se méfier. Son cri à peine étouffé, elle entendit quelque chose se précipiter vers elle. Dans l'espoir de se protéger et de se cacher, elle s'était recroquevillée dans un coin de ce qui ressemblait à un labyrinthe. Les jambes repliées contre sa poitrine, elle tentait de cacher le bruit de sa respiration avec ses mains. Et lorsque ses yeux aperçurent cette forme humanoïde, mais gigantesque, courir vers elle, Mathilde avait écarquillé les yeux et avait retenu sa respiration. Par miracle, cela semblait fonctionner. La créature était là, à un pas d'elle, mais elle ne l'attaquait pas. Alors, Mathilde faisait au mieux pour rester discrète, pour contenir sa respiration qui s'accélérait naturellement à cause de la peur ou les larmes qui commençaient à couler, à cause de la peur. Elle venait de comprendre une chose : un bruit et elle était morte. Et Mathilde n'avait aucune envie de mourir comme ça, aussi bêtement. Si elle devait mourir aujourd'hui, elle mourrait en se battant, pas recroquevillée dans un coin.

Les yeux de Louise semblaient impossibles à ouvrir. Une fatigue soudaine semblait l’avoir envahie. La brune ne se souvenait même pas avoir rejoint sa chambre. Elle ne se souvenait même pas s’être allongée. C’était pourtant dans cette position qu’elle se trouvait. Mais après réflexion, ce n’était pas son oreiller qui s’appuyait contre sa joue. Non, la chose était froide et humide. Et aussi étrange que cela puisse paraître, il y avait aussi une odeur de terre. Une terre qui viendrait justement d’être arrosée. Cela n’avait aucun sens. Pourquoi serait-elle allongée au beau milieu de son jardin, sauf si elle y avait chuté ? Ce qui expliquerait qu’elle ne se souvienne pas s’être allongée, puis endormie. En ouvrant les yeux, la brune avait remarqué la terre qui se trouvait sous son visage. Mais en observant un peu plus les alentours, malgré l’obscurité, la jeune femme remarqua que cet endroit n’avait rien de familier. Il ne ressemblait en rien à son jardin. Avec difficulté, la brune se releva. Se tenant désormais sur ses deux jambes elle tapota sa robe, cherchant à retirer la terre qui la recouvrait, mais cela était impossible.

Alors que Louise tentait de reconnaître les lieux, elle entendit un cri. Celui d’une femme. Elle n’était donc pas seule. Et pour être honnête, elle ne savait pas si cela devait la rassurer. Celle qui fut calme jusqu’à maintenant senti les battements de son cœur s'accélérer. Si elle voulait fuir, elle en était incapable. Elle ne savait pas où elle était. Ne savait pas comment elle était arrivée là. Alors repartir n’avait rien de simple. Louise tenta alors, peut-être naïvement, de rejoindre le cri qu’elle avait entendu. Même s’il ressemblait à un cri de peur, la brune avait l’espoir d’être guidée vers la sortie, tentant de se persuader que ce cri était peut-être celui d’une femme qui s’amusait, d’une femme loin de tout danger par conséquent.

Après quelques minutes de marche, qui avait paru être une éternité, la brune était tombée nez à nez avec une drôle de créature. Cette chose semblait humaine, mais elle était bien trop grande pour l’être. À quelques centimètres seulement de la bête, Louise était certaine qu’elle vivait ses derniers instants. Cette créature avait sans doute assassiné la jeune femme qui avait poussé un cri et Louise était la suivante. Elle était face à elle, il n’y avait aucune chance qu’elle soit passée inaperçue. Immobile, le cœur battant plus vite que jamais, la brune eut une pensée pour Julien et ses enfants, persuadée que jamais elle ne les reverrait. Pourtant, au bout de quelques secondes, elle comprit que rien ne lui arriverait, pas si elle se faisait discrète. Vu sa position, la bête aurait déjà dû la voir, sauf si quelque chose l’en empêchait. Elle ne savait pas quoi, mais elle n’allait pas tenter de le découvrir pour le moment. Pour l’instant, elle devait se contenter de fuir et retrouver la liberté, la sécurité.

Dans le plus grand des silences, Louise repris sa route, avant de tomber sur une autre créature et sur une jeune femme recroquevillait. Une jeune femme qu’elle n’avait pas reconnue. Après une légère hésitation, la brune s’était approchée de la jeune femme avant de déposer une main sur son épaule. “ Ne faites aucun bruit et suivez-moi.” Louise n’était pas certaine de l’amener vers une sortie, mais elle savait que le chemin qu’elle avait emprunté était occupé par une créature, que celui qui se trouvait devant la femme l’était également, il ne restait donc plus qu’une option qu’elles devaient essayer.

Mathilde avait tenté d'étouffer son cri. Elle s'était recroquevillée dans un coin, les jambes repliées contre sa poitrine, les mains plaquées sur la bouche, tentant de dissimuler sa respiration. La créature était à un pas d'elle, réellement. Au moindre mouvement, au moindre son, elle s'attaquerait à Mathilde, la jeune mère n'avait aucun doute là-dessus. Alors, elle attendait. Quoi, elle ne le savait pas, mais elle attendait. En silence, Mathilde pleurait. Elle se préparait à une mort certaine, mais elle se préparait surtout à lutter. Il n'était pas question qu'elle rende aussi facilement les armes. Si cette créature voulait sa vie, il faudrait la lui prendre de force.

Focalisée sur son destin, prête à livrer un dernier combat épique, la jeune femme n'avait pas entendu l'arrivée d'une autre jeune femme. Elle ne l'avait pas vue, non plus. Sa main sur son épaule lui révéla sa présence. Elle étouffa un cri de terreur et de surprise, mais ne put retenir son léger sursaut. Mathilde se redressa légèrement, tout en écoutant les mots de la jeune femme, et en tournant son visage vers celle-ci, elle la reconnut immédiatement. « Louise... » Murmura-t-elle, surprise. De toutes les personnes avec qui elle aurait pu se retrouver, elle se retrouvait donc avec l'amante de celui qui aurait dû être son mari, avec celle qui avait condamné Julien à la peine de mort par sa jalousie. Cette ville se moquait vraiment d'elle, il n'y avait plus aucun doute là-dessus.

Néanmoins, puisqu'elle n'avait pas le choix, elle allait bien suivre Louise, qui semblait savoir où aller. Dans le plus grand des silences et avec la plus grande des délicatesses, Mathilde s'était mise debout. Silencieuse, pour éviter d'éveiller la créature qui se trouvait toujours non loin d'elle, Mathilde fit un signe de main à celle qui se trouvait être désormais sa compagne d'aventures afin de lui indiquer qu'elle la suivait. Il y avait bien peu de chances pour que cette dernière connaisse la sortie, mais peut-être venait-elle d'un endroit plus sûr, où ces étranges créatures humanoïdes n'étaient pas ? Et c'était toujours mieux que rien.

Louise ne comprenait pas ce qui était en train de se passer. Elle ne comprenait pas comment elle était arrivée ici, ni pourquoi. D’ailleurs, elle ne reconnaissait même pas les lieux. Cet endroit, elle ne l’avait encore jamais vu. Elle était bloquée dans une sorte de labyrinthe. Et dans ce labyrinthe, elle ne semblait pas seule. Une jeune femme venait de pousser un cri. Léger certes, mais Louise l’avait tout de même entendu. Alors elle s’était dirigée vers ce cri, sans même savoir si cela était une bonne idée ou non.

Sur son chemin, elle avait croisé une créature étrange. Elle ressemblait à un humain dans sa forme, mais était étrangement grande et était recouverte d’une sorte de cape qui cachait son visage. Si au départ Louise eut peur, elle comprit vite que cette créature ne l’avait pas remarqué. Dans le plus grand des silences, elle s’éloigna alors, avant de voir de nouveau une créature, mais cette fois-ci, elle n’était pas seule. Il y avait une femme non loin d’elle, sans doute la jeune femme qui avait fait du bruit quelques minutes plus tôt. Louise s’avança alors dans le plus grand des silences, elle déposa une main sur l’épaule de la jeune femme avant de lui dire de garder le silence et de l’inviter à la suivre. Alors que Louise était concentrée sur tout autre chose, autrement dit, alors qu’elle observait la créature, elle entendit la femme prononcer son nom. Et elle n’avait même pas eu besoin de la voir pour comprendre qui elle était, cette voix, elle la connaissait, c’était celle de Mathilde, celle qui fut sa remplaçante auprès de Julien. Si Louise l’avait souhaité, elle aurait pu finalement la laisser là, se débrouiller seule face à cette créature, mais cela revenait à se trouver seule elle-même. Et surtout, Louise n’était pas capable d’une telle cruauté. Elle ne pouvait se résoudre à faire du mal à Mathilde, même avec ce qu’elle ressentait à son égard. La blonde ne fit d’ailleurs aucune réflexion, sans doute par peur d’attirer la créature. Visiblement, les deux femmes allaient devoir faire équipe. Si Julien était là, il n’en croirait pas ses yeux.

