(Terminé) Nul n'échappe à son destin ▿ Elena.

Elle l'avait vue. Elle l'avait reconnue. La parfaite petite Elena. La parfaite petite médecin, au service du bien-être et de la santé des autres. L'enviée, l'aimée, l'adorée Elena. La belle, la douce et la gentille Elena. N'était-ce pas amusant, le destin ? Celui qui mettait Katherine sur la route d'Elena, même dans ce nouveau monde, ce nouvel univers ? Vie après la mort, nouvel enfer, nouvelle vie, seconde chance... Qu'importe le nom qu'on lui donnait, il fallait qu'elle soit là, elle aussi. Bien sûr, il fallait la moins bonne version des doubles puisque la meilleure était là. Ça devait équilibrer l'univers, ou un truc comme ça.

Katherine aurait pu passer sa route, éviter l'ennuie d'avoir à discuter avec une fille comme elle - mais elle s'interdirait le plaisir qu'elle prendrait à le faire, aussi. Sagement, patiemment, comme elle savait si bien le faire, Katherine avait guetté la sortie de l'hôpital, tapie dans l'ombre d'une ruelle, juste en face. Puis elle était apparue. Souriante, heureuse. Elle respirait la bonté, à tel point que c'en était dégoûtant - elle ne voyait pas grand-chose, de là où elle était, mais elle se l'imaginait parfaitement.

Les pas de Katherine la conduisirent discrètement un peu plus loin dans la ruelle, là où l'obscurité la plus totale régnait. Les pas d'Elena se rapprochaient et lorsqu'elle était suffisamment proche, Katherine prit une voix terrifiée, affolée avant de se mettre à crier. « S'il vous plaît, j'ai besoin d'aide. » Elle ne lui ferait aucun mal - après tout, elle n'avait récupéré aucun pouvoir et elle ne savait pas si Elena était dans le même cas ou non, l'attaquer frontalement et directement aurait été une erreur stupide et particulièrement dangereuse - simplement elle voulait l'attirer ici, simuler une amnésie - ou un double, un énième, après tout les sosies étaient choses courantes dans ce monde, Katherine pouvait n'être que l'un d'eux - et se jouer d'elle comme elle avait tant aimé le faire par le passé. Quatre années qu'elle s'ennuyait à mourir dans ce monde, peut-être que les choses intéressantes allaient enfin commencer et que Katherine allait enfin pouvoir s'amuser un peu ?

Katherine avait passé des heures devant cet hôpital à observer, à patienter, à attendre. Son esprit avait imaginé tous les scénarios possibles pour se venger, tous les scénarios possibles pour lui infliger des tortures à la hauteur de ce qu'elle avait subi, elle. Son esprit s'était focalisé sur ces années que Katherine avait passé à fomenter une vengeance, oubliant de préciser les détails de cette rencontre et de la préparer. Elle ne faisait pourtant jamais rien au hasard. Chaque instant, chaque événement, chaque action étaient savamment orchestrés afin que rien ne puisse lui échapper. Cette fois-ci faisait exception. Katherine s'était laissée distraire, emportée par ses émotions qui la rendaient si faible. Si humaine.

Rapidement, pourtant, en voyant la silhouette de son double quitter l'hôpital, un plan s'était dessiné dans son esprit. Elle ne risquait pas grand-chose - sauf si Elena était vampire et qu'elle possédait tous ses dons, mais là encore, elle doutait que la douce Elena puisse la tuer avant d'être certaine qu'il s'agissait bel et bien de Katherine. Elle avait crié, dans son coin, tapie dans l'ombre, à l'abri des regards. Attirer l'attention d'Elena, l'observer, en apprendre plus sur sa vie ici. C'était tout ce qu'elle devait faire. L'envie de lui briser la nuque ou de lui arracher la tête était là, bien présente, bien ancrée en elle. Pourtant... Il ne le fallait pas. Trop risqué. Trop tôt. La vengeance pouvait attendre. Puis quel plaisir prendrait-elle à se venger aussi facilement ? Non, il fallait faire durer les choses et la détruire petit à petit. Laisser planer la menace qu'elle représentait. L'effrayer. La torturer. La terrifier. Lui faire peur. Faire de sa vie un enfer.

