More than anything [Charlotte Morningstar]

- Ok tout le monde, tournage terminé ! Merci pour votre participation.

Nous venions de finir notre publicité. J'aurais peut-être du la tourner un peu plus tôt, mais rebâtir l'hôtel ne s'est pas fait en un jour. Non il nous a fallut des mois, en réalité presque un peu plus d'un an pour pouvoir simplement faire construire la bâtisse, puis il y a eu toute la partie décoration. Même si nous n'y étions plus réellement, j'avais tenu à ce que cet Hazbin Hôtel soit assez similaire à celui que nous avions en Enfer. J'avais réussi à retrouver le papier peint si particulier mais pourtant si beau que nous avions là-bas. Ce qui avait été le plus douleur, c'était d'avoir prévu certaines chambres pour mes amis. Parce que pour moi, il était évident que j'allais pouvoir les retrouver un jour... Malheureusement, avoir le nez dans les travaux du matin au soir ne m'aidait pas réellement à les chercher. J'espérais aussi que l'hôtel soit une sorte de phare, qu'en le voyant ils reviennent tous petit à petit à la maison. Ils auraient tous leur place. Je ne savais pas réellement comment me positionner vis à vis de Vaggie par contre... J'avais prévu quelque chose pour elle, à son goût, mais ce n'était pas une chambre que nous partagerions. Je tenais toujours énormément à elle, mais être séparé pendant tout ce temps, avoir le nez dans un projet si gros, sans baguette magique pour tout accélérer avait probablement placé mes sentiments au second plan. Malheureusement, je ne pouvais plus dire avec exactitude que j'aimais Vaggie. Enfin si, je l'aimais elle était ma meilleure amie, elle le serait toujours puisque personne ne me connaissait comme elle me connaissait, mais je n'étais plus amoureuse comme avant, si tant bien que je le fus encore un peu... Je me sentais coupable, comme si je l'avais trahi et que j'étais complètement incapable de retourner en arrière. Elle était probablement celle que j'appréhendais le plus de retrouver...

Au bout d'un peu plus d'un an, l'hôtel avait pu ouvrir et il était aussi parfait que dans mes souvenirs. Je devais tout ça à une seul et même personne: ma mère. OUI ! Vous m'avez bien lu, ma mère était belle et bien là, avec moi ! Bon mon père n'avait pas été téléporté et je ne pouvais que m'inquiéter pour lui que je supposais à présent seul chez nous. Pourtant, en cinq ans, j'avais pu rattraper le temps perdu et surtout, j'avais laissé la petite fille à l'intérieur de moi, celle qui avait désespérément besoin de sa maman, profiter de moment qu'elle avait toujours voulu avoir. Elle m'avait apporté le soutiens financier dont j'avais besoin en plus d'être là. Après sept ans sans elle, je pouvais enfin la retrouver, me laisser aller en lui parlant de mes doutes, mes faiblesses, mes craintes. J'avais retrouvé ma maman, j'avais retrouvé l'une des personnes les plus importantes pour moi. Il n'y avait qu'elle durant cinq ans, cinq années où je n'avais pas eu assez de temps pour retrouver mes amis, sans pour autant être suffisamment occupée pour ne pas penser à eux.