Une fois éloignée de la créature, Louise se retourna vers Mathilde, qui la suivait de près. “ Je suis tombée sur l’une de ces créatures un peu avant de tomber sur vous. Mais j’ai eu comme l’impression qu’elle ne m’avait pas vu, alors que je n’étais qu’à quelques pas d’elle. Est-ce que vous avez remarqué quelque chose de similaire avec celle qui se trouvait face à vous ? ” chuchota-t-elle. C’était important de le savoir. Pour avancer et ne pas se mettre en danger, elles devaient sûrement essayer de comprendre ces créatures.

Sur cette Terre, dans cette ville mystérieuse, il y avait un nombre incroyable d'êtres vivants et il fallait que Mathilde se retrouve face à Louise. Il aurait été trop fort de dire qu'il s'agissait de la personne qu'elle détestait le plus en ce monde, mais elle était la personne qu'elle détestait le plus en ce monde. Elle était la femme qui lui avait volé Julien. Elle était la femme qui avait conduit Julien à sa perte, par jalousie. Mais puisque la situation semblait désespérée, elles allaient devoir coopérer. La situation n'enchantait pas réellement la jeune femme, mais elle n'allait pas faire sa difficile - pour une fois.

Silencieusement et avec la plus grande des précautions, Mathilde s'était redressée. Au moindre bruit, elles étaient mortes. Autant dire que cela motivait Mathilde à ne pas en faire un seul. Toujours aussi silencieusement, les deux femmes s'étaient dirigées plus loin afin de prendre de la distance avec la créature. Lorsque la distance avait été jugée suffisante par la brune, elle s'était retournée vers Mathilde pour lui expliquer la situation, à voix basse. Avant de la rencontrer, Louise était donc tombée sur l'une de ces créatures - il n'y en avait donc pas qu'une, ce qui n'était guère rassurant - qui avait semblé ne pas la voir. Mathilde hocha la tête doucement, avant de répondre dans un souffle. « La créature a réagi de la même façon. Elle s'est approchée lorsque j'ai crié, elle était à quelques pas de moi, mais elle semblait ne pas me voir, simplement m'entendre. » Si toutes les créatures réagissaient de la même manière, c'était déjà une bonne chose. S'il fallait composer avec des créatures qui réagissaient différemment ou qui avaient différents points faibles et points forts, elles ne s'en sortiraient jamais - et il fallait déjà composer avec l'idée qu'elles devaient faire face à des créatures humanoïdes, qui n'étaient pas humaines, ce qui était déjà beaucoup pour deux femmes de leur monde.

Mathilde observa un instant Louise. Qu'était-il en train de se passer ? En avait-elle seulement la moindre idée ? Avait-elle des réponses là où Mathilde n'en avait pas ? « Que se passe-t-il ? » L'interrogea-t-elle, afin de ne plus laisser planer aucun doute. Depuis leur rencontre, il n'y avait aucune colère ou haine dans sa voix. Elle faisait la part des choses et gardait son mauvais caractère pour plus tard, lorsqu'elles seraient sorties d'affaire. « Je suppose que nous sommes coincées au centre de ce labyrinthe et qu'il faut que l'on sorte d'ici. » Ou qu'elles attendent bien gentiment de se faire dévorer par ces créatures, ce qui n'était évidemment pas dans les projets de la jeune femme.

Mathilde n’était sans doute pas celle que Louise aurait espéré avoir à ses côtés dans ce genre de situation. Mais, visiblement, la ville avait décidé de les réunir pour surmonter cette épreuve. Ce n’était certainement pas le moment d’exprimer leur colère, ni même de jouer au même jeu que la dernière fois qu’elles s’étaient rencontrées. Cette fois-ci, leur vie était sans doute en jeu. Alors elles devaient faire l’effort de s’entraider. Louise connaissait bien le caractère détestable de Mathilde, mais elle savait aussi qu’elle était capable de faire des efforts notamment dans ce genre de situation.

Parlant avec une voix neutre, comme si elle s’adressait à n’importe qui, Louise expliqua alors être tombée sur une créature avant d’être tombée sur Mathilde. Elle prit le temps d’ajouter ce qu’elle avait remarqué sur cette chose, parce que cela avait sans doute son importance. Louise n’avait pas pour habitude de devoir affronter ce genre de choses, mais elle savait réfléchir et savait que le moindre détail pouvait avoir son importance. La première créature qu’elle avait rencontrée semblait être privée de la vue. Puisque Louise s’était retrouvée très proche d’elle sans que cette bête ne semble la voir, sans qu’elle ne tente de l’attaquer, Louise en avait alors conclu qu’elle était sans doute aveugle. Et ce ne fut pas différent avec la créature qu’avait vue Mathilde. Elle avait réagi au cri de la jeune femme – donc elle n’était pas sourde – mais ne l’avait pas vu. C’était sans doute déjà une bonne chose. Cela voulait dire qu’elle avait une chance de s’en sortir vivante. Pour échapper à ces bêtes, elles devaient simplement rester silencieuses – même si les choses restaient tout de même un peu plus compliquées.

« Je ne sais pas. » Se contenta-t-elle de dire. Parce qu’elle n’avait véritablement aucune idée de ce qui était en train de se passer. Elle n’avait encore jamais rien vécu de semblable. Jusqu’à maintenant, sa vie avait plutôt été calme. « Oui, sans doute. Nous ne pouvons décemment pas rester ici à attendre. » C’était une évidence. Les deux femmes devaient tenter d’avancer dans le labyrinthe pour essayer de gagner une sortie. « Alors on y va. » Dit-elle tant pour informer Mathilde qu’elle était prête, que pour se donner un peu de courage. Après tout, elle ne savait pas sur ce qu’elle pouvait tomber à l’intérieur de ce labyrinthe. Peut-être qu’il y avait encore pire que ces créatures. Après une grande inspiration, Louise entama la marche, tentant de faire le moins de bruit possible, marchant le plus calmement possible pour éviter d’attirer de potentielles créatures.

Il n'était évidemment pas question de jouer à la fille fière et hautaine, comme Mathilde savait si bien le faire. Il était question de trouver comment sortir de ce labyrinthe et, de préférence, entières et vivantes. Pour cela, Mathilde devait donc s'allier à Louise. Autant dire, qu'en d'autres circonstances, elle n'aurait jamais accepté. Cette fois-ci, le choix ne lui était pas vraiment laissé. Elles étaient deux alliées improbables, mais deux alliées qui allaient s'en sortir en mettant leur intelligence en commun - de ça, Mathilde, en était persuadée, ou presque.

Bien évidemment, aucune des deux femmes n'était capable d'expliquer ce qui était en train de se passer. Mathilde avait eu vent de ces affaires, en ville. Certaines personnes se réveillaient n'importe où, n'importe quand, sans pouvoir répondre au pourquoi ou au comment. A priori, son tour était venu. Puisque Louise ne semblait pas pouvoir répondre davantage à ces questions, la jeune femme n'insista pas plus - ce n'était pas l'heure de perdre du temps en bavardages inutiles qui ne mèneraient à rien.

Non, il était temps de se débrouiller, de réfléchir et de trouver comment quitter cet endroit sans alerter les créatures qui s'y trouvaient. Si elles n'étaient que deux, peut-être auraient-elles une véritable chance de ne pas recroiser leur chemin, mais rien ne pouvait leur assurer leur nombre, malheureusement. Sans grande surprise, Louise était d'accord avec elle. Alors, puisqu'elles ne pouvaient pas attendre un miracle, ici, coincées au milieu de ce labyrinthe, elles allaient devoir partir en quête d'une sortie. Les deux femmes se mirent donc à marcher. Elles ignoraient où elles allaient, mais elles tentaient d'emprunter, le plus discrètement possible, des allées, semblant les mener, le plus possible, en ligne droite. Il était vite difficile de savoir ce qu'était une ligne droite lorsqu'il fallait bifurquer sans cesse, mais elles n'avaient pas d'autres choix et, peut-être, étaient-elles en train de tourner en rond. C'était impossible à dire, en réalité. « Vous n'avez pas l'impression de tourner en rond ? » Souffla-t-elle au bout de plusieurs minutes à être restées silencieuses. Comment le savoir ? Tout paraissait identique et elles ignoraient tout de la longueur de cet endroit. « Ecoutez. » Ce n'était qu'un murmure, mais en se concentrant suffisamment, il semblait à Mathilde entendre toujours ces créatures étranges, non loin d'elles. « Peut-être devrions-nous essayer de laisser une marque ou quelque chose nous prouvant par où nous sommes déjà passées ? » Avec quoi ou comment, c'était une question à laquelle elle n'avait pas encore réfléchi. Il fallait pourtant bien qu'elles fassent quelque chose pour éviter de tourner en rond indéfiniment.

