(abandonné) The best way to find out if you can trust somebody is to trust them. [Henry Creel]

The best way to find out if you can trust somebody is to trust them.

feat. Henry Creel

Ne pas se mêler des affaires des autres serait certainement un excellent point de départ pour ne pas s’attirer constamment des ennuis comme Jane en a pris l’habitude. Peut-être bien, oui, mais les affaires des autres ont cet avantage de la détourner de ses propres affaires, de tout ce qu’elle a du mal à appréhender se concernant, de ses souvenirs en lambeaux, de la pensée anxiogène de ne plus jamais revoir Jim ou Mike. Alors oui, quand elle s’intéresse aux histoires de cœur d’Eddie et de Nancy, ou encore quand elle se mêle des nouvelles obsessions de Max, ça a le mérite de lui faire oublier un moment ses cauchemars sans queue ni tête pour l’aider à se concentrer sur quelque chose qui a davantage de sens.

C’est pour cette raison, donc, que El a décidé – sans prévenir la principale concernée, bien évidemment – de se rendre au zoo afin d’aller jeter un coup d’œil à celui qui semble bien plus responsable des visites régulières de Max à cet endroit que les animaux en eux-mêmes. Un blond plus âgé, El’ n’a pas vraiment obtenu plus d’informations de la part de sa meilleure amie, mais elle accepte de s’en contenter. Dans tous les cas, ce n’est pas comme si elle attendait grand-chose de cette petite enquête improvisée. Elle, elle se donne surtout un prétexte à sortir de chez elle (un prétexte qui ne soit pas l’université que bien sûr elle continue de fuir comme la peste – mais puisque ce sont les vacances scolaires, au moins elle a une bonne raison pour cela maintenant), et si sa petite filature du dimanche (qui a lieu un mardi mais ne nous attardons pas sur des détails) devait ne pas lui apporter de satisfaction, ce ne serait pas bien grave non plus au bout du compte, elle aura peut-être vu quelques animaux, et c’est déjà pas si mal en soi.

C’est en pénétrant dans le bâtiment qui abrite le vivarium du zoo qu’elle repère la silhouette en uniforme du zoo qu’elle devine être bel et bien celle du concerné. Elle n’a pas la moindre idée de ce qu’elle va faire maintenant qu’elle l’a repéré. Lui parler ? Probablement que non. Du moins, ce n’est pas son intention au départ, jusqu’au moment de le voir se retourner. Son visage… Figée sur place, El l’observe un moment sans bouger, ce qui doit lui donner l’air singulièrement ahurie, mais peu importe. Elle connaît ce visage. Elle connaît cet homme. Il la ramène à un souvenir lointain, nébuleux, mais bien réel, celui du laboratoire d’Hawkins… Ses pensées semblent brouillées, comme occultées par ce voile mystérieux qui entoure encore plusieurs points de son passé, mais elle se souvient de plusieurs de leurs conversations, elle se souvient aussi de ce sentiment, lointain mais réel, d’avoir trouvé en lui, à cette période lointaine, son seul et unique allié.

« Je ne pensais pas que je vous reverrai un jour », fait-elle finalement en osant l’aborder. « Encore moins ici », reprend-elle sans trop savoir que penser de ces retrouvailles qu’elle n’avait pas attendues un seul instant.

The best way to find out if you can trust somebody is to trust them.

feat. Henry Creel

El observe son interlocuteur avec circonspection tandis que ce dernier lui laisse entendre qu’il ne sait pas qui elle est. Se peut-il qu’elle se soit trompée ? C’est plus que probable, à vrai dire. Les souvenirs qu’elle associe au laboratoire d’Hawkins sont fragmentées, flous, difficiles à dissocier de ce qui pourrait n’être que de simples songes, et rien d’autre. El ne peut pas garantir véritablement connaître l’homme qu’elle a sous les yeux, car les souvenirs qu’elle lui associe manquent de clarté. Pourtant, elle est incapable de croire dans le fait qu’elle se fourvoie. Même s’il ne la reconnaît pas, elle ne peut se retirer de l’esprit qu’elle le connaît, et elle a besoin d’en avoir le cœur net. Après tout, il ne s’est pas contenté de dire qu’elle faisait erreur ou quoi que ce soit du même acabit, il lui a demandé s’ils se connaissaient, tout simplement. Et quelque chose, dans son regard, dans son attitude, lui laisse supposer que c’est bel et bien le cas, il n’en a peut-être juste pas conscience. Qui sait si elle ne lui évoque pas l’un de ses sentiments de déjà-vu que l’on éprouve quand l’on se confronte à son passé sans le savoir. El peut le comprendre. Elle est passée par là. Alors, peut-être n’a-t-il pas tous ses souvenirs en place ? Ou bien peut-être qu’il ne la reconnaît pas ? Ce ne serait pas improbable, après tout, le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle a plus que largement changé, depuis cette époque.

Tout comme elle qui peine tant et tant à faire le lien entre ce qu’elle a vécu, rêvé, et oublié. Alors c’est de façon très directe qu’El lui répond, quitte à passer pour une folle. Elle a besoin d’en avoir le cœur net, quoi qu’il en soit. Et il n’y a qu’une manière, simple mais directe, qui lui vient à l’esprit pour en avoir le cœur net et se faire une meilleure idée de l’ampleur – ou non – de ses illusions. Alors, avant de prononcer le moindre mot, et même si cette gestuelle pourrait lui paraître bien étrange, elle décide de lui présenter son avant-bras afin qu’il puisse lire la série de chiffres tatoués au creux de son poignet.

« Je crois bien que oui. »

Elle relève le regard, avec l’espoir qu’il ait compris, qu’il lui donne la confirmation qu’elle n’est pas totalement folle, qu’elle ne s’est pas adressée de la sorte à un inconnu qui n’aurait pas la moindre idée de qui elle est réellement. En ne rattachant son interlocuteur qu’à des souvenirs diffus mais néanmoins positifs, elle a envie de le considérer comme un ami, comme un allié, une personne qu’elle a de la chance d’avoir retrouvé, ici et maintenant.

« Vous voyez, maintenant ? » demande-t-elle en espérant que c’est bel et bien le cas. Dans le cas contraire, elle passera juste pour une illuminée qui l’aura abordé et dérangé sans absolument la moindre raison… Et en plus de se sentir idiote, El se sentira plus perdue encore.

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feat. Henry Creel

El a un léger mouvement de recul quand elle sent les doigts de son interlocuteur se refermer autour de son poignet, un frisson désagréable la traverse de part en part. Elle ne sait pas à quelle réaction elle s’était attendue. Elle ne sait pas ce qu’elle attend tout court de cette conversation, elle sait seulement que cette attitude la prend de court. Bien que légèrement inquiète, El décide de chasser le pourtant judicieux mauvais pressentiment qui l’assaille pour à la place analyser le comportement de son interlocuteur… Il a été surpris, surpris par une réalité qui vient le frapper sans prévenir. Le caractère abrupt de sa réaction peut sans doute aisément s’expliquer de la sorte. C’est d’ailleurs avec une certaine délicatesse qu’il finit par relâcher sa prise pour finalement révéler son propre tatouage. El se sent à la fois inquiète et rassurée. Elle ne s’est pas imaginée tout et n’importe quoi. Cette scène, tandis qu’elle le voit tourner son avant-bras gauche sous ses yeux pour dévoiler les chiffres gravés à l’encre dans sa chair, lui est toute familière est dans le même temps étrangère.

« Plus ou moins », confesse-t-elle alors, comprenant que son interlocuteur n’a aucun souvenir de cette période de sa vie.

Les souvenirs d’El, quant à eux, sont fragmentés, incomplets, trop flous pour certains. Ceux qu’elle associe à son interlocuteur, notamment, sont comment largement enveloppés d’un voile de brume très épais qui l’empêche de voir au travers, exception faite de quelques informations éparses, mais qui lui délivrent pour la peine de fausses certitudes, comme celle qui lui prête à croire que cette homme puisse être un allié.

« Vous ne vous souvenez de rien ? » C’est une question totalement rhétorique. A l’évidence, c’est bel et bien le cas, il n’a effectivement aucun souvenir, et elle ne pourra probablement pas compter sur lui, par conséquent, pour combler les vides auxquels elle fait également face de son côté. « Je ne me souviens pas de grand-chose non plus », confesse-t-elle doucement, sans avoir l’intention de s’arrêter là dans son discours malgré tout. Si cet homme est en quête de réponse sur ses origines et si elle est capable de lui en apporter, même fragmentées, il est de son devoir de le faire. « Le laboratoire national d’Hawkins, c’est là qu’on s’est rencontrés. J’ai été élevée là-bas. On était des objets d’études, des cobayes, et vous… » Elle baisse un regard éloquent en direction de son tatouage. « … Vous étiez le premier. »

Mais El a le souvenir de ne l’avoir appris que tardivement, sans trop savoir ce qu’en ont été les raisons. En retrouvant cet homme, elle avait songé que leurs souvenirs, mis en commun, leur permettraient peut-être d’y voir plus clair. Elle comprend à présent qu’il n’en sera rien, et qu’elle ressortir a peut-être de cette conversation plus perdue encore qu’au moment où cette dernière avait commencé.