J'allais pour retourner derrière la réception lorsque l'un des employés vint vers moi. Il me tendit une boite qu'on aurait apparemment déposé pour moi. Je le remercies et passai derrière le comptoir de la réception pour le déposer sur le bureau. Je me mis à sourire en voyant les couleurs. C'était mes couleurs préférées, celle que je portais souvent avec fierté puisque mon père aussi les aimait. C'était un joli rouge avec un ruban doré savamment noué. On aurait dit l'un de ses petits paquets que les gens s'offraient tous les ans à Noël. C'était apparemment une fête pour célébrer la naissance de Jesus. A vrai dire, ce n'était pas quelqu'un qui été passé par chez nous donc je ne le connaissais pas vraiment. J'avais d'ailleurs longuement cru que c'était un juron avant de comprendre que c'était le nom d'une personne. Pas n'importe qui apparemment, il saurait un fils de Dieu. Peut-être, en tout cas, c'était chouette Noël. Il y avait de la joie sur tous les visages (ou presque), de belles décorations et les enfants étaient heureux. C'était une période de l'année qui nous mettait du baume au coeur. Tout comme ce que je vis en soulevant le couvercle du paquet... Le nom en dorures sur l'enveloppe était très bien écrit, là n'était pas le problème, c'était plus le fait que ce soit visiblement une entreprise. J'ouvris alors l'enveloppe et ne pus que reconnaitre l'écriture. Il me fallut tout d'abord m'assoir sentant que mes jambes allaient finir par me lâcher si je prenais le risque de rester debout. A vrai dire, qu'il soit en retard ne m'importait peu, il était là, quelque part sur cette île et il cherchait à me revoir, c'était tout ce qui comptait pour moi. Il avait essayé, il avait fait cet effort que je n'avais pas pu faire, évidemment je ne pouvais lui en vouloir. Les larmes se mirent à couler sans que je ne puisse réellement le contrôler, s'il avait été en face de moi, j'aurais probablement pleuré toutes les larmes de mon corps en le serrant le plus fort possible contre moi. Il y avait aussi une heure pour un rendez-vous ce qui me fit sortir l'agenda de l'hôtel rapidement. Bien, j'étais en service sur cette après-midi là, mais à situation exceptionnelle, mesure encore plus exceptionnelle s'impose. Je pris le téléphone, composai le numéro de la bénévole travailla ce matin là et négocia d'échanger nos deux shift. Une fois l'appel passé, je me rendis compte que je n'avais pas regardé ce qu'il y avait d'autre dans cette boite, ce n'était probablement pas une si petite lettre qui pesait tout ce poids. Effectivement, c'était une magnifique peluche de Keekee. Ce petit chat si adorable qui n'était malheureusement pas ici, avec moi. Je me remis à pleurer de plus belle, touchée par cette délicate attention. Je la pris, la serra fort puis lui trouva une place de choix à la réception. Elle devait être visible par tous, parce que Keekee était la clef du premier Hazbin Hotel.

Le jour j avança à grand pas et le shift du matin fut le plus long que je connus. Il ne me tardait qu'une seule chose: partir retrouver mon père. Bien évidemment, un client eu besoin de quelque chose peu de temps avant que je n'eus fini et me mis, involontairement en retour. Je pris rapidement mon sac, enfilant grossièrement la bandoulière sur mon épaule avant de partir en courant vers le café. J'avais pu repérer où il se situait grâce à internet, je ne connaissais pas vraiment ce quartier et il me fallut un peu de temps pour finalement arriver devant les grandes baies vitrées où une tasse fumante dessinée sur la vite m'indiqua que j'étais à bon port au "Central Perk". C'est là que je le vis, à vrai dire je ne le reconnus que part son attitude anxieuse et à son regard fixé sur la porte d'entrée. Je fis le tour du bâtiment en quelques enjambées, inspira profondément avant d'entrer dans le café. Je fis un petit signe timide de la main et avançant vers lui.

- Bonjour papa.

Il y avait très peu de personne assises seule à leur table et les seuls hommes adultes qui n'avait personne avec eux n'était -heureusement- pas mon père. Si ce n'était pas lui, j'aurais simplement l'air bête, mais ça ne me dérangeait pas. Il se leva, ce qui me fit comprendre que c'était bel et bien lui. Alors j'approchai et le pris dans mes bras. Cinq ans sans lui, sans aucune nouvelle, ça avait été aussi dur que l'absence inexpliquée de ma mère, sauf que cette fois, j'étais inquiète de le savoir seul chez nous.

- Tu m'as tellement manqué !

