SECRET SANTA ▿Artemis Olympus & Nigel Balan

Artemis s'efforçait de participer aux activités locales, ce qui lui permettait de faire connaître son entreprise. Elle s'était donc inscrite pour un Secret Santa et elle ne s'était même pas rendu compte que quelqu'un avait déposé une enveloppe à son intention. Quand elle s'en aperçut, elles en lu le contenu sans savoir absolument qui était ce Nigel. Mais on lui demandait de l'empêcher de glisser. Elle supposa donc qu’elle allait devoir se rendre à la patinoire. Elle acheva de faire tous les papiers urgents qui nécessitaient son attention et décida donc de s'octroyer une petite balade pour partir à la recherche de cet homme et l'empêcher de se faire mal. Quand on confiait une mission à Artemis, elle faisait ce qu'il fallait pour la réussir.

Mais en sortant, elle ne put que constater que le sol était déjà devenu une vraie patinoire. Elle avait elle-même du mal à avancer et elle comprit mieux pourquoi celui qu'elle devait aider allait se retrouver dans le pétrin. Elle espérait simplement pouvoir lui donner un coup de main sans trop de difficultés. Après tout, elle avait aussi du mal à rester campée sur ses deux jambes dans la situation actuelle. Il n'était donc pas du tout certain qu'elle soit capable de retenir quelqu'un qui glissait. Elle finit quand même par retrouver un endroit à peu près praticable et à parcourir une partie de la ville avant de retomber sur une zone de glissade.

Elle demeura attentive et regarda autour d'elle pour être sûr de ne pas louper la personne qui risquait de se faire bien mal si elle échouait. Elle finit par apercevoir au loin un individu qui avançait. Comme elle le pensait, il se trouva soudain en difficulté. Avec une dextérité qui l’étonna elle même car elle lui semblait bien supérieure à celle qu'elle avait habituellement, elle se précipita à la proximité de la personne pour essayer de la retenir. Ce genre de sauvetage était clairement le seul moyen pour un homme de se retrouver dans les bras d'Artemis, mais elle le soutint avec fermeté.

« Ca va aller, je vous tiens. »

Artemis pinça les lèvres et fut tentée de lâcher le séducteur quand celui-ci lui fit ce compliment à-propos de son charme. Elle n’avait jamais eu de patience avec les séducteurs et quiconque la connaissait un minimum savait qu’on ne taquinait pas Artemis sur le chapitre de la séduction. Certains avaient été punis pour moins que ça. Mais elle n’était pas dans son monde et cet homme n’avait pas atteint à son vœu en la complimentant. Dans ce monde, les dieux avaient appris à mettre de l’eau dans leur vin. Elle se contenta d’un hochement de tête pour toute réponse à sa reconnaissance.

« Vous êtes Monsieur Nigel ? Il semblerait que quelque chose ait tenu à ce que je vous rattrape. En tous les cas, j’espère que vous n’êtes pas blessé. »

Elle ne considérait pas comme un cadeau de Secret Santa d’avoir simplement empêché cet homme de se faire mal. Mais elle pouvait bien lui accorder de faire connaissance, après une telle mésaventure. Et puis, elle devait coopérer un minimum si elle voulait qu’il puisse réaliser son propre Secret Santa, probablement avec elle, du moins, elle le supposait. Il se présentant, omettant le monsieur. Cela voulait sans-doute dire qu’elle n’avait plus qu’à l’occulter elle aussi. Il lui demanda alors de confirmer son identité. Elle hocha à nouveau la tête, il était tombé sur la bonne personne. Il fallait maintenant espérer pour lui qu’il sache se tenir. Elle lui serra la main.

« Dame Artemis, de Artemis Security. Enchantée de faire votre connaissance. »

Si elle pouvait faire un peu de publicité au passage pour son entreprise, elle n’allait pas s’en priver, même si l’essentiel, pour l’instant, c’était que l’homme n’ait rien et de trouver un moyen de s’extirper de cette patinoire où même la déesse risquait de se faire des bleus. Enfin, elle n’était pas sûre. Elle avait remarqué qu’elle se fatiguait bien moins depuis quelques temps, elle était peut-être redevenue une déesse. Il était difficile de savoir si elle avait retrouvé toutes ses facultés. Et elle n’allait pas le transformer en chevreuil pour tester la situation, ce ne serait pas bien aimable.

Ils étaient nombreux ceux qui étaient impressionnés, voire intimidés par sa présence. Les hommes pouvaient être de vraies lavettes. Dans un premier temps, ils se montraient forts et impressionnants et ensuite, quand on était la plus forte, alors, il n'y avait plus personne. Artemis avait toujours un regard un peu particulier sur les hommes qui, comme celui-là, étaient capables de passer à un comportement de cordialité et de bienséance au delà de la simple domination naturelle qu'ils comprenaient assez spontanément. Mais à ce jeu, Artemis leur faisait rapidement mettre le nez à terre. Ils n'y jouaient pas très longtemps, en général.

