Je m'étais faufilé discrètement dans la chambre du patient, un homme dans le coma depuis plusieurs jours déjà. Le silence régnait, seulement brisé par les bips réguliers des machines médicales. La pièce était plongée dans une semi-obscurité, laissant entrevoir quelques rayons de lumière filtrant à travers les rideaux tirés.
J'avais apporté avec moi un paquet de chips au sel, mon péché mignon, et une tablette pour regarder une de mes séries préférées. Il fallait bien s'occuper lors de ces longues nuits d'hôpital, et quoi de mieux que de se régaler de ces crasses salées tout en suivant les péripéties des personnages à l'écran ?
Assis au bord du lit, je déballai les chips avec précaution, veillant non pas à ne pas faire trop de bruit mais bien à ne pas en perdre une seule. Le croustillant des chips se mêlait à l'atmosphère paisible de la chambre, créant un contraste étrange. Je me sentais comme un intrus, mais ma gourmandise l'emportait sur toute autre considération.
Je pris une poignée de chips et les portai à ma bouche, savourant leur goût salé et croquant. J'entendais les dialogues de la série, mais je restais attentif aux moindres bruits provenant du lit. Les machines médicales étaient rassurantes, elles semblaient dire que tout était sous contrôle.
Au fur et à mesure que je grignotais mes chips, je me laissais emporter par l'intrigue captivante de l'épisode. Les rebondissements, les amours, les disputes, tout cela contribuait à créer une ambiance électrique dans la chambre endormie. J'oubliais presque que j'étais dans un hôpital, que j'étais supposé être en train de travailler.
Pendant ce court moment de répit, je me sentais presque normal, comme si j'étais à la maison, confortablement installé devant ma télévision. Mais la réalité me rattrapait toujours, rappelant que j'étais le Dr Grégory House, responsable de ce patient et de nombreux autres. Mon devoir m'appellerait bientôt, et les chips devraient céder la place aux diagnostics.
Mais je comptais bien finir le paquet. Et puis, cet homme était mon patient. Je pourrais toujours prétexter que je travaillais sur le diagnostic.
Évidemment, comme on ne pouvait jamais être tranquille nulle part, la porte s’ouvrit sur un ambulancier. Je le regardais vaguement puis je revins à ma série et mes chips.
« Fermez la porte en sortant. »
Je ne voyais pas trop ce qu’il venait faire ici, mais je ne voulais pas perdre une miette de chips ni une minute des trépidantes aventures de ce médecin dragueur avec les infirmières sexy.
Tomber sur un médecin en pleine nuit, dans une chambre d'hôpital ça peut être tout à fait normal mais pas lorsque celui ci se trouve être assis tranquillement sur un fauteuil avec des chips et son téléphone, surement en train de regarder une série ou un film, que diable faisait il là ? Si TK n'était pas rentrer dans la chambre par erreur, le sujet n'aurait jamais eu lieu, la rencontre fortuite entre ces deux là non plus. Vraiment rien à y comprendre. Le pire dans tout ça c'est que le gars en blouse blanche lui demanda de sortir et de fermer la porte derrière lui comme si de rien n'était, comme si c'était normal, et pourtant c'est pas normal.
TK était intervenu sur un accident de la route, deux voitures qui s'étaient malheureusement retrouvé dans le canal voisin, il avait fallu plonger pour les récupérer et l'opération de sauvetage avait durer un certain temps, mais heureusement le jeune homme et son équipe avait pu sauver les 5 personnes coincées dans les voitures et les avaient donc emmené à l'hôpital. Comme un malheur n'arrive jamais seul, le bipeur de l'ambulance sonna une seconde fois pour un autre accident pas très loin d'ici en plus, cependant TK était trempé de la tête au pied et malheureusement il n'avait pas le temps de retourner à la caserne afin de se changer alors il demanda à une infirmière si il avait des vêtements de rechange à lui prêter, elle le connaissait bien et elle lui indiqua une porte où se trouvait d'autres tenues, il la remercia et fila à la quatrième vitesse pour rejoindre cette dite porte. Si il ne faisait froid dehors, il serai reparti ainsi mais c'était pas du tout le cas alors il préférait se changer pour ne pas être congelé et servir à rien. Et c'est là qu'il tomba sur ce médecin. TK n'avait toujours pas refermé la porte surpris de voir cet homme assis tranquillement, il était clair qu'il s'était trompé de porte. "Qu'est ce vous faites là ?" Fut la seule chose qui lui vint à l'esprit là tout de suite.
J’étais ici chez moi. Ou presque. C’était la chambre d’un de mes patients, alors, forcément, ma présence ici était normale. Et même demandée. Même si je n’avais pas vraiment l’habitude de passer voir mes patients, ça, beaucoup de membres du personnel de l’hôpital le savaient. Tout comme tout le monde ici savait bien que je ne portais jamais de blouse blanche, sauf quand je devais me faire passer pour quelqu’un d’autre. Ce qui n’était pas le cas. Ma présence ici, donc, en dehors du fait que je mangeais des chips devant un vrai soap, n’était pas spécialement indésirable.
Par contre… Les deux seules personnes dont je tolérais l’intervention quand j’étais tranquillement installé comme ça, c’était Wilson et Cuddy. C’était tout. Alors le regard que j’adressais à l’intrus voulait tout dire…
« Je tricote des nouvelles chaussettes pour l’ami JP ici présent, ça se voit pas ? »
Ce que je foutais là… franchement… ça se voyait, quand même que je prenais du bon temps. Et encore, ça aurait pu être pire, imaginez s’il m’avait trouvé devant un porno… là, ça aurait sûrement été très gênant… pour lui.
« Et vous, alors ? A voir vos fringues, vous devriez être du côté des véhicules et des urgences… Vous vous êtes perdu ou vous cherchez un endroit tranquille pour roupiller un peu ? »
Je n’avais jamais été un type sympa. Ce n’était pas dans ma nature. Ce qui était important pour moi… c’était moi. Et tandis que je gardais les yeux sur l’ambulancier, j’enfournais une poignée de chips dans ma bouche, sans faire attention aux miettes que je foutais un peu partout. Pas besoin de faire gaffe, de toute façon, puisque le patient n’était pas conscient. Je frottais mon pantalon pour envoyer lesdites miettes sur le lit, d’ailleurs.
Ca aurait pu être une nuit simple, la plus banale que possible mais le mot banal n'existait pas dans le vocabulaire de TK, avec lui les choses étaient toujours compliqués ou originales. Arrivé par erreur dans cette chambre, il regarda l'homme qui se trouvait en face de lui, il avait un certain sens de l'humour celui là, il ne savait pas si il devait rire de la situation ou avoir un ton sérieux. Clairement il ne le connaissait pas et surtout est ce que c'était quelqu'un du personnel médical au moins ? Si c'était un membre de la famille, il n'avait aucun respect de manger des chips devant une série au chevet de son proche souffrant, enfin le jeune brun n'était pas là pour émettre un jugement, à la base il était là pour pouvoir se changer. "Oui c'est tout à fait ça." Lui répondit TK sur le même ton avant de lui demander "C'est quelqu'un de votre famille ou c'est votre patient ?" Peut être qu'il allait enfin savoir qui était il parce qu'il est vrai que l'homme ne portait pas de blouse blanche ou tout autre affaire du personnel de l'hôpital.
L'homme en question continua sur la même lancée, bon il n'avait pas tord, vu comment TK était habillé, il n'était pas bête pour comprendre qu'il n'était pas à sa place, il était perdu en réalité mais est ce qu'il allait lui dire ? Au gré de se prendre d'autres remarques ? En soit ce n'est pas ça qui allait arrêter le jeune homme. "Pour tout vous dire, je me suis perdu, je cherchais un local où me changer parce que comme vous pouvez le voir je suis trempé, petit accident dans le canal." Bon il n'allait pas lui raconter sa vie, surtout qu'il n'avait pas l'air d'être enclin à l'écouter parler de ses problèmes personnels, sans que ça soit pour autant des problèmes, il avait surement autre chose à faire comme continuer sa série. Ce qui suivit surprit encore plus TK, l'homme tout en mangeant ses chips dont la moitié tombèrent sur le lit, lui demanda quel genre de série il regardait, il arqua un sourcil avant de répondre. "Euh...avec mon petit ami on regarde des séries type drame romantique et policières." Il ne sait pas pourquoi il lui a répondu, maintenant il ne manquerai plus que TK s'installe à côté de lui afin de manger des chips.
Dans les hôpitaux, c’était assez compliqué de trouver un endroit où avoir la paix. J’avais l’impression que n’importe qui dans le personnel de cet hosto était tout à fait capable de débarquer pour m’appeler pour une urgence. Même sur les chiottes, j’étais sûr que je ne serais pas tranquille. Mais il me suffit d’entendre la question de l’ambulancier pour comprendre qu’il ne savait pas qui j’étais. Ça, c’était plutôt cool pour moi. Cela voulait dire qu’il y avait quand même des chances qu’il ne soit pas là pour m’entrainer sur un autre cas.
« Je n’ai pas vraiment de famille par ici, à vous d’en tirer les conclusions. »
Je ne connaissais pas cet ambulancier, il ne me connaissait pas non plus. Alors… Il m’expliqua alors qu’il s’était perdu. Intéressant… Se perdre sur son lieu de travail, c’était un peu ballot… Peut-être que je devrais sortir ça comme excuse la prochaine fois que Cuddy voudrait m’imposer des consultations. Je soupirai, pointant du doigt la salle de bains attenante à la chambre.
« Vas-y, mais dépêche-toi. Et la prochaine fois, essaie de ne pas interrompre un génie en plein travail. »
Je le testais. C’était un peu idiot, je le savais, mais c’était plus fort que moi, il fallait toujours que je pousse les gens dans leurs retranchements. Et à sa réponse au sujet des séries, j’eus un petit haussement d’épaules, que j’accompagnais d’une moue un peu déçue.
« Oh ? et pas les séries médicales ? »
Et quoi, il n’y avait que moi qui m’intéressais aux séries médicales où ça couchait dans tous les coins ?
« Et c’est quoi votre petit nom ? »
Je n’avais jamais été le plus doué pour les rencontres et encore moins pour les moments comme ça, alors, je faisais comme je pensais.
