(Terminé) Entraînement privé [PV Alexandra Vasquez]

Pour Françoise, l'essentiel avait toujours été de pouvoir enquêter discrètement sans attirer l'attention sur elle. Quand Ficelle et Boulotte s’en mêlaient, ça n'avait rien de discret, mais au moins elle obtenait quelques informations sans se mettre trop en avant. Elle faisait juste partie d'un groupe d'écolières un peu curieuses. Mais ses interventions nocturnes étaient différentes. La nuit, pour obtenir des informations, il fallait surtout savoir écouter sans se faire remarquer et pour ça, il n'y avait rien de mieux que se fondre dans la masse. Ça et ne pas avoir trop froid. Ça avait été les éléments décisifs de la tenue de la jeune fille.

Quand elle expliqua à l'ancienne espionne, celle-ci reconnut bien volontiers que la tenue était de bonne qualité et qu'elle remplissait la fonction qui était la sienne. Avoir un vêtement correct lui permettait d'accomplir sa mission un peu plus facilement mais il n'empêchait pas que ce n'était que partie de ce qui faisait la mission. C'était la raison pour laquelle elle était vraiment déterminée à en apprendre plus et à faire tout ce qui serait nécessaire pour s'améliorer. Elle était consciente d'avoir un niveau assez léger idéal pour un endroit Framboisy mais trop peu efficace pour la ville qu'elle avait rejointe et qui contenait de véritables organisations du crime.

Son enseignante était prête à faire le nécessaire pour qu'elle ait une formation digne de ce nom. Elle commença tout de suite les choses sérieuses en lui proposant un combat avec ses règles à elle. Elle ne semblait pas vouloir en mettre beaucoup. Cela signifiait s'attendre à tout et finalement, c'était ce que la jeune fille avait demandé. Il était donc hors de question de se plaindre. Elle se tint à l'affût, prête à riposter à n'importe quelle attaque. Évidemment, Alex commença par la prendre de dos, c'était presque prévisible. Elle para le coup avec une facilité en accord avec l'entraînement qu'elle avait eu jusque là, et en profita pour tenter de lui faire un croche-pied afin de lui montrer qu'elle n'était pas non plus en difficulté pour attaquer, même s'il était déjà évident qu'elle savait se défendre.

Il n'était pas facile d'enseigner à une personne quelque chose comme l'art du combat sans connaître la base de ce qu'elle pouvait avoir appris toute seule. Il était donc évident pour la jeune fille que son professeur allait devoir la tester. Elle y était prête. Elle savait très bien que c'était le processus normal pour pouvoir être entraînée par son professeur de sport et elle s'y prêtait avec beaucoup de bonne volonté. Françoise n'était pas quelqu'un de difficile et dans la mesure où quelque chose prenait la direction dont elle avait besoin, elle se montrait plutôt performante et peu critique sur la manière dont les choses se déroulaient. Elle s'attendait évidemment à ce que la difficulté augmente avec le temps, mais il fallait se concentrer sur une épreuve après l'autre.

La jeune justicière avait l'habitude que l'on essaye de l’avoir dans le dos. La plupart des bandits auxquelles elle s'affrontait n'étaient pas vraiment loyaux et du genre à attaquer au su et au vu de tous, et surtout les bandits lâches et peu performants comme pouvait l'être le Furet dont les plans machiavéliques manquaient systématiquement d'une certaine ambition. Fantômette ne disait pas qu’il ne lui avait jamais donné de fil à retordre, mais il était clair que le combattre n'était probablement pas le plus grand défi que pouvait avoir un justicier. D’où le fait était qu’elle n’ait eu aucun mal à parer le croche-pied que son enseignante essaya de lui faire.

Elle pouvait donc constater qu'elle avait déjà une bonne base de combat, mais elle ne pouvait pas savoir son niveau exact. Quand l'enseignante se positionna face à elle, Françoise se tint prête à faire tout ce qui serait nécessaire efficacement. Coup en haut à gauche, la main para. Coup en bas à droite, ce fut le tour de la jambe et coup après coup, elle essayait de ressentir dans quelle direction l'ancienne espionne allait frapper. Le début était simple, elle n'essayait pas trop de la prendre en traîtres, mais Françoise ne s'y fiait pas, car il ne faisait aucun doute que la difficulté allait forcément s'accentuer.

Le risque d'un combat qui apparaissait trop facile, c'était de se confronter à une situation ou on se retrouverait à diminuer sa méfiance. Alors, on se laisserait prendre par surprise et le moment venu on ne réagissait pas comme il faudrait le faire. Sur un coup compliqué, on pouvait se laisser surprendre et échouer. Françoise connaissait bien cette façon de fonctionner et c'était pour cette raison qu'elle agissait avec prudence en partant du principe que son professeur était en train de tester ses acquis pour pouvoir la prendre par surprise le moment venu. Elle ne laissait donc pas sa vigilance s'endormir.