Les parents sont la base de notre éducation, ils sont les piliers de notre vie. J'avais pu compter sur les miens durant des années, mais parfois, quand les fondations ont du mal à se supporter, elles ne peuvent plus porter le reste. C'est ce qui est arrivé à mon père. Il n'arrivait pas à gérer sa propre tristesse alors il m'a laissée seule face à la mien. Je ne pouvais pas lui en vouloir, je ne pouvais que comprendre. J'avais franchi cette épreuve en trouvant du soutiens ailleurs, en devenant plus solide. Malgré tout, il était et restera toujours une part de moi. J'avais passé des années à le regarder, les yeux pleins d'étoiles, à écouter ses histoires, je ne pouvais pas lui en vouloir éternellement. Parce qu'il était mon père, que je l'aimais malgré tout ce qui avait pu se passer entre nous. Je l'aimerais toujours envers et contre tout. C'était mon rêve, mon but peut-être insensé qui nous avait rapproché parce qu'il avait accepté de se battre à mes côtés pour le défendre. Il n'y a pas de formule magique pour être un bon parent, il n'y a que des personnes qui font de leur mieux. C'était exactement pour ça que j'étais fière qu'il soit mon père. Il s'était battu seul contre ses démons intérieur mais avait eu la force de venir défendre mes intérêts.

J'avais traversé la ville d'un pas léger et joyeux, ravie de pouvoir revoir mon père. Oui, plus joyeusement qu'à l'accoutumé. Le café où nous avions été charmant, vraiment ça n'avait rien à voir avec ce que j'avais connu en Enfer. Non, en enfer c'était un peu plus sombre et sanguinolant. J'avais presque couru pour accepter l'étreinte qui m'étais proposée. Avec ces nouvelles apparences, notre différence de taille était différente. Je ne le dépassais plus de plusieurs têtes, nous étions à vrai dire égaux en taille -du moins j'en avais l'impression-. Il y avait quelque chose de similaire à avant, je me sentais réellement réconfortée et en sécurité, tout en ayant l'impression que quelque chose avait changé. J'avais grandit et par conséquent muri, c'était probablement ça. Enfin, je savais que je resterais toujours une petite fille pour mes parents.

- Elle est parfaite. Je l'ai installé à la réception pour que tous les visiteurs puissent la voir. Merci, je l'aime beaucoup !

La douceur de ses gestes, la petite gène que nous ressentions -en apparence du moins- tous les deux, rien n'avait changé entre nous, enfin rien ne s'était dégradé et c'était incroyablement rassurant. J'avais eu cette peur sourde que ces cinq ans m'éloignent de tous mes proches, j'avais eu cette terrible angoisse de me retrouver seule craignant en plus que ma mère ne disparaisse, encore, du jour au lendemain. C'était dans ces moments là que je voyais que la pomme ne tombe jamais bien loin de l'arbre. Je ressemblais à mon père dans ces petits moments de nervosités. Ce n'était pas plus mal, j'étais ravie de trouver des similitudes entre nous. Je pris place à la table, appréciant son simple geste.

- Merci papa.

J'aurais pu me payer ma consommation, je n'étais pas totalement démunie, mais je trouvais important de lui laisser ce genre de petit plaisir. Puis je ne voulais pas risquer de le blesser en refusant sa proposition si gentille. C'était pour ça que je l'avais simplement remercié. Il finit par me questionné et je ne pus contenir la joie que je ressentais tout en lui parlant de l'hôtel et de ma mère.

- Eh bien je suis arrivée il y a cinq ans, lors de la première lune rouge. J'ai retrouvé maman, elle est ici elle aussi ! Puis elle m'a aidé à reconstruire l'hôtel. Ca a pris du temps mais tout est prêt et aussi beau qu'avant ! Si tu veux, tu pourrais passer et voir ce qu'on a fait, ça me ferait plaisir. Je n'ai pas encore retrouvé mes amis ou d'autres Pêcheurs, mais je fais de mon mieux pour aider touts ceux qui viennent à l'hôtel. Je suis désolée pour mon retard d'ailleurs ! Les clients ne cessent de demander des petites choses un peu étrange parfois. Je crois que parce que c'est gratuit nous n'attirons pas que des personnes motivées à devenir meilleures...

