(abandonné) Double, double, toil and trouble [Eve]

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« Carolyn veut te voir dans son bureau. Tout de suite. »

Villanelle relève les yeux de son bureau, et du travail sur lequel elle avait oublié de se concentrer depuis deux bonnes heures déjà : un éclair d’intérêt et de curiosité traverse son regard tandis que son collègue la pousse à la suivre sans ménagement. Comme d’autres, il n’approuve pas franchement sa prise de poste au ministère, quand bien même les fonctions qu’elle occupe (elle est en charge de faire le tri dans d’anciens dossiers du Comité d’excuses à l’usage des Moldus) sont d’une inutilité et d’une répétitivité telle que Villanelle se demande bien souvent si la compagnie des détraqueurs n’aurait pas moins relevé du supplice à ses yeux. Sa satisfaction réside dans le fait de pouvoir parader dans les couloirs du ministère libre comme l’air quand son affiliation auprès du seigneur des ténèbres ne faisait aucun doute pour personne (et la marque des ténèbres à son avant-bras achevait naturellement de le confirmer). Satisfaction toujours éphémère, mais plaisante.

Que Carolyn, directrice émérite du bureau des Aurors, demande à la voir, c’est une nouveauté. Depuis que Villanelle a pris ses fonctions au ministère, elle est devenue invisible aux yeux de ceux qui autrefois cherchaient à remonter sa trace. Tant mieux pour elle, non ? Elle a l’occasion de faire table rase… mais Villanelle s’ennuie. Le sort rencontré par le seigneur des ténèbres ne l’a pas particulièrement émue, elle ne l’a pas suivi par conviction mais par commodité, et depuis qu’elle ne peut plus mettre ses pulsions sadiques et meurtrières au service d’un maître, depuis qu’elle est sa propre maîtresse, elle est à la fois grisée et ennuyée par cette liberté qui plaisante au début, ne fait que renforcer en elle le sentiment qu’il lui manque définitivement quelque chose.

Tête haute, elle rejoint l’étage du département de la justice magique et le bureau auquel elle ne frappe pas, constatant que la porte est entrouverte est constatant la présence non pas de l’austère Carolyn, mais d’une silhouette familière. Ce qu’elle reconnaît en premier lieu, c’est cette chevelure épaisse et indisciplinée dans laquelle elle rêve de plonger sa main. Un sourire se dépose immédiatement sur ses lèvres, son intérêt soudainement redoublé.

« Bonjour Eve », la salue-t-elle en la fixant tout en pénétrant dans la pièce.

Eve est une Auror de talent, et bon sang, ce qu’elle lui a donné du fil à retordre. C’est elle qui est parvenue à la faire arrêter avant qu’un arrangement avec le ministère ne lui épargne la condamnation à la prison d’Azkaban. Eve est coriace, Eve est déterminée. Eve est fascinante… C’est ce qui lui manque le plus, à l’heure actuelle. Leur petit jeu du chat et de la souris et terminée. Eve n’a plus à lui courir après, et réciproquement.

« C’est toi qui voulais me voir ? Je te manquais, c’est ça ? » fait-elle en prenant, sans gêne, place sur la première chaise qu’elle découvre sur son chemin, ravi de ce tête-à-tête inespéré.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

Un large sourire étire les lèvres de Villanelle quand, d’entrée de jeu, Eve prononce de mots que la mangemort présumément repentie n’apprécie bien évidemment que trop. J’ai besoin de ton aide. Quelle douce mélodie à son oreille. Elle ne connaît pas de phrase plus belle, surtout quand cette dernière lui est adressée, et sort de la bouche d’Eve, qui plus est.

« Je savais que je t’avais manqué », ne peut s’empêcher de commenter Villanelle, indifférente au regard d’avertissement que lui adresse son interlocutrice afin de conférer à cette discussion tout le sérieux exigé semble-t-il par les circonstances.

Villanelle pourrait soutenir le regard de son ancienne ennemie encore longtemps si cette dernière ne décidait pas de détourner la tête afin de lui demander d’approcher d’un bureau sur lequel sont disposées plusieurs photographies ainsi que quelques coupures de journaux .Villanelle les regarde avec attention… Bien sûr, aucune de ces informations ne lui sont inconnues. Elle sait bien que certains de ses anciens… camarades… ne se sont pas lassés du petit jeu qui aurait dû cesser après la défaite du seigneur des ténèbres. Lord Voldemort n’est plus, mais cela n’empêche pas quelques nostalgiques de vouloir répandre son message malgré tout. Villanelle aurait pu en être, mais ça ne l’intéresse pas. En soi, ça ne l’avait jamais vraiment intéressée, et ça dès le départ.