Il était flatteur, trop flatteur pour être complètement honnête dans sa flatterie du point de vue de la déesse. Mais en voyant que la séduction ne fonctionnait pas, il passait à autre chose avec une facilité déconcertante et une attitude qui lui sembla plus sincère. Elle eut un hochement discret de la tête quand il mentionna ses réflexes. En tant que Déesse de la Chasse, il aurait été insultant pour elle de perdre ses réflexes, même si elle n'avait pas de pouvoirs en débarquant dans cet endroit. Il y avait des exigences que l'on se devait d'avoir quand on était née pour vivre sur l'Olympe.

« Je ne saurais avoir un niveau inférieur à celui que j'exige de mes employées. »

Elle n'était pas du genre à accepter l'invitation à boire d'un inconnu qu'elle venait d'empêcher de se vautrer par terre, en soi, mais les circonstances étaient particulières. Elle avait accepté de se prêter au jeu du Secret Santa et au fond, ce n'était pas une si mauvaise chose. Ca lui permettrait sans-doute de faire de nouvelles connaissances. Rien que pour la pérennité de son entreprise, Artemis participait à quasiment tous les évènements de la ville. Elle avait besoin de rencontrer des clients potentiels et de faire en sorte de trouver des alliés. Elle avait déjà un réseau bien fourni, mais ce n'était pas encore assez à son goût.

« Pourquoi pas ? J'imagine que c'est tout l'intérêt de se genre d'évènements. Faire de nouvelles connaissances. »

La déesse n'avait rien contre Noël. Le vieux barbu que les humains vénéraient à cette occasion n'avait rien de commun avec son père Zeus, mais en soi, elle adhérait au concept, et elle en avait même fait profiter son entreprise à l'occasion. Il le fallait bien si on voulait être une cheffe d'entreprise moderne. Comme il pouvait être compliqué d'être moderne pour une déesse de l'Antiquité, mais elle avait fait son chemin. En revanche, elle ne se sentait pas le cœur en joie comme la plupart des humains face à cette fête. La famille et les célébrations avec tous ses membres n'étaient pas spécialement symbole de paix sur l'Olympe.

« Le concept ne me dérange pas en soi, je dirais surtout qu'il m'indiffère. Cela dit, en ce qui concerne ma famille... eh bien disons que nous évitons de tous nous retrouver ensemble en dehors des prises de décisions officielle. Cela pourrait dégenrer. »

L'homme avait parfaitement compris de quoi Artemis voulait parler. Lorsque les dieux s'affrontaient, les conséquences sur le monde pouvaient être terribles. S’ils étaient tous arrivés ici en même temps et munis de leur pouvoir, il convenait de s'interroger sur le sort que la ville aurait connue durant les premiers mois. Artemis n'était même pas certaine qu'elle se serait développée. Le fait était que les dieux n'avaient pas été réunis. Ceux qui étaient arrivés avaient été posés à différents endroits, privés de leur pouvoir et inoffensifs, ce qui n'était pas plus mal.

Artemis n'avait jamais vraiment apprécié les querelles familiales. Elle préférait largement courir le monde avec ses chasseresses que passer quelques jours sur le Mont Olympe avec sa famille. Les querelles de pouvoir n'étaient pas pour elles et elle avait des causes autrement plus dignes à défendre et à revendiquer. C'était pour cette raison que même s'il y avait eu des repas en famille de programmés, il n'était pas certain qu'elle s'y serait rendue. En tout cas, elle n'y aurait pas fait long feu et elle se serait vite esquivée, surtout dans le cas ou le ton commencerait à monter.

« C'est tout à fait ça. Vous avez parfaitement résumé la situation. »

Elle devait reconnaître qu'elle avait davantage investi dans ces festivités par souci publicitaire envers son entreprise et pour être bien vue de la municipalité. En revanche, elle n'était pas particulièrement avide de sortir de sa zone de confort ou de passer un long moment à discuter avec un membre de la gent masculine. Elle avait appris au fil du temps qu'il y en avait des individus plus fréquentables que d'autres, mais cela n'avait pas changé complètement son point de vue à leur égard et son opinion selon laquelle les femmes pouvaient se montrer bien plus fortes que beaucoup d'hommes mais elle devait bien admettre aussi qu'elle avait sciemment choisi une bonne partie de ses employées pour que ce soit de très fortes femmes. Un certain nombre en avait le potentiel naturellement, même si ce n'était pas le cas de ses employées au départ. Ces recrutements récents ne nécessiteraient pas un entraînement aussi long que celui des premières employées.

« Je ne sais pas trop si j'avais réellement le désir de sortir de ma zone de confort. Mais il est bien vu de participer à ce genre d'événements et puis, je crois que je ne suis pas trop mal tombée, en ce qui concerne de la personne que l'on m'a attribuée », le complimenta-t-elle avec un sourire.

Les compliments les plus discrets étaient probablement ceux qui passaient le mieux. Mais il était rare pour Artemis de complimenter qui que ce soit, homme ou femme d'ailleurs, et l'on pouvait alors se dire que c'était des plus sincère. Puisque le mystère était levé et qu'elle lui avait indiqué les raisons de son choix de participer ce jour-là, Elle se dit qu'elle pouvait être raisonnablement curieuse en lui posant également la question de ses motivations. Elle espérait qui n'était pas dans l'objectif de se trouver une petite amie où il risquait d'être vraiment déçu.