« Et cet accident dans le canal ? Alcool ? Dispute ? Fellation au volant ? »
Je pris quelques chips dans ma main pour les déguster en imaginant des scénarios possibles pour un tel accident : quitter la route pour finir dans un canal, ce n’était pas anodin.
Il n'avait donc pas de famille ici, la seconde option était donc surement la bonne, il devait faire parti du personnel médical. Ce qui était tout de même bizarre car prendre sa pause dans la chambre d'un patient était tout de même pas ordinaire et en même temps il ne faisait de mal à personne, sauf peut être à lui même vu toutes les chips qu'il s'enfilait, son taux de sel devait bien être haut. "Médecin, infirmier alors ?" Lui demanda TK, curieux de savoir qui était il vraiment, si ce dernier accepta de lui répondre parce que ça ce n'était pas sur. Ils ne se connaissaient peut être pas mais lui expliquer pourquoi il était la était la bonne chose à faire, il était encore tout trempé et valait mieux expliquer pourquoi parce qu'il ne prenait pas plaisir à se balader comme ça dans un hôpital. Son interlocuteur, après l'avoir écouté enfin du moins une partie, lui montra la salle de bain où il pouvait se changer, c'était simple comme bonjour. "Un génie en plein travail ? On n'a pas la même définition du mot travail." Lui répondit il en levant les yeux au ciel. Le jeune ambulancier n'attendit pas une minute de plus et se rendit dans la dite salle avant d'enfiler une tenue propre et un peu plus décente. Une fois changé, il revient dans la salle où son interlocuteur n'avait pas bougé d'un pouce bien décidé à finir sa série.
C'était justement le sujet abordé, TK regardait un tas de série mais celles qu'il préférait étaient bien évidemment les séries romantiques avec une pointe de policier dans le genre pour Carlos. Bien sur ça lui arrivait de regarder des séries médicales, mais c'était par moment si loin de la vérité et dans d'autres si proches, que ce n'était pas vraiment ce qu'il préférait. "Si de temps à autre, mais ne vous trouvez pas que c'est un peu différent par rapport à la réalité ? Enfin surement pas le fait que tout le monde couche avec tout le monde." Lança le jeune brun avec un petit rire, c'était le point le plus important de ces séries là, une chose qui faisait que beaucoup de personnes les suivaient, les histoires d'amour. "Je m'appelle TK Strand et vous ?" Lui répondit il lorsqu'il lui demanda son petit nom, il y a encore une minute, ils étaient de simples inconnus. Gregory s'intéressa alors à l'accident du canal dont la remarque fit sourire le jeune brun. "Téléphone et dispute je présume, c'est souvent le cas dans les accidents de la route, même si clairement le couple a très mal choisi son moment pour se prendre la tête puisqu'ils se sont retrouvés dans le canal." TK ne jugeait pas, ça arrivait souvent de se disputer avec sa moitié mais quand même, se retrouver dans le canal, ce n'était pas tout les jours que ça arrivait, que s'était il vraiment passé ?
Je haussais un sourcil, regardant ce TK qui venait de faire irruption dans mon espace personnel. "Médecin? Infirmier?" Il me demanda, avec une curiosité mal dissimulée dans la voix. Je pris une poignée de chips, les avalant bruyamment avant de répondre, « Je suis juste le type qui sauve des vies en résolvant des cas que personne d'autre ne peut résoudre. Mais aujourd’hui, c'est ma pause. »
Je me tournais vers lui, le scrutant de haut en bas. « Et toi, tu es qui au juste? Tu as l'air d'avoir survécu à une tempête. » Il me raconta brièvement son histoire, l'accident du canal, tout en changeant de vêtements dans la salle de bain. Quand il revint, je n'avais pas bougé d'un iota, toujours aussi captivé par mon épisode de série télévisée.
Il commença à parler de séries, mentionnant qu'il en regardait de temps en temps, notamment des séries romantiques et policières.
« Des séries romantiques, vraiment? C’est ton truc ou c'est plus celui de ton copain ? » Je ne pus m'empêcher de le taquiner, un sourire narquois aux lèvres. « Et pour répondre à ta question, ouais, la réalité est souvent plus ennuyeuse mais pas toujours moins... dramatique. »
Il se présenta ensuite comme TK Strand et me demanda mon nom. « House. Dr. Gregory House. »
Je le fixai, essayant de déterminer s'il était vraiment intéressant ou juste une autre âme perdue dans les couloirs de cet hôpital.
Il expliqua ensuite sa théorie sur l'accident du canal, mentionnant les disputes et les téléphones comme causes probables.
« Classique. » commentai-je en roulant des yeux. « Les gens ne savent vraiment pas quand il est temps de raccrocher et de conduire... Enfin, ça nous fait du boulot... S'il y avait moins d'imbéciles, on serait peut-être au chômage. » Je pris une autre poignée de chips, laissant échapper un soupir. « Alors, TK Strand, tu vas rester ici pour te divertir un peu avec moi ou tu as une autre raison de traîner dans une chambre d'hôpital avec un sac de chips et un médecin grincheux? »
TK ne savait jamais dissimulé sa curiosité et clairement en cet instant présent, il s'en fichait un peu en vrai, en plus il eu sa réponse, bon ce n'était ce qu'il attendait comme réponse mais c'était déjà ça. "Médecin du coup, une spécialité particulière ? Je vous vois bien en blouse blanche." Lui répondit il avec un fin sourire sans aucune once de moquerie dans sa voix, il était donc en pause déjeuner, et bien ils n'avaient pas non plus la même définition du mot pause, il était apparemment ce "genre" de médecin, même si le brun ne pensait pas que cela soit possible, à faire des pauses dans les chambres des patients (comme dans Grey's Anatomy d'ailleurs) "Je suis ambulancier/secouriste et on peut dire ça." Pas besoin d'être devin pour savoir qu'il venait de traverser une tempête, il avait apparu dans la chambre, mouillé de la tête aux pieds. Maintenant propre comme un sou neuf, parler de ce que Carlos et lui regardaient comme séries avec une personne presque étrangère, ne paraissait pas si louche que ça. "Les séries romantiques c'est plus pour moi même si mon copain est plus romantique que moi." Lui répondit il même si sa question était posée d'une façon à le taquiner plus qu'autre chose, à vrai dire il ne savait pas où la conversation allait les mener, autant jouer franc jeu.
La vie était tout aussi dramatique que les séries, la dessus TK était d'accord avec son interlocuteur, il en avait lui même fais les frais. Il se contenta d'hocher la tête en signe qu'il était d'accord sur ce point. "Enchanté Gregory House." Lui lança le jeune ambulancier en lui tendant la main, il était poli tout de même. Pour la cause de l'accident qui l'a mené ici, c'était souvent la même chose, les gens ne faisaient clairement pas attention, à la remarque du Doc, TK ne put s'empêcher de s'esclaffer, c'était malheureux mais il n'avait pas tort. "Ouais comme tu dis, on aurai vite moins de choses à faire." Toujours adossé contre le mur, le jeune ambulancier n'avait pas encore décampé, surement que sa discussion avec le principal intéressé était quelque chose de nouveau, de tentant. "Clairement j'ai aucune raison de rester dans un hôpital que ce soit avec toi ou ce charmant patient dans le coma, mais une chips ou deux ça ne serait pas de refus."
Peut-être que la situation était plus sympa que je ne l’avais pensée au début. Je me redressai légèrement dans mon fauteuil, croisant les bras en observant TK avec un air mi-amusé, mi-intrigué.
« Spécialité particulière ? » Je répétais sa question, feignant de réfléchir. « Disons que je me spécialise dans les cas désespérés, ceux où les autres médecins ont jeté l'éponge. Je suis la sainte Rita des patients. Oh et la blouse blanche, ça attire trop l'attention. Je préfère le confort d'une veste en cuir.»
Je l'observai se servir de chips, remarquant son geste poli, presque trop correct pour un ambulancier. En tout cas, j’avais croisé des ambulanciers bien moins polis et bien moins respectueux. Lui, il ne ressemblait pas à un troll ou à un homme des cavernes. « Tu sais, TK, dans cet hôpital, les blouses blanches et les combinaisons de secours sont comme des masques…. Les gens se cachent derrière leur profession, oubliant parfois qui ils sont vraiment. Ou essayant de faire en sorte que les autres oublient qui ils sont. Mais toi, tu sembles différent. Peut-être un peu trop honnête pour ton bien. » Cette théorie du masque, personne n’y échappait. On jouait tous un rôle, finalement, celui que les autres attendaient de nous. Même moi. Je me levai, m'approchant lentement de lui, scrutant son expression. « Donc, ambulancier, hein ? Tu cours après les catastrophes, tout comme moi. Mais dis-moi, qu'est-ce qui t'amène à te confier à un médecin que tu viens de rencontrer ? La curiosité ? L'ennui ? Ou peut-être cherches-tu quelque chose de plus... stimulant ?»
Je pris une poignée de chips, m'asseyant sur le coin de la table. Ça manquait de bière, ici. Mais dans l’hôpital, ce n’était pas la boisson la plus courante. « Romantique et policier... Intéressant mélange. Tu cherches l'évasion dans la fiction, ou c'est juste une façon de décompresser après une journée difficile ? Les gens comme toi, toujours en première ligne, vous avez une vision unique sur la vie et la mort. Ça doit être fascinant, non ? »
Je m'arrêtai un instant, le fixant de mes yeux perçants. Je m’amusais, en fait, à essayer de le cerner. « Tu sais, TK, les gens viennent ici avec leurs histoires, leurs drames personnels, espérant que quelqu'un les écoute, les comprenne. Mais moi, je ne suis pas un thérapeute. Je résous des puzzles médicaux. Alors, si tu as un mystère à résoudre, je suis tout ouïe. Sinon, c'est juste un échange de plaisanteries entre deux professionnels du sauvetage.» e marquai une pause, attendant sa réaction. « Mais parlons un peu plus de toi. Ambulancier, en couple, fan de séries... Qu'est-ce qui te pousse à te lever chaque matin pour affronter le chaos du monde ?» Mon ton était mi-sérieux, mi-taquin, typique de mon approche détachée mais curieuse.