Le choix des mots est important, Villanelle sait bien que ce n’est pas par hasard si elle parle de ce maître débouté comme de son maître également. Sauf que Villanelle ne l’a jamais observé comme telle. Elle n’a jamais suivi les préceptes du seigneur des ténèbres par fanatisme, elle l’a fait parce que c’était ce qu’on lui proposait de mieux.

Les attentes d’Eve sont claires, elle lui demande de débusquer ses anciens « alliés ». Villanelle n’a pas vraiment de problèmes avec ça. Elle n’a jamais éprouvé ni sympathie, ni amitié à leur égard, leur sort lui est relativement indifférent. Ce ne serait pas vraiment pour elle une trahison… pas non plus une manière de se racheter. Ce serait davantage une manière de… s’amuser, sans doute. Mais elle ne compte tout de même pas consentir si facilement à la requête d’Eve sans y mettre ne serait-ce qu’un peu son grain de sel, surtout quand cette requête lui vient d’Eve, cela va sans dire.

« Qu’est-ce que j’obtiens en échange ? » demande-t-elle histoire de jouer les dures en affaires. « Je ne suis pas Auror, après tout. Ce n’est pas mon problème », ajoute-t-elle avec une lueur des plus malignes dans le regard.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« Ce qui serait suspect, c’est que je fasse tout ce qu’on me demande comme un gentil toutou du ministère pour ne surtout pas griller ma couverture », réplique Villanelle d’un ton désinvolte quand son interlocutrice lui fait remarquer que si elle devait ne pas collaborer, elle aurait affaire au Magenmagot une nouvelle fois, et ils seraient sans doute moins conciliants qu’ils ne l’avaient été la fois précédente.

D’accord, le coup de l’imperium, c’était un classique, mais Villanelle aurait été bête de ne pas tenter le coup, n’est-ce pas. Elle n’était pas de ces mangemorts qui hurlaient leur loyauté au seigneur des Ténèbres alors qu’il n’y avait plus de seigneur des Ténèbres à honorer. Non, elle a cherché à sauver sa peau, et au final, elle a réussi à tirer son épingle du jeu. C’est que Villanelle sait se montrer particulièrement convaincante quand elle le décide. Ceci dit, elle sait qu’avoir joué avec le feu sans s’être brûlé une fois a été un tour de force, retenter le diable si rapidement serait en revanche suicidaire, et le fait est que si l’ancienne mangemort estime que sa vie manque singulièrement d’action, elle n’a aucune envie de tenter le diable non plus.

La blonde attend malgré tout d’autres arguments de la part de son interlocutrice, ceux-là même qui viendront lui prouver une fois de plus à quel point l’Auror la connaît bien – et ces arguments ne tardent pas à arriver. C’est un fait, Eve Polastri la connaît effectivement sur le bout des doigts, mieux sans doute que quiconque d’autre, et il est une chose qu’elle a comprise quand tant d’autres passent à côté, et c’est sa propension à l’ennui et à la lassitude, qui ont sur elle des effets absolument dévastateurs.

« Oh vraiment ? »

Quand Eve lui parle de lui obtenir un poste moins répétitif, tout de suite, elle se redresse avec intérêt et semble vouloir lui prêter une oreille tout à coup plus attentive. Elle n’est pas sûre qu’aucun métier lui permettrait réellement de s’épanouir, mais troquer ses activités actuelles contre n’importe quelles autres ne serait définitivement pas de refus.

« Tu me proposerais de travailler avec toi ? » suggère-t-elle en amarrant ses yeux aux siens. « C’est sûr qu’entre ton expertise et ma connaissance du terrain, on formerait une équipe de choc, toutes les deux, pas vrai ? » suggère-t-elle avec un sourire au coin des lèvres qui ne dissimule définitivement rien du fond de sa pensée.

Elle insiste sur certains mots, qu’elle laisse traîner sur le bout de sa langue, de son accent russe prononcer, comme ce « avec toi » et ce « toutes les deux », autant de formulations qui ne sont bien sûr pas anodines et revêtent un sens des plus particuliers quand il est question d’Eve. Quand il est question d’elles.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« J’adore quand tu prononces ce mot », observe Villanelle, le regard pétillant. « Ensemble », répète-t-elle en tentant d’imiter ce qui avait été le ton de la voix de son interlocutrice au moment de le dire.