« Et vous-même, qu'est-ce qui vous a poussé à vous inscrire ? »

Ils poussèrent la porte du café et lorsqu'ils furent tous deux installés face à face, il lui posa alors la question de savoir si, à défaut de la famille, elle n'aurait pas pu fêter un événement comme celui-là avec des amis proches. Artemis pouvait compter sur les doigts d'une seule main le nombre de personnes qu'elle considérait comme des amis proches. Il y avait beaucoup de gens pour qui elle avait de l'affection et peut être que c'était un semblant de famille avec qui elle aurait pu participer à des événements de ce genre. Elle en organisait d'ailleurs pour les agentes mais c'était un peu plus comme un devoir entrepreneurial que comme une fête de famille. Elle pensa tout de même à une personne, un ami avec qui elle aurait pu aimer partager des moments de complicité et de joie.

« Il y a peut être une personne, oui, ou deux. Mais je dois avouer qu'il est assez rare que je passe beaucoup de temps avec d'autres personnes, en dehors de mon temps de travail. C'est sans-doute un peu triste mais je dirais que ça vient naturellement quand on est d'origine divine. C’est sans-doute pour ça que j'ai toujours voulu parcourir le monde avec mes chasseresses plutôt que de demeurer dans l'Olympe. Auprès d'elles, j'avais sans-doute une famille avec qui je pouvais célébrer les grands moments de la vie. »

Elle ne s'était jamais penchée sur la conception de sa vie d'avant et sur ce qui en ressortait culturellement parlant, et elle en avait encore moins fait la confidence à un humain. Mais il semblait qu'avec celui-ci, cela n'ait aucune conséquence à ses yeux. Ils passaient un peu de temps ensemble parce qu'un événement leur avait dit de le faire et il était à l'écoute. Elle avait peut-être plus besoin de communiquer sur ce qu'elle éprouvait que ce qu'elle croyait. Les dieux se croyaient toujours plus forts et plus puissants que la moyenne, mais ce n'était peut-être plutôt aussi vrai ici.

« Et dans quel genre de situation trouvez-vous des instants de plaisir, cher monsieur ? »

La Déesse de la Chasse et du pouvoir féminin ne se laissait pas facilement inviter par un homme mais la situation était un peu particulière. Il lui semblait évident que cet homme n'était pas en train de la séduire et que les échanges qu'ils avaient se limitaient à un simple rendez-vous de Secret Santa. Qu'il veuille de lui offrir un verre en compensation de l'aide qu'elle lui avait apportée ne prêtait pas à confusion et elle était prête à faire un effort, comme elle le faisait depuis leur début de conversation. Cela dit, ça restait dans un effort mesuré puisque l'homme se montrait raisonnable et agréable.

« En ce cas, je vous remercie. Je ne suis pas tout à fait sûre que cela soit quelque chose que j'affectionne personnellement. Mais il est clair que c'est dans notre sang que de vouloir que les choses se fassent à la manière que l'on a décidé, sans se soucier aucunement, ou si peu, du tort que cela fait aux autres. Mais si les dieux ne pensent pas les uns aux autres et que tous ont la même attitude, cela implique forcément des bagarres entre dieux. Même moi, je m'y suis retrouvée confrontée. L'étrangeté et que nous parvenons à nous unir lorsque certains aspects d'une situation l’exigent. Conflictuels, mais toujours moins entre nous que face à un ennemi commun », acheva-t-elle en haussant les épaules.

Il était possible qu’il ne corresponde pas réellement au genre de personne que la déesse aimait fréquenter, mais il avait le mérite d'être respectueux et de faire ce qu'il fallait pour qu'elle ne se sente pas incommodée ou insultée. Sur ce chapitre, elle s'estimait donc chanceuse, connaissant le nombre de cas d'individus qui auraient pu se montrer graveleux et mettre sa patience en péril. Il aurait alors été difficile de leur accorder l'attention qui était demandée dans ce genre d'événement. Mieux valait un homme moins vertueux mais respectueux qu'un homme sans crime dont l'orgueil le faisait se croire irrésistible.

« Vous êtes poli et vous n'avez pas encore balancé de commentaires graveleux sur une quelconque partie de mon corps, c'est déjà plus que ce que je peux avoir avec un certain nombre de petits écervelés que je n'ai que le désir de baffer brutalement. »

C'était un sujet facile que de lui demander pour quelle raison il s'était inscrit à ce Secret Santa. Et la réponse ne demandait rien de spécial puisqu'il s'agissait vraiment de quelque chose qui avait été fait, de toute évidence, comme tout et n'importe quoi, mais sans réellement de désir profond. La curiosité. C’était une façon de faire les choses comme une autre et elle avait l'impression que c'était un leitmotiv assez puissant chez cet homme. Elle sourit quand il mentionna que ça n'avait pas de prix de tomber sur quelqu'un comme Artemis.

« Flatter une déesse… on peut dire que vous avez le sens de la survie. Certains hommes ont eu le regret de constater que tomber sur moi pouvait coûter la vie. Mais je serai bienveillante. Je vous épargnerai aujourd'hui », acheva-t-elle avec un sourire malicieux.