Bien lui en prit. Alors qu'elle croyait sa vigilance endormie, sa prof de sport tentait de la prendre par surprise on lui assénant un coup par derrière. Françoise avait beau être vigilante, elle fut désarçonnée car elle s'était préparée à parer un coup par devant et elle se retrouvait à devoir le parer par derrière. Elle perdit l'équilibre, mais cela lui permit de montrer à son enseignante une autre de ses forces, car elle bondit sur son autre pied et se rattrapa en un instant dans un mouvement gracieux. Elle atterrit un peu plus loin et retrouva son sourire. Elle s'adressa aussitôt à la professeure en étant relativement satisfaite d'elle-même.

« C'était bien joué, mais vous n'êtes pas la première à vouloir me surprendre de cette façon, et j'ai appris à me rattraper. Ça aide d'autant lors d'un combat que pendant un cours de gym. »

Elle émit un petit rire avant de changer de tactique. Ce n'était pas une mauvaise chose d'avoir un entraînement au combat mais elle aurait bien voulu faire une pause le temps de lui poser quelques questions dans un domaine qui était particulièrement compliqué pour elle. C'était le défi qu'elle avait affronté en arrivant dans ce monde et elle savait bien qu'elle n'était pas à la hauteur pour le relever malgré toutes ses capacités au combat. Il suffisait qu'elle se fasse dépasser par le nombre et les choses devenaient aussitôt beaucoup plus compliquées.

« Je sais relativement bien me battre au corps-à-corps, mais c'est plus compliqué quand il y a des armes qui sont en jeu. Comment vous réagiriez face à un pistolet qui vous menace ? Et il y a aussi le problème des organisations du crime, elles ont une telle étendue ici. Quand je commence à en dégrossir une partie, j'ai l'impression que je ne peux que récurer le sommet d'un iceberg gigantesque sans jamais l'abîmer vraiment. Peut-être suis-je trop faible pour ce genre de combat, qu'en pensez-vous ? »

Plus les choses avançaient, plus elle se rendait compte que ce n'était pas tant d'entraînement physique dont elle avait besoin que de conseils pour améliorer cette qualité en tant que justicière défenseuse du bien. Il lui était notamment difficile de réagir en présence d'armes car elle n'avait pas de supers pouvoirs pour éviter qu'on lui tire dessus. Mais c'était un domaine où son professeur n'avait pas non plus d'expérience. Françoise réfléchit un instant avant de lui faire une proposition dont elle ne savait pas ce qu'elle en penserait, mais qui aurait le mérite de les faire avancer toutes les deux.

« Puisque nous avons toutes les deux du mal avec les armes, peut-être pourrions-nous réfléchir ensemble à une tactique ou même à plusieurs pour les esquiver. Cela nous donnerait des armes le moment venu si nous devons combattre contre une force ici dans cette ville. »

Son enseignante avait apparemment plus l'habitude qu'elle de combattre des organisations du crime, même si elle n'avait pas repris son métier d'espionne ici et qu'elle ne connaissait donc pas vraiment les forces en puissance. Mais elle avait de l'expérience et en cela, elle pouvait conseiller l'adolescente afin qu'elle parvienne aussi à améliorer les choses pour elles-mêmes. Il n'était pas facile de se battre contre quelque chose qu'on n'avait jamais affronté, ou suffisamment peu pour que ce ne soit pas pertinent. Françoise manquait clairement d'expérience. Mais ce n'était pas grave, elle allait apprendre.

La leçon première que Alex lui donna, ce n'était pas quelque chose qui lui était étranger. En effet, Ted lui avait déjà fait remarquer qu'elle s'en sortirait sans doute mieux en ayant quelqu'un avec qui partager tous les moments où elle combattait les forces du mal. Son professeur elle-même admettait qu'elle n'avait pas combattu ses ennemis toute seule. Ses meilleures amies avaient été ses alliés pour affronter tous ses ennemis. Cela faisait longtemps que Françoise envisageait une alliance avec quelqu'un et il apparaissait de plus en plus logique de suivre ce chemin.

« Mon tuteur m’a souvent fait remarquer que j'aurais probablement moins de risques et plus de sécurité si je me battais avec quelqu'un. Il faudrait peut-être que je trouve un allié solide avec qui partager mes expériences de justicière », reconnut-elle pensivement.

La solitude avait toujours fait partie de sa mission de justicière et elle commençait à se dire que ce n'était pas une bonne chose. Pour quelles raisons avait-elle gardé cet état de fait ? La jeune fille ne s'en souvenait pas. Elle ne comptait pas son ami dans la balance parce que même s'il était capable de faire beaucoup de choses, Œil-de-Lynx n'avait pas pour particularité le pouvoir démolir le visage d'un bandit trop dangereux. Il se battait avec les mots. Edward aurait plus de chance d'y arriver, avec ses pouvoirs magiques, et il y avait de nombreux justiciers dans ce monde. Françoise avait donc des opportunités et il était important qu’elle songe à s’organiser dans un contexte où il pouvait être compliqué de se battre seule.

Son professeur proposa de prendre ce rôle si elle le voulait. Mais même si Françoise avait demandé son aide en tant que mentor, elle n'était pas certaine que la jeune femme veuille pour autant rempiler. Après tout, en arrivant ici, elle n'avait pas cherché à rencontrer d'autres personnes déterminées à se battre contre les forces du mal, mais elle était simplement devenue professeur et avait commencé une petite vie calme et tranquille. Il était possible aussi que ce soit compliqué pour elle de pratiquer ce genre d'activité sans les personnes avec qui elle le faisait quand elle était dans son monde.