Elena s'était approchée. Prudemment, mais tout de même suffisamment proche pour que Katherine craigne d'être démasquée trop vite. Cette dernière gardait le visage baissé, les mains reposant sur ses cuisses comme si elle ressentait le besoin de se maintenir pour ne pas tomber. Katherine ne comptait pas se cacher, mais elle voulait faire durer les choses, observer la réaction de son double à l'instant où elle verrait son visage et où elle supposerait avoir Katherine face à elle - ce qu'elle nierait avec ardeur, évidemment. « Je... Il y avait quelqu'un. J'ai couru pour lui échapper, puis je vous ai entendu et j'ai hurlé. Je crois que ça l'a fait fuir. » Tentait-elle de dire de sa voix la plus douce et la plus effrayée - celle qu'elle prenait lorsqu'elle imitait cette pauvre idiote d'Elena, en d'autres termes. Elle se voulait essoufflée, effrayée, terrifiée. Elle se voulait perdue, craintive et apeurée. Ce rôle lui allait à la perfection, elle en était persuadée.

Ses yeux se relevèrent, sans jamais se poser sur Elena, pour observer le reste de cette ruelle, comme si elle craignait de voir une créature sortir de l'ombre à tout moment. « J'ai eu si peur. » Continuait-elle, la voix chevrotante et les yeux larmoyants. « Si vous n'étiez pas arrivée... » Oh, oui, que serait-il arrivé à la pauvre petite humaine innocente et inoffensive qu'elle était si la brave et courageuse Elena n'était pas arrivée ?

Katherine jouait la jeune femme terrifiée, apeurée, épuisée, affolée. Son rôle préféré - après celui d'Elena - puisqu'il attirait la pitié. Elle y prenait toujours un plaisir fou. Plus encore lorsqu'il s'agissait de piéger quelqu'un comme la parfaite petite Elena. Si parfaite qu'elle était là, en train de lui venir en aide, en train de la secourir comme la parfaite humaine qu'elle était devenue. Il fallait voir comme elle se comportait avec douceur, empathie et gentillesse. Cette main rassurante dans son dos, l'autre sur son bras, et ses mots réconfortants. C'en était à vomir. Katherine était donc en sécurité désormais, quelle chance, n'est-ce pas ? La brave et courageuse Elena la défendrait donc contre cet homme imaginaire qui la suivait ? Elle en avait de la chance.

« Je vous remercie... Merci. » Souffla-t-elle, la crainte transpirant toujours dans sa voix, alors qu'on lui assurait qu'elle était en sécurité. Evidemment, Elena était une fille prudente. Elle connaissait les dangers des ruelles sombres, mal éclairées, la nuit. Les criminels et les personnes malintentionnées n'étaient pas les seuls risques qu'elles courraient toutes les deux, en restant là. Un vampire, assoiffé de sang, sans le moindre scrupule, pouvait décider de se repaître d'elles. Sans le moindre mot, les yeux toujours baissés, soutenue par la main rassurante de son sosie, Katherine s'avançait légèrement, doucement, au rythme de l'autre humaine. « Non. Non, je... Je ne crois pas. » Souffla-t-elle en s'observant, comme si elle avait besoin de vérifier ses dires et de s'assurer qu'elle n'était pas blessée.

Sortie de l'ombre, enfin, Katherine leva les yeux, avec une infinie lenteur, vers Elena, prête à jouer la comédie. Son regard se figea à l'instant où elle découvrit son visage. Elle tentait de faire passer plusieurs émotions : l'étonnement, la crainte, les questions. Et elle accompagnait les expressions de son visage d'un léger mouvement de recul, comme si elle se retrouvait surprise de faire face à son sosie. « Comment est-ce... Qu'est-ce que... » Souffla-t-elle, dans un murmure parfaitement joué, tout en levant lentement une main vers le visage d'Elena, pour désigner leur évidente ressemblance.

Katherine jouait avec Elena. Les choses étaient simples, il fallait simplement qu'elle se fasse passer pour ce qu'elle n'était pas afin d'obtenir le maximum d'informations de la part de l'humaine. Si elle était ici, combien de visages de son passé étaient là, eux aussi ? Beaucoup rêvaient de la détruire et de lui arracher la tête - mais elle le leur rendait bien puisqu'elle avait tout autant envie de leur arracher la tête - elle devait donc se protéger. Pour cela, puisqu'elle n'avait plus ses capacités d'autrefois, ni même son entourage d'autrefois, elle devait se débrouiller toute seule. L'idée était donc de comprendre des choses à propos de la vie d'Elena depuis qu'elle était ici. Des choses afin de se protéger et afin d'élaborer un véritable plan pour contrecarrer tous ses ennemis et les empêcher de nuire.

Ce n'était pas facile, non. Ça ne l'était pas parce que Katherine avait envie de briser ce joli petit cou. Elle avait envie d'entendre le craquement sinistre de la mort entre ses mains. Mais où serait le plaisir alors ? Bien sûr qu'elle voulait des informations, mais elle voulait aussi la vengeance. Et la vengeance perdrait de sa saveur si elle devait ressembler à un meurtre aussi simpliste et ennuyant. Non, elle voulait la torturer, la faire souffrir. Elle voulait lire la peur dans ses yeux. Elle voulait l'entendre supplier. Elle lui offrirait une mort lente et douloureuse, parce qu'elle ne méritait rien d'autre.

Alors, en attendant, elle jouait. Elle jouait la surprise en voyant ce visage familier. Son visage - même si elle le portait beaucoup mieux qu'elle, mais ça, c'était une autre question. Les émotions s'enchaînaient sur ce dernier, de la crainte à la surprise, des questions à la peur. « Katherine... » Souffla-t-elle lentement, en articulant bien chaque syllabe. « Je m'appelle Katherine. » Répéta-t-elle. Oui, elle donnait son véritable prénom. Elle se ferait passer pour amnésique - c'était plus risqué, peut-être, mais aussi plus drôle et elle avait hâte de voir comment la douce et gentille Elena réagirait face à cet aveu. Vu l'état que Katherine simulait, Elena penserait forcément à l'amnésie - et elle en douterait évidemment. A Katherine de bien jouer désormais pour que les choses ne soient pas découvertes trop vite. Il serait tellement dommage de mettre si vite fin à ce jeu - et si risqué, aussi.

Katherine ne mentait pas. Katherine jouait la comédie. Katherine jouait l'amnésique. C'était tellement agréable de se jouer de cette gamine idiote. Jouer avec ses nerfs, jouer avec ses peurs, jouer avec sa colère. Sans difficulté, Katherine imaginait tous les sentiments qui envahissaient Elena à l'instant où elle avait entendu le nom de son sosie. La jeune femme aurait donné n'importe quoi pour être dans la tête de son ennemie à cet instant précis. Elle aurait aimé la sentir tressaillir. Elle aurait aimé sentir son coeur rater un battement. Elle aurait aimé sentir le frisson qui avait dû parcourir son corps. Tout ça, elle ne pouvait que le supposer, mais elle était sûre d'elle : Elena avait peur. Et sans même pouvoir la ressentir, Katherine se délecter de cette peur.

Katherine avait dû retenir un sourire lorsqu'elle avait entendu Elena répéter son prénom, après quelques secondes de flottement. Craignait-elle que Katherine ne s'attaque à elle ? Elle l'espérait tellement. Elle voulait créer la terreur chez elle, elle voulait lire la peur dans ses yeux, elle voulait lui donner l'impression que la mort approchait pour elle. Alors, face aux hésitations d'Elena, Katherine jouait l'innocente, celle qui ne comprenait rien, celle qui était perdue, celle qui était terrifiée.

Sans trop attendre, Elena avait fini par poser la question, celle qui devait lui brûler les lèvres, celle qu'elle devait craindre de prononcer presqu'autant qu'elle devait craindre d'entendre la réponse. Pour jouer avec elle, comme elle jouait toujours avec ses proies, Katherine ne répondit pas tout de suite. Non. Il fallait faire durer le plaisir, après tout. Il ne fallait pas gâcher une seconde de ce plaisir qu'Elena lui offrait. Tout était bon à prendre. Son regard paraissait étonné et surpris. Elle faisait celle qui ne comprenait pas, la fille naïve et innocente qui se retrouvait face à une situation qui la dépassait totalement.

Pauvre petite Elena, si naïve et si humaine, qui devait se battre avec elle-même, intérieurement. Katherine en était persuadée. Elle devait être en train de se battre entre vouloir l'aider parce qu'elle croyait en cette amnésie et l'envie de fuir parce qu'elle craignait une Katherine manipulatrice qui aurait récupéré ses pouvoirs. Après avoir joué suffisamment longtemps avec sa victime, pour ne pas que le silence paraisse trop étrange, la jeune femme avait fini par hocher la tête de haut en bas. Lentement. Laissant à son visage tout le loisir d'exprimer sa fausse surprise, celle qu'elle simulait depuis un moment déjà. « Comment... » Un souffle. Un vulgaire souffle, plein de crainte et de questions. « Comment savez-vous qui je suis ? » Dit-elle pour accompagner sa voix qui tremblait légèrement, un léger mouvement de recul incontrôlable et un frisson, à peine visible, pour dire toute la crainte qu'elle éprouvait face à cette inconnue qui avait son visage et qui connaissait son nom. Pauvre petite Katherine apeurée et terrifiée, c'était ce qu'Elena devait finir par penser et elle ferait tout pour ça.

Le petit jeu de Katherine l'amusait tout particulièrement. Voir le visage d'Elena se décomposer à mesure où elle comprenait ce qui était en train de se passer l'était tout autant - ou plus, peut-être ? Evidemment, ses mensonges ne prenaient pas - même si elle restait persuadée que la jeune femme ne pouvait s'empêcher d'avoir un doute persistant au fond d'elle. Elena était Elena après tout et son humanité la poussait toujours à essayer de voir du bon en chacun des pires êtres humains - après tout, elle avait bien réussi à voir quelque chose de bon et d'intéressant en Damon, alors elle pouvait bien le faire avec n'importe qui.

Elena, toujours calme, assurait que Katherine jouait les amnésiques et que, cette fois-ci, elle ne l'aurait pas. Elle l'avait eue bien des fois pourtant, non ? Mais pas cette fois ? Si elle le voulait vraiment, elle l'aurait sans la moindre difficulté, elle en était persuadée. Et ce, même si Elena semblait déterminée à passer son chemin, assurant que Katherine allait se débrouiller. La gentille Elena lui tournait même le dos ? C'était qu'elle avait pris du caractère ! - bon celui d'une enfant de cinq ans, mais c'était déjà ça, non ?

Katherine aurait adoré jouer à ce petit jeu encore et encore, mais toutes les bonnes choses avaient une fin, n'est-ce pas ? Puis, si le jeu était amusant, l'après l'était tout autant. Surtout avec elle. Surtout parce qu'elle avait hâte de jouer avec ses nerfs et avec ses peurs. Alors, Katherine avait abandonné son visage naïf et larmoyant, son visage craintif et apeuré, pour retrouver ce qui la caractérisait le mieux : son sourire satisfait et son regard agaçant. Redevenir soi-même était presque aussi satisfaisant que jouer le rôle d'une autre. « Tu m'as percée à jour. Quelle perspicacité Elena, tu m'impressionnerais presque. » Souffla-t-elle, amusée, en emboîtant le pas de son double. Pas question qu'elle la laisse fuir comme ça. Ce serait trop simple. « Avoue que tu as douté pendant un instant... » Parce que c'était le cas, elle en était persuadée. « Je t'ai manqué ? » Poursuivait-elle en marchant désormais à ses côtés, se moquant bien du fait qu'Elena n'avait pas la moindre envie de poursuivre une quelconque conversation avec elle.

Katherine était Katherine et on ne se débarrassait pas d'elle aussi facilement qu'en lui tournant le dos. On ne pouvait se débarrasser d'elle que si elle avait décidé qu'elle en avait terminé avec vous, en réalité. Elle s'était plutôt bien amusée avec Elena - même si ce petit plaisir aurait pu durer des heures encore sans qu'elle ne s'en lasse - et elle n'avait pas l'intention d'en rester là. Pourquoi cesser un jeu si drôle aussi vite ? Non, il fallait faire durer le plaisir et profiter. Alors, puisqu'Elena l'avait démasquée - ce qui n'était pas bien compliqué, il suffisait d'avoir l'intelligence d'un enfant de trois ans pour ça - autant tout avouer et cesser de se faire passer pour une pauvre petite amnésique.

Katherine ne niait donc plus. Non, elle rappelait à Elena le genre de personne qu'elle était tout en la suivant et en profitant de ses réactions. Inutile de dire qu'elle ne comptait pas la laisser tranquille pour l'instant et qu'elle comptait bien la pousser à bout. Ce n'était encore rien comme vengeance. Une petite chose sans intérêt. Le début de quelque chose de bien pire encore que le simple retour de Katherine dans sa petite vie minable et tranquille. D'ici peu, Elena allait regretter ces instants face à ce que Katherine planifierait comme véritable vengeance. « C'est vexant, ça. » Claqua-t-elle, faussement déçue et blessée, quand la petite humaine avait ri en levant les yeux au ciel. Comment ça, elle ne lui avait pas manqué ? L'incroyable Katherine Pierce manquait toujours, non ? Après tout, comme sa vie devait être fade sans son merveilleux double.

La générosité de Katherine l'obligeait à rendre la vie d'Elena plus palpitante, plus excitante, plus intéressante. Alors, puisqu'Elena avait décidé de grimper dans sa voiture, Katherine avait décidé de grimper dans la voiture d'Elena. Tranquillement, elle s'était donc installée côté passager, comme si c'était la chose la plus naturelle au monde. S'il y avait bien une chose évidente en cet instant, c'était que Katherine se moquait éperdument de ce qu'Elena désirait - et c'en était que plus amusant. « Alors, on va où ? » On, oui. Pauvre Elena. « On a tellement de choses à se raconter toutes les deux... » Ou pas, en réalité.

C'était mal connaître Katherine que de croire qu'une voiture l'arrêterait. Elle était décidée à ennuyer Elena, elle ennuierait Elena. Cette dernière voulait lui échapper en montant dans sa voiture ? Alors, elle montait dans la voiture de cette dernière. Elle n'en avait pas terminé avec son ennuyant double mortel. Fière et agaçante, comme à son habitude, la jeune femme cherchait Elena. Les deux femmes n'avaient rien à se dire et n'auraient sans doute jamais rien à se dire. Elles n'avaient aucun point commun - en dehors de leur attirance pour les Salvatore et de leur physique, ce qui était déjà pas mal, en réalité. L'une était la bonté incarnée, la gentillesse, la dévotion, l'altruisme... Toutes ces choses ennuyantes à mourir que l'on qualifiait de qualités chez les humains chiants. Katherine était intelligente, égoïste, monstrueuse... Toutes ces choses que l'on qualifiait de défauts quand Katherine n'y voyait que de bonnes choses lui ayant permis de survivre toutes ces années.

Les mots autoritaires d'Elena firent rire Katherine. Elena. Autoritaire. Bien sûr, oui. Pourquoi pas Damon intelligent et réfléchi ? Ou Stefan égoïste et irréfléchi ? Non. L'autorité n'allait définitivement à cette pauvre Elena. Au mieux, c'était risible. Au pire, c'était ridicule. « Sinon quoi ? » Répondit-elle en faisant la grimace, faussement effrayée par des menaces invisibles. « Laisse-moi deviner... » Elle se tournait vers Elena, en fronçant les sourcils, avant de faire ses suppositions. « Tu vas appeler au secours pour qu'on vienne te secourir et te libérer de ton monstrueux double ? » Parce qu'elle n'était bonne qu'à ça. Chouiner. Pleurer. Geindre. Se plaindre. Pleurer encore. Se faire aider. Se faire secourir. Faire qu'on se sacrifie pour elle. Et repleurer encore. Et... Pleurer, encore. Et après, c'était Katherine l'insupportable des deux ? Non, mais ce qu'il ne fallait pas entendre ! « Damon ou Stefan ? Stefan ou Damon ? Bonnie ? Caroline ? Oh... Non, attends ! Tu les as peut-être déjà tué eux aussi, dans ce monde ? » Continuait-elle de la provoquer dans l'unique but de la pousser à bout et de comprendre si d'autres de leurs connaissances communes se trouvaient dans cette maudite ville.

Elena n'acceptait peut-être pas la vérité, mais la vérité était pourtant bel et bien là : les autres se sacrifiaient souvent pour elle. Elena prétendait vouloir le faire pour les autres, mais Elena survivait toujours parce que tout le monde voulait la protéger, tout le monde était prêt à tout pour ses beaux yeux. Et dans ce monde, alors ? D'autres s'étaient-ils déjà sacrifiés pour elle ? Etait-elle responsable de la mort d'autres personnes ? Encore une fois ? Bien sûr, Katherine ne se privait pas d'appuyer là où ça faisait mal. Elle jouait avec son double, elle voulait la détruire psychologiquement. Ce petit jeu ne prendrait pas effet en quelques minutes, ce serait un travail long et répétitif, mais c'était un petit jeu qu'elle allait adorer jouer, elle le savait déjà.

Avec hâte, elle guettait sa réaction. Son regard en disait long sur ce qu'elle avait ressenti au plus profond d'elle-même - et qu'elle avait tenté de cacher, mais Katherine et Elena partageaient le même visage, elle était capable de déceler bien des émotions en elle. « Tu es sûre de ça ? » Demanda-t-elle en se penchant légèrement vers elle. Elle aurait adoré avoir récupéré ses pouvoirs pour pouvoir jouer avec elle, mais ce n'était malheureusement pas le cas. « Après tout, tu n'es rien d'autre qu'une petite humaine fragile. » Souffla-t-elle, tentant de rendre ces secondes angoissantes pour l'humaine. Il fallait qu'Elena doute de Katherine et de sa nature réelle. Si elle doutait, elle gardait un avantage certain sur elle - et puis, ça permettait de faire durer le plaisir, ce n'était pas négligeable. « Tu n'aurais pas survécu à Mystic Falls sans tous tes amis. Accepte au moins de leur reconnaître ça - parce qu'on ne peut pas dire qu'ils aient grand-chose pour eux - tu as toujours eu besoin d'eux pour te protéger. » Les amis d'Elena étaient, pour la plupart, au départ tout du moins, des humains parfaitement inutiles et insignifiants, mais elle s'était servie d'eux, en les embarquant dans des histoires qui les dépassaient très largement, pour se protéger. Ne pas le reconnaître, c'était nier leur utilité - et même Katherine trouvait ça incroyablement égoïste de s'attribuer tous les mérites de la sorte.

Katherine jubilait. Elle profitait de chaque petite seconde de terreur qu'elle créait chez son interlocutrice. Elle profitait de chaque petite seconde de doute qu'elle faisait naître chez son interlocutrice. Tout était prétexte à l'effrayer, à l'enfoncer, à lui faire du mal. Ainsi, ce qu'elle avait en tête à cet instant, c'était de lui rappeler ses nombreuses erreurs. Celles qui avaient conduit bon nombre de ses amis à devoir se sacrifier pour elle, à devoir prendre des décisions extrêmement difficiles, à devoir la faire passer avant eux. Mais pas que. Non. Ce qu'elle avait en tête également, c'était de faire naître le doute chez son double. Katherine humaine ou Katherine vampire ? Si elle n'avait rien montré de ce dernier côté - simplement parce qu'elle n'en avait plus les pouvoirs depuis bien longtemps, malheureusement pour elle - elle tentait de lui faire imaginer qu'elle avait bel et bien récupéré ses pouvoirs. Son objectif était clairement de l'effrayer.

Ça fonctionnait. Quoi qu'elle veuille bien dire ou admettre, ça fonctionnait. Elena avait peur. Elle doutait. Que ferait-elle face à une Katherine redevenue vampire ? Seule, elle n'avait pas la moindre chance. Pourtant, elle tentait de rester forte et de garder la tête haute. C'était ainsi qu'elle faisait. Toujours. Faire semblant d'être plus forte qu'elle ne l'était. Faire semblant d'être capable de pouvoir tout affronter toute seule. Incapable de voir la vérité en face et d'assumer, elle ne pouvait rien répondre de sérieux aux propos de la jeune femme. Alors, sa seule solution était de lui demander de dégager. Quelle répartie !

Un sourire provocateur et terriblement agaçant aux lèvres, Katherine était restée assise, en silence, pendant de longues secondes. Puis, elle avait fini par se retourner vers son double, avec toujours ce même sourire aux lèvres. « Ne sois pas impolie, ça ne te va pas. » Souffla-t-elle, agaçante, tout en ouvrant la portière avec une lenteur volontairement exagérée. « Mais tu me sembles tendue, alors je vais te laisser tranquille. » Simplement, le jeu commençait à la lasser pour aujourd'hui, maintenant qu'elle avait déjà obtenu ce qu'elle voulait. Puis, il ne fallait pas abuser des bonnes choses. « On se reverra très vite, de toute façon. » Et ça, c'était une évidence. A peine sortie de cette voiture, Katherine s'imaginait déjà leurs prochaines rencontres jusqu'à celle qui signerait sa vengeance pour de bon.