Mais un homme qui cherchait à faire les choses simplement pour profiter des bons moments sans forcément se soucier de prolonger cela à plusieurs rencontres pouvait avoir cet avantage de ne pas être obligé de rechercher la romance. Elle n'avait jamais envisagé que les relations puissent être de simples moments d'échange comme celui qu'il vivait en ce moment avec une réflexion philosophique sur le sens de la vie. Peut-être que ce serait de cette façon qu’elle pourrait trouver un peu plus de paix dans ces échanges. En tout cas, c'était le genre de moment qu'elle pouvait avoir avec son père dorénavant. Voilà une chose que ce monde lui avait donné.

« Vous semblez prendre la vie avec philosophie. Peut-être pourriez-vous vous caser, comme vous le dites si bien, avec une personne qui aimerait vadrouiller autant que vous. L'avantage de vivre dans un monde avec de multiples origines, c'est qu'il y a ici de multiples personnalités. Cela dit, il est clair qu'une telle personnalité ne compte pas parmi mes adeptes et encore. Après tout, lorsque je choisissais mes Chasseresses, notre but était de parcourir le monde. Il paraît donc logique de choisir des personnes qui aiment vadrouiller comme vous dites. »

Elle réfléchit un instant alors qu'il lui demandait ce que cette discussion lui inspirait comme moment. Elle songea à certains moments forts de sa vie, par exemple, quand son père lui était venu en aide et qu'ils avaient parlé ensuite mais elle n'avait pas l'intention de parler de ça à un complet inconnu. Il fallait un exemple moins fort qui ne la mettent pas en péril personnellement. Elle choisit donc autre chose qu'une conversation, quelque chose qui lui correspondait et qui amenait souvent une grande quantité de quiétude dans sa vie.

« Je dirais que lorsque j'ai besoin d'éprouver ce genre de choses, je cherche le refuge de la forêt. Il n'est guère d'endroit où l'on se sente plus paisible et en harmonie que dans un tel endroit. C'est en tout cas mon cas. »

Même s’il affirmait que sa politesse n'était pas due à sa bonne éducation, cela ne fit que hausser les épaules à la déesse. Peu importait pour quelle raison il avait décidé de ne pas lui sauter dessus en prétendant que sa jolie frimousse était une invitation pour des commentaires plus graveleux, le fait qu'il s'en tienne à ce respect élémentaire lui donner des points. Elle n'avait pas la moindre idée de si c'était son habitude de vie ou s'il se contentait de faire un effort parce qu'elle était une déesse et que cela pouvait coûter cher, mais le fait était qu'il le faisait et ça lui suffisait.

Elle sourit lorsqu'il mentionna que les bases pouvaient ne pas suffire face à ce genre d'individus et son sourire prit une tournure un peu moins bienveillante. Artemis n'était pas la plus sanguinaire des déesses mais en ce qui concernait le respect du consentement, il s'agissait d'un des éléments principaux qu'elle représentait en tant que déesse et elle était inflexible sur la question. Personne ne voulait avoir un statut d’harceleur aux yeux de Artemis, personne sachant de quoi elle était capable. Le courroux de la déesse pouvait être incommensurable.

« Je ne me contentais pas toujours de ça, là d'où je viens. Mais ici, on ne peut plus se permettre de castrer les indélicats ou de les changer en cerfs et de lâcher ses chiens sur eux. Il paraît que c'est mal vu » dit-elle avec un petit sourire narquois.

Elle se demanda ce qui faisait qu'une rencontre avec cet homme pouvait coûter la vie, mais elle ne savait pas s'il était bienvenu de poser ce genre de questions. Cela pouvait causer de la fierté comme être quelque peu indélicat et elle ne savait pas dans quelle catégorie ils se rangeaient. Il était évident que ce n'était pas un enfant de chœur, mais cela n'entrait pas tellement en considération dans le sens où la déesse avait rencontré un certain nombre de personnes que l'on ne voudrait pas croiser dans une ruelle sombre et qui pourtant gagné à être connu.

« Qu'est-ce que vous faisiez dans ce monde ? »

Elle semblait l'avoir bien cernée et elle hocha la tête quand il confirma que sa philosophie de vie ressemblait bien à ce qu'elle avait mis en avant. Elle le comprenait. Elle n'aurait jamais aimé se poser alors même que toute sa famille restait fichée dans le Mont Olympe et ne voyageait que fort peu. Cela dit, c'était l'image qu'elle en avait mais ce n'était peut-être pas l'entière réalité. Évidemment, il avait touché un point juste. C'était quelque chose qui lui manquait beaucoup, mais il n'y avait pas vraiment de monde à parcourir ici. Pour ce qu'elle en savait, on en faisait bien trop rapidement le tour. Même ses fidèles chasseresses ne parviendraient sûrement pas à en trouver davantage.