Même si ces paroles ont normalement vocation à rejeter ses taquineries constantes, Villanelle ne peut s’empêcher de lire entre les lignes une agréable promesse, et nul le la retiendra d’observer les choses différemment que de cette façon. Elle, ça lui va très bien de collaborer avec Eve sur cette affaire pour commencer si cela signifie qu’elle pourra passer tout le temps qu’elle veut en compagnie de celle qui fait depuis si longtemps maintenant l’objet de toutes ses obsessions – complètement assumées qui plus est. Elles vont devoir sans doute passer beaucoup de temps l’une avec l’autre, et cette seule perspective a déjà le don de la ravir, elle n’en demande définitivement pas davantage.

Bien sûr, tandis que Villanelle prend le plus malin des plaisirs à savourer cette situation, elle se laisse partiellement abuser au sens où Eve se contente pour beaucoup d’appuyer sur les leviers susceptibles de la faire réagir : car, évidemment, elle la connaît mieux que personne. Elle connaît ses quelques atouts, qui pourront être utiles au cours de son enquête, mais ce qu’elle connaît mieux encore, ce sont ses défauts, qu’il s’agisse des plus manifestes ou des plus enfouis, qu’elle a su percer à jour quand tant d’autres n’avaient fait qu’effleurer la surface sans rien deviner vraiment de qui elle était en réalité.

« Est-ce que j’ai dit que je ne voulais pas coopérer ? » fait Villanelle, qui tombe évidemment droit dans le piège rhétorique d’Eve et sans même s’en rendre compte, totalement rattrapée par son orgueil… et sa jalousie, également – car bien évidemment, il n’était pas question que qui que ce soit s’octroie la place qu’elle était parvenue à obtenir. C’était bien sûr hors de question. Non, il ne pouvait définitivement pas en être question, et sous aucune forme de prétexte. « Comment tu t’en sortirais sans moi de toute façon ? Tu as besoin de moi, Eve », fait-elle avec tout l’orgueil dont elle est capable. « Et moi j’adore rendre service. » Tu parles. « On va pouvoir passer plein de temps ensemble », ajoute-t-elle avec une esquisse de sourire malicieux aux lèvres.

Et elle compte bien profiter de ce temps un maximum, un temps qu’elle n’a, pour une fois, pas besoin de dérober aux circonstances pour pouvoir en profiter vraiment pleinement et le savourer à sa juste valeur.

« Alors, par quoi on commence ? »

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

Villanelle se laisse guider à l’extérieur du ministère sans plus de réponses à ses questions pour commencer. Elle est curieuse, bien sûr, mais surtout impatiente de voir où va les mener cette collaboration surprise, et en attendant, elle sait se satisfaire de la seule compagnie d’Eve. En la regardant en coin, elle peut discerner quelques signes remarquables qui lui laissent supposer que sa compagnie est au fond loin de lui déplaire. Elle aime cette situation et le léger sentiment de pouvoir que cette situation lui procure. Une fois dehors, alors qu’elles progressent dans les rues de Londres, Villanelle lui apprend vouloir la conduire sur la dernière scène de crime.

« Chouette ! » s’exclame-t-elle en se frottant les mains à la manière d’une enfant à qui ont aurait appris qu’on l’emmène à Disneyland.

Oui, elle est ravie de cette suggestion, d’autant qu’elle est effectivement curieuse de découvrir la scène en question. Sera-t-elle capable de déterminer d’office l’identité de l’instigateur d’un tel crime ? Difficile à dire. Quoi qu’il en soit, elle espère que cette situation sera révélatrice, pas seulement au nom de ce qu’elle est mandatée à faire par le ministère, mais au non de ce que cela pourrait lui révéler au sujet d’Eve… en plus du reste. Quoi qu’il en soit, Eve attend son expertise, et Villanelle a bien l’intention de la lui confier. Et dans le détail, qui plus est. Elle se rit beaucoup de cette situation, il n’empêche qu’elle est à son service.

Sans prévenir, Eve fait transplaner Villanelle sur la scène en question. Le choc est brutal – comme toujours quand on subit un transplanage d’escorte sans avoir été prévenu, mais la blonde s’en remet assez vite. On va dire que c’est de bonne guerre. Elle apprécie le contact de sa main sur son bras, mais ce contact ne dure pas, et elle doit rentrer dans le vif du sujet, ce qui est rendu très simple par la nature de la scène en question. La marque des ténèbres encore imposante dans le ciel, le corps de deux moldus encore présents sur la place. Un sort de repousse-moldus avait dû être utilisé pour éloigner les fouineurs.