Une serveuse s'approcha de la table pour prendre ma commande. Mon père n'avait pas encore fini son thé -ou à l'inverse, il l'avait déjà bien entamé- et je me décidai à prendre un café et l'une de leur pâtisserie rose avec des petites billes blanches dessus. Elle reparti et ce fut à mon tour d'interroger un Morningstar.

- Et toi, qu'en est-il de ton côté ? J'ai cru comprendre que c'était toi qui avait fait cette superbe peluche de Keekee !

Il y a quelques années, j'aurais été prête à tout pour ce genre de moment, pour pouvoir avoir une relation comme celle-ci avec mon père. Elle n'était pas parfaite, loin de là, mais elle était authentique et surtout à notre image. Nous n'étions pas vraiment les individus les plus à l'aise avec la communication, mais c'était ce qui rendait notre lien unique. J'étais fière de l'avoir pour père et avoir cette complicité avec lui était ce que je voulais plus que tout au monde. En grandissant, j'avais bien remarqué que j'étais un savant mélange entre mon père et ma mère, ils étaient tous deux une part de moi. Alors je ne pouvais que me laisser porter tout en profitant de l'instant présent. Je ne pouvais m'empêcher de me sentir un peu surexcitée à l'idée de passer plus de moment dans ce genre d'endroit avec lui. Parce que j'avais perdu mon père pendant sept longues années et une fois réunis, nous n'avions pas eu plus de six mois avant d'être à nouveau séparés pour cinq ans de plus... Pourtant, au fond de moi, je sentais que tout ce que j'avais toujours voulu construire avec lui était faisable, parce qu'il le voulait aussi, parce qu'il était tous aussi prêt à faire des efforts que moi. Voir qu'il croyais en moi m'insuffla encore plus de motivation, je me sentis comme transcendée par une force résistante à toutes épreuves. Je serrais à mon tour sa main avant de répondre.

- Je l'espère. Merci de croire en moi. Ca compte beaucoup, surtout venant de toi.

Je remis timidement une mèche derrière mon oreille, fixant le set de table comme s'il était tout à coup la chose la plus intéressante de l'univers. Il avait raison, je pouvais être forte et dépasser ma peur, mes craintes, je pouvais gérer ce nouvel hôtel, j'étais capable de bien des choses. Spoiler alerte, ça n'allait pas être simple grâce à mes antagonistes préférés, mais j'étais prête à endurer tout ça, parce que ça valait la peine d'être vécu. Mon père avait tout sacrifié pour ses rêves, il avait été détruit par le Paradis, il avait souffert, mais il s'était relevé pour braver bien d'autres situations. Il s'était même battu contre Adam pour me protéger, pour protéger mon hôtel. Je voulais le prendre pour modèle, aller de l'avant sans me laisser entrainer par la peur qui me tiraillait les tripes, je pouvais m'en sortir, du moins je m'en sentais capable à ce moment là. Je me passais nerveusement la main sur la nuque en regardant le plafond.

- Ahah... euh... Oui ?

Nous savions tous les deux que ma gentillesse me perdra un jour et qu'il serait difficile pour moi de mettre quelqu'un dehors... C'était pour ça que Vaggie me complétait parfaitement, qu'elle me permettait de compenser cette gentillesse par un côté un peu brut. C'était aussi pour ça qu'Alastor m'aidait beaucoup, il faisait peur et c'était une protection de plus. J'aurais aimé être plus forte, être capable de bien plus de choses, mais c'était qui j'étais et je ne pouvais pas le changer. C'était cette gentillesse qui me différenciait des autres et qui m'aiderait à m'en sortir. Son inquiétude ne m'avait pourquoi pas échappé, j'allais faire du mieux que je le pouvais, même si ce ne serait pas simple pour moi. On ne pouvait pas arrêter de vouloir le bien de tous et surtout arrêter d'être si conciliante du jour au lendemain.