Louise ne pensait pas se retrouver dans cette situation un jour. Ni dans celle de se retrouver à devoir combattre ou éviter des créatures. Ni dans celle la poussant à collaborer avec Mathilde. Au moins, chacune d’elles faisait part d’une certaine intelligence en sachant mettre leurs différents de côtés pour un temps. Puisque leur vie était en jeu, elles n’avaient sans doute pas eu le choix.

Louise aurait préféré ne pas se retrouver dans une telle situation, mais elle ne pouvait pas se contenter d’attendre que les choses passent. Parce qu’elle en était certaine, les choses n’allaient pas s’arranger seules. Avec Mathilde, elles devaient faire en sorte de s’éloigner de ces créatures, de ce labyrinthe et du danger que ces deux choses représentés. Pour cela, les deux femmes devaient progresser, tenter de se repérer au mieux pour essayer de trouver une sortie. Ce n’était pas chose aisée. Dans un labyrinthe tout se ressemblait. Il y avait tellement de bifurcations que les deux femmes étaient sans doute très souvent revenues sur leurs pas. Et puis ce labyrinthe semblait immense. Bien trop pour pouvoir espérer trouver une sortie rapidement. A la question de Mathilde, la brune haussa une épaule. « Je ne sais pas, tout se ressemble ici. » C’était le but d’un labyrinthe. Les labyrinthes étaient faits de nombreuses allées, de nombreux virages, de nombreux chemins, ainsi les issues étaient difficiles à trouver. Alors Mathilde avait proposé une idée. Elles devaient faire en sorte de marquer leur passage. Ainsi, elles sauraient si elles étaient déjà passées à un endroit ou non. Louise devait le reconnaître, cette idée était simple, mais intelligente. « C’est une bonne idée, mais avec quoi pourrions nous marquer notre passage ? » Louise cherchait autour d’elle, mais il n’y avait absolument rien. Alors comment faire ? « Vous pensez que ce collier pourrait nous aider ? » Louise décrocha son collier de perles, un bijou auquel elle tenait beaucoup, mais s’il pouvait l’aider à sortir d’ici, elle n’hésiterait pas une seconde. « Je sais que ce n’est pas l’idéal, mais si on dépose une perle à chaque entrée que l’on choisit d’emprunter, ça pourrait nous aider, non ? » Une perle, ce n’était pas la meilleure idée, il fallait bien l’ancrer au sol, assez pour ne pas la faire rouler, mais pas trop pour pouvoir la voir sans avoir à chercher pendant de longues minutes. Mais elles n’avaient sans doute pas le choix, Louise n’avait aucune meilleure idée à lui proposer.

Il fallait sortir d'ici le plus vite possible, évidemment. Néanmoins, elles ne pouvaient pas se contenter de parcourir les différentes allées du labyrinthe en boucle dans l'espoir de trouver une sortie puisqu'à l'évidence, cela ne fonctionnait pas. Il fallait donc réfléchir de manière logique et établir un plan à suivre. Aucune solution n'était idéale, très certainement, mais certaines devaient faire davantage l'affaire que d'autres. A force d'avoir cette impression de tourner en rond, Mathilde s'était stoppée. Continuer, c'était s'épuiser inutilement et les deux femmes avaient besoin de toutes leurs forces pour espérer sortir d'ici vivantes - plus encore si elles devaient combattre ces créatures à un moment donné. Evidemment, tourner en rond, ce n'était qu'une impression, pas une certitude. Comment avoir la moindre certitude dans un cas comme le leur ?

Louise ne savait pas non plus. Evidemment, une fois encore. Il fallait trouver une idée leur permettant de savoir si elles étaient déjà passées ou non par tel ou tel endroit. Elles devaient marquer leur chemin - la question était comment ? Les deux jeunes femmes n'avaient pas énormément de choix à leur disposition. Le bon côté des choses était déjà que Louise était d'accord avec elle et qu'elle jugeait l'idée bonne. Et même, elle complétait l'idée de Mathilde en proposant son collier pour les aider. Un collier de perles, autant dire qu'il tombait bien. Elles ne pourraient pas s'en servir éternellement, le nombre de perles était limité, mais il pouvait être bien utile dans un premier temps, au moins. « Oui, peut-être. » Souffla-t-elle, réfléchissant à s'il s'agissait de la meilleure opportunité pour elles ou si elles devaient trouver une autre solution et ne pas perdre de temps . Mais, après tout, elles pouvaient faire ça et essayer autre chose si cette idée ne fonctionnait pas, ensuite. « Oui, oui, ça va fonctionner, c'est une bonne idée. » Disait-elle en tendant la main pour récupérer le collier de Louise. C'était invraisemblable. Elles s'entraidaient et s'alliaient comme jamais, mais elles n'avaient pas vraiment le choix. Il s'agissait néanmoins d'une preuve qu'elles pouvaient s'entendre si elles le voulaient, avec un peu d'efforts. « Essayons de le briser sans tout faire tomber. » Murmura-t-elle tout en tirant légèrement sur le collier pour en récupérer des perles, sans perdre de temps à devoir les ramasser. « Je vous laisse l'honneur de choisir le premier chemin. » Soufflait-elle, une perle en main, en observant leurs arrières pour être certaine que les monstres n'étaient pas là.

Trouver la sortie n’était pas chose aisée. Les deux femmes tournaient en rond, du moins, elles en avaient l’impression. Il était difficile d’être certaine de ce genre de chose quand tout se ressemblait à la perfection. Pour être certaine d’emprunter des chemins différents à chaque fois, Mathilde avait proposé de marquer leur passage. Mais comment ? Il n’y avait aucun moyen de le faire. Il n’y avait rien à leur disposition pour s’aider de cette façon. La seule idée qu’avait eue Louise, c’était son collier. Un collier de perles qu’elle aimait, mais qui pouvait, peut-être, lui sauver la vie en l’aidant à trouver une sortie. Ce n’était sans doute pas l’idée du siècle, mais c’était la seule idée qui lui était venue. En brisant le collier, les deux femmes allaient pouvoir récupérer les perles et en déposer une devant chaque entrée choisie. Ainsi, elles ne passeraient plus deux fois au même endroit. Il n’y avait donc plus qu’à espérer que cela fonctionne et suffise à les aider à sortir.

Si Mathilde ne semblait pas très emballée par l’idée, au départ, elle avait fini par se convaincre que cela allait fonctionner. Même si c’était un échec, elles auraient au moins essayé. Et si cela ne fonctionnait pas, elles se débrouilleraient pour trouver une autre solution. Mathilde tendit sa main afin de récupérer le collier de Louise. Une fois récupéré, la blonde avait brisé le bijou avec la plus grande des précautions. Si le collier était fichu, il ne fallait pas perdre la moindre perle. Elles n’étaient pas nombreuses et Louise ne savait même pas si elles allaient suffire à noter tous les chemins empruntés. Alors elles devaient faire attention et ne pas gaspiller la moindre perle.

C’était à Louise de choisir le premier chemin. Quatre possibilités s’offraient à elle. Elle pouvait déjà en éliminer une première, puisqu’elles en venaient, la sortie n’était pas par là. Choisir entre les trois autres n’avait rien de simple, mais de toute manière, il n’y avait pas vraiment de quoi réfléchir. Il n’y avait aucun moyen de trouver le bon chemin, pour le savoir, elles devaient simplement s’y aventurer. Alors sans perdre de temps, par crainte de voir les créatures arriver, la brune avait pointé un chemin. « Prenons celui-là. » Louise avait attendu que Mathilde dépose une perle à l’entrée et avait commencé à avancer. « Pensez-vous que ce labyrinthe possède au moins une sortie ? » La question n’était pas bête. Puisqu'aucune d’elles n’était arrivée par une entrée, il était fort probable qu’il n’y ait aucune issue. Dans ce cas, les deux femmes seraient, sans doute, perdues. Elles ne pouvaient pas échapper à ces créatures éternellement. Et surtout, elles ne pouvaient pas survivre indéfiniment dans cet endroit.