« Je peux toucher ? » Elle demande en se rapprochant des corps et sans vraiment attendre l’autorisation d’Eve pour y regarder de plus près. « Ils ont été torturés avant le coup fatal. Sans raison. Un classique », résume-t-elle simplement en effleurant le visage d’un des deux corps du bout des doigts. « On sait qui sont ces charmants macchabées ? »

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

Villanelle détaille Eve du regard tandis que cette dernière lui répond. Elle ne peut en être tout à fait sûr, mais elle a le sentiment que quelque chose a perturbé cette dernière, le fil de pensées inavouables peut-être ? suggérées par sa présence ? Villanelle ne peut que l’espérer. Elle-même ne demande jamais qu’à hanter les pensées et les fantasmes de sa « collègue de travail ». Ce serait de bonne guerre, après tout, pour toutes les fois où ce sont ses pensées à elle que Eve Polastri a hantées, d’une manière inextricable, inestimable. Malgré tout, Eve paraît revenir à elle et à un peu de professionnalisme, et Villanelle décide de garder ses questions et le fond de sa pensée pour elle – du moins pour l’instant. Avec Villanelle, cela ne dure jamais bien longtemps, c’est un fait.

Elle reporte son attention sur les cadavres tandis que son interlocutrice lui apprend qu’il s’agit du cadavre de parents de trois enfants nés moldus. L’information la plus intrigante est que les enfants sont portés disparus. Villanelle le sait pour avoir officié auprès d’eux bien assez longtemps, les mangemorts ne s’embarrassent pas de considérations éthiques – ou du moins possèdent-il leur propre sens de l’éthique. Il est surprenant qu’ils n’aient pas tué ces enfants, purement et simplement. S’ils ont seulement été enlevés, alors pourquoi ? Pour en faire des elfes de maison nouvelle génération, avec supplément humiliation en prime ?

« Vu la différence de méthode, on a sans doute affaire à des auteurs différents… » Elle hausse les épaules. « Pour certains, la marque des ténèbres, c’est une manière de marquer son appartenance à un groupe qui n’existe plus, à faire croire que l’héritage du seigneur des ténèbres lui survivra. Pour d’autres, c’est un prétexte. Tu peux justifier tous les pires massacres, pardonner toutes les horreurs que tu as toujours rêvé de commettre sous prétexte d’idéologie », reprend-elle en ancrant son regard à celui d’Eve. « Avoue que c’est quand même pratique… tu n’aimerais pas, toi, pouvoir te dédouaner de tous les crimes les plus vicieux qui t’ont jamais traversé l’esprit. » Elle esquisse un sourire en coin. « Allez, Eve, je suis sûre que tu en as des dizaines à l’esprit. » Elle reporte son attention sur la marque dans le ciel. « Si ça se trouve, l’assassin n’était même pas un mangemort, il s’approprie la marque pour brouiller les pistes. » Elle marque une pause. « Qu’est-ce qu’ils peuvent bien faire des gosses, par contre… », s’interroge-t-elle, songeuse.

Elle a plus d’une hypothèse, elle a même quelques noms à l’esprit, qui appartiennent bel et bien à des sorciers avec lesquels elle avait œuvré quand elle était encore au service de Lord Voldemort – quand ce dernier était encore de ce monde, en somme, mais pour le moment, elle veut surtout se confronter aux hypothèse de celle qui l’accompagne.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« Tu me fais beaucoup trop d’honneur, Eve », fait Villanelle d’un ton peu convaincu en dévisageant un instant Eve, sourire aux lèvres, après que cette dernière ait affirmé que nul n’envisagerait de lui reprocher le seul crime qu’elle avait fréquemment à l’esprit.

Villanelle est convaincue du fait qu’Eve a certainement, et de plus d’une manière, songé à la façon dont elle lui prendrait la vie si elle en avait l’occasion… probablement pas un avada kedavra… c’est bien trop classique, comme manière de faire, beaucoup trop impersonnel, aussi. Elle lui réserverait sans doute un sort autrement plus remarquable, et cette pensée éveille en Villanelle un manifeste mélange de curiosité… et d’excitation. Oui, d’excitation sans aucun doute possible. Et ce n’est certainement pas pour lui déplaire.

« Quel dommage que tu mentes », ajoute-t-elle en affichant une moue faussement boudeuse avant de suivre le regard de sa « collègue », qui à l’instant se porte sur les cadavres qu’elles ont sous les yeux. L’espace d’un instant, Villanelle songe que les mêmes pensées et les mêmes interrogations leur traversent peut-être l’esprit au même instant, et cette pensée a quelque chose de définitivement grisante, c’est certain.