« Je ne saurais dire ce qui me manque vraiment le plus. Je crois que ce n'est pas tant de parcourir le monde que la compagnie de mes fidèles chasseresses. Il n'y a rien de pire que de ressentir le lourd poids de la solitude, lorsque vous avez passé votre vie à arpenter le monde avec ceux que vous considériez comme une famille. »

Elle avait toujours passé beaucoup de temps à arpenter les bois et c'était probablement pour ça que c'était dans cet endroit qu'elle se sentait le mieux. Mais elle ne pouvait y être tout le temps, son entreprise nécessitait ses interventions et il était parfois même nécessaire qu’elle se tienne aux côtés de ses agentes pour des missions spécifiques. Il n'y avait rien de facile à tenir une entreprise quelle qu'elle soit, mais elle ne s'en sortait pas trop mal. Toutefois, elle devait se rendre disponible pour ce qu'il y avait à faire. Il la sortit de ses pensées en lui demandant s'il y avait d'autres éléments de sa vie qui lui plaisait. Elle le regarda alors d'un air pensif.

« J'aime la chasse et les arts martiaux. J'aime le camping et toutes ces choses qui me rappelle ce que je faisais de plus agréable dans mon monde. Et vous-même, avez-vous quelques hobbies ? »

Artemis avait toujours trouvé les hommes veules et intéressés par une seule chose qu’elle et les siennes ne voulaient plus donner. C’était donc dans ce domaine précis que la plupart des combats se faisaient en ce qui la concernait avec des individus qui voulaient convaincre une femme qui ne le voulait pas de se montrer plus complaisante. Cela, la déesse ne pouvait le tolérer. En conséquence, les châtiments qu'elle se proposait d'appliquer étaient à la mesure de la faute. Il ne fallait pas mentir, c'était une lourde faute que de ne pas respecter le consentement aux yeux de cette déesse précise.

D'ordinaire, les hommes se montraient mal à l'aise lorsqu'elle évoquait ce genre de choses. Il ne fallait pas avoir beaucoup d'expérience pour constater à quel point les hommes pouvaient se trouver dérangés quand on essayait de toucher à cette partie de leur anatomie. Mais son interlocuteur ne sembla pas concerné par ce malaise. Au contraire, il semblait plutôt amusé et cela lui fit dire qu'il ne craignait nullement de se retrouver dans cette situation. Puisqu'il savait qui elle était et ce qu'elle était capable de faire, c'était donc qu’il avait la conscience tranquille et c'était plutôt heureux pour lui.

« Je serai ravie d'échanger avec vous sur nos techniques de torture préférées, mais je ne suis pas sûre que ce soit de bon ton à cette époque de l'année » , lança-t-elle avec facétie.

Elle ne savait pas bien si cet homme était un chasseur de primes, un homme de main ou un tueur professionnel. Mais il avait trempé dans le monde de la criminalité et il était évident qu'une personne dépositaire de la justice devrait l'avoir à l'œil. Pour Artemis, qui limitait cet aspect de la vie à ne pas accorder protection à un être trop dangereux, les aveux de cet homme n’avaient pas vocation à la lui aliéner, à moins qu'il n'en vienne à toucher à quelqu'un à qui elle tenait vraiment et elle ne voyait pas pourquoi il ferait ça.

« Qui est cette personne ? Pourquoi a-t-elle à ce point changé votre vie ? »

L'avantage de vivre dans un monde un peu plus moderne, c'était que Artemis comprenait un peu mieux la notion de combat que cela pouvait évoquer. La lutte dans ce genre de milieu pouvait apporter presque autant de danger qu'une quête pour trouver un trésor ou affronter une menace. La guerre était présente dans un certain sens et Artemis avait la certitude que cet homme avait combattu autant qu'elle et les femmes qui lui étaient chères. Elle ne pouvait même pas établir que ça puisse être plus facile ou plus compliquée. Tout était toujours tellement compliqué quand il s'agissait d'affronter le danger.

« Chez nous aussi, cela pouvait s'apparenter à des combats pour sa survie. Les héros et les chasseresses sont la proie des monstres et les luttes intestines pour le pouvoir sont encore plus grandes depuis que les croyances des humains évoluent et ne nous donnent plus autant d'impact dans leur vie. Mais avec mes filles, j'avais un groupe, une unité de personnes en qui je pouvais avoir réellement confiance et qui pourrait avoir confiance en moi. Se battre ensemble, c'était acquérir la certitude que nous ne serions jamais seules, et pourtant me voilà et je le suis. »

Maudite lune rouge qui avait ainsi fait les choses qu'elle les avait séparées et Artemis n'avait encore pas su démontrer qu'une seule de ces élues avait pu trouver le chemin vers cette ville. Il était probable que ce n'était pas le cas. Elle sourit en l'entendant dire que la nature n'était pas son truc. Elle avait découvert la notion de citadin dans cette ville où il y avait énormément de personnes qui étaient totalement incapables de parcourir une forêt, ou de manger à même le sol. C’était presque triste que la ville ait pris autant d'impact dans la vie des humains. En tout cas, elle n'avait jamais essayé les courses de voitures clandestines et ce n'était pas quelque chose qui la tentait vraiment.