Elles avaient beau se détester, elles devaient s'entraider. Que penserait Julien en les voyant là, toutes les deux ? Peut-être trouverait-il tout cela ridicule ? Ou peut-être qu'il rirait de cette situation ? Qu'importe, finalement. Il n'était pas là et ne serait plus jamais là. Plus jamais à cause d'elle, à cause de cette femme que Mathilde observait, avec qui Mathilde devait s'associer. Lui sauver la vie pour sauver sa propre vie, c'était, semblait-il, le prix à payer.

Le collier de perles de Louise en main, cassé avec la plus grande des précautions et des délicatesses, Mathilde priait pour que ce plan fonctionne. Il n'y avait pas mille perles à disposition, mais peut-être suffisamment pour espérer s'en sortir en marquant les différents chemins qu'elles emprunteraient. Mais, pour pouvoir positionner ces perles, encore fallait-il choisir le bon chemin. Les choix étaient nombreux. Trop nombreux. Évidement, il aurait été trop simple qu'il n'y ait qu'un chemin à suivre.

Il y avait quatre chemins. Un pouvait être supprimé : l'endroit d'où elles venaient. Il restait trois chemins. Identiques. Semblables. Sans indice indiquant la sortie. Mathilde était incapable de choisir. Alors, elle avait laissé Louise le faire. Il ne s'agissait que d'une question de hasard et il fallait prier pour que Louise ait la main chanceuse, tout simplement. La jeune femme désigna donc un chemin. Mathilde déposa précautionneusement une perle à l'entrée, puis suivit la jeune femme. La question de Louise terrifiait Mathilde - qui n'en montrait rien, elle était bien trop fière pour ça. Néanmoins, cette question n'était pas stupide. Elle était même plutôt intelligente. Terrifiante et intelligente.

Mathilde était restée silencieuse un certain temps. Trop, peut-être, pour ne pas laisser paraître ses doutes. « S'il n'en possède pas, nous sommes fichues, mais je préfère mourir en me battant que mourir en étant prostrée dans un coin. » Autant se battre jusqu'aux derniers instants, non ? Mourir fièrement, dignement. « Peut-être nous faut-il nous cacher suffisamment longtemps pour que l'on nous libère ? » C'était une hypothèse, mais rien ne le prouvait, comme à chaque fois. « Ou peut-être nous faut-il affronter ces créatures ? » Une hypothèse qui la faisait frissonner. « Malheureusement, nous n'en savons rien. Il nous faudra tester les hypothèses les unes après les autres. » Si elles ne voyaient aucune sortie, à force de recherches, il leur faudrait tenter les autres solutions, même si cela leur déplaisait, avant que leurs forces ne disparaissent entièrement.

Pourquoi cette épreuve ? Que devaient-elles faire exactement ? Devaient-elles se contenter d’avancer et de progresser dans ce labyrinthe, tout en évitant les créatures qui s’y trouvait ? Peut-être qu’il n’y avait aucune sortie. Dans ce cas, on attendait sans doute autre chose d’elles. Mais quoi ? Après tout, ce monde était étrange et Louise avait déjà entendu différents récits sur des aventures vécues, involontairement, ici. Les solutions n’étaient pas toujours les plus évidentes. Pas toujours les plus simples. Le but étant, visiblement, de mettre les habitants à l’épreuve, pour, elle ne savait quelle raison.

Si ce labyrinthe n’avait aucune sortie, si la trouver n’était pas la solution, alors Mathilde avait raison, elles étaient fichues. Mais comme elle le disait – et pour une fois, Louise était d’accord avec elle – elle préférait se battre et mourir de cette façon, plutôt qu’en attendant dans un coin que la mort ne vienne les chercher. Il y avait de nombreuses possibilités pour sortir d’ici. Mais laquelle était la bonne ? Elles devaient toutes les essayer. Et puisqu’elles avaient commencé par chercher une sortie, elles devaient continuer. Après tout, c’était peut-être la solution. « Vous avez raison. Nous devons continuer à chercher une sortie. Et si nous n’en trouvons pas, alors nous tenterons une autre solution. » Après un court instant de marche, les deux femmes étaient arrivées devant de nouveaux chemins. « C’est à votre tour de choisir le chemin à emprunter. » Chacune son tour. Il ne restait plus qu’à espérer que les deux femmes allaient avoir la chance de leur côté.

Plus le temps passait, plus il devenait compliqué de déterminer les envies et les objectifs de cet endroit - hormis ce désir de mettre ses habitants dans des situations inconfortables voire dangereuses. Les deux femmes n'avaient d'autres choix que celui de s'allier. Elles devaient tenter de trouver une sortie. Tâche compliquée par la présence de ces étranges créatures qui hantaient les différentes allées de ce labyrinthe. Pourtant, elles essayaient. Battre en se mourant plutôt qu'en se rendant, c'était ainsi qu'elles avaient décidé de procéder.

Ensemble, elles cherchaient donc des solutions. Louise avait proposé de se servir de son collier pour ne pas perdre son chemin et ne pas repasser là où elles étaient déjà passées. C'était une bonne idée - pas éternelle - mais une très bonne idée tout de même. Chercher une sortie était la première hypothèse qu'elles tentaient, elles s'occuperaient des autres ensuite, si celle-ci ne fonctionnait pas. Leur route les avait conduites devant un nouveau choix. Une nouvelle fois, plusieurs chemins s'offraient à elles. A elles de choisir le bon. A Mathilde, plutôt, selon Louise, qui avait déjà passé son tour. « Très bien, alors... » Elle prenait une seconde pour réfléchir. Rien ne pouvait lui indiquer le bon chemin, alors elle tentait d'écouter son instinct. « Lui. » Souffla-t-elle en désignant un chemin de la main, tout en commençant à avancer.

Elles n'avaient eu le temps de faire que quelques pas qu'une créature se précipita vers elles. Elles n'avaient pourtant pas fait de bruit et elles n'avaient même pas entendu la créature arriver. Pour l'éviter, Mathilde avait fait un pas de côté. Du mauvais côté. Elle se retrouvait séparée de Louise. Alors il n'y avait pas mille solutions possibles : Mathilde et Louise devaient se montrer discrètes pour ne pas se faire repérer par la créature et elles devaient trouver un moyen de se rejoindre avant de quitter cet endroit. S'éloigner ou se perdre de vu avant d'être ensemble, c'était prendre le risque de ne jamais se retrouver. Et Mathilde n'avait aucune envie de vivre cette mésaventure toute seule.

Choisir un chemin n’avait rien d’évident. Ou plutôt, choisir le bon chemin. Tous les passages se ressemblaient. Il n’y avait aucun indice – sinon cela serait trop simple – aucune différence. Les deux femmes devaient donc faire confiance à leur instinct et devaient se débrouiller pour trouver le bon chemin, choisi uniquement par hasard. Il y avait peu de chances de trouver les bons passages à emprunter dès le premier coup. Il y avait, même, peu de chance qu’elles trouvent le bon chemin tout simplement. Le labyrinthe était peut-être grand, en tout cas, les issues étaient nombreuses et il ne fallait pas oublier les créatures qui rôdaient ici.

Face à un nouveau choix, Louise avait laissé Mathilde choisir le chemin à prendre. Sans discuter – parce qu’il n’y avait rien à dire – Louise avait suivi le choix de Mathilde et avait commencé à avancer. Mais très rapidement les deux femmes furent stoppées, pire encore, elles furent séparées. L’une des créatures se trouvait entre elles et aucune ne pouvait rejoindre l’autre sans prendre le risque de se faire repérer. Ces créatures semblaient privées de la vue, mais elles semblaient avoir une ouïe bien développée. Le moindre bruit risquait donc de trahir la position des deux femmes.