Eve rompt finalement le silence qui s’est installé entre elles pour suggérer une hypothèse qui avait effectivement effleuré l’ancienne mangemort également. Peut-être ces individus étaient-ils victimes de quelque expérience sinistre. Ce ne serait probablement pas impossible… Et cela serait assez conforme à la mentalité de certains, convaincus de devoir voir passer la magie à un stade encore supérieur.

« Ce n’est pas impossible. Certains d’entre nous étaient bien allumés, à vouloir dépasser constamment les limites de la magie, noire comme blanche… ce serait pas forcément surprenant », confirme-t-elle alors.

« Certains d’entre nous », elle n’a pas cherché à se dissocier du groupe auquel elle a prétendu appartenir par la contrainte, mais en présence d’Eve, il est des subtilités de langage qu’il n’est pas nécessaire d’adopter quoi qu’il en soit. Eve ne serait pas dupe dans tous les cas – elle est beaucoup trop intelligente pour cela, et Villanelle ne se lassera probablement jamais d’en faire le constat, au demeurant.

« J’ai quelques contacts, oui », répond en reportant toute son attention sur Eve quand cette dernière lui demande si elle connais le marché noir sorcier. Oui, elle le connaît, et elle y a ses entrées de longue date. « Enfin, je connais quelqu’un qui connaît quelqu’un… c’est pratiquement pareil. » Elle haussa les épaules. « Qu’est-ce que tu as en tête exactement ? » demande-t-elle en sondant aussitôt le regard de son interlocutrice avec curiosité.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« Quel drôle d’idée de vouloir trafiquer des organes, et des organes de moldus, en plus », observe Villanelle comme si c’était là la suggestion la plus drôle autant qu’improbable qu’elle aurait pu entendre en cet instant.

Elle n’est pas certaine d’avoir des réponses exactes à apporter à son interlocutrice. De son côté, elle n’a jamais que des suppositions, rien de complètement abouti non plus. Mais il est vrai que ces organes pourraient être utilisés dans l’usage de potions chez des sorciers peu scrupuleux, ou les corps être exploités pour faire l’objet d’expérience diverses… à ce stade, on peut s’attendre à tout et n’importe quoi.

« Les sorciers ont toujours mieux à proposer », remarque Villanelle en relevant le regard comme si elle s’apprêtait à lui servir un de ces discours sur la supériorité des sorciers sur les moldus qu’apprécient tant les serviteurs du Lord déchu en temps normal, mais ce n’est pas vraiment à cette conclusion qu’elle aboutit, ne serait-ce que parce que ce n’est pas véritablement ce qu’elle pense en réalité de son côté. Non, ce n’est définitivement pas parce qu’elle souscrivait aux idéaux des sorciers de sang pur qu’elle avait agi de la sorte, loin de là. Ses motivations à elle avaient définitivement été bien plus prosaïques que cela. « En matière de cruauté, au moins c’est sûr. » Elle marque une pause. « Certains parlaient des esclaves moldus comme la nouvelle tendance, beaucoup moins efficaces que des elfes de maisons, mais presque aussi dociles, avec un supplément humiliation en prime, fait-elle sans réellement confier son opinion sur la question, loin de là.

Villanelle reporte son attention sur les corps allongés, il y a quelque chose de fascinant à avoir tout le loisir de les observer comme elle a trop peu eu souvent le temps et l’occasion de contempler ses victimes, quand bien même il y en a pourtant eu un très grand nombre, à la vérité. Quand elle revient à elle – et à Eve –, elle constate que cette dernière tend la main dans sa direction, et ce constat la fait doucement sourire, pas un sourire suffisant ou ironique, rien de tel.

« Un s’il te plaît, ça n’a jamais fait de mal, ça, tu le sais », dit-elle avec un sourire au coin des lèvres avant de, tout de même, attraper sa main, et sans plus attendre, la faire transplaner jusqu’à l’allée des embrumes. « On va faire un détour par chez moi avant, ça te dérange pas, n’est-ce pas ? »

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« Justement, ça n’aura pas forcément de quoi les dépayser », remarque Villanelle dans un haussement d’épaules indifférent quand Eve fait remarquer que les moldus sont déjà très doués pour s’infliger entre eux les pires horreurs, de celles qu’aucun être humain normalement constitué ne devrait vouloir faire subir à ses pairs… mais les être humains normalement constitués n’existent probablement pas, au final, et ceci explique cela.