« La seule course que je tenterais, c'est la course à pied très cher. Il n'y a rien de plus agréable que de sentir ses muscles bougés au rythme de la nature. Mais je puis comprendre que ce ne soit pas pour vous. »

En revanche, la musique, cela la fait sourire. Elle n'avait pas un attrait démesuré pour la musique elle-même, mais elle ne pouvait faire autrement que de penser à son cher frère. Il aimait suffisamment la musique pour se vanter d'avoir inspiré un grand nombre de ses chansons rock et rap dont parlait cet homme. Artemis n'était pas totalement sûre que l'on puisse croire son frère sur l'ensemble de ce qu'il se vantait d'avoir fait. Après tout, il n'arrêtait pas de prétendre que c'était lui qui était né le premier. Le fait que son vœu ait justement pour initiation la naissance de son frère ne changeait rien au discours du Dieu de la Musique et de la Médecine.

« Vous plairiez à mon frère. Cela dit, il n'est pas difficile de plaire à mon frère. Mais la musique est son domaine de prédilection. Il se chamaillent souvent avec Euterpe en prétendant avoir inspiré autant de musiciens qu'elle, voire plus. Enfin, ça c'était avant. »

Elle secoua la tête car elle ne voyait pas quoi rajouter en ce qui concernait son occupation dans la forêt. Elle se promenait, elle y chassait un peu, elle y rencontrait des animaux. Il n'y avait rien de précis à en dire. Elle avait fait le tour de ce qui la représentait.

Okay, il avait gagné un point, Artemis éclata de rire. Il n'était pas facile de faire rire la déesse, qui tenait généralement à garder son image de femme forte et intouchable auprès de tout le monde. Elle se laissait un peu aller avec son père, mais c'était particulier puisqu'il était un dieu aussi. En revanche, pour le reste du monde, il demeurait que peu de personnes savaient comment la toucher et lui faire manifester des émotions. Et c'était volontaire. Elle se contrôlait au-delà de la norme pour être certaine que personne ne pourrait jouer avec ses émotions. Mais il était parvenu à la faire rire avec la simplicité d'une évidence énoncée qu’était celle consistant à plaisanter sur le chapitre des tortures.

« Lorsqu'on a eu des millénaires pour expérimenter dans ce domaine, on est devenu créatif, en général. Transformer quelqu'un en biche pour le faire poursuivre par ses chiens, c'est assez symptomatique d’une déesse associée à la chasse, mais un autre dieu aura une autre créativité. Je suppose que la vôtre est plus terre-à-terre. »

Quand il lui parla de sa bien-aimée, Artemis comprit, mais pas forcément de la manière dont il le pensait. Elle se rendait compte que le genre de relation aussi intense que celle-là correspondait à peu près à celle qu'elle ressentait avec Apollon. Rien de romantique entre eux, il était la véritable famille de Artemis, loin devant tous les autres dieux. Néanmoins, il avait changé sa vie d'une manière unique qui lui faisait penser que personne ne pouvait remplacer son frère dans sa vie. Pour autant, elle avait construit des choses, mais il lui manquait toujours cette part d'elle-même qu'elle avait l'impression d'avoir perdu.

« Je comprends ce que vous voulez dire. C'est une sensation terrible. »

Finalement, sa bande et celle de cet homme, cela pouvait correspondre dans un certain sens. Après tout, ils se battaient tous pour leur survie, et pour des choses qui les dépassaient. Il y avait toujours des facteurs qu'on ne connaissait pas. Chez les chasseresses, il y avait les monstres à combattre, un peu plus fort que les autres. Mais il y avait aussi cette notion de survie car le seul moment où elles pouvaient mourir, c'était au combat. Ce n'était pas le cas de Artemis, évidemment, mais ça ne voulait pas dire qu'elle était heureuse que celles qu'elle avait choisies meurent à cause de leurs épopées.

« A vous aussi, votre bande manque. Quelques fois, je me dis que je pourrais la recréer ici, mais je n'ai encore trouvé personne qui corresponde à ma vision de celles qui doivent partager mon quotidien. Finalement, c'est probablement avec mes gardes du corps que je retrouve le plus cette sensation. »

Et c'était la raison pour laquelle elle tenait à conserver ce côté fermé avec exclusivement des filles. Elle ne pouvait pas leur demander le même serment qu'elle exigeait de ses chasseresses et ces femmes ne recevaient pas sa bénédiction divine, mais elles étaient ce qui se rapprochait le plus de ce clan qu'elle avait construit autrefois. c'était un moyen de se reconstruire une famille à l'identique de celle qu'elle avait par le passé, ou sinon à l'identique, de la manière la plus proche possible. Elle se demandait s'il en avait fait de même. Il lui dirait peut-être tout simplement lui-même.

Si cela n'avait pas fait un moment qu’elle était dans ce monde et si elle n'y était pas arrivée comme simple humaine, elle n'aurait pas su exactement de quoi il parlait. Elle aurait pu le deviner dans une certaine mesure, connaissant un peu les humains et la façon dont ils étaient faits. Mais elle n'aurait pas pu l'expérimenter parce que ça ne faisait pas partie de ce dont une déesse était capable. Mais il y avait eu Artemis Security et les entraînements réguliers et elle comprenait. Pour autant, elle pouvait aussi très bien comprendre que ce ne soit pas son truc et elle n'imposerait jamais à personne de faire quelque chose qu'il n'avait pas envie de faire. Plus maintenant. Enfin, cela pouvait se discuter, mais il était clair que les dieux avaient appris qu'ils n'étaient pas tout-puissants en ce monde-ci.