Les deux femmes n’avaient pas beaucoup d’options face à la situation. Soit elles suivaient leur chemin chacune de leur côté, même si être seule dans ce genre de cas ne donnait pas envie. Soit elles tentaient de se rejoindre par tous les moyens, afin de ne pas finir seule dans ce labyrinthe. Louise aurait pu choisir la première option, seulement, elle refusait de se retrouver seule dans cet endroit. Elle était terrifiée à l’idée de se retrouver seule. Mais ce n’était pas ce qui l’empêchait réellement d’avancer. Malgré leur passé, malgré leurs différends, elle refusait de laisser Mathilde se débrouiller seule. Mais que faire ? Comment éloigner la créature afin d’être de nouveau réunis toutes les deux ? Les deux femmes ne pouvaient même pas parler, même pas discuter d’un plan à deux. Le moindre son pouvait leur coûter la vie. Louise avait eu une idée, attirer la créature ailleurs et la forcer à bouger. Mais en faisant cela, elle prenait toutes les deux un énorme risque. Et en contournant la créature pour rejoindre Mathilde, elles prenaient, là aussi un risque bien trop important. Finalement, il n’y avait sans doute aucune bonne solution.

Ne sachant quoi faire d’autre, la brune fit signe à Mathilde de ne pas bouger. Elle allait essayé de la rejoindre. Lorsque Louise fit un premier pas, elle crut sentir son cœur cesser de battre. Le sol émettait quelques légers bruits qu’elle n’avait pas encore remarqués jusqu’à présent. Ils étaient sans doute discrets, trop discrets pour être entendus par la créature, mais elle, elle les entendait et craignait que ce soit la même chose pour la créature. Lorsque la brune arriva tout juste derrière la créature, cette dernière se retourna faisant désormais face à Louise. Elle était si proche d’elle, mais elle ne bougeait pas. Même si elle ne voyait pas, elle semblait fixer Louise. Inquiète persuadant que la créature l’avait repéré, Louise était restée immobile. Une main sur la bouche, la brune essayait de faire le moins de bruit possible. Mais il était sans doute déjà trop tard, puisque la créature leva une main en direction de Louise. Cette dernière ne lui laissa pas le temps de l’atteindre et se mit à courir en direction de Mathilde, trahissant, sans aucun doute leur présence – qui de toutes façons avaient sans doute déjà était repéré. Sans prendre la peine de se retourner, Louise attrapa le bras de Mathilde l’incitant à courir le plus vite possible afin de pouvoir échapper à la bête.

Il n'y avait que deux choix à faire : un pas à gauche ou un pas à droite. Mathilde avait fait, semble-t-il, le mauvais. Elle était désormais séparée de Louise. Si elle n'appréciait pas particulièrement la compagnie de Louise pour des raisons évidentes, elle n'avait pas la moindre envie de se retrouver toute seule et d'affronter cette épreuve sans personne. Il fallait absolument que les deux femmes réussissent, d'une façon ou d'une autre, à se rejoindre. La créature ne les voyait pas, mais elle les entendait particulièrement bien. Il ne fallait pas respirer trop fort, ni produire le moindre son en se déplaçant. Le plus tentant était évidemment de se recroqueviller dans un coin, en priant pour que la créature finisse par partir, mais si elle ne partait pas ? Elles n'allaient pas pouvoir rester ici indéfiniment. Non, il fallait qu'elles agissent. Elles ne pouvaient pas se contenter d'attendre.

Totalement immobile, Mathilde attendait. Louise lui avait fait un signe pour qu'elle ne bouge pas, alors sans doute avait-elle un plan ? Il fallait l'espérer, tout du moins. Louise était prudente et avançait avec précaution. Chaque pas était mesuré, mais à quel point la créature était sensible au bruit ? Mathilde cessait presque de respirer, sans s'en rendre compte. Elle avait l'impression que le temps était suspendu et tout paraissait incroyablement long. Brusquement, alors que Louise était derrière elle, la créature s'était retournée. Elle ne bougeait pas et se contentait de faire face à Louise. Mathilde avait sursauté, mais était restée immobile, attendant de voir ce qui allait se passer. Etait-ce terminé ? Avait-elle été découverte ? Allait-elle se faire dévorer sous les yeux de Mathilde ?

Mathilde ignorait ce qu'elle devait faire. Louise aussi, sans aucun doute. Alors, cette dernière avait laissé parler son instinct de survie. Puisque la créature était en train de lever une main dans sa direction, Louise se mit à courir aussi vite qu'elle le pouvait. Sans perdre de temps, elle attrapa le bras de Mathilde, toujours immobile face à ce qui était en train de se passer, au passage. Les deux femmes courraient aussi vite que leur corps le leur permettait. La créature les suivait. Heureusement, elle n'était pas plus rapide qu'elles.

Plus le temps passait, plus courir devenait difficile. Elles étaient incapables de distancer la créature. Elles devaient trouver une solution, Mathilde ne tiendrait pas beaucoup plus longtemps. Alors, après y avoir réfléchi un instant, la jeune femme s'était débarrassée du gilet qu'elle portait. A une intersection, elle avait poussé Louise d'un côté et avait jeté de toutes ses forces son vêtement de l'autre côté, dans l'espoir que le bruit soit suffisant pour attirer la créature de ce côté-là. Il fallait l'espérer puisqu'elles ne courraient plus désormais et que si ça ne fonctionnait pas, la créature les trouverait.

Une nouvelle créature se tenait là, entre les deux femmes. Se rejoindre était presque impossible désormais, mais se séparer était impensable. Aucune d’elles ne tenait à rester seule dans cet endroit. Mathilde avait beau ne pas être le meilleur soutien pour Louise et Louise avait beau ne pas être le meilleur soutien pour Mathilde, elles étaient, pour le moment, leur seul soutien. Elles n’avaient, donc, pas le choix, elles devaient trouver un moyen de se rejoindre. C’est Louise qui prit l’initiative de la rejoindre. Mathilde ne devait pas bouger. Pendant ce temps, Louise allait essayer de contourner la créature dans le plus grand des silences. Mais la créature était privée de la vue, par conséquent, son ouïe était plus développée, mais à quel point ? Louise avait rapidement eu sa réponse, la créature devait être extrêmement sensible aux bruits, puisqu’elle semblait avoir entendu Louise. Ne sachant quoi faire, la brune se mit à courir, attrapant Mathilde pour l’entraîner dans sa course. Elles devaient échapper à cette créature.

Louise était à bout de souffle. Elle courait sans réfléchir, tentant de ne pas penser à l’air qui commençait à lui manquer, à ses jambes qui lui faisaient terriblement mal… Elle ne pouvait pas réfléchir, elle n’en avait pas le droit. Si elle s’arrêtait, la créature la rattraperait et son sort serait certainement tragique. Et en faisant cela, elle risquait d’entraîner Mathilde. Mais cette dernière était tout autant à bout de souffle qu’elle. Elles n’allaient pas tenir, jamais. Jamais elles n’allaient réussir à courir jusqu’à être en sécurité. La créature n’allait peut-être jamais s’épuiser et elle connaissait sans doute mieux le labyrinthe que les deux femmes. Alors il fallait trouver une solution et rapidement, avant que leurs jambes ne les lâchent.

Louise n’arrivait pas à réfléchir, elle n’arrivait pas à trouver une solution convenable. Heureusement, Mathilde avait agi rapidement. Elle avait retiré son gilet et l’avait lancé, avec toute la force qu’il lui restait, dans une direction opposée à celle où elles venaient de les pousser. Il n’y avait plus qu’à espérer que le simple bruit léger du gilet qui était tombé sur le sol allait attirer la créature. Mais le bruit de leur respiration était sans doute plus fort, alors elle devait faire l’effort de ne pas respirer pendant encore quelques secondes, juste le temps d’éloigner la créature.

La respiration stoppée, Louise attendait alors de voir dans quelle direction la créature allait aller. Son cœur avait cessé de battre lorsque la chose était de nouveau visible, mais un soulagement s’était immédiatement fait ressentir lorsqu’elle vit que la créature avait suivi le bruit du gilet de Mathilde. Presque aussitôt, sachant que la créature était assez éloignée maintenant, Louise reprit son souffle, la course et l’apnée avait été une épreuve plus que difficile pour la jeune femme. « C’était une bonne idée. » Dit-elle alors pour remercier Mathilde de les avoir sauvées de ce mauvais pas, sans vraiment utiliser les mots qu’il fallait. « On doit continuer avant qu’elle ne comprenne qu’elle s’est trompée de chemin. » C’était tout à fait possible et les deux femmes ne devaient pas prendre ce risque. Elles devaient partir d’ici, s’éloigner au plus vite. Elle n’avait pas le temps de se remettre véritablement de la course et de la crainte qu’elles venaient de vivre.