« Ce n'est pas que je ne veuille pas de vous, Professeur, mais je ne voudrais pas vous contraindre à reprendre une activité que vous ne souhaitez pas poursuivre. Le métier de justicière peut être pesant quand on ne l'a pas choisi. »

En réalité, il pouvait être tout aussi pesant parfois quand on l'avait choisi mais là, on ne pouvait s'en prendre qu'à soi-même puisque c'était une décision personnelle. Pour ce qui était de l'imposer à quelqu'un, Françoise se refusait à être celle qui allait l'imposer. Alex serait au moins une personne au courant de son secret qu’elle pourrait impliquer occasionnellement quoi qu'il arrive, si cela devenait vital de le faire. Même si elle ne choisissait pas de redevenir agent de la justice à plein temps, elle avait déjà offert énormément à Françoise en étant là.

Ça n'aurait pas dérangé Françoise que ce soit son professeur qui lui serve de partenaire en soi, même si cela pouvait avoir quelque chose de bizarre d'avoir un lien d'autorité dans un contexte et d'être à égal niveau dans un autre. Elle n'était pas sûre que ça pourrait marcher. Mais même dans le contexte où elle pourrait passer outre, ce qui était probablement le cas, ça ne changeait pas le fait qu'il était assez relativement clair que l'enseignante n'avait pas une envie folle de reprendre ses activités d'espionne ou une activité de justicière s’en rapprochant.

Françoise était toujours ravie d'accepter l'aide d'où qu'elle vienne. Du moins, dans la mesure où cette aide n'impliquait pas que qui que ce soit se retrouve dans une situation qu'il ne pouvait pas maîtriser. Mais il ne s'agissait pas de ça en l'occurrence. En revanche, il n'était pas question pour elle de forcer qui que ce soit à agir contre ses envies et ses ambitions. Si son professeur avait eu envie de troquer sa robe d'espionne pour une robe non moins valable de professeur, c'était son affaire et elle n'avait pas le droit de lui imposer un autre chemin.

Pour autant, ça ne voulait pas dire que Françoise n'était pas prête à accepter l'aide occasionnelle de son professeur, surtout concernant le fait que certaines choses pouvaient nécessiter l'influence d'un adulte et qu'il était possible qu'un adulte journaliste comme l'était son père ne suffise pas en termes de compétences. Il y avait une différence entre imposer à la jeune femme de redevenir l'espionne qu'elle avait été et accepter d'aller chercher son aide à l'occasion si le besoin s'en faisait sentir. La seconde option était tout à fait acceptable et elle ne voyait pas pour quelle raison elle s'y refuserait.

« C’est une bonne chose d’avoir un adulte supplémentaire autour de moi à contacter en cas d’urgence, c’est certain. Faisons ainsi. C’est une bonne idée. »

Françoise ne pouvait pas dire qu'elle était totalement satisfaite de cette unique séance d'entraînement parce qu'elle avait compris que, même avec l'aide d'une espionne qui avait combattu à un niveau planétaire, elle n'aurait pas de réponse pour pouvoir affronter tout toute seule. Elle comprenait de plus en plus à quel point elle s'était montrée orgueilleuse et combien il importait d'avoir des alliés. Ce n'était pourtant pas compliqué dans ce monde qui regorgeait de héros, certains avec des pouvoirs et d'autres non, de tous âges et de toutes forces qui pouvait être des alliés potentiels. Elle allait devoir se mettre activement à en chercher parce que c'était le seul moyen d'affronter les ennemis les plus féroces et les plus coriaces.

Elle commençait enfin à l'admettre et évidemment, ce serait très certainement un soulagement pour son père. La seule chose qu'elle savait, c'était que son professeur ne pouvait pas être cet alliée, pas à temps plein, mais elle pouvait être quelqu'un donc elle s'entourerait parmi d'autres personnes pour l'aider au cas où elle en aurait besoin. c'était une personne forte et courageuse avec une certaine expérience et elle était certaine que cela pourrait faire la différence un jour entre échecs et succès. Quand on savait qu'un échec pouvait lui coûter la vie, il était important de le prendre en compte.

Mais pour le moment, elles avaient fait tout ce qu'elles pouvaient pour ce jour-là. Il valait donc mieux en rester là et faire les choses différemment à partir de maintenant. Son enseignante serait là pour elle, et elle n’hésiterait pas à lui demander conseil voire à faire quelques séances supplémentaires de lutte et de sport avec elle pour mieux s'entraîner et à force de travailler dur, même si elle n'était pas capable d'affronter de grands groupes sauvages toute seule, elle serait plus forte et il ne faisait aucun doute que son enseignante allait participer à ce renforcement.

« Je vous remercie d'accepter d'être là pour moi, Professeur. Dans ce cas, je vous dis à très vite en classe et peut être dans des séances de sport plus intensives, si cela vous intéresse de vous maintenir en forme avec moi. »