Elle ne sait pas si Eve prendra soi de retenir toutes les informations que Villanelle lui communique, mais elle a tout de même l’intuition que oui, et qu’elle est même en mesure d’y accorder l’importance qu’elles nécessitent, peu importe qu’elle lui vienne d’une femme telle que Villanelle, une ancienne mangemort, qui plus est, ce qui, tout naturellement, laisse suggérer que son opinion ne vaut pas forcément grand-chose, loin de là.

Quoi qu’il en soit, ces suggestions sont laissées en suspens tandis que l’une et l’autre se rendent en direction de l’allée des embrumes, où elles seront plus à même de trouver les contacts qui les intéressent mais également – et surtout – où se trouve l’appartement de Villanelle, un petit studio sous les toits, qui ne paie clairement pas de mine, dans un immeuble terriblement mal fréquenté… elle menait une vie plus luxueuse autrefois, mais son passif n’encourage pas la confiance des locataires, et l’intimidation ne fonctionne pas à tous les coups… quant au salaire que lui verse le ministère… elle se sentirait probablement mieux rémunérée s’ils lui crachaient directement dessus. Ce serait en tout cas définitivement plus honnête. Ce n’est pas grave, au moins, il y a de l’animation, et pour l’aisément ennuyée Villanelle, c’est un atout non négligeable.

« T’inquiète, on a le temps », fait Villanelle avec un sourire au coin des lèvres quand, après avoir fait mine de protester, Eve consent à ce qu’elle se rende chez elle. « Tu m’accompagnes, de toute façon, je dois mettre la main sur deux-trois trucs avant qu’on y retourne. On a le temps, on pourra toujours prendre un verre avant d’y aller. J’ai un super whisky pur-feu. »

Elle n’attend pas de découvrir si Eve a été séduite ou non par son argumentaire, elle devine qu’elle doit l’être, au moins en partie, parce qu’elle est probablement curieuse de découvrir son antre et comment elle vie. Villanelle attrape donc le poignet d’Eve sans véritablement lui laisser le choix et l’entraîne un peu plus loin dans l’entrée d’un immeuble sordide, lui fait monter plusieurs étages sur des marches grinçantes et ouvre en grand son appartement, pas si grand pour sa part, mais décoré au goût de Villanelle.

« Bienvenue chez moi. Je te le sers, ce whisky ? »

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

Villanelle se contente d’adresser un sourire indifférent à son interlocutrice quand cette dernière observe qu’elle est loin d’avoir son temps. L’ancienne mangemort ne prend même pas la peine de répliquer à son interlocutrice qu’elle prend totalement cette situation au sérieux, contrairement à ce que son interlocutrice s’imagine peut-être. Oui, cette histoire est très sérieuse, c’est un fait, et elle y accorde un semblant de crédit, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut attendre de sa part qu’elle trahisse sa nature et ses habitudes, surtout qu’elle est convaincue de la curiosité de son interlocutrice, elle sera sans doute ravie de découvrir son chez-elle dans tous les cas. Et au-delà de ça, l’idée d’entraîner Eve chez elle est beaucoup trop séduisante pour qu’elle ne fasse qu’envisager de passer à côté de cette opportunité.

Une fois chez elle, la blonde ne cesse d’accorder des regards en biais à son acolyte, elle sent bien que cette dernière est particulièrement curieuse, peut-être même fascinée… c’est ce qu’elle espère, en tout cas… et ce n’est qu’un début, bien sûr. Eve a beau jouer les pressées qui n’a vraiment pas de temps à perdre et préfère en finir rapidement, ça ne l’empêche pas d’accepter un verre quand son interlocutrice lui en propose un.

« Alors comme ça on boit pendant le service ? » s’amuse Villanelle tout en s’affairant à lui remplir à ras-bord un généreux verre de whisky pur-feu. « C’est pas joli-joli, ça », remarque-t-elle avec un léger sourire en coin, tout en profitant de ce geste pour effleurer les doigts d’Eve des siens en une caresse légère, fugace, aérienne, son regard un instant don elle se détourne finalement pour se servir son propre verre, qu’elle lève alors en direction de son interlocutrice. « A notre collaboration », trinque-t-elle alors sans attendre la réponse d’Eve pour boire déjà une grande gorgée de son propre verre.

Elle n’est même pas fan de whisky pur-feu en soi, mais l’idée de poursuivre cet échange en présence d’une Eve ne serait-ce qu’un peu désinhibée lui plaît beaucoup trop pour qu’elle passe à côté de cette possibilité ô combien plaisante.