« Et au fait, ne t'inquiète pas pour les chips. J'ai tendance à partager... occasionnellement. » Je lui tendis le paquet, un sourire en coin. « Alors, quel est ton verdict sur les médecins et les ambulanciers ? Rivaux, partenaires ou juste deux faces d'une même pièce ?»
Lorsque TK demanda à Gregory quelle spécialité il avait choisi, la réponse de ce dernier le fit rire, vraiment il n'avait pas langue dans sa poche, la conversation était bien plus drôle qu'il ne l'aurai pensé en premier lieu. Et puis la blouse ce n'était clairement pas pour lui, il préférait largement quelque chose de plus classe comme une veste en cuir, la dessus il n'avait pas tord, parfois les tenues du corps médical ne sont pas les plus sexy qu'il soit mais le jeune secouriste appréciait toujours sa tenue d'ambulancier. "Alors quand je parlais de spécialité, je parlais plus du service où tu travaille, les urgences, la chirurgie ou quelque chose comme ça. Et pour la tenue je valide." Lui répondit il avec un sourire, il fallait savoir complimenter au bon moment. TK invité à se servir dans le paquet de chips, fit donc cela avec un geste de respect, c'était déjà très gentil que l'homme veuille bien partager ses chips avec lui, de toute manière, il sentait qu'il resterai là un bon petit moment. "Oui malheureusement certaines personnes se sentent obligées de se cacher derrière un masque, comme pour se protéger ou quelque chose dans le genre. Ah oui ? Et bien je te remercie du compliment, si s'en est un." Rétorqua le brun lorsque House lui parla des masques portés par le corps médical, c'était malheureusement le cas dans pas mal de job, toujours prêt à jouer un rôle pour ne pas trop se livrer probablement. "Oui c'est ça, je suis un ancien pompier, j'avais besoin de trouver ma voie et être secouriste, c'est ce qu'il me faut, la mort ne me fais pas peur, si je peux sauver des vies. Ahah probablement ma curiosité je dirai et mon sens de l'humour." Lui répondit il avec un sourire amusé, le danger et TK c'était une très grande histoire d'amour et puis il avait trouvé le métier qu'il le faisait vibrer, qu'il le faisait se sentir lui même. Et puis il était du genre à papoter librement avec un parfait inconnu.
La vision que House avait des personnes en premières lignes était presque glorifiante, même si le jeune secouriste n'aurai pas décrit ça de la sorte, son interlocuteur n'avait pas tout à fait tord. "Je dirai décompresser après la journée, pour le reste j'ai déjà ce qu'il faut à la maison. Ce n'est pas ce que tu cherches ici ? En décompressant devant une de tes séries tout en mangeant des chips ?" Lui demanda le jeune ambulancier en retour, puisque l'autre avait décidé de le scruter de son regard perçant, TK en profita pour se prendre une nouvelle poignée de chips, il commençait sérieusement à avoir faim. Ce que son interlocuteur lui expliqua ensuite n'était pas faux du tout, souvent en venant dans un hôpital, outre les besoins médicaux, il y avait toujours une approche psychologique, une écoute attentive de la part du personnel médical même si apparemment ce n'était pas le cas de Greg. "Je suis d'accord avec toi sur ce fait là mais pour autant, je ne suis pas là pour me plaindre et je ne suis pas un puzzle à résoudre." Légèrement agacé par sa réplique, il soupira légèrement et son ton devint plus léger par la suite. "Alors je dirai que nous sommes là pour plaisanter, entre deux professionnels de santé." C'est qu'il savait se montrer curieux ce gars, du moins pour sur, il était en train de l'analyser, surement qu'il aimait faire ça avec de parfais inconnus, tel un savant en train d'observer une bête sauvage, même si ce n'était pas vraiment le bon terme pour décrire le jeune homme, un peu imprudent ça oui. "Je sais que c'est pour la bonne cause, pour sauver des vies. Et toi quelle est ta plus belle motivation ?" Lui répondit le jeune homme lorsqu'il lui demanda quelle était sa motivation pour se lever le matin. "Ahah merci c'est gentil de ta part, je commence à avoir très faim par ailleurs." Mais ce n'était pas bon de se gaver de chips sinon il risquerait de ne pas manger grand chose ce soir, quoi que TK avait toujours faim donc il pourrait toujours en rentrant. La question de House n'avait pas besoin de plus de réflexion que ça, pour lui l'un allait avec l'autre. "La première étape de prise en charge d'un patient, c'est les ambulanciers qui s'en occupent, la seconde c'est vous les médecins, donc on a besoin l'un de l'autre sans nul doute."
Peut-être que TK avait raison. En effet, la spécialité médicale n'était pas vraiment ce qui m'intéressait le plus. Je travaillais en diagnostic, à déchiffrer les mystères que la nature s'amusait à lancer. Un peu comme un Sherlock Holmes de la médecine, mais sans la pipe et le chapeau ridicule.
Je haussai un sourcil, amusé par sa précision. « u as raison, les urgences, la chirurgie... ce n'est pas pour moi. Trop de routine. Moi, je suis dans le diagnostic. C'est là que les vrais mystères se cachent. J'explore les mystères du corps humain, ceux qui laissent les autres médecins perplexes. Je cherche les réponses, les vérités… celles qui sont cachées derrière les symptômes, les mots, les regards. Et pour la veste en cuir, merci, je sais que j'ai du style. » Je pris quelques chips, les croquant bruyamment. « Mais assez parlé de moi. Toi, un ancien pompier devenu secouriste... intéressant. »
Son histoire m'interpellait. Passer de pompier à secouriste n'était pas un changement anodin. Cela révélait quelque chose de sa personnalité, de son rapport à l'urgence, au danger. « Tu as besoin de l'adrénaline, n'est-ce pas ? Cet appel du risque, de l'inconnu. C'est ce qui te motive, hein ? »
Je l'observais, notant son sourire amusé, sa facilité à converser. Il était à l'aise, ce qui était rare dans ces murs. « Tu parles de curiosité et d'humour, mais je parie qu'il y a plus que ça. Tu cherches à donner un sens à ce chaos, à trouver ta place… » Comme tout le monde, en fait, mais j’aimais bien montrer que je devinais des trucs.
Je souris à sa réplique sur le fait de ne pas être un puzzle. « Oh, je n'en suis pas si sûr. Chaque personne est un puzzle, d'une manière ou d'une autre. Mais je respecte ton désir de juste plaisanter. Après tout, c'est pas désagréable de parler à quelqu'un qui ne veut pas simplement se plaindre ou chercher à tout savoir. »
Quand il parla de sa motivation pour se lever chaque matin, je me retrouvai à réfléchir à ma propre motivation. « Ma plus belle motivation ? Probablement prouver que je peux résoudre des énigmes que personne d'autre ne peut… ça me botte de trouver des réponses là où d'autres n'ont vu que des questions. »
Je lui tendis le paquet de chips. Ça manquait de boisson, tout ça. Mais difficile de trouver autre chose que des trucs sans alcool dans un hosto. « Les ambulanciers amènent les problèmes, et nous, médecins, essayons de les résoudre. Mais parfois, je me demande si certains médecins ne préféreraient pas que les ambulanciers ne ramènent rien du tout. » Je ris légèrement, espérant qu'il comprendrait l'ironie. Mais, au fond, je n’en doutais pas vraiment. C’était pas tous les jours qu’on croisait la route de quelqu’un qui était disposé à venir se planquer avec moi dans la chambre d’un patient hors d’état de nuire, juste pour profiter du calme, de la télé et d’un bon paquet de chips salées.
Gregory lui parla alors de la spécialité qu'il exerçait, il lui expliqua ce qu'il faisait réellement, des diagnostics, c'était la première fois que TK entendait parler de ce fonctionnement, alors il l'écouta avec attention. C'était la recherche de mystères bien profonds, des choses bien cachés tel un enquêteur lors d'un crime commis par autrui, ce Greg House était quelqu'un de bien particulier et bien mystérieux. "Oh je vois, c'est intéressant, c'est si différent de ce que je voyais des médecins, enfin c'est autre chose quoi. Tu sais que ainsi décrit, tu pourrai ressembler à Sherlock Holmes." Lui répondit il avec un petit rire, en tout cas de ce qu'il comprenait c'est que son interlocuteur avait l'air d'aimer ce qu'il faisait et c'était le plus important dans tout ça. Il voulu ensuite parler de TK comme ci son histoire l'intéressait bien plus que tout autre chose. Dans tout les cas, il avait comprit que le jeune brun avait ce goût du risque et qu'il avait besoin de cette adrénaline dont il lui parlait un peu plus tôt. "On peut dire ça oui, j'ai toujours eu cette idée qu'il fallait prendre un risque pour sauver la vie d'autrui. Pour moi, c'est bien plus important que ma propre vie." Lui répondit TK, il avait cette conviction même si ce n'était clairement pas l'avis de son fiancé ni de sa famille, il avait failli mourir tellement de fois que c'était devenu une quasi habitude, heureusement il s'était calmé sur ce point ces dernières années. Cependant il se mettrait toujours en danger si c'est pour aider, si c'est pour sauver des vies. La passion du métier aussi surtout qu'après avoir été pompier, il restait dans la même branche. Son parcourt pouvait donc être remarquable et intéresser son interlocuteur mais pour lui c'était quelque chose de tout à fait banal, normal même. "Oui probablement et je pense l'avoir trouvé." Il a trouvé sa place là dessus il en est certain, même si il aurai aimé rester dans son monde là où est sa véritable place mais bon c'est comme ça, il ne peut rester sur la même chose éternellement.
Voir chaque personne comme un puzzle est l'une des convictions de House, même si le jeune ambulancier n'y crois pas vraiment, non pas qu'il n'a pas tord sur le fait que chacun est un mystère mais pourquoi aurait on besoin de se faire examiner de fond en comble afin de se faire résoudre ? "Oui c'est bien aussi, d'avoir une conversation simple et légère, pour plaisanter ou autre sans se prendre la tête." Là est tout l'intérêt de la chose, pouvoir décompresser sans se prendre le chou. Concernant la motivation de Greg de se lever le matin, si pour TK c'est de sauver des vies, pour le plus âgé, c'est surtout pour pouvoir résoudre des mystères, là ou personne n'a réussi. En clair montrer qu'il est supérieur aux autres la dessus. "Hm je vois, si je comprend bien, tu aimes bien montrer que tu assure plus que les autres." Lui répondit le brun avec un sourire amusé, maintenant leur petite conversation tournait à un moment de détente, un petit apéro enfin sans l'alcool bien sur TK ne buvait pas mais les chips qu'il mangeait depuis tout à l'heure lui donnait soif. Quand à savoir leurs rôles dans tout ça, Gregory fit une petite plaisanterie qui amena le brun à rire à son tour. Il n'avait pas tord la dessus, c'était les ambulanciers qui amenaient, la plupart du temps les patients donc plus de travail pour les médecins. "Ahah c'est clair, mais ça serai bien triste non si on ne vous donner pas du fil à retordre."
Un sourire narquois se dessina sur mes lèvres alors que TK m'observait, intrigué par ma description du métier de diagnosticien.
« Sherlock Holmes, hein ?» e haussai un sourcil, amusé par la comparaison. « Flatteur, mais pas tout à fait. Je ne fume pas la pipe, je préfère qu’on m’en taille, et je suis plutôt du genre à me vautrer dans mon fauteuil plutôt que de courir dans les rues de Londres.» Un clin d'œil complice accompagna mes paroles.
Bien sûr, je n’avais pas pu m’empêcher de lancer une vanne de cul.
Mais son histoire m'intriguait. Pompier devenu secouriste, il y avait une histoire là-dedans, un fil d'Ariane que j'étais impatient de dénouer. « L’adrénaline ? Le frisson du danger ? Intéressant.» Je le fixai, mes yeux perçants analysant chaque nuance de son expression. « Tu cherches à donner un sens à ce chaos, à trouver ta place dans le grand puzzle de la vie. »
Un haussement d'épaules nonchalant ponctua sa réponse, et un sourire énigmatique illumina son visage. Sa motivation, sauver des vies, était noble, mais teintée d'une certaine naïveté. « Sauver des vies, hein ? Un but admirable, jeune homme.» Un silence s'installa, ponctué par le croquant des chips que nous partagions. « Mais pour moi, ce n'est pas une question de sauver des vies. C'est une question de résoudre des énigmes, de percer les mystères que la nature nous lance. »
Je levai mon verre imaginaire, un clin d'œil ironique à son absence d'alcool. « Aux ambulanciers qui nous amènent du travail, et aux médecins qui s'amusent à le résoudre.» Un rire amer ponctua ma phrase. « Un jeu cruel, n'est-ce pas ? Mais un jeu auquel j'excelle. »
Un silence s'installa, laissant place à une contemplation mutuelle. Deux âmes brisées, chacune à sa manière, cherchant un semblant de paix dans ce monde chaotique. Un lien improbable s'était tissé entre nous, une camaraderie née de l'humour noir et de la lucidité désabusée. « Mais sans vous, on passerait à côté de tant de cas fascinants. Vous êtes en première ligne, TK. Vous voyez le chaos avant qu'il ne soit filtré, nettoyé, et emballé pour notre confort en salle d'examen. »
Je me penchai légèrement vers lui, mon sérieux temporaire laissant place à une malice familière. « Et puis, avouons-le, sans ces urgences, mes journées seraient bien trop ennuyeuses. Je devrais me contenter de mystères médicaux mineurs ou, pire, de réunions administratives sans fin. »
Je me redressai, prenant un ton plus léger. « Alors, merci de nous donner du fil à retordre. C'est ce qui rend le travail intéressant. » Je lui tendis à nouveau le paquet de chips, un sourire complice aux lèvres. « Et pour les moments de détente, comme maintenant, ça permet d’apprécier les petites choses... comme une conversation intéressante et un paquet de chips.»
Je me levai, m'étirant légèrement. « Bon, et si on allait se marrer un peu ? »
Sherlock Holmes voilà à quoi TK le comparait surtout après qu'il lui a décrit son métier mais sa remarque et sa petite blague sexuel le fit rire comme jamais, la comparaison était tout de même justifiée sur certains points. "Hm okey je vois, mais tu ne peux pas me contredire sur le fait que ton histoire de mystères ressemble tout de même à ce cher détective." Lui répondit il avec sourire rieur, à la limite de la moquerie, mais le brun trouvait tout de même que c'était le plus approprié. En tout cas, Gregory était curieux d'en apprendre plus sur l'histoire de TK, il le regardait, l'observait, scrutait chaque expression de son visage pour en savoir plus. Il décelait ce que le brun ressentait lors de ses interventions, la prise de risque, le fait de sauver des vies, tout ça, ça faisait parti de sa vie et pour rien au monde, il n'y changerait quelque chose, parce qu'au fond il tentait de trouver sa place. Il acquiesça aux paroles de son interlocuteur qui avait bien comprit la chose. "Et je l'ai découvert grâce à ce travail." Répondit simplement le jeune homme en parlant de sa place dans ce monde. Encore une fois, Greg fit part de son ressenti sur la question, sauver des vies c'était bien, mais pour lui c'était important de résoudre les mystères que la vie lui offrait. Sa vision des choses était particulière mais avec un véritable fondement. "Et tu as trouvé ta place dans ce flot de mystères à résoudre." Sans ça, peut être qu'il ne se sentirai pas aussi bien dans sa place qu'il s'était trouvé, dans le mystère de la vie.
Sans ambulanciers, les médecins s'ennuieraient, les deux hommes rirent à cette notion, l'un faisant mine de trinquer à leurs propres chefs. "A nous ! Oui un jeu cruel oui mais c'est la vie." C'était comme ça et pas autrement sinon ils seraient tout les deux au chômage. Un silence s'installa ensuite laissant le temps à TK de se goinfrer de chips, si bien qu'il devrait bientôt s'en empêcher sinon il ne pourrai pas goûter le bon repas de Carlos de ce soir. Ce que lui expliqua ensuite Grégory était tout à fait ce qu'il ressentait et comprenait, il fallait un peu de joie dans ce monde de brut, un monde où le chaos était bien trop présent et pouvoir sauver des vies apportait du positif dans tout ça. Son interlocuteur avait besoin d'actions, de choses à faire, de mystères croustillants, dans sa vie, dans sa journée, ce qui se comprenait totalement, ils avaient chacun besoin de leur dose de travail pour occuper leurs vies. "Encore une fois, nous avons besoin l'un de l'autre. Des réunions administratives ? Ca a l'air bien barbant." La conversation était fluide, sans soucis, de la reconnaissance planait entre eux, de la plaisanterie et une bonne poignée de chips. Son interlocuteur le remercia même pour son travail accompli. "Et bien je te remercie, et surtout le paquet de chips." Lui répondit TK avec un clin d'œil avant de l'observer se lever sans comprendre tout de suite où il voulait en venir. "Se marrer un peu ?"
Je t'observais du coin de l'œil, non sans une certaine malice, alors que tu engloutissais les dernières chips, faisant mine de n'être nullement affecté par mon sarcasme latent. Le sourire que tu affichais, à la fois moqueur et complice, me donnait matière à réflexion. N'était-ce pas là le signe d'une camaraderie inattendue entre deux âmes égarées dans l'immensité de leurs propres chaos ? La tienne, cherchant inlassablement à sauver des vies, et la mienne, obsédée par le déchiffrage des énigmes les plus ardues.
« Ben oui, se marrer un peu.» répétais-je, une lueur de défi dans le regard. « Mais bien sûr, pourquoi pas ? Après tout, même les esprits les plus tourmentés méritent leur lot de distractions.»
Je me dirigeais vers mon bureau encombré, en poussant du pied une pile de dossiers négligemment jetés au sol la veille. « Tu sais, TK, ce monde, cette ville… c’est un théâtre d'absurdités. Et nous ? De simples marionnettes. Mais, de temps en temps, on a l'occasion de tirer les ficelles, au moins un peu. »
Je fouillais dans le désordre ambiant, à la recherche d'un objet particulier. « Ah ! Le voilà.» Je brandissais triomphalement un vieux jeu d'échecs, dont les pièces, usées par le temps, semblaient porter les stigmates de nombreuses batailles passées. « Rien de tel qu'une petite confrontation intellectuelle pour éveiller les esprits, tu ne trouves pas ? » dis-je en installant le plateau entre nous.
« Les échecs, TK, sont l'essence même de la vie. Un roi, des pions, et un champ de bataille. Chaque mouvement compte, chaque décision peut être fatale. Et parfois, il suffit d'un seul faux pas pour que tout s'effondre.» Mon regard se posait sur toi, scrutant ta réaction, cherchant à décrypter le moindre de tes gestes. « Alors, qu'en dis-tu ? Es-tu prêt à plonger dans cette joute verbale et stratégique ?»
La pièce était emplie d'une tension palpable, le silence seulement perturbé par le crépitement sporadique du néon au-dessus de nous. Je m'assis en face de toi, un sourire en coin, l'esprit déjà en train d'élaborer plusieurs coups d'avance. « C'est plus qu'un simple jeu, TK. C'est une danse, un affrontement de volontés. Et je suis curieux de voir comment tu te débrouilleras. Vas-tu jouer la sécurité, avancer prudemment, ou bien seras-tu audacieux, prêt à sacrifier pour obtenir ce que tu désires ? »
Je poussais le pion en avant, inaugurant la partie. « Ton tour, mon cher. »
Peut-être que ce n’était pas exactement ce à quoi il pouvait s’attendre quand j’avais parlé de se marrer, mais TK ne me connaissais sans doute pas assez pour savoir que je ne m’arrêterais pas là.
TK n'aurai jamais pensé qu'une camaraderie allait se créer avec Greg, mais ce dernier avait raison dans ce qu'il disait, il avait tout à fait raison alors il acquiesça ses paroles avec un sourire. "Je suis tout à fait d'accord, malgré tout on a bien besoin de se détendre." L'un voulant sauver des vies et l'autre voulant résoudre les énigmes de la vie, une belle amitié allait naitre, le brun en était persuadé. Sa métaphore des marionnettes n'était pas si absurde que ça, dans ce monde ils étaient des pions qui n'avaient pas eu le choix d'arriver ici, dans un but probablement précis mais qui encore une fois n'avait pas décidé d'être révéler au grand jour. "Si on peut en tirer profit moi je dis oui. Parce qu'à preuve du contraire on est ici pendant un lapse de temps indéterminé." Lui répondit TK un instant en pleine réflexion sur le pourquoi du comment. Laissant le temps à House de chercher ce qu'il voulait, fouillant dans sa tonne de papiers, il en sorti un jeu d'échecs, qu'il plaça entre eux. "Oui c'est une bonne idée ! Mais ça fait longtemps que je n'y ai pas joué." Un bail même, il y jouait avec son grand-père maternel lorsqu'il était petit et à vrai dire il ne comprenait pas réellement l'intérêt de ce jeu. Mais aujourd'hui, c'était tout à fait différent, le jeune secouriste avait l'impression que les échecs et sa vie ici se ressemblaient beaucoup, un champ de bataille, des pions, les bonnes décisions à prendre mais à la différence dans l'un, il n'y a pas vraiment d'échappatoire. "Oui c'est même un peu ce qui se passe ici, enfin j'ai l'impression tu vois, comme d'habitude, chaque chose est à sa place. Je suis tout à fait prêt de tenter de te battre." Lui répondit il avec un petit rire n'ayant aucune conviction de gagner.
Désormais installés face à face, les deux jeunes gens se lancèrent de petits regards, TK voyait bien que House était concentré, réfléchissant à sa stratégie future, il devait bien connaitre ça. Le brun essayait déjà de voir en son jeu, de voir où il comptait aller. Il avait deux options très bien cités par son interlocuteur, à lui de choisir mais honnêtement TK n'était pas du genre à foncer tête baissée sans plan en premier lieu, enfin ça ce n'était pas vrai dans son métier de tout les jours. Greg commença la partie en déplaçant son premier pion, le brun regarda attentivement le jeu, par où commencer ? "Hm, je vais faire ça. Tu y joues souvent ?" Lui demanda t'il tout en déplaçant son premier pion à son tour. Effectivement, il n'aurai pas pensé que pour se divertir, ils allaient jouer aux échecs, mais au final c'était une très bonne chose et puis ça changeait des choses habituelles. "Tu penses qu'un jour on rentrera dans nos mondes respectifs ?" Lui demanda t'il d'un coup, en repensant à cette conversation qu'il avait eu avec un patient un jour.
C’était difficile à croire, mais je le trouvais sympathique, ce TK. Notre rencontre hasardeuse était une bonne chose, en soi, puisque nous étions en train de nous découvrir des choses en commun qui pouvaient tout à fait mener à une relation presque amicale. Je disais « presque » parce que je savais bien que je n’étais pas un bon ami, que ce que j’attendais de mes potes était souvent un peu excessif et que j’étais moi-même un peu excessif, parce que j’aimais tester les limites et voir jusqu’où je pouvais aller, mais aussi jusqu’où les autres pouvaient aller à ma demande.
Mais pour l’heure, j’avais surtout envie d’une confrontation intellectuelle. Et pour cela, les échecs étaient un challenge tout à fait judicieux. J’avais ce qu’il fallait dans mon bureau, en plus de quelques trucs sympa.
« Assez pour savoir qu'il ne s'agit pas simplement de jouer, mais de prévoir les conséquences de chaque mouvement.» Et puis, c’était stimulant de réfléchir à autre chose que des cas médicaux. Mes yeux parcouraient le plateau, analysant les possibilités, les risques. Je me penchais légèrement en avant, la lumière du néon vacillante dessinant des ombres dansantes sur les contours de mon visage. Je pouvais sentir la tension dans l'air, une danse silencieuse de pensées et de stratégies. « Et toi, t’aimes ce genre de jeu ? La stratégie, tout ça ? »
C’était mon trip, clairement, mais pas forcément les échecs. Ce qu’il y avait de bien dans ce jeu, c’était son côté assez universel.
« Pour ce qui est de rentrer… Je ne sais pas trop… Je ne sais déjà pas toujours si je vais rentrer simplement chez moi après le boulot, alors tu penses bien… Et puis l’hôpital de Princeton Plainsboro ou celui-ci… ça ne change pas grand-chose, à part les collègues. »
Les ambulanciers, en tout cas, semblaient plus cool ici que là-bas. Et peut-être que je devais tout de même me l’avouer à moi-même, certaines personnes me manquaient. Wilson, par exemple… ou le décolleté de Cuddy… « T’aimerais y retourner ? ou bien tu t’y fais, à la vie ici ? »
La ville était un peu bizarre au début, mais l’être humain avait la capacité de s’adapter à beaucoup d’environnements différents. Ce qui m’avait semblé le plus étrange, récemment, c’était cette espèce de vampire venu sucer les poches de sang dans la réserve de l’hosto. Un incident que j’avais oublié de signaler, évidemment, mais qui me faisait pas mal cogiter aussi.
Je déplaçai un cavalier, le bois du plateau grinçant légèrement sous la pression de mon toucher. « Tu sais, j’ai vu un truc un peu bizarre, quand même… T’as remarqué qu’il y a des gens qui ne sont pas tout à fait normaux, par ici ? » De quelle norme je parlais ? Bonne question… j’étais surtout curieux de voir si j’étais le seul à avoir remarqué ça… auquel cas, ça voudrait peut-être juste dire que je recommençais à avoir des hallucinations à cause de la vicodin.
Une bonne partie d'échec comme au bon vieux temps, TK ne savait pas ce qu'il valait parce que ça faisait très longtemps qu'il n'y avait pas joué mais il allait tenter. House avait l'air d'être un expert dans la matière parce que jouer n'était pas le plus important c'était de savoir prévoir chaque mouvement de l'autre et les conséquences de ses propres mouvements. Et puis il fallait voir comment il regardait le plateau de jeu, à en scruter chaque recoin, chaque détail. "Je vois ça, les échecs c'est plus qu'un jeu, c'est un moment de partage. Un peu oui, mon petit ami l'est plus que moi mais on adore les jeux de société comme Catan." Qu'est ce qu'ils pouvaient passer du temps la dessus, des soirées entières sur leurs jeux de société et c'était le plus souvent toujours chez eux, ça leur permettait de passer du temps tous ensemble en dehors de la caserne et c'était toujours de superbes soirées. Puis l'ambulancier demanda à son interlocuteur son avis sur la fameuse question de savoir si ils rentreraient un jour chez eux, c'était quelque chose qui occupait souvent l'esprit du jeune homme, même si cette idée était moins présente depuis qu'il avait retrouvé Carlos, elle était toujours là dans un coin de sa tête. Pour Greg il était assez mitigé sur la question, il ne savait déjà pas si il allait rentrer chez lui après le boulot et puis c'était un hôpital comme un autre, par conséquent quel était l'intérêt de rentre chez lui. "Oui c'est vrai que vu comme ça, la vie d'avant ne manque pas. Tu as retrouvé des personnes de ton entourage ici ? Personnellement je garde un petit espoir de pouvoir rentrer chez moi parce que ça me manque tout de même mais pour autant je pense que j'en sortirai changer. Et oui je m'y fais à cette vie ici tant que j'ai l'une des personnes les plus importantes à mes côtés c'est le plus important." Même si sa vie ici et là bas n'est pas vraiment différente, il y a tout de même certains points qui ne changent pas.
Tout en discutant House déplaça l'un de ses cavaliers, le brun lui préférait jouer la prudence et déplacer un autre petit pion. Puis il lui parla de la normalité des gens ici, ils venaient d'univers différents et certains étaient bien différents, TK pouvait le concevoir et il l'avait vu de ses propres yeux. Dans son métier il avait déjà eu à faire à des personnes ayant des pouvoirs, c'était quelque chose de vraiment sensationnel et de très bizarre pour lui parce qu'il ne pensait pas que cela était possible, il y avait aussi une histoire de super héro et de méchants bien sur mais de ce qui était créatures surnaturelles, il n'avait pas encore l'occasion d'en voir. "Oui j'ai déjà eu à faire à des personnes complètement différentes des humains normaux si on peut dire ça comme ça. Je suis curieux tu as vu quoi dis moi." Lui répondit il avec un sourire, un air emplis de curiosité dans le regard, de toute manière il ne pouvait pas imaginer tout ce qui était possible dans cet univers rempli de mystères.
Je m'affalai sur le fauteuil de mon bureau, le plateau d'échecs entre nous, comme une barrière invisible mais palpable. Les pièces de bois, usées par le temps et les nombreuses parties, attendaient d'être déplacées, prêtes à servir de pions dans notre duel intellectuel. Je scrutai chaque pièce, chaque recoin du plateau, anticipant les mouvements de TK. Mon esprit était une machine bien huilée, toujours en quête de défis, de puzzles à résoudre.
« Catan ? C'est bien, mais c'est un peu... gentillet. Tu fais ta route pour diviser le plateau en deux et tu as vite le monopole des ressources… Les échecs, c'est plus brutal. C'est la guerre, la vraie. Chaque mouvement est une attaque ou une défense, chaque pièce un soldat sur le champ de bataille. » Je levai les yeux vers TK, un sourire narquois sur les lèvres. « Ton petit ami doit être un fin stratège alors. Peut-être qu'il pourrait me donner du fil à retordre. »
Je déplaçai un fou, le bois grinçant légèrement sous mes doigts. La lumière du néon vacillant jetait des ombres dansantes sur le plateau, accentuant l'atmosphère plus détendue que tendue, au fond. « Je pense que la vie est une série de parties d'échecs successives, avec quelques victoires occasionnelles. On s'adapte, on improvise, et on espère que notre prochain mouvement sera le bon. »
TK répondit, parlant de la possibilité de rentrer chez lui, de retrouver son ancien entourage. Son espoir était presque palpable, une lueur dans ses yeux. « J’avais retrouvé une personne de mon équipe, mais… je ne sais pas où elle est passée. Elle a sûrement voulu partir pour sauver le monde avec MSF ou quelque chose comme ça, c’est tout à fait son genre. » Je haussai un sourcil, réfléchissant un instant à comment je pouvais dire ce que j’avais envie de dire. « L'endroit où l'on vit importe moins que les personnes avec qui on vit. Les relations humaines sont ce qui rend la vie supportable, voire agréable pour certains. »
TK fit un mouvement prudent, déplaçant un pion. La conversation dériva sur la normalité des gens ici, une question qui me titillait depuis un moment. « Ouais… J'ai vu quelque chose qui pourrait entrer dans cette catégorie. » Je marquai une pause, observant sa réaction avant de continuer. « Un type, un vampire, en fait. Il était en train de sucer des poches de sang dans la réserve de l'hôpital. J'ai oublié de signaler l'incident, mais ça m'a fait réfléchir. Peut-être que je recommence à halluciner à cause de la Vicodin, ou peut-être que ce monde est encore plus tordu que je ne le pensais. »
Je déplaçai une tour, levant les yeux vers mon adversaire. « Et toi, tu as déjà eu affaire à ce genre de bizarreries dans ton métier d'ambulancier ? Des pouvoirs, des super-héros, des créatures surnaturelles ? » Mon ton était délibérément léger, presque moqueur, mais je savais que la question était sérieuse. Les réponses de TK pourraient bien éclairer quelques zones d'ombre de ce monde étrange dans lequel nous évoluions.
Je m'enfonçai un peu plus dans mon fauteuil, les yeux rivés sur le plateau. « Chaque mouvement que nous faisons, chaque décision que nous prenons, tout cela pourrait être orchestré par quelqu'un ou quelque chose d'autre. Imagine… et si on n’était rien de plus que des marionnettes, dans cette ville ? »
e pris un instant pour savourer la tension de la partie, le silence ponctué seulement par le léger grincement du bois lorsque TK déplaça une pièce. « »
« Mais bon, je suppose que c'est là toute la beauté de la vie. L'incertitude, l'imprévisibilité. Si tout était planifié à l'avance, où serait le plaisir ? Où serait le défi ? »
Les voilà en train de se faire une partie d'échec, tout ce qu'il y a de plus normal, si l'un était affalé sur son fauteuil, l'autre était assis en tailleur, regardant et essayant d'analyser le jeu de l'autre même si à vrai dire TK n'était pas aussi expert que Gregory. "Oui c'est sur que c'est bien différent, et puis Catan on joue à plusieurs, là c'est une partie à deux, un duel. Ahah la dessus c'est le meilleur, il réfléchit beaucoup trop à mon avis mais tu devrais très bien t'entendre avec lui." Lui répondit TK avec un petit rire, il est clair que Carlos était du genre très stratège, toujours avec un coup d'avance parce qu'il préparait tout à l'avance, c'était l'esprit dans tout ça, un peu comme son interlocuteur en ce moment même. Il le regarda déplacer un fou avec une certaine aisance, l'ambiance tamisé par la lumière, la concentration étant à son comble. Le brun hocha la tête à la remarque de Greg, la vie était une suite d'évènements aléatoires, pour certains prévus d'avance, pour d'autres c'était tout le contraire. "On s'adapte beaucoup je trouve et les évènements ne sont pas toujours simples à vivre mais je suis bien d'accord avec toi sur ce fait là." Dans ce monde si on ne pouvait pas s'adapter, ça menait la tâche plus difficile qu'autre chose, heureusement le jeune homme avait réussi à s'adapter à sa vie ici, sans retomber dans ses vieux démons.
Ce fut au tour du jeune ambulancier de se montrer curieux sur la vie de son interlocuteur qui lui répondit avoir retrouvé une personne de son entourage mais qui apparemment n'est pas resté longtemps, ce qui était étrange d'ailleurs, où était elle passée ? Il émit alors une chose qui était fondé en réalité et très vrai, il fallait tout simplement trouvé les bon mots, et les bonnes personnes en soit. "Oui très agréable pour ma part, je ne coinçois pas ma vie sans certaines personnes de mon entourage. Ah bon ? Elle est partie comme ça du jour au lendemain, elle a disparu plutôt non ?" Lui demanda t'il vraiment étonné de la choix et curieux de savoir si la vie après ce monde était possible ou du moins si il était possible d'en sortir même si clairement il n'y croyait pas.
Tandis que TK fit un mouvement prudent sur le plateau, la conversation tourna sur la normalité de la population vivant ici, il y avait effectivement de tout mais ce dernier n'avait pas encore eu l'occasion d'en rencontrer beaucoup. Le brun écouta avec attention House lui parler de certaines catégories qu'il avait pu rencontrer en arrivant dans ce monde, il écarquilla les yeux en entendant le mot vampire, il n'aurai jamais cru penser ça possible. "Pardon ?! Mais tu n'as pas eu peur ? Ah ouais carrément il se servait ici." Oui le monde était cruel et plus tordu que quiconque pouvait l'imaginer mais en même temps c'était simplement un signe de la diversité. Ce fut à Greg de déplacer un pion tout en étant parfaitement discipliné et calme face aux bizarreries de ce monde, presque amusé de la situation même, TK fit une petite moue triste avant de répondre puisque pour le moment il n'avait jamais rencontré ces choses là. "Rien de bizarre, enfin pas de ce genre là." Il n'avait pas encore rencontré les jumeaux Lacroix, ni Harlan d'ailleurs. Le terme marionnette résonna dans la tête du brun, c'était si possible et en même temps il n'avait pas envie de découvrir cette vérité là. "Oui peut être et même sans ça, la vie serai trop morose, on a besoin de nouveauté et de surprise perpétuelle mais pour autant je n'aimerai pas savoir que quelqu'un ou quelque chose me contrôle pas toi ?" Le défi était dans cette contemplation de la vie, mais pour autant le jeune ambulancier n'avait pas envie que ça soit quelqu'un d'autre qui régit sa vie.
L’avantage des échecs, c’était de permettre une stimulation intellectuelle et logique. J’avais besoin de ça très régulièrement, sans quoi, j’étais du genre à m’emmerder profondément après quelques minutes. Quant au jeu Catan… en réalité, j’appréciais cela aussi, mais je n’avais pas grand-monde pour jouer avec moi. Trouver un partenaire de jeu, ça allait, en trouver deux, c’était tout de suite plus compliqué. Même Wilson n’était plus très chaud depuis que j’avais joué avec lui et sa copine du moment : j’avais le monopole de l’argile et je refusais les simples échanges. Autant dire que la partie avait été la plus longue de l’histoire de Catan. Mais j’étais un connard, par moments, je le savais bien. Et Wilson aussi le savait, il connaissait les risques que cela signifiait de jouer avec moi.
Pourtant, un con qui réfléchissait, visiblement, ça pouvait être une personne digne d’intérêt. En tout cas, c’était ce qui semblait ressortir des paroles de TK, puisque je pouvais bien m’entendre avec son copain. J’eus un petit sourire, ne sachant pas si c’était une façon de me proposer de venir jouer à Catan avec eux ou juste une manière de poursuivre la conversation. « Faudra me le présenter, alors… on a peut-être de bonnes soirées jeux de société en perspective… » Il faudrait juste que je pense à ne pas faire le con tout de suite.
TK avait une vision des choses plutôt simple. Il avait sans doute raison, l’être humain était capable de s’adapter à quasi toutes les situations. Il suffisait de voir l’évolution au fil des siècles ou, même, comment des gens étaient capables de s’organiser pour survivre après un crash d’avion au milieu de nulle part. C’était comme si on avait un « mode survie » en nous et que nous pouvions l’activer par moments. « Quand on y pense… l’humain est quand même capable de s’adapter à tout un tas de trucs plus ou moins prévisibles… Ajoute la résilience et on est des putains de créatures polyvalentes que rien ne peut arrêter. » À part la mort, bien sûr, et la maladie ou les accidents graves… mais c’était un autre sujet.
Dans notre adaptation à la vie dans cette ville, on avait tous dû se recréer un entourage. Je me voilais sans doute la face par rapport à Cameron, mais je préférais me dire qu’elle était partie sauver des vies à l’autre bout du monde plutôt que penser qu’elle avait disparu et que rien ne présageait un potentiel retour. « Aucune idée. C’est une grande romantique qui aime les belles histoires et qui donnerait sa vie pour sauver celle de n’importe qui… si elle a simplement disparu, ça voudrait dire que dans cette ville, il y a des choses qu’on ne soupçonne pas qui sont en train de se passer, dans un but dont on n’a pas idée et dans des circonstances qu’on préférera ne pas connaître en détails… » C’était plus facile de l’imaginer partie que disparue. Mais à voir l’expression sur le visage de TK, c’était pas trop envisageable à ses yeux. « Quoi ? T’as entendu parler d’autres disparitions ? »
Poser la question directement, c’était le mieux à faire. Comme on en était à parler franchement, j’avais évoqué l’histoire du vampire et la réaction de TK ne se fit pas attendre. « Ouais, sans gêne, comme dans un self service… » Avais-je eu peur ? Pas vraiment… j’étais surtout curieux. « Tu vas me prendre pour un taré, enfin, un peu plus que ce que tu penses déjà, mais non. J’ai d’abord cru que c’était un malade qui était en pleine crise hallucinatoire. Il m’a proposé des trucs pour guérir ma jambe, j’ai pas voulu. Je voulais l’analyser mais ça lui a pas trop plu… » Je passais volontairement sous silence tout le côté menaçant, le fait que ce vampire qui avait les traits d’un jeune homme m’avait soulevé d’une main pour me plaquer au mur… Je ne savais même pas comment j’avais pu ne pas paniquer, c’était pas rien comme situation.
Des marionnettes… l’idée me trottait dans la tête. Bien sûr qu’on pouvait en être. Et bien sûr que je n’aimerais pas que ce soit le cas. « J’ai trop besoin de ma liberté, de pouvoir faire mes choix et prendre mes décisions, même les plus pourries possibles… si ça vient de moi, ça me va. Quand ça vient de quelqu’un d’autre… rien à foutre, même si ça vient de la direction de l’hôpital, évidemment. »
TK était persuadé que Carlos et Greg s'entendrait bien et pourquoi pas s'organiser une partie de Catan un de ces jours, ça lui rappelait de bons souvenirs même si pauvre de son interlocuteur, il pouvait se montrer mauvais joueur de temps à autre. Heureusement il n'avait pas le temps de voir ça puisqu'ils étaient souvent plusieurs à y jouer, de ce fait ils pouvaient être à deux contre deux ce qui était bien plus simple. "Oui avec plaisir, ça serait vraiment sympa à faire. Il faudrait juste trouver d'autres personnes, parce que c'est un jeu où plus on est, mieux c'est." Lui répondit il avec un petit sourire, ils ne se connaissaient pas encore très bien mais de ce qu'il avait saisi, ça lui ferai plaisir d'être ami avec House. Certaines personnes n'avaient pas la même vision des choses et c'était tout à fait normal mais TK savait bien ce que c'était la vie, il avait failli la perdre à plusieurs reprises et de ce fait il préférait voir les choses de la manière la plus facile qu'il soit. Greg était d'accord avec lui et sa remarque n'était pas bête, au fond les êtres humains étaient fait avec un mode de survie, un mode de vie qu'il leur permettait de s'adapter à tout et à rien, dans n'importe quelle situation. "Oui c'est clair, c'est tout à fait ça même parce que si on y réfléchit bien, dans n'importe quelle situation de danger, on est fait pour se démener et s'en sortir." Adaptation était la clé si on voulait s'en sortir dans ce monde.
Ils parlèrent ensuite d'un proche de House qui avait littéralement disparu du jour au lendemain, la ville était forcément en cause de tout ça, et comme disait son interlocuteur, il y avait certaines choses qu'il était préférable de ne pas connaitre, de ne pas savoir parce que la vérité ne serait pas forcément belle à découvrir. Greg préférait s'imaginer que son amie soit parti autre part pour sauver des vies plutôt que de réaliser qu'elle avait disparue. "Oui c'est surement le jeu de cette ville bien trop mystérieuse à mon goût et il est préférable de ne pas en savoir plus. Je suis désolé pour toi cependant." Lui répondit l'ambulancier avec une petite moue compatissante, concernant si il y avait d'autres disparitions à laquelle TK aurai entendu parler, il fit non de la tête, déjà que sa famille d'Austin lui manquait, savoir qu'une personne avec qui on était a disparue sans aucune raison lui était impossible à concevoir, si il était une nouvelle fois séparé de Carlos, il ne sait pas comment il réagirai. "Non enfin on entends pas mal parlé de choses et d'autres comme les disparitions mais c'est pas un truc que je pourrai faire."
Tout en jouant la meilleure partie de leurs vies, ils échangèrent sur la possibilité des créatures surnaturelles de ce monde. Le jeune brun se demandait comment son interlocuteur n'avait pas ne pas paniquer à sa rencontre avec un vampire qui se servait de sang comme dans un sel service, au contraire celui ci était plus apte à l'analyser qu'autre chose. "Ah ouais je vois le genre sympathique. Et beh quel courage mon pote ! Moi j'aurai eu peur, vraiment enfin bon j'ai l'impression que c'est monnaie courante ici." TK ne prenait pas Greg pour un fou, il était juste particulier avec un grand sang froid et un certain franc parler limite il pourrait l'admirer. Sinon concernant cette notion de liberté, le secouriste comprenait très bien ce qu'il voulait dire par là, malheureusement il avait la forte impression que tôt ou tard ils n'auraient pas le choix parce qu'ils étaient voués à être utiliser par ceux ou celles qui contrôlaient ce drôle d'endroit. "Je comprends très bien ce ressentiment, la liberté c'est important et j'ai l'impression que c'est ce qu'on va perdre ici." Il n'était pas comme Greg au point de désobéir à la hiérarchie mais dans cette ville, la hiérarchie fonctionnait à merveille et pourtant personne en apparence ne la dirigeait.
Je me trouvais face à un individu qui pensait que jouer à un jeu de société pourrait faire de nous des amis. C’était mignon, vraiment, mais c’était aussi terriblement naïf. Le simple fait de croire qu’on pouvait tisser des liens durables en jetant des dés et en échangeant des cartes était une idée que j’avais depuis longtemps reléguée dans la catégorie des illusions bon marché. Mais bon, TK avait l’air convaincu que son petit monde de stratégies et de comptabilité fictive pouvait nous rapprocher. Alors, pourquoi pas jouer le jeu, pour voir où ça nous mènerait ? Je n’étais pas contre l’idée de m’amuser un peu, même si je savais que les chances de finir avec plus d’amis qu’au départ étaient assez minces.
« Trouver d’autres personnes pour une partie, hein ? » dis-je en jetant un regard scrutateur sur TK. Il semblait si sûr de lui, comme si ce genre de soirée détente pouvait résoudre tous les problèmes du monde. «Pourquoi pas. Je suis sûr qu’on peut dénicher deux pauvres âmes prêtes à se faire écraser par ma supériorité stratégique. Ou celle de ton copain. » Je ne pus m’empêcher de laisser échapper un petit rire sarcastique. Après tout, la modestie n’avait jamais été mon fort.
Nous continuâmes à parler de la capacité humaine à s’adapter à n’importe quelle situation, une conversation qui, je devais l’admettre, avait au moins le mérite de stimuler mes neurones. Mais au fond, je savais que toute cette discussion sur la résilience et l’adaptation n’était qu’une façade pour cacher des craintes plus profondes, des peurs que personne ne voulait vraiment affronter de face. « Se démener pour s’en sortir, c’est ce qu’on fait tous, non ? Peu importe la situation, on trouve toujours un moyen de s’en sortir… jusqu’à ce qu’on n’y arrive plus. » Je laissai cette dernière phrase en suspens, un brin de vérité amère dans une conversation qui, jusqu’à présent, avait évité les vérités les plus dures.
Puis vint le moment où la conversation prit un tour plus sombre. Parler des disparitions, de cette ville étrange et des mystères qui l’entouraient, c’était comme marcher sur une corde raide. Il y avait tant de choses qu’on préférait ignorer, tant de vérités qu’on se refusait à affronter. « Oui, cette ville… » Je laissai mes mots traîner, comme pour m’assurer que TK comprenait bien l’implication de ce que je disais. « C’est plus facile de s’imaginer des scénarios où tout se termine bien. Mais, crois-moi, plus tu creuses, plus tu risques de découvrir des choses que tu aurais préféré ne jamais savoir. »
C’était presque un avertissement, un conseil déguisé en simple constatation. La compassion que TK montrait en exprimant ses regrets pour la disparition de mon amie me toucha plus que je ne l’aurais admis. Mais au lieu de m’attarder sur ce sentiment, je préférai le repousser. « Ne t’inquiète pas pour moi. Je suis un grand garçon, j’ai survécu à pire que ça. »
Et c’était vrai. Des années passées à jongler entre la douleur physique et la solitude avaient forgé une carapace difficile à percer. Quand il secoua la tête pour dire qu’il n’avait pas entendu parler d’autres disparitions, je ne fus pas surpris. Les gens dans cette ville avaient une tendance agaçante à fermer les yeux sur ce qui se passait autour d’eux, comme si ignorer les problèmes les faisait disparaître.
« Bien sûr que non, » répondis-je avec un haussement d’épaules. « Les gens disparaissent tout le temps, mais tant que ça ne te touche pas personnellement, pourquoi s’en soucier, n’est-ce pas ? » C’était cynique, mais terriblement proche de la réalité.
Le sujet dériva vers ces créatures surnaturelles dont on parlait de plus en plus. J’avais rencontré un vampire, et l’idée d’analyser cette créature au lieu de paniquer m’avait semblé tout à fait logique sur le moment. Après tout, la science avait toujours été mon refuge contre l’inconnu. « Courage, ou curiosité morbide, appelle ça comme tu veux. Mais quand tu te retrouves face à un truc qui défie toute logique, la seule chose à faire, c’est de chercher à comprendre. La peur n’est qu’un obstacle de plus à franchir. » Mon ton était délibérément détaché, comme si je parlais de quelque chose d’aussi banal que la météo. TK, avec son admiration à peine voilée, semblait incapable de comprendre pourquoi je ne m’étais pas effondré de terreur face à cette créature. Il parlait de courage, mais il ne savait pas que la peur avait été mon compagnon constant pendant des années. Ce vampire n’était qu’une nouveauté, une variable supplémentaire dans une équation déjà complexe.
Enfin, nous en vînmes à parler de liberté, un concept qui me tenait particulièrement à cœur. TK semblait partager mes préoccupations, bien que de manière plus tempérée. « La liberté… » Je laissai ce mot résonner un moment avant de continuer. « C’est ce qui fait de nous ce que nous sommes. Si on me prive de ma liberté, on fait de moi une simple machine, un pion dans un jeu que je n’ai pas choisi. » J’avais déjà passé trop de temps à me battre contre des forces qui cherchaient à me contrôler, que ce soit ma propre douleur ou les attentes des autres. « Je refuse de perdre ça. Peu importe le prix. » Je laissai ces mots flotter dans l’air, une déclaration de guerre silencieuse contre tout ce qui tenterait de m’enlever le peu de contrôle que j’avais sur ma propre vie. TK avait raison de craindre pour sa liberté, mais il ne savait pas encore à quel point cette lutte pouvait être vicieuse.
Je lui jetai un dernier regard, un mélange d’avertissement et de défi. « Tu serais prêt à tout sacrifier pour conserver ta liberté, toi ? Parce que si ce n’est pas le cas, tu ferais mieux de te préparer à ce que cette ville te la vole morceau par morceau, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien. » Le ton était délibérément provocateur, car je savais que dans ce monde, seuls ceux qui se battaient sans relâche pouvaient espérer conserver ce qui leur tenait à cœur.
Si TK se montrait enjoué à l'idée de faire participé House à son jeu de Catan, ce dernier qui hésita avant d'accepter, ne se montrait pas autant réjoui par la situation, ce jeu de stratégie était bien important pour le secouriste, lui rappelant sa vie d'avant et les parties qu'il faisait avec ses amis. Il savait que ça ne pouvait pas tout résoudre dans le monde, mais au moins ils partageaient un bon moment ensemble et convivial, leur faisant oublier les soucis un moment. House ne se montra nullement modeste concernant le fait qu'il fallait d'autres personnes avec qui jouer, mais n'importe qui, des personnes capables de se laisser écraser par lui même. Le brun leva les yeux au ciel avant de répondre. "Oui c'est un jeu qui se joue à plusieurs mais on devrait abandonner cette idée parce que personne ne voudra ça." Ce n'était qu'un jeu après tout mais TK ne voulait pas se laisser avoir par le comportement de son adversaire. "Ah moins que tu connaisses quelqu'un." Ajouta t'il avec un rire léger, non définitivement on ne blaguait pas avec ça et il se fichait royalement qu'on le trouve naïf de penser ainsi.
L'adaptation, c'est quelque chose de presque inné chez les humains et clairement ils n'avaient pas le choix, cependant la réponse de Greg sur le sujet laissa en suspens pendant un court lapse de temps leur conversation, TK se dit alors qu'il avait raison mais que malheureusement, personne ne se l'avouait réellement. "Oui après tout même si on ne l'avoue pas vraiment, ce sont nos peurs qui guide nombreux de nos actes et de nos pensées." C'était un fait véridique, il n'y avait pas d'autres raisons mais la plupart des gens préférait cacher cette vérité là. Tout comme cette ville, bien mystérieuse, aux secrets les plus étranges, et le jeune homme était bien d'accord sur le fait que plus les gens creusaient plus ils risqueraient de tomber sur des vérités bien trop durs à encaisser. Il hocha la tête avant de répondre. "C'est bien plus facile de faire comme si tout était normal. Parce que oui au final, on sera forcément décus." Parce que c'était plus facile de se dire que tout allait bien se finir alors qu'en réalité, personne ne savait comment les choses allaient se dérouler dans l'avenir.
Lorsqu'ils évoquèrent la disparition de l'ami de House, TK se montra compatissant, ce qui déclencha un sentiment particulier chez son interlocuteur qui préféra l'évincer et intima le jeune brun à ne pas s'en faire pour lui, alors il acquiesça ses paroles avec un demi sourire. Sourire qu'il perdit rapidement aux prochaines paroles de House concernant les disparitions, le fait qu'il ne soit pas au courant des disparitions ne montrait pas forcément qu'il ne s'inquiétait pas du sort d'autrui. Non pas qu'il le prit mal, cependant il prit ça comme un reproche. "Ce n'est pas une question de se soucier ou non si on ne remarque pas. Je ne connais pas tout le monde ici, surement que pour toi c'est différent, tu tiens surement un registre !" TK se montra particulièrement froid même si il comprenait où voulait en venir son interlocuteur, cependant en tant que secouriste, en tant que quelqu'un voulant aider autrui, il n'aimait pas qu'on l'inclue dans le même groupe que les égoïstes, il ne pouvait tout simplement pas aider tout le monde. Rencontrer une créature surnaturelle et plus particulièrement un vampire et ne pas déguerpir était signe de courage pour le brun alors que pour l'autre c'était juste qu'il souhaitait comprendre d'avantage et une question de logique. Ils n'avaient clairement pas les mêmes points de vues. "Si tu le dis. Mais ce n'est pas aussi facile pour tout le monde, la peur n'est pas aussi facile à franchir pour tous." Il était certes plus facile de vivre avec que de la croiser occasionnellement.
House lui fit ensuite part de la notion de liberté qu'ils étaient en train de perdre, TK comprenait ce ressentiment, que ce n'était pas simple de la voir presque s'envoler mais pour son interlocuteur c'était quelque chose de plus important, il ne pouvait vivre sans, sinon il n'était plus lui même et il avait raison, si on enlevait la liberté aux humains, ils ne seraient plus que des machines sans vie et sans cœur. Greg refusait catégoriquement de perdre sa liberté et ce à n'importe quel prix et on ne pouvait que le comprendre. "Je comprends, c'est tellement ça, si on ne peut plus rien choisir, on n'est plus que l'ombre de nous même." Mais qu'est ce qu'ils pouvaient faire de plus ? Se battre contre une ombre ? TK était perdu sur ce qu'il devait faire réellement et la question presque provocatrice de House ne l'aida pas, parce qu'au fond il savait qu'il avait raison mais que dire de plus ? Après un instant de réflexion, il prit la parole. "Tout ça me perd, mais je suis prêt à me battre pour ce que je chéris, il est hors de question de vivre au dépend de quelqu'un d'autre." Il était au moins sur de ça.
« Oh, je connais peut-être quelqu’un, mais je doute qu’ils aient le profil pour apprécier ce genre de… distraction. » Je laissai planer mes mots, observant les réactions de TK, tout en me délectant du petit frisson de provocation qui accompagnait mes paroles. Il cherchait à me comprendre, ce qui en soi était une entreprise assez futile, mais il semblait bien décidé à maintenir ce semblant d’échange. Pas de quoi en faire tout un plat. Mais si ce jeu de Catan pouvait le rendre heureux, pourquoi pas ? Ce n’était qu’un jeu après tout, et ça me donnait l’occasion de tester sa patience, son sens stratégique, et surtout, de confirmer cette part naïve qu’il s’obstinait à exhiber comme un gamin avec un jouet neuf.
Il parlait d’adaptation, d’illusions de contrôle. Voilà bien un sujet qui avait été pour moi une grande source d’amusement au fil des années. C’était presque hilarant de voir à quel point l’humain aimait croire qu’il avait la main sur quoi que ce soit, alors qu’en réalité, la vie nous balançait d’un côté et de l’autre comme des pantins désarticulés. Mais bon, si ça lui faisait plaisir de penser que tout cela avait un sens… pourquoi pas ?
« Croire qu’on contrôle notre adaptation, c’est mignon, » dis-je en croisant les bras. « Mais la vérité, c’est qu’on ne fait que réagir. Tu vois, TK, on est des éponges, pas des maîtres de notre propre destin. On absorbe la merde qui nous entoure, on l’accumule, on pense que ça fait de nous des survivants, mais au fond, on est juste… englués. » Je haussai les épaules, comme si tout cela n’avait pas d’importance. Et d’ailleurs, est-ce que ça en avait ? Pas vraiment. Pas pour moi, en tout cas. Mais il semblait en avoir besoin, alors je lui laissai cette illusion.
Nous nous sommes retrouvés à parler de cette ville et de ses sombres secrets, de ces choses que les gens préféraient ignorer. Le silence s’était fait plus lourd, presque tangible, comme une nappe de brouillard qu’on ne pouvait plus dissiper. Il hochait la tête, comme s’il comprenait, comme si cette façade de résignation lui donnait une force que je ne pouvais plus vraiment lui envier. J’avais appris, depuis longtemps, que creuser trop profondément menait à des choses bien plus déplaisantes que des mystères. Alors je me contentais de gratouiller la surface, assez pour entrevoir les horreurs, mais pas assez pour m’y brûler totalement.
« Ah, cette ville… » soupirai-je, un sourire sans joie aux lèvres. « Elle aime les naïfs, ceux qui pensent que les choses vont simplement se résoudre d’elles-mêmes. Mais c’est ça, au fond, la grande blague de l’humanité. Creuser, espérer, et finir par se retrouver nez à nez avec une vérité trop moche pour qu’on puisse la digérer. T’as vraiment envie de voir ça ? » Je le regardai, le défi dans mes yeux, attendant de voir s’il osait encore croire en ses idéaux, s’il pensait encore que cette quête de sens avait quelque chose à offrir, au-delà de l’inévitable désillusion.
Le sujet dériva vers ces disparitions, ce vide béant laissé par les gens qui n’étaient plus là. Sa compassion m’avait presque pris au dépourvu, même si je n’allais certainement pas lui montrer. Ce genre de sympathie ne m’était d’aucune utilité, c’était une distraction, un petit écho d’une époque où peut-être, juste peut-être, les relations avaient encore un poids. Alors je me contentai de répondre avec un léger haussement d’épaules, repoussant cette tentative de réconfort aussi efficacement que possible.
« Ah, les disparitions, » dis-je avec un soupir lassé. « La grande loi de la jungle urbaine : disparaît qui doit disparaître, et ceux qui restent finissent par oublier. C’est comme ça. On est dans une situation où il n’y a pas d’explications… mais au moins les disparus n’arrivent pas aux urgences. On peut juste espérer qu’ils soient dans un monde meilleur. » Mon ton était acerbe, presque venimeux. Mais je savais bien que ce n’était pas totalement vrai. Pas pour lui, du moins. Ce type avait l’air de s’accrocher aux gens comme une moule à son rocher, incapable de lâcher prise. Alors pourquoi ne pas lui balancer la réalité en pleine figure, pour voir jusqu’où il pouvait aller sans rompre ?
Quand il mentionna la peur, cette façon qu’elle avait de guider nos actions, de dicter nos choix, je ne pus m’empêcher de sourire. C’était là tout le fond du problème, après tout. La peur n’était pas un ennemi ; c’était un moteur, une raison de plus pour aller de l’avant, pour ne pas se laisser piéger par cette spirale d’indifférence qui nous entourait.
« La peur, c’est le meilleur allié que t’auras jamais. Elle te garde en vie, te pousse à agir, à te surpasser. Si tu la combats, elle te bouffera tout entier. Accepte-la, et elle deviendra ta meilleure amie. » Je me penchai légèrement en avant, le regard rivé sur lui, sondant ses réactions comme un prédateur guette sa proie. « C’est bien joli de se dire prêt à tout pour ses idéaux, mais la réalité, c’est que la peur finira par te faire des choses que tu n’aurais jamais imaginées… enfin, je dis « tu », mais ça vaut pour tout le monde, même pour moi. » ajoutai-je en haussant les épaules.
Quant à cette histoire de liberté, la conversation avait pris un tour presque philosophique. Il semblait s’accrocher à cette idée avec la ferveur d’un croyant, refusant de céder, même face aux incertitudes qui nous entouraient. C’était touchant, d’une certaine façon, mais je savais bien que cette ville, ce monde, n’allait pas lui laisser ce luxe. Pas sans qu’il doive se battre jusqu’à la dernière goutte de son âme. Et même là, les chances étaient minces. « La liberté, TK… » Je laissai échapper un ricanement, sec et presque moqueur. « Tu peux bien te battre, te défendre bec et ongles pour garder ce semblant de contrôle. Mais crois-moi, à la fin, tu seras toujours le jouet d’un système qui n’en a rien à foutre de toi. Et tu sais quoi ? C’est pas un problème, parce que si tu t’en rends compte assez tôt, ça te donne un avantage. T’as pas besoin de te laisser piéger par l’illusion. Moi, j’ai décidé depuis longtemps que ce monde n’aurait pas ma liberté. Je la garde, et je la défends, quitte à devenir ce connard que tout le monde adore détester. »
Je me redressai, regardant TK avec une lueur de défi dans les yeux. « Mais ouais, je comprends ton point de vue. »