Les deux femmes avancèrent alors, continuant d’avancer dans la direction opposée à la créature. Il était hors de question de faire demi-tour. Hors de question de retourner là où la créature les avait trouvées. « On prend ce chemin. » Dit-elle sans hésitation, puisqu’une fois de plus, il n’y avait aucune hésitation à avoir. « N’oubliez pas de déposer une perle à l’entrée. » En espérant que Mathilde n’avait pas mis les perles dans son gilet. « Mathilde ! Regardez ! » Dit-elle presque aussitôt. Après avoir fait quelques pas, la brune avait aperçu quelque chose d’écrit sur le sol. Des lettres avaient été écrites sur le sol, dans la poussière, mais certaines d’elles avaient été en partie effacées. « Est-ce que vous arrivez à lire quelque chose ? » Ces mots avaient sans doute une importance. Ils en avaient forcément. Les déchiffrer allait peut-être les aider ou les emmener vers un nouveau piège.

La course épuisait Mathilde à une vitesse folle. Elle n'était pas habituée à devoir courir autant et aussi vite. Si elle voulait rester en vie, elle n'avait pas le choix. C'était son instinct de survie qui lui permettait de trouver la force nécessaire pour continuer. Autrement, elle aurait sans doute abandonné depuis longtemps. Là, elle ne le pouvait pas. Elle ne le pouvait pas parce qu'elle voulait vivre et parce qu'elle devait penser à son fils. Il avait besoin d'elle et elle n'avait pas le droit de l'abandonner. Il était seul et il n'avait qu'elle, alors elle devait se battre pour lui. Aujourd'hui et tous les autres jours. Abandonner n'était pas une option envisageable.

A bout de force, mais motivée pour trouver une solution, Mathilde tentait de réfléchir aux différentes options qui s'offraient à elles. Elle avait fini par retirer sa veste pour la jeter aussi bruyamment que possible du côté opposé à celui où Mathilde venait de les pousser. Pour que le piège fonctionne, elles devaient se taire et cesser de courir - au moins le temps que la chose s'éloigne. Peut-être que Mathilde venait de les condamner, mais elle n'avait pas eu le choix. C'était tenter ça ou s'arrêter et mourir, puisque jamais elle n'aurait pu continuer sa course.

Les deux femmes avaient retenu leur respiration jusqu'à voir la créature s'éloigner. Le plan avait fonctionné. Elles étaient en sécurité. Plus ou moins. Pour le moment, en tout cas. A sa façon, Louise lui fit comprendre que l'idée était bonne, mais qu'elles devaient désormais en profiter pour s'éloigner. Elle avait raison, à tout moment, la créature pouvait se rendre compte de son erreur et venir les attaquer à nouveau. Elles reprirent donc leur chemin. Doucement et prudemment, elles avançaient. Louise faisait un choix, à une nouvelle intersection, et Mathilde déposait une perle à l'entrée - ce que Louise n'avait, de toute façon, pas oublié de lui rappeler. Heureusement que les perles étaient dans la poche de son jean et pas dans son gilet.

Tandis que Mathilde suivait Louise, cette dernière l'interpella. Elle semblait être tombée sur quelque chose. Mathilde observa ce qu'on était en train de lui désigner et s'approcha. Des lettres avaient été inscrites dans la poussière, sur le sol. Certaines étaient effacées et rendaient la lecture difficile. La jeune femme s'approcha autant que possible et s'agenouilla devant ces lettres, afin de se concentrer pour les déchiffrer. « Pas vraiment. Elles sont si effacées. » Souffla Mathilde, concentrée. « On dirait... » Sa phrase restait en suspens. « On dirait une sorte de mise en garde. » Parce qu'il lui semblait voir des mots comme "danger" ou "fuir", ce qui correspondait plutôt bien à leur situation actuelle. « Regardez, on dirait... On dirait qu'il y a des rimes. » Il s'agissait de quatre lignes - quatre vers ? - qui rimaient. Etait-ce quelque chose pour éloigner les créatures ? Ou, au contraire, pour les attirer ? Etait-ce la solution pour sortir de cet endroit ? « J'ignore si nous avons trouvé quelque chose pour nous aider ou s'il s'agit d'un piège. » Les deux étaient probables et rien n'indiquait de quoi il s'agissait, difficile à déterminer, donc.

Une nouvelle fois, les deux femmes avaient eu de la chance. Mathilde avait eu une bonne idée – Louise devait bien le reconnaître – en jetant sa veste dans un chemin avant de se diriger vers celui à l’opposé. La créature avait suivi le bruit qu’avait fait la veste en percutant le sol. Et les bruits de la bête s’étaient fait de moins en moins audibles, signe qu’elle s’était éloignée. Néanmoins, les deux femmes devaient faire vite et reprendre leur route le plus rapidement possible. À tout moment, la créature pouvait comprendre qu’elle s’était fait avoir et elle pouvait faire demi-tour, repartant à la recherche de ses deux proies.

Sans perdre plus de temps, les deux femmes s’étaient donc remises en route. Louise avait choisi un chemin et Mathilde avait déposé une perle à l’entrée. Mais alors qu’elle s’apprêtait à s’avancer, la brune avait remarqué quelque chose sur le sol. Il y avait une inscription. Malheureusement, une bonne partie de cette dernière avait été effacée. Désormais, seuls quelques mots étaient lisibles, mais bien trop peu pour comprendre le sens de ce qui était inscrit. En voyant cela, Louise avait appelé celle qui était sa coéquipière dans cette mésaventure et lui avait demandé si elle arrivait à comprendre ce qui était écrit. La blonde avait d’abord dit qu’elle ne comprenait pas grand-chose, puis s’était agenouillée pour observer l’inscription plus en détail. Elle avait l’impression que c’était une mise en garde. C’était sans doute ça, Louise en avait l’impression, en tout cas, elle reconnaissait certains mots qui allaient en ce sens. « Vous avez raison. » Dit-elle presque étonnée de voir une sorte de poème inscrit sur le sol. « Je ne sais pas, c’est… étrange de retrouver ce genre de chose au beau milieu d’un labyrinthe hanté par de mystérieuses créatures. » Pour les aider ou pour les piéger ? Une bonne question, mais il était pour le moment impossible d’y répondre. Il y avait bien trop peu de mots lisibles pour en déduire quoi que ce soit. « Vous pensez que ça pourrait nous donner des indications à suivre ? » C’était possible après tout. Peut-être que quelque chose ou quelqu’un avait mis ces mots là pour aider. « Je ne sais pas si vous croyez en la magie, mais c’est peut-être une sorte d’incantation qui pourrait nous faire sortir de là ? » Louise n’y connaissait rien, mais dans ce monde, personne ne pouvait vraiment douter de l’existence de la magie et du surnaturel. Depuis son arrivée ici, la brune avait déjà entendu certaines choses à propos de magie, de sortilèges, d’incantations et de tout un tas d’autres trucs qu’elle ne comprenait pas vraiment. Pourtant, elle pouvait affirmer que la plupart des incantations étaient composées de rimes, comme les poèmes. « Lorsque nous avons fui la créature tout à l’heure, j’ai cru apercevoir des inscriptions comme celles-ci sur le sol. Je n’ai pas vu ce qu’il y avait d’écrit, mais je me dis que c’était peut-être les mêmes inscriptions. » S'était-elle soudainement souvenue. « Auriez-vous du papier et un crayon, où n’importe quoi nous permettant d’écrire ? » Elles devaient essayer. « Peut-être devrions-nous noter les quelques mots que nous arrivons à lire. En poursuivant notre chemin, nous allons peut-être réussir à combler les trous. Et une fois le puzzle complété, nous pourrons peut-être comprendre de quoi il s’agit exactement. »

Inscrits dans la poussière, ces mots n'aidaient pas vraiment les deux jeunes femmes. Ils n'étaient pas complets et elles n'avaient pas la moindre idée de s'il s'agissait d'une mise en garde ou d'une aide. Mathilde tentait de déchiffrer ce qu'elle pouvait, mais une bonne partie avait été effacée, ce qui ne facilitait pas les choses. Il y avait, cependant, des choses qu'elle pouvait déduire. Les phrases ressemblaient à des vers. S'agissait-il d'un poème ? D'une sorte de formule ? D'une simple mise en garde écrite de la sorte ? Difficile à dire, sans l'ensemble des mots.

Mathilde ne pouvait qu'être d'accord avec Louise. Il était bien étrange de voir ce genre d'inscriptions au sol, dans un labyrinthe hanté par des créatures aussi mystérieuses qu'effrayantes. « Peut-être, oui. Pourquoi pas ? » Après tout, oui, pourquoi pas ? Pourquoi ne pourrait-il pas s'agir d'indication ? Peut-être s'agissait-il de quelque chose à déchiffrer afin de les faire sortir d'ici ? Ou peut-être n'était-ce qu'un piège ? Louise proposait même une autre hypothèse : une incantation. Mathilde fronça les sourcils. Jusqu'ici, elle aurait dit qu'elle ne croyait pas en la magie ou en ce genre de fantaisie pour enfant... mais dans cette ville, finalement, comment ne pas y croire ? Louise, morte, était là. Mathilde, enceinte et bien vivante, était arrivée dans ce monde un matin après une nuit de pleine lune rouge. Les deux femmes venaient de se réveiller dans un labyrinthe sans savoir comment ou pourquoi. Certains parlaient de pouvoirs qu'ils possédaient, de créatures à combattre. Il y avait des créatures monstrueuses dans ces allées. Comment ne plus croire en la magie, dans ce genre de moment ? « Avec tout ce qui nous arrive, je suis prête à croire en n'importe quoi. » Il fallait ouvrir son esprit dans cette ville, afin de se préparer au mieux aux différentes aventures et mésaventures. « Alors peut-être avez-vous raison. » Autant croire en tout et imaginer toutes les possibilités pour ne rien laisser de côté. Négliger une hypothèse serait parfaitement stupide.

Louise lui donna alors une information importante. Lors de leur fuite, elle avait aperçu d'autres de ces inscriptions, auxquelles elle n'avait pas prêté particulièrement attention. « Il faudrait faire demi-tour et prendre le risque de tomber sur la créature. De plus, rien ne nous assure de retrouver notre chemin. » Beaucoup de points négatifs pour finalement beaucoup d'incertitudes quant aux résultats, mais avaient-elles réellement le choix ? Après tout, elles devaient sortir d'ici et pour cela, peut-être devaient-elles résoudre cette énigme ?

« Non. » Elle n'avait ni papier, ni crayon sur elle. Si elle avait eu un sac, peut-être que ça aurait pu être le cas. « Mais... » Sa main se dirigeait vers la poche arrière de son pantalon. Heureusement, elle n'avait pas rangé son téléphone dans sa veste. Ce dernier était parfaitement inutile ici dans sa fonction première puisqu'il n'y avait aucun réseau. En revanche, il s’avérerait très pratique pour noter les différentes inscriptions et travailler dessus. « J'ai ça ! » Dit-elle en le montrant, avant de le déverrouiller pour prendre une photo de l'inscription. Ce ne serait pas aussi pratique que du papier pour travailler, mais ça ferait l'affaire. « Espérons que cette énigme à résoudre soit notre porte de sortie, dans ce cas. » Souffla Mathilde qui reprenait peu à peu un peu d'espoir. « Je vous suis, allons voir ces fameuses inscriptions. » En espérant qu'elle se souvienne du chemin, pour éviter de se perdre, et priant pour ne pas tomber sur ces créatures.

Que signifiaient ces inscriptions ? Donnaient-elles des indications à suivre ? Pouvaient-elles les conduire jusqu’à la sortie ? Comme Mathilde l’avait dit, les phrases rimaient entre elles. Cela avait forcément une signification. Peut-être que c’était une sorte de formule magique. Louise avait appris à croire en ces choses-là depuis qu’elle était arrivée dans ce monde. Ici, les choses étaient bien différentes d’autrefois. Avant, elle ne risquait pas sa vie tous les jours, elle ne risquait pas non plus de se retrouver dans un endroit inconnu, entourait de toute sorte de monstres. Ici, la magie existait, mais elle savait qu’elle pouvait être bonne ou mauvaise. Alors que devaient-elles faire ? Retrouver l’inscription en entier et tenter de la lire ? Ou passer leur chemin ? La première option était dangereuse, mais c’était sans doute celle qu’elles devaient tenter, parce que ces phrases étaient peut-être leur issue de secours. Mathilde était prête à la croire. Prête à se dire que ces phrases étaient peut-être une incantation. Elles devaient alors suivre cette piste.

Lorsqu’elles avaient fui, Louise avait aperçu des inscriptions comme celles-ci. Peut-être que celles-ci étaient plus complètes ? Peut-être qu’elles pouvaient les aider à remplir un peu plus ce qu’elle avait déjà vu ? En tout cas, cela voulait dire que ce n’était pas perdu. Même si l’inscription était incomplète, elles allaient peut-être pouvoir la remplir en trouvant, dans ce labyrinthe, d’autres endroits où ces quelques phrases étaient inscrites. « Je sais que cela est risqué, mais avons-nous vraiment le choix ? » Louise aussi craignait de retomber sur la créature. Elle craignait tout autant de se perdre, mais en même temps, en empruntant un autre chemin, elles pouvaient tomber sur une nouvelle créature et se perdre également. Alors autant faire demi-tour et tenter de retrouver ce que Louise avait vu.

Pour pouvoir essayer d’avoir l’inscription au complet, les deux femmes devaient prendre note de chaque mot lisible, de chaque lettre lisible, elles devaient absolument tout retranscrire. Malheureusement, Louise n’avait rien sur elle lui permettant de noter quoi que ce soit. Il fallait espérer que Mathilde ait du papier et un crayon. Mais non, elle n’en avait pas non plus. En revanche, elle avait avec elle son téléphone. Avec, elle allait pouvoir noter tout ce qu’il y avait d’important à noter, mais surtout, elle allait pouvoir prendre en photo toutes les inscriptions pour être certaine de ne rien oublier, de ne pas se tromper en renotant elles-mêmes. « Parfait. » Maintenant, elles devaient aller chercher les autres inscriptions. « Je l’espère également. » Peut-être qu’elles allaient bientôt sortir d’ici. « Allons-y. » Sans perdre de temps, la brune avait fait demi-tour, à la recherche de l’inscription qu’elle avait vu.

Après quelques minutes et quelques hésitations, les deux femmes étaient arrivées à l’endroit où Louise avait la première inscription. « Elle était quelque part par ici. » Dit-elle en désignant une zone. Louise l’avait vu dans la précipitation et n’avait pas enregistré l’endroit exact où elle se trouvait. « Là ! » Dit-elle en voyant les quelques phrases, assez fort pour alerter Mathilde, mais pas trop pour ne pas alerter les créatures qui se trouvaient avec elles dans le labyrinthe. « Elle est effacée également, mais j’ai l’impression qu’on peut lire de nouveaux mots. » Elles devaient comparer avec la photo qu’avait prise Mathilde, elles allaient peut-être pouvoir compléter les phrases qu’elles avaient trouvées.

Avec ce genre de phénomène, il fallait tester toutes les solutions qui s'offraient à vous pour espérer trouver celle qui vous permettrez d'en finir. Bien sûr, c'était une chose risquée. A tout moment, votre décision pouvait être mauvaise et pouvait vous condamner au pire. Cependant, il n'y avait pas d'autres choix. Attendre bêtement en espérant un miracle n'apporterait rien. Rien du tout. Il fallait agir. Se débrouiller. Réfléchir. Comprendre. Tester.

Les deux femmes étaient donc sur la piste d'inscriptions mystérieuses. Louise lui expliquait que ce n'était pas la première qu'elle voyait dans ce labyrinthe. Puisque celle-ci était incomplète, peut-être était-il préférable, malgré le danger évident, de faire demi-tour pour essayer de retrouver l'autre ? « Je suppose que non. » Aucun choix ne s'offrait véritablement à elles. D'une certaine façon, les choses s'imposaient d'elles-mêmes et elles devaient simplement trouver le courage de les suivre. Pour réussir, elles allaient devoir être minutieuses et précises. Puisqu'elles n'avaient pas de papier ou de crayon, Mathilde avait utilisé l'appareil photo de son téléphone - qu'elle se bénissait, à cet instant, d'avoir gardé dans sa poche - pour photographier l'inscription. Ainsi, elles auraient les détails et pourraient revenir dessus aussi souvent que nécessaire, pour la déchiffrer.

Les deux femmes se mirent en chemin, avec le même espoir : que cette énigme soit la réponse pour sortir d'ici. Plutôt rapidement, et sans mauvaise rencontre, les deux femmes avaient rejoint la première inscription vue par Louise. Très vite, après avoir atteint la bonne zone, elles trouvèrent l'inscription dont il était question. Les deux femmes se précipitèrent pour l'observer. Il n'y avait pas de temps à perdre. Rapidement, la première réaction de Mathilde avait été de photographier cette inscription également. Puis, elle était retournée sur la première pour les comparer. « Vous avez vu juste. » rétorqua la blonde, concentrée. Elle éditait l'image - et cette fois-ci, elle bénissait la personne qui avait pris un temps fou à lui expliquer le fonctionnement des différentes applications de ces appareils qui lui étaient inconnus quelques années plus tôt. Elle traçait les mots manquants sur la première inscription pour la compléter. « Regardez, elle est presque complète ! » S'exclama-t-elle, heureuse de voir les choses avancer. La sortie n'était peut-être plus très loin. « Je pense qu'il nous manque une dernière inscription et elle sera entièrement complétée. »

Il fallait donc repartir à l'aventure dans ce labyrinthe. Seulement, Mathilde avait entendu un bruit. Une créature n'était pas loin. Heureusement, elle ne les avait pas repérées. Pas encore, et il fallait espérer que cela continue ainsi. D'un signe discret de la main, Mathilde l'avait montrée à Louise afin que cette dernière reste silencieuse. « Soyons discrètes. » Sur ces mots, elle se mit à avancer lentement, à l'opposé de la créature, pour trouver cette autre inscription. « Nous serons bientôt sorties d'ici. » Affirma-t-elle dans un souffle plein d'espoir.

Cet endroit était étrange et inquiétant. Louise n’avait qu’une envie, sortir d’ici et retrouvé ses enfants, son chez elle. Cette inscription lui avait redonné espoir. Elle était peut-être leur clé pour sortir d’ici. Seulement, elle était incomplète. Les mots étaient effacés, parfois incomplets. Malgré tout, avec Mathilde, elles avaient tout de même réussis à déchiffrer quelques mots et cette dernière avait pris l’inscription en photo.

Lorsqu’elle avait fui la créature, Louise avait remarqué une inscription similaire à celle-ci. En la voyant, la brune n’avait pas compris son importance. Elle n’avait pas pris le temps de s’intéresser à elle, mais il faut dire qu’elle n’en avait pas eu le temps. Alors, elles devaient revenir sur leurs pas, en espérant que la créature ne soit pas dans les parages, ni elle, ni une autre. Elles devaient rester prudentes, discrètes, silencieuses pour ne pas se faire prendre. Pour pouvoir aller à l’autre inscription et noter les nouveaux mots visibles.

Mathilde prit la nouvelle inscription en photo et édita l’autre photo – des choses que Louise était toujours incapable de faire, même avec le temps. La blonde ajouta les quelques nouveaux mots lisibles sur l’inscription afin de compléter la première. Même si cette nouvelle inscription était incomplète, elles pouvaient tout de même lire de nouvelles choses, parce que par chance, l’inscription n’était pas entièrement effacée. Malgré tout, il leur manquait encore quelques mots à trouver pour compléter le texte. « Vous avez raison. » Dit-elle à voix basse, mais exprimant la joie et l’espoir qui l’avait envahi.

Les deux femmes devaient donc repartir s’aventurer dans le labyrinthe à la recherche d’une autre inscription. Seulement, le labyrinthe était rempli de créatures et non loin d’elle, il y en avait une nouvelle. Par chance, elle ne les avait pas repérées, mais elles devaient se montrer discrètes, si elles ne voulaient pas attirer l’attention sur elles. Mathilde lui désigna la créature de la main, avant d’ajouter qu’elles devaient être discrètes. Pour éviter tout son inutile, la brune se contenta d’un signe de tête pour montrer qu’elle avait compris. Et dans le plus grand des silences, elles étaient reparties, dans le sens opposé à la créature, pour ne pas se faire avoir par elle. « J’en suis certaine. » Répondit-elle, souriante, certaine que Mathilde avait raison, pour une fois. « Regardez là-bas ! » Il y avait une nouvelle inscription. Le seul problème était qu’une créature se trouvait, seulement, à quelques centimètres d’elle. « On doit vraiment être très discrètes. » Parce qu’elles n’avaient pas le choix et que Louise n’avaient pas envie que l’une d’elles serve d’appât pour éloigner la créature. Elles devaient seulement s’avancer discrètement, rester à deux et s’éloigner dès que l’inscription allait être complète afin de réciter les quelques mots pour fuir cet endroit maudit.

L'énigme était sur le point d'être résolue. Les deux femmes s'activaient à déchiffrer les mots inscrits dans la poussière et à trouver les suivants pour compléter entièrement l'inscription. Avec application, Mathilde prenait en photo et complétait la première inscription à l'aide de la seconde - heureusement que quelqu'un avait eu, un jour, la patience de lui apprendre tout ça.

Cette fois-ci, elles étaient proches du but. L'inscription était presque entièrement complétée. Selon Mathilde, il n'en manquait qu'une puisqu'il ne manquait que quelques mots. Elles se lancèrent donc dans cette nouvelle aventure. Cependant, une créature se trouvait sur leur chemin : elles devaient être particulièrement discrètes. Discrètes comme prévu, les deux femmes avaient contourné la créature. Leurs pas les conduisirent vers une nouvelle inscription. Après tout ce qu'elles avaient vécu, tout cela paraissait presque trop simple. Enfin, trop simple... Il y avait tout de même une nouvelle créature entre elles et cette fameuse inscription, ce qui compliquait évidemment la tâche, mais elles avaient trouvé si simplement l'inscription que... ça ne paraissait presque rien finalement.

Tout doucement, d'un pas lent et léger, Louise et Mathilde avançaient. Un pas après l'autre, il ne fallait pas se précipiter. Se précipiter, c'était la mort assurée - ou presque. Par miracle, ou grâce à leur application, elles étaient arrivées devant l'inscription sans se faire repérer. Mathilde, sans perdre une seconde, l'avait prise en photo. Voir le résultat, en revanche, attendrait qu'elles se soient éloignées. « Nous devons nous éloigner. » Ce n'était qu'un murmure. Un murmure que Louise devait à peine entendre. Pourtant, la créature s'était stoppée dans son avancée avant de se tourner vers les deux femmes. Mathilde ignorait si elle connaissait leur localisation, si elle était au courant de leur présence ou si, simplement, elle se doutait de quelque chose. Après tout, elle ne s'était pas encore jetée sur elles. N'était-ce pas une bonne nouvelle ? Mathilde n'en savait rien. Elle ne bougeait plus. Elle craignait de se mettre à courir pour rien et d'attirer, pour de bon, la créature vers elles.

L’inscription se complétait peu à peu. Il ne manquait presque rien pour qu’elles puissent la lire dans son entièreté. Les deux femmes n’en avaient, normalement, plus pour très longtemps. Bientôt, elles allaient pouvoir sortir, rentrer chez elles et reprendre le cours de leur vie. Rapidement et très facilement, les deux femmes avaient trouvé la troisième et dernière inscription. Bien évidemment, rien n’était toujours très simple dans ce monde. Alors pour obtenir la dernière photo, Mathilde et Louise devaient s’approcher le plus discrètement possible, pour ne pas alerter la créature qui se trouvait tout à côté de l’endroit où elles devaient aller.


Discrètement, faisant de petits pas légers, les deux femmes étaient arrivées jusqu’à l’inscription sans se faire repérer. Elles n’avaient pas le temps d’essayer de la déchiffrer, ni le temps de discuter ou de compléter la première photo. Mathilde devait prendre cette dernière en photo et elles devaient repartir vite et discrètement. Seulement, Mathilde s’était sentie obligée de parler. Elle avait chuchoté, bien évidemment, mais c’était suffisant pour que la créature l’entende. Louise en avait l’impression tout du moins. Après tout, cette dernière s’était arrêté de marcher et elle s’était tournée vers les deux femmes. Le cœur de Louise s’était mis à battre plus fort que la normale, quant à sa respiration, elle s’était aussitôt stoppée, par crainte d’être repéré. Louise crut mourir, lorsque la créature s’avança vers elles, s’arrêtant à quelques centimètres à peine. Elle croyait être fichue, mais elle ne pouvait pas bouger, parce qu’elle espérait un peu. Fort heureusement, après quelques longues secondes d’attentes, la créature avait fait demi-tour. D’un geste de la tête, Louise avait indiqué à Mathilde de partir. Discrètement, alors, elles firent demi-tour, s’éloignant assez de la créature pour ne pas être entendue. Après avoir observé la photo, les deux femmes avaient réussi à compléter l’inscription. Grâce à elle, elles avaient pu sortir saines et sauves de ce labyrinthe infesté de créatures étranges à l’ouïe surdéveloppée.