« Je te conseille de bien le savourer. Ça fera mieux passer le goût du polynectar ensuite », reprend-t-elle du ton léger de la conversation tout en guettant, bien sûr, la réaction de son interlocutrice, non sans une certaine malice. « Tu ne peux décemment pas rencontrer mon contact en étant… toi… », ajoute-t-elle avec un léger rire avant de reprendre une bonne gorgée de son verre, dont elle finirait presque à apprécier le contenu, pour peu qu’elle puisse toujours le savourer en présente d’Eve Polastri.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

« Aucune ? » suggère Villanelle dans un haussement d’épaules indifférent que vient contredire le fin sourire à la commissure de ses lèvres quand Eve suggère qu’elle a enfreint un nombre certains de règles en lui adressant la parole, et plus encore en réclamant son aide. « Je suis innocente », ajoute-t-elle sans chercher à être crédible le moins du monde et en s’autorisant même à être un tantinet provocante dans le processus, parce qu’elle sait qu’elle ne saurait duper Eve dans tous les cas, et qu’elle n’a jamais cherché véritablement à le faire.

Ceci dit, elle estime qu’en l’occurrence, les seules règles qu’enfreint son interlocutrice en la fréquentant ne sont jamais que d’ordre moral. Après tout, la jeune femme n’est pas une criminelle, ou du moins elle est une criminelle repentie aux yeux de la loi, et puisque c’est Carolyn qui a techniquement chapoté leur collaboration, ce n’est même pas comme si elle agissait vraiment en dehors des clous non plus. Bon, pour ce qui est du fait qu’elles se trouvent chez elle, à boire du vieux whisky pur-feu en plein service, dans un appartement moisi de l’allée des embrumes, ce n’était sans doute pas prévu au programme, mais c’est sans importance, car au final, si on posait la question à Villanelle, elle ne changerait absolument à cette situation qui ne lui plaît que beaucoup trop, et par bien des aspects.

Quoi qu’il en soit, Villanelle avait bien une idée derrière la tête en conduisant Eve dans son appartement. Bon, d’accord, elle avait plus d’une idée en tête, en réalité, mais elle avait d’entrée de jeu confié la plus avouable entre toutes à son interlocutrice, curieuse de découvrir, bien évidemment, ce que serait sa réaction. Le polynectar n’est pas forcément une nécessité, mais c’est tout de même un petit bonus amusant duquel Villanelle n’a pas envie de se passer. Ici, elles sont sur son territoire, et donc, la tueuse entend de les voir jouer selon ses règles.

« Ouais, ça c’est ce que tu crois. Personne ne te connaît ici, mais moi oui, crois-moi que tu vas attirer l’attention. C’est pas ce que tu veux, pas vrai ? » Elle sourit. « On dirait presque que ça te déranger », remarque-t-elle en fronçant les sourcils. Tu voudrais être importante ? Tu sais, ça se négocie facilement, ça, suffit de couper quelques têtes, et hop ! » Elle rit doucement. « Je plaisante ! » Ou pas. Elle porte son verre à ses lèvres et en boit une longue gorgée avant de reprendre. « On n’est pas obligées d’y aller tout de suite, de toute façon, on peut souffler et se détendre un peu avant… »

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

Villanelle accueille avec un fin sourire en coin chacune des occasions à laquelle Eve porte son verre à ses lèvres pour en boire une gorgée. Il en faudrait sans doute bien davantage pour la déshiniber, mais elle aime l’idée de ce laisser-aller qui passe par des détails aussi infimes que la manière dont elle accueille cette gorgée de whisky entre ces lèvres que l’ancienne mangemort rêve depuis bien longtemps d’embrasser – s’en cachant à peine au demeurant. Serait-ce pour autant qu’elle acceptera de boire le polynectar que lui propose Villanelle ? Probablement que non.

« J’en sais rien, Eve, t’as bien attiré mon attention, après tout », réplique la blonde du tac au tac, d’un ton provocateur, quand Eve lui fait remarquer qu’elle ne serait pas devenue Auror sans avoir quelques notions de base à son palmarès tout de même.

Certes, c’est effectivement le cas, et Villanelle ne doute pas le moins du monde du fait qu’elle a toujours été et reste une excellente Auror, mais elle sait aussi qu’elle ne ressemble à aucune des Aurors qui avaient croisé sa route avant elle. Non, Eve Polastri est différente, et c’est justement cette différence qui fait que Villanelle s’intéresse tant à elle et que cette dernière lui plaît autant. Sans doute qu’Eve serait totalement capable de s’en sortir à sa manière, mais elles sont sur son terrain, là, et c’est bien parce que c’est le cas qu’elle estime qu’elles devraient jouer selon ses règles à elle. Certes, Eve lui rétorquera probablement que tout ceci n’est pas un jeu… mais aux yeux de la jeune femme, c’en est bel et bien un. Et un jeu, au demeurant, auquel elle trouve un amusement total et qu’elle ne cherche pas à nier même un seul instant.