« Je l'ai expérimenté depuis que je suis ici, en effet. Je ne sais pas cependant à quel point cela peut rendre accro, comme vous dites. »

Elle se perdit un instant dans ses pensées alors que celles-ci se tournaient vers son frère. Apollon lui était toujours apparu comme étant une moitié d'elle-même. Elle ne pouvait être complètement entière sans qu'il ne soit à ses côtés. Et actuellement, elle n'avait aucun moyen de savoir ce qui en était à ce sujet. C'était terriblement douloureux, et elle s’efforça de masquer cette douleur en ayant l'impression de ne pas vraiment y arriver lorsqu'il lui demanda si Apollon se trouvait dans les parages. Elle arrivait facilement à masquer sa douleur, d'ordinaire, mais pas cette fois.

« Je l'ignore. Je sais qu'il arrive que les gens soient là et qu'on ne les ait pas encore retrouvés. Aussi, je me refuse à croire que c'est impossible. Mais j'avoue que mon espoir est forcément mesuré, dans la mesure où je n'ai aucune trace de sa présence actuellement. »

Le silence de la douleur s'installa. Elle était incapable de s'investir profondément dans une conversation qui impliquait d'être loin de son frère chéri. Elle ne savait pas comment ramener les choses à un ensemble plus simple à envisager pour elle. Et elle ne sortit de ses pensées que lorsqu'il lui proposa un autre café et des croissants, ce qui lui valut un sourire pour avoir ramené ces pensées dans quelque chose de plus concret, avec une question pertinente à laquelle elle pouvait répondre, et qui pouvait la détourner un peu de la douleur qu'elle ressentait. Juste pour un temps, mais juste ce qu'il fallait.

« Je vous remercie. Ce sera avec plaisir. »

Au début, quand il affirma qu'elle n'était pas la seule à avoir perdu des gens, Artemis pensa qu'il ne se sentait pas compris et elle se demanda même si elle ne devrait pas s'en vouloir un peu d'avoir centré l'attention sur ses propres histoires jusqu'à ce qu'elle comprenne qu'il ne s'agissait pas d'un reproche mais plutôt d'une forme d'empathie, parce qu'il ressentait avoir vécu quelque chose de similaire impliquant une compréhension mutuelle. Elle n'était pas certaine que cette compréhension mutuelle soit réelle, mais il semblait y croire et cela lui suffisait. Elle n'avait pas besoin de plus que ça pour le considérer.

Elle l'écouta lui parler de la personne qui était si cher à son cœur et qu'il avait perdue. Ce n'était qu'une histoire humaine banale comme il y en avait beaucoup et la plupart des dieux ne se seraient pas formalisés d'une telle chose, mais elle savait que c'était beaucoup plus que cela et elle faisait partie de ceux qui comprenaient l'attachement que l'on peut avoir à un être humain. Peu de dieux de l’Olympe avaient ce véritable et profond attachement à un être humain parce qu'ils se pensaient supérieurs. Artemis ne différait pas sur ce point précis, sauf que se sentir supérieure ne l'empêchait pas d'avoir une certaine affection.

« Une lumière dans un monde de noirceur. Un petit éclat dans une vie qui en manque. Je comprends tout à fait ce que cela peut représenter. »

Il n'avait pas tort, sauf que les dieux ne pouvaient pas être des fantômes. Les dieux ne pouvaient être que cela et quand ils n'étaient plus, elle ne savait pas ce qu'ils devenaient. Mais elle était persuadée que Apollon n'avait pas complètement disparu. Il était peut-être simplement resté dans le monde d'où elle venait. Elle savait que c'était le cas de certains des dieux tandis que d'autres avaient été envoyés ici aussi et elle ne savait pas encore faire le tri. Il lui semblait que ce monde était fait pour ne pas pouvoir faire le tri. Mais même s'il ne s'agissait pas d'un fantôme, il avait raison sur le lien particulier et la force de ce lien. Cet homme avait de l'intuition.

« Je suis à peu près sûre qu'il n'est pas un fantôme, parce que c'est un dieu et que les dieux ne peuvent pas l'être. Il a peut-être tout simplement été oublié chez nous et je ne le reverrai peut-être jamais. J'ignore si cette situation est préférable à la mort de l'être aimé. Je serais bien incapable de le dire. »

Mais elle pouvait au moins répondre à la question de la nature de cette personne et de ce qui faisait partie de lui. Les valeurs d'Apollon, tous ceux qui maîtrisaient un peu la mythologie savaient très bien de quoi on parlait. Mais elle avait la conviction qu'un certain nombre de personnes ne savaient pas du tout qui il y avait derrière le dieu de l'Olympe. Elle sourit lorsqu'une pensée se fit dans son esprit que ce n'était peut-être pas plus mal. Il y avait un côté de Apollon que la plupart des gens trouvaient agaçants. Et cela expliquait sans doute pour quelle raison c'était lui que leur père avait le plus souvent envoyer sur Terre, changé en humain.