Lorsque mon père prononça le nom de ma mère, je me mis à tiquer. Pourquoi ne m'avait-elle pas parler de lui ? J'aurais tant aimé savoir qu'il était là, lui aussi... Elle avait probablement ses raisons qu'elle m'expliquerait. Ce ne fut pourtant pas l'information la plus étrange, non c'était l'idée qu'il puisse y avoir à nouveau un "tous les trois"... Alors, nous allions être une famille comme avant ? Nous allions pouvoir vivre normalement à nouveau, sans l'absence qui pesait sur nos cœurs et qui nous séparait ? Les larmes me montèrent aux yeux sans que je ne puisse réellement les contrôler.

- Tu veux dire que vous êtes de nouveaux ensembles et qu'on sera à nouveau une famille comme avant ? Oh papa, c'est vraiment une super nouvelle, si tu savais comme je suis contente ! Evidemment, je ferais tout mon possible pour que nous puissions passer du temps ensembles, tous les trois.

Du revers de la main, j'essuyais les larmes traitres qui venaient de couler sous le coup de l'émotion. Je souriais, tentant de ne pas faire paniquer mon père qui m'avait probablement vu pleurer légèrement. Il ne semblait déjà pas bien à l'aise, je ne voulais pas qu'il s'inquiète d'avantage sur cette entre vue. Je le sentais mal à l'aise, comme si quelque chose n'allait pas alors que ce qu'il avait pu accomplir en cinq ans était une aventure super chouette! Mon père avait toujours aimé fabriquer des choses avec ses mains, alors c'était comme une évidence que ce métier lui plairait. Keekee était donc une pièce unique que mon père avait pris le temps de me faire en personne, qu'il n'avait pas confié à l'un de ses employés, j'en étais d'autant plus touchée. Ce fut à mon tour de chercher sa main pour le réconforter, pour lui faire comprendre que je comprenais et surtout que je le soutenais.

- Cette boutique, est-ce que c'est ton nouveau rêve ? Est-ce que tu te sens épanouis grâce à elle ? Où se situe-t-elle ? J'adorerais pouvoir venir la visiter !

Parce que c'était intéressant pour mon père, je voulais m'intéresser à ce qui lui tenait à coeur, tout comme il allait prendre du temps pour venir à l'hôtel, pour voir ce que j'avais réalisé. Nous étions de grands rêveurs avec des étoiles plein nos pensées, avec tant d'idées qu'il nous suffisait de tendre le bras pour en attraper une nouvelle. Il fallait seulement que nous ayons plus confiance en nous.

Je compris ce qui le contrariait, ce qui le rendait si peu à l'aise lorsque je vis un éclair de culpabilité passer sur son visage. Je comprenais ce qu'il traversait parce que j'avais fait la même erreur avec mes amis. Je n'étais pas allée vers eux plus tôt parce que j'avais été bien trop occupée à me concentrer sur mon projet personnel. Alors, une petite moue sur les lèvres je lui répondis.

- Si tu veux savoir, je ne t'en veux pas de ne pas être réapparu plus tôt. Ce serait très déplacé de ma part de t'en vouloir pour ça. Je suis tout simplement heureuse que nous soyons là, tous les deux et c'est tout ce qui compte pour moi. Je n'ai peut-être pas les mêmes moyens, mais je suis là aussi si tu as besoin.

J'avais grandie, je n'étais as une jeune fille qui attendait qu'on l'aide, qu'on lui donne ce dont elle avait besoin sans donner de contrepartie, non, il était important pour moi de tendre aussi la main quand on se montrait généreux avec moi, d'autant plus lorsqu'il s'agissait d'un proche. Je sortis mon téléphone et pianotai les chiffres donnés par mon père avant d'enregistrer son contact et de lui donner le mien. Mon regard parti ailleurs, alors que je tentais de cacher la gêne que je ressentais en ajoutant:

- Et si tu veux simplement m'appeler pour me parler, ça me va aussi....

