Ya des jours comme ça [PV Chance d'Estaing]

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

En courant comme un dératé à en trébucher toutes les cinq secondes, le Docteur ne pouvait s’empêcher de se demander comment il en était arrivé là. Tout cela avait commencé par une balade bien ordinaire dans la forêt en plus. Enfin, y avait-il quoi que ce soit d’ordinaire dans la vie du Docteur ? C’était une question qu’on était en droit de se poser. Il n’était même pas venu en TARDIS. Il ne pouvait donc pas l’accuser pour l’avoir mis dans le pétrin. A croire qu’il était doué pour s’y mettre tout seul. Bon, ok, il était doué pour le faire, il n’y avait rien à dire là-dessus.

Mais quand-même. Un ours. Il était en train d’analyser une plante, juste parce qu’elle lui avait paru particulièrement jolie et intéressante. Le bruit du tournevis sonique avait attiré la bestiole et voilà maintenant qu’il devait s’en aller le plus vite possible pour être sûr de ne pas se faire déchiqueter. Pris de panique, il agrippa les branches basses d’un arbre et se hissa de branche en branche jusqu’au sommet. L’ours grognait en bas en balançant la patte dans le vide. Au moins, il ne pouvait pas l’atteindre, et puisque le tournevis ne tournait plus, il allait peut-être le laisser tranquille.

« Va te promener ailleurs, je suis pas intéressé ! »

Ce fut alors qu’il aperçut au loin une jeune fille. Il ne l’aurait pas reconnue à priori, mais elle avait de petites cornes, des cheveux roux et elle se tenait à-côté de ce jeune homme qu’il avait sauvé avec le TARDIS. Il ne se rappelait pas son nom, il y avait tellement de choses à se rappeler autre que les noms de ses étudiants, mais elle était dans sa classe. En soi, il n’aurait pas forcément harangué quelqu’un de sa classe de base, mais l’ours semblait curieux de cette nouvelle présence, et le Docteur ne laisserait pas quelqu’un se faire manger sans réagir.

« Mademoiselle ? Elève ! Heu… Miss ! Attention à l’ours !”

C’était probablement la tentative de prévention la plus minable de l’histoire de l’humanité mais le grognement de la bête allait sûrement lui donner un indice sur la conduite à tenir.

**Invité**

Noël approche et ca se voit ! La maison d'Estaing est prête pour la fête. La façade et mes clôtures extérieures sont revêtus de guirlandes lumineuses. Des décorations emplissent chaque espace d'étagère laissé libre : Santons, crèche, boules à neige, mini traineaux en bois, faux poteau avec écrit dessus "pôle nord" et autres bibelots kitchs et criards annoncent tout de suite la couleur : "Ici on prépare la fête !"

Les petits d'Estaing, excités comme des gnomes à la veille du grand jour, chahutent et anticipent déjà l'ouverture des cadeaux. En attendant le grand jour où ils ouvriront les emballages et arracheront à pleines mains les papier cadeau, ils comparent leur liste de cadeauxet s'affrontent déjà pour déterminer lequel aura les plus beaux. Le sapin, trône majestueusement au centre du salon, déborde de décorations scintillantes, parmi lesquelles se cachent de petites figurines de rennes. A côté se tient la grande table, suffisamment grande pour accueillir toute la tribu. Quand viendra le réveillon, toute la famille d'Estaing sera là, attablée autour de la traditionnelle dinde farcie et d'une bûche délicieuse.

Dans la frénésie des préparatifs de Noël, la maison des d'Estaing est un véritable tourbillon d'activités. Les sept petits frères de Chance se chamaillent bruyamment créant une cacophonie incessante qui tape franchement sur les nerfs. Cette maison est un bordel sans nom.

Chance, malgré ses tentatives de concentration, se trouve rapidement débordée par l'agitation. Elle avait prévu de confectionner ses célèbres petits biscuits de Noël: ses lutines coquines en pain d'épice dont elