Pas une journée sans blessure

feat. @James Fraser

Les parcs, voilà bien des lieux où personne ne venait jamais m’ennuyer. En tout cas, pas dans ce monde. Ici, je pouvais venir pour lire tranquillement, installé sur un banc, idéalement à l’ombre, car, non, décidément, le soleil, je ne pouvais pas. J’étais très bien à l’ombre, je n’aimais pas le soleil ni la chaleur. J’étais plutôt habitué à l’obscurité, la fraîcheur… comme les cachots de Poudlard, par exemple.

J’avais pu mettre la main sur un livre intéressant à la bibliothèque, quelque chose sur la chimie organique et je lisais cela comme d’autres peuvent lire un roman. J’étais tranquille, plongé dans les pages de ce livre et puis, tout à coup, un ballon atterrit sur mon livre. Ne voyant pas à qui il pouvait appartenir, je décidais de l’envoyer au hasard. Je n’avais pas envie de devoir me mettre à justifier des choses à des gamins qui jouaient à une sorte de quidditch moldu avec la grâce et l’habileté d’un troll des cavernes.
Cela dit, mon renvoi de ballon n’était pas très bien calculé, puisqu’une fois envoyé au loin, alors que je cherchais à me replonger dans ma lecture, mais un homme vint vers moi, en m’accostant pour me demander si c’était mon ballon.

Je relevais un regard noir de mon livre pour regarder cet homme qui me posait une question aussi ridicule.

« Certainement pas. » Avais-je la tête de quelqu’un qui jouait avec ce genre de jeu ? Avais-je l’air d’être quelqu’un qui jouait, simplement ?
Je plaçais un marque-page dans mon livre et je me levais pour faire face à cet homme. « Vous avez souvent vu des gens lire et jouer au ballon en même temps, vous ? »

Pas une journée sans blessure

feat. @James Fraser

Les rencontres, ça n’avait jamais été vraiment mon fort. J’avais toujours un peu trop tendance à me méfier de tout le monde, à être solitaire, à préférer me faire détester pour éviter qu’on ne m’approche de trop près…
Un mécanisme de défense que des psychomages attribuaient facilement à des traumatismes relationnels vécus à l’adolescence… sans blague. Même le pire pitiponk attardé aurait pu le deviner, ça, pas besoin de se faire payer des centaines de gallions pour obtenir un tel diagnostic !

Alors voilà, ce moldu qui me faisait face me répondit, semblant aussi peu réceptif à l’ironie qu’au second degré. Mon esprit analytique l’envoya directement à Gryffondor, sans autre forme de procès. Mais il se montra assez perspicace, pourtant. Etonnant.
L’homme renvoya la balle aux gamins et il se remit à me parler. De mon livre.

« En effet. » Je glissais un marque-page là où j’en étais dans ma lecture, puis je levais les yeux vers le moldu. « Il est rare que je lise des choses inintéressantes. »

Il ne s’agissait pas d’un roman, mais bien d’un ouvrage sur les plantes médicinales de la région. La première de couverture allait lui donner plus d’informations sur ce que je lisais, mais soit.
« Assez, oui. » Je ne lui renvoyais pas la question parce que… en réalité, je n’avais pas très envie de savoir ce qu’aimait cet homme. « Et vous, ça vous arrive souvent de venir troubler la lecture des honnêtes gens ? »

Froid, moi ? Peut-être… Distant, sans doute. Je ne m’en cachais pas. Mais j’étais comme cela. Je n’étais pas du genre à sociabiliser avec le premier moldu venu faire un peu d’ombre sur les pages de mon livre.

Pas une journée sans blessure

feat. @James Fraser

Les moldus étaient aussi étonnants qu’ennuyeux, selon les personnes et selon les moments. Celui-ci était d’une nature curieuse, ce qui le rendait moins ennuyeux, certes, mais pas très divertissant pour autant.
Je dus fermer mon livre pour bien lui montrer qu’il me dérangeait tout de même un peu. Voire plus ;

Je le regardais d'un air méfiant, mes yeux noirs scrutant les siens.
« Lire des choses intéressantes n'est pas une question de chance. C'est une question de choix. » Je marquais une pause, laissant mes mots s'imprégner dans l'air. « Et je choisis toujours avec soin ce que je permets à mon esprit d'absorber. »

Voilà, c’était là le meilleur moyen de ne rien lire d’inintéressant. Il suffisait de bien choisir ses lectures. Il était évident que je n’aurais jamais ouvert un livre de littérature moldue à l’eau de rose, par exemple, puisque c’était le genre de livres qui me semblaient être parmi les plus ennuyeux du monde. Les histoires d’amour, ce n’était pas pour moi. Je me considérais comme un homme de sciences, ici, un sorcier parfaitement reconverti dans le domaine de la chimie. Et mon talent incontesté et incontestable pour les potions m’avait permis de décrocher un très bon emploi dans une entreprise pharmaceutique.

À sa mention du ballon, je levais un sourcil, clairement non impressionné.
« Un ballon, dites-vous ? Quelle excuse fascinante. » Mon sarcasme était palpable. C’était le genre de phrase que je pouvais facilement prononcer en cours de potions, à l’époque, lorsqu’un misérable petit élève me servait une excuse pour un devoir non fait ou pour l’explosion de son chaudron en étain.

Lorsqu'il se présenta et tendit la main, je la regardais un moment, hésitant. Finalement, je la serrais brièvement, ma poigne froide et ferme.
« Snape. Severus Snape. » Je retirais ma main aussi vite que je l'avais prise, mon visage toujours aussi inexpressif. « Et qu'attendez-vous de moi, Fraser ? »

Pas une journée sans blessure

feat. @James Fraser

Je regardais James Fraser avec un mélange de mépris et d'amusement. Cette créature semblait croire qu'il pouvait me comprendre, me percer à jour. Ridicule.

« Des livres mauvais ou décevants ? » Je répétais sa question, laissant échapper un soupir de lassitude. «Mon cher monsieur, pensez-vous vraiment qu'un homme de mon expérience et de ma sagacité puisse se laisser tromper par de simples couvertures et des titres accrocheurs ? Les erreurs de lecture sont pour les amateurs et les insensés. Je choisis mes livres comme je choisis mes potions, avec précision et discernement. »

Un cri lointain retentit dans l'air, ajoutant une touche dramatique à mes paroles. Je sentais la pluie commencer à tomber, froide et insistante, mais je ne laissais rien paraître.
«Vous ne savez pas ce que vous voulez de moi ? » dis-je en arquant un sourcil. «La naïveté ou la dissimulation, Fraser, laquelle de ces deux facettes est la vôtre ? Je n'ai guère de temps pour les deux. »

Je fis un pas en arrière, mon regard scrutant le sien.
« Je pense que vous êtes là par intérêt, oui. Tout le monde l'est. Vous ne me connaissez pas, dites-vous ? Et pourtant, vous vous tenez ici, devant moi, espérant quelque chose. Quoi, je l'ignore. Mais ne prétendez pas que votre présence est due au hasard.»

Je reconnaissais ce genre de situations. Quand j’étais jeune, Potter et ses amis se plaisaient à venir me harceler quand j’étais tranquillement installé pour lire. Ils me traitaient de chauve-souris, ou de toutes sortes de surnoms aussi agréables. Je n’étais pas de ceux qui s’amusaient avec les balais de sorcières, je préférais la délicatesse des chaudrons bouillonnants et des potions. Je n’avais jamais eu peur des maraudeurs, mais leurs cris attiraient beaucoup de spectateurs… et c’était ce que voulaient ces Gryffondor.

La citrouille posée non loin, dans le parc, ajoutait une ironie cruelle à la situation. Halloween était la fête des masques et des illusions. Et cet homme devant moi portait certainement l'un ou l'autre.

Je le fixais, attendant sa réaction, prêt à déchirer le voile de l'illusion avec la froideur et la précision qui étaient les miennes.

Pas une journée sans blessure

feat. @James Fraser

Je scrutais James Fraser, mon expression de marbre cachant à peine mon irritation. Sa naïveté était presque comique. Un ballon en pleine tête ? La coïncidence semblait trop grotesque pour être crédible. Pourtant, quelque chose dans son regard sincère et déconcerté me poussait à tempérer mon jugement habituellement acerbe.

« Médecin ?» je répétai, un rictus se dessinant sur mes lèvres. « Non, monsieur Fraser. Les potions que je manipule sont d'une nature bien différente. Elles requièrent un savoir et une dextérité qui dépassent largement le cadre de la médecine.»

J’évitais, évidemment, de prononcer le mot « moldu », qui pourtant m’était venu bien vite à l’esprit.
 
Je m'arrêtai un instant, mesurant ses paroles. Sa question sur le hasard me fit lever les yeux au ciel.

« Le hasard, monsieur Fraser, est une excuse commode pour ceux qui ne comprennent pas les subtilités du destin. Et la coïncidence... une invention des esprits simples.»

C’était un avis très tranché, bien sûr, mais j’étais comme cela. Je le fixai, mon regard sombre transperçant le sien.
« Vous me demandez ce que je veux... c’est une question pertinente, en effet. Ce que je veux, monsieur Fraser, c'est la tranquillité, le respect de mon espace et de mes pensées. Ce monde est rempli de bruits et de distractions. Les gens comme vous, qui se promènent sans but et sans comprendre, sont une source constante d'agacement.» Je me tournai légèrement, mon regard se perdant dans le paysage du parc, tandis que mes souvenirs recréaient la silhouette sombre de Poudlard. « Mais peut-être suis-je trop sévère. Peut-être votre intrusion n'est-elle pas aussi mal intentionnée que je le pensais. Peut-être...»

Je me retournai vers lui, un soupçon de curiosité dans mon expression.
« Dites-moi, monsieur Fraser, que savez-vous de ce monde ? Pensez-vous qu’il y ait eu quelque chose de magique, dans tout cela ? De la vraie magie, pas des tours de passe-passe des charlatans et des illusionnistes.»

J'observais sa réaction, cherchant à détecter un signe de compréhension ou de mépris. C'était un test, un moyen de jauger son esprit.
« Quant à partir ou rester... cela dépend de vous, monsieur Fraser. Si vous cherchez à comprendre, alors peut-être trouverez-vous en moi un interlocuteur inattendu. Mais si c'est la banalité et le quotidien qui vous attirent, alors oui, vous feriez mieux de continuer votre promenade.»

Attendant sa réponse, je me tenais prêt à trancher cette interaction selon son choix.

Pas une journée sans blessure

feat. @James Fraser

Je fixais James Fraser, mes yeux noirs scrutant chaque nuance de son expression. Son affirmation faisait écho dans mon esprit, réveillant un mélange de sarcasme et de méfiance. Ces mots étaient chargés d'histoire et de mépris dans son monde…. Mais pas dans le mien. Et ici, dans cette rencontre insolite, ils semblaient presque... innocents.

« Sorcier, en effet, » répondis-je d'une voix douce mais teintée d'un froid mépris, « bien que je doute que vous compreniez pleinement ce que cela implique. » Ses paroles sur la magie mal vue dans son monde m'amenèrent un rictus méprisant. « Brûler sur un bûcher... Une pratique barbare, typique des peurs irrationnelles des moldus. Heureusement, le monde sorcier a évolué au-delà de telles... superstitions. »

Ses réflexions sur le hasard et la solitude me firent lever un sourcil. Était-ce de la naïveté ou une forme de sagesse que je n'avais jamais connue ?
« Votre philosophie est touchante, Monsieur Fraser, mais je crains qu'elle soit quelque peu... simpliste. Le hasard, vous dites ? Peut-être. Mais je préfère croire en la détermination et en la force de la volonté. »

Sa mention d'une vie passée seul me piqua légèrement, un souvenir douloureux effleurant mon esprit.
« Seul ? » répétai-je, un voile sombre passant brièvement sur mon visage. « Oui, dans une certaine mesure. Mais la solitude est souvent le prix à payer pour la grandeur, n'est-ce pas ?»

Son sourire, face à l'idée de rester à mes côtés, attisa en moi un sentiment contradictoire. Était-ce de la curiosité ou de la pitié ?
« Vous n’avez jamais rencontré quelqu’un comme moi, dites-vous ? Cela ne m’étonne guère. Je suis... unique, en effet. » Ma voix s'adoucit légèrement, une rare ouverture se dessinant dans mon habituelle réserve. « Si vous souhaitez rester, alors restez. Mais sachez que le chemin que je propose est loin de la banalité.»

Sa liste de créatures fantastiques m'arracha un rire sec.
« Loups-garous, vampires, dragons... Ces créatures existent, en effet, dans mon monde. Mais elles sont bien différentes des légendes que vous semblez connaître. Quant à la magie de cet endroit, elle est indéniablement puissante, mais elle demeure un mystère, même pour moi.»

Son interrogation finale me fit esquisser un sourire ironique.
« Un test, Monsieur Fraser ? Non, je ne dirais pas cela. Disons plutôt... une évaluation. Et jusqu'ici, vous vous montrez... intéressant. » e me redressai, mon regard s'assombrissant à nouveau. « Mais comprenez bien, monsieur Fraser, que ce chemin ne sera pas sans dangers, ni sans révélations troublantes. Êtes-vous prêt à accepter cela ? À plonger dans les abysses de la vraie magie, de la connaissance interdite ? »

Je le fixai intensément, attendant sa réponse, prêt à l'emmener dans un monde bien au-delà de sa compréhension actuelle. Un monde où la magie était bien réelle et bien plus complexe que tout ce qu'il avait pu imaginer.