« Il s'agit de mon frère, Apollon. Nous sommes jumeaux, nous avons toujours eu ce lien si particulier qui nous unissait. Nous ne passions pas tant de temps que cela ensemble, mais cela ne change pas que ne pas pouvoir le voir du tout quand j'en ai envie, c'est à la fois inhabituel et pénible. »

Il désirait passer à autre chose et se proposer de faire quelque chose qui n'avait rien à voir avec les vieux démons et les fantômes perdus. Elle ne pouvait pas dire que ça ne l'intéressait pas mais elle ne savait pas exactement ce qu'elle était censée faire. En termes de loisirs, Artemis avait une vie bizarre elle n'avait pas l'habitude de s'adonner à des jeux ou à des activités en dehors de son travail. C'était un peu étrange mais plus ça avançait, puis elle se disait qu'elle devrait trouver quelque chose qui lui plaise en dehors de Artemis Security.

« Je dois vous avouer que je n'ai pas la moindre idée de ce que l'on est censé faire pour se distraire. J'ai passé énormément de temps à me plonger dans le travail et on ne peut pas dire que j'ai énormément de loisirs. Pas que ça me soit impossible, mais je n'en ai jamais ressenti le besoin. »

Même si les émotions humaines étaient quelque chose d'assez nouveau pour Artemis, elle ne pensait pas que c’en était au point d’aimer et détester simultanément Apollon. Elle ne le détestait jamais. Il l’insupportait parfois, mais il était fait comme il était fait et chaque dieu avec une spécialité dans le monde. Son frère n'y pouvait rien si la sienne était d'être particulièrement séducteur. Elle n'était même pas sûre qu'il soit physiquement capable de se retenir avec ses chasseresses, même si aucune n'aurait jamais accordé au dieu le moindre espoir.

« Non, je n'en suis jamais à le détester. C'est le genre de frère qu'il vaut mieux surveiller parce qu'il est l'art de se mettre dans les embêtements. Avec des personnes mal intentionnées. Avec notre père. Il a plusieurs fois subi son courroux en se retrouvant changé en humain et en devant offrir ses services à un demi-dieu pour se racheter d'une quelconque faute. Je ne dis pas que Zeus n'a jamais exagéré. Mais il cherche quand-même. »

Elle ne se serait jamais comparée à un humain qui se perd dans son travail, mais c'est uniquement parce que pour elle, ce n'était pas qu'elle refuse de se distraire mais elle n'en ressentait pas le besoin comme la plupart des autres. Artemis avait toujours été une femme d'action et de devoir, bien avant les loisirs frivoles tels que les concevaient les autres dieux. Elle n'avait jamais connu cette sensation d'amusement aussi clairement que les autres, même si les vagabondages avec les chasseresses lui procuraient énormément de plaisir.

« Je ne dirais pas que je me concentre sur mon travail à la manière d'un humain. non, c'est assez différent je pense. Le plaisir des activités futiles semble être une constante chez l'humain, même celui qui y renonce volontairement pour d'autres priorités, mais c'est un plaisir qui m'est inconnu en tant que déesse. Ce n'est toutefois pas propre à ma condition puisque d'autres dieux s'abandonnent beaucoup plus que moi au plaisir. Cela fait peut-être tout simplement partie de la manière dont mon père m'a conçue. »

Cependant, sa façon d'insister pour l'emmener participer à des activités d'ordre récréatif l'intriguait et cette façon de le faire comme un défi était carrément le genre de choses qui pouvaient la pousser à le suivre, rien que pour voir ce qu'il allait lui proposer. Ce n'était pas comme si elle pouvait être en danger. Il ne pouvait pas lui faire prendre de risques. À partir de là, puisque ça ne risquait rien, ça ne lui coûtait rien non plus d'essayer. Elle se demandait dans quel genre d'activité il allait l'entraîner, mais ce serait sûrement des plus intéressants et cela lui permettrait sûrement de mieux comprendre les humains ensuite.

« Je ne suis pas contre découvrir ce genre de choses, dans l'absolu mais à une condition, enfin deux. La première, c'est que ce soit toi qui choisisse l'activité. La seconde, c'est que tu évites tout ce qui aura attrait à la sexualité humaine. C'est bien quelque chose que je trouve dégradant. Je n'approuve pas ce genre de distractions. »

Puisqu'il avait déjà quelque chose en tête, elle supposait raisonnablement qu'il ne verrait aucun problème à ces deux conditions. Sauf évidemment si la décadence du lieu ne correspondait pas à ses attentes. Mais elle serait inflexible sur la question. Il n'était pas question qu’elle dérive de ses valeurs profondes, même si le fait de s'amuser n'entrait pas en ligne de compte. Elle acceptait un peu de distraction dans une certaine mesure. D'ailleurs, elle considérait que sa condition n'était pas si terrible à accepter. On pouvait très certainement éviter ce genre de choses tout en s'amusant comme des humains pouvaient le faire. Ça ne la dérangeait d'ailleurs pas de s'amuser de cette manière.

« Si vous acceptez, alors, je vous suis. »