A vrai dire, j'avais un peu de mal à prendre la main qu'on me tendait. Pas que je ne le veuille pas, plutôt parce que c'était compliqué pour moi de ne pas être celle qui aidait les autres. La joie du syndrome du héro. J'avais ce besoin de tendre la main, pas de la prendre. Pourtant, parfois je n'avais pas eu d'autre choix que de me résigner et d'accepter de me reposer sur les autres. Alastor, Vaggie, Husk, Nifty j'avais eu besoin d'eux pour faire marcher l'hôtel, pour pouvoir ouvrir. Je n'avais jamais été réellement seule pour affronter les épreuves qui s'étaient dressées contre moi. Pas par peur, non, parce que je me sentais plus forte quand j'avais le soutiens de mes amis, présents ou non. J'avais ce besoin de croire en une cause, d'avoir des personnes qui s'alliés à moi pour pouvoir déplacer des montagnes. Je ne pouvais pas délibérément baisser les bras face à l'adversité, c'était totalement contre mes valeurs et mes principes.

- Je l'espère.

J'avais déjà pensé que ma gentillesse me perdrait un jour, qu'elle ne ferait que m'apporter des ennuies, des personnes voulant en abuser. Pourtant, je n'avais aucune envie de changer ce trait de ma personnalité. Pour moi, c'était comme une part importante de mon identité, ça faisait de moi qui j'étais. J'avais un côté candide, qui faisait confiance rapidement aux autres, mais sans ça, je n'aurais probablement pas lié une amitié avec Alastor et serais assurément une toute autre personne. Alors, changer pouvait être une bonne chose si c'était pour devenir quelqu'un de meilleur, mais je ne pensais pas que me débarrasser de ma douceur serait une bonne chose. Je pouvais voir de la bonté en chacun, malgré les apparences, j'étais capable d'être ravie pour quelque chose qui semblait moindre pour les autres, mais j'étais heureuse telle que j'étais. A vrai dire, je l'étais aussi pour ce que cette simple phrase impliquée. Mes parents allaient enfin être réunis. Il faudrait du temps, il leur faudrait se redécouvrir tel qu'ils étaient devenus, mais c'était possible, j'y croyais de tout mon coeur avec ferveur.

- Je suis si contente pour vous deux. Ce serait vraiment génial de pouvoir être tous les trois.

J'avais conscience qu'il était possible qu'ils finissent par se séparer, mais essayer est déjà un très bon départ. Essayer et le tout départ de la réussite et je sentais que c'était possible, parce que si on se donne les moyens, tout peut-être possible. Nous avions bien réussi à repousser Adam et ses Exorcistes, nous avions bien reconstruit l'hôtel sur l'île, avec de la force, les bons alliés et de la volonté, tout était faisable. C'est en croyant à ses rêves qu'on les rendait réel, tangibles, il n'y a pas d'autre secret. Cette fabrique de jouets pouvait elle aussi être un rêve, une envie d'avancé pour l'avenir, tout comme l'était l'hôtel pour moi. Je l'écoutais me parler, sentant qu'il y avait définitivement quelque chose de changer entre nous. Nous parlions, de nos envies, de nos passions, de qui nous étions et surtout, de nos sentiments. C'était une évolution et j'avais passé des années à espérer retrouver cette relation avec mon père. Être un peu plus âgée m'avait permis de mûrir, de pouvoir avoir une appréhension différente de la vie d'adulte, de tout ce qui faisait que c'était géniale et toutes ses contraintes. Je ne pouvait que voir la passion dans les yeux de mon père, cette étincelle qui faisait pétiller ses yeux.

- Tu aimes ce que tu fais, c'est merveilleux. Tu as beaucoup de commande personnalisées ? Je marquai une pause, ne voulant pas parler de la lettre et de ce qu'elle m'avait fait ressentir pour l'instant. J'ai conservé l'enveloppe, je viendrais te voir dès que j'en aurais l'occasion. Tu veux peut-être celle de l'hôtel ? tu y es le bienvenue ! Nous sommes à Hogwarts Place.

La serveuse arriva à la fin de ma tirade pour déposer ma commande. Alors ces petites pâtisseries étaient vraiment d'un rose aussi flashy ? C'était très jolie et je croquai dedans pour gouter. C'était très sucré, mais le coulis à la framboise qu'il y avait à l'intérieur contrastait avec son amertume. En d'autres termes, c'était très bon.

- Avec plaisir !

Visiter le travail de son père était quelque chose qui était souvent fait par les petites filles mortelles. J'avais grandit dans ses "affaires" sans réellement comprendre de quoi il s'agissait, comme la plupart des princesses. Pourtant, l'idée d'aller découvrir la fabrique qu'il avait construite lui-même était excitante. Parce que c'était un peu comme l'hôtel, mais pour lui. C'était quelque chose qui lui tenait à coeur, un endroit où il passait du temps et je voulais découvrir son univers. Je lui offris un sourire pour lui répondre que c'était normal d'être là pour lui. Parce qu'il était mon père, parce que je l'avais toujours vu comme un modèle, malgré tout ce qui nous était arrivé.

- Je n'hésiterais pas, promis

Mes parents étaient les êtres que j'aimais le plus, que j'avais toujours aimé de tout mon coeur. Ils étaient les modèles que j'avais eu pour grandir, c'était en les observant que je m'étais construite. C'est pour ça que leur séparations, que leur disparition spontanée avait été si dur pour moi. J'avais, en peu de temps d'intervalle perdu ma mère puis mon père. Beaucoup de flammes ont dansé dans les sept Cercle depuis et ils étaient tout les deux revenus dans ma vie, non sans larmes. Maintenant, c'était au tour de leur couple de se relever, de surmonter cette horrible épreuve. Je souris avec douceur, heureuse d'imaginer à nouveau notre famille plus unie que jamais.

- Je serais patiente. Vous savez tous les deux que vous pouvez compter sur moi si vous avez besoin. En ce moment, pour l'hôtel, je lis pas mal de livre de psychologie, sur le développement personnel, l'estime de soi, le rapport avec autrui, ça pourrait peut-être vous être utile.

C'était leur relation, je ne pouvais que les soutenir au besoin et attendre qu'ils règlent leurs différents. C'était dans ce genre de moment que je voyais que la pomme ne tombait pas bien loin de l'arbre. Il suffisait de nous lancer sur un sujet que nous apprécions, qui nous passionnait et nous étions lancés, des étoiles pleins les yeux, le coeur tambourinant dans notre poitrine. Nous pouvions parler pendant des heures si personne ne nous arrêtez, nous pouvions parler tellement que nous ne verrions pas l'heure passer. Parce que nous étions comme ça, nous étions des êtres animés pas nos passions et un peu notre anxiété...

- Tu dois faire tout un tas d'heureux ! Et toi, tu l'es ? Ca te plait vraiment de créer des jouets ?

Il me fallut un temps pour comprendre ce que je venais de dire... Bien sûr, s'il m'avait envoyé cette peluche, il avait probablement eu l'adresse quelque part... Cette carte n'allait pas lui servir à grand chose... J'avais, moi aussi, de quoi le contacter, alors il était probablement impossible que l'on se perde de vu de si tôt. Un large sourire étira mes lèvres. Cet hôtel, c'était un peu comme mon bébé, comme la prunelle de mes yeux, comme mon petit trésor. J'en étais si fière, j'étais si heureuse de pouvoir le partager avec d'autres personnes, de pouvoir dire que j'avais réussis à le remonter de toutes pièces.