« J’avais l’intention de te laisser la surprise », répond Villanelle d’un ton énigmatique, quand Eve s’interroge sur l’apparence qu’elle avait eu l’intention d’endosser.

Pour le reste, elle sent bien que ses réflexions ne l’amusent pas franchement mais peu importe… ça ne l’empêche pas d’insister malgré tout, et même de prendre un malin plaisir à insister par ailleurs. Ignorant sa réflexion, elle se contente de rebondir sur sa dernière proposition.

« On dirait que tu lis dans mes pensées », observe la blonde en répondant au cynisme de son interlocutrice par une forme de cynisme totalement équivalente, alors qu’elle suggère d’un ton ironique qu’elles pourraient bien passer la soirée en tête à tête, à couper quelques têtes en guise de dessert. Villanelle est convaincue du fait que cette possibilité ne déplairait pas forcément à Eve. « Tu penses que notre seule intervention sauvera des centaines d’innocents ? » demande-t-elle, incrédule. « Il y aura toujours des enfoirés en liberté, et des enfoirés en chef pour remplacer ce qui auront été détrôné. Le mal sera toujours là, il attendra sagement, que tu t’en occupes, que ce soit maintenant, dans une heure ou dans dix jours », reprend-t-elle dans un haussement d’épaules indifférent et désabusé.

Double, double, toil and trouble

feat. Eve

Villanelle se contente de répliquer par un léger rire quand Eve lui rétorque qu’elle n’aime pas les surprises. Elle n’est pas totalement convaincue de cela, pour tout dire, mais elle la laisse parler. Elle voit bien que cette situation a le don de l’agacer partiellement, et l’ancienne mangemort mentirait en affirmant qu’elle ne prend pas un malin plaisir à ce constant. Loin de dissiper ce sentiment chez son interlocutrice, elle prend le plus grand soin à l’entretenir autant qu’elle le peux, avec un plaisir non dissimulé.

Bien sûr, la vision exposée par Villanelle précédemment ne peut que déplaire à Eve, et cette dernière y réagit d’une manière très directe, qui plaît beaucoup à la sorcière. Oui, Eve travaille de manière consciencieuse, et avec la certitude de faire ce qui doit l’être, ce qui est nécessairement juste. C’est une chose que Villanelle est capable d’admirer… en partie… mais bien sûr, elle veut considérer Eve comme étant bien plus corruptible qu’elle ne veut le laisser croire, et elle prendra toujours le plus malin des plaisirs de se jouer de ce qu’elle pense être un potentiel à exploiter chez son interlocutrice, elle qui n’aura eu de cesse que de la poursuivre tout en peinant à dissimuler la fascination qu’elle aura toujours su lui inspirer.

Villanelle n’insiste pas, elle ne cherche pas à débattre sur le sujet, elle se contente de hausser les épaules d’une manière suffisamment éloquente pour que la jeune femme se fasse une bonne idée de ce qu’est le fond de sa pensée en cet instant. Pour ce qui est de la suite et des remarques qu’elle a sorties en partie pour déstabiliser son interlocutrice, ce n’est pas parce qu’elle l’a fait à dessein qu’elle ne le pense pas. En effet, elle estime qu’il doit bel et bien y avoir des sorciers pour vouloir, d’ores et déjà, se positionner après la disparition de Lord Voldemort. Il fallait s’y attendre. Tout le monde veut sa part du gâteau, et le pouvoir, plus que n’importe quoi d’autres, attise la gourmandise chez les plus ambitieux.

« Bien sûr », répond-t-elle d’un ton qui ne laisse aucune place à l’hésitation, accompagnant sa réflexion d’un léger haussement d’épaules proche de l’indifférence. En vérité, ce n’est pas vraiment qu’elle est indifférente à ce sujet, c’est seulement qu’elle ne sait pas trop qu’en penser. La disparition du seigneur des ténèbres ne l’a pas affectée plus que cela, cela a juste eu pour effet d’encourager une situation qu’elle n’avait pas anticipée, et exigé d’elle qu’elle fasse preuve d’ingéniosité afin de se reconvertir tant que la chose était possible. « Ce sera toujours comme ça, quoi qu’on fasse. Sa place est vacante, forcément que certains vont tenter le coup. » Elle réfléchit à voix haute en prononçant les mots suivants. « Qui, par contre… »

Elle n’en a pas la moindre idée, à vrai dire.