- Avec grand plaisir ! Oh papa tu n'en croiras pas tes yeux! Il est à la fois si similaire à celui que j'avais en enfer. La déco est assez proches, j'ai même réussis à retrouver le même papier peint ! Je l'aimais tellement que j'aurais été déçue de ne pas le retrouver...

J'avais bien évidemment chuchoter le mot "enfer" comprenant que pour les vivants, parler de là où ils pourraient finir n'était pas vraiment un sujet très joyeux. J'avais encore parlé vite, en faisant de grands gestes. Je m'étais peut-être encore laissée emportée, mais ce n'était pas grave, j'étais heureuse, autant que je pouvais l'être dans cette nouvelle vie. C'est en me taisant finalement que je fis attention à son regard. Au départ, ce n'était que pour vérifier que je ne l'ennuyais pas trop, mais je me rendis compte de toute la fierté qui s'y trouvait et remis une mèche de cheveux derrière mon oreille, légèrement gênée. J'avais toujours rêvé de provoquer ce genre d'émotion chez mon père, mais je ne m'y attendais pas... Je pris une gorgée de mon café, qui avait légèrement refroidit. Il n'avait pas tort, j'étais bien plus grande, plus mature, mais ce n'était pas pour autant qu'il n'avait pas été là. Je posais ma main sur la sienne, tentant d'attirer à nouveau son regard sur moi.

- Tu as été là, papa. La majeur partie de ma vie, tu étais là, tu as mis en moi tout un tas de rêves. Il y a eu ces sept ans... je détournais la tête, marquant un temps avant de le regarder à nouveau Cette période où maman n'était plus là... Mais tu avais tes raisons et maintenant tu es là à nouveau. Nous sommes immortels, qu'est-ce donc que sept ans sur une éternité ? Oublions les mauvais moments, ne les laissons pas tacher le tableau. Je suis fière que tu sois mon père, je suis fière de mon enfance, de la vie que j'ai menée et surtout de celle que nous mèneront ensemble. Ce qui compte, c'est tout ce temps qu'il nous reste, pas celui que nous avons perdu. Ce qui compte, ce sont les bons moments que nous avons passés ensembles, tout ce temps à rire, à être là l'un pour l'autre.

- Bien sûr je comprends.

J’étais ravie d’apprendre que mes parents se laissaient une autre chance. Ils avaient le droit de vouloir régler leurs problèmes par eux-même et je ne m’en mêlerais pas. L’amour est un sentiment aussi incontrôlable que puissant. J’en avais bien conscience… J’étais morte d’inquiétude à l’idée de devoir un jour me confronter à Vaggie, de devoir lui briser le cœur. C’était compliqué pour moi, comme ça avait dû l’être pour mes parents de parler… Mon père était là et m’avait proposé son soutien, je pouvais bien lui parler de mes craintes, peut-être pourrait-il me conseiller…

- Dis moi, tu penses que des sentiments perdus peuvent refaire surface? Je dis ça parce que… Tu te souviens de Vaggie? Et bien cela fait cinq ans que je ne l’ai pas revu et je crois que malheureusement je ne ressens plus rien pour elle… Si je la retrouve, j’ai peur de lui faire de la peine en lui avouant…

Il me parla de son entreprise, de sa construction de jouet. Il avait l’air passionné parce ce qu’il faisait et après l’avoir su en dépression pendant tant de temps, j’étais vraiment ravie de le voir aller mieux. Ce n’était pas mon rôle de faire en sorte qu’il soit heureux, pour autant ça ne m’empêchait pas d’être inquiète pour lui et que son bonheur compte à mes yeux.

- J’espère que tout ira pour le mieux pour toi maintenant.

J’étais prête à lui pardonner tout ce qu’il s’était passé entre nous. Il fallait faire table rase du passé pour laisser place à l’avenir. Ce n’était pas en gardant des griefs contre lui que j’allais pouvoir y arriver. Je me devais de lui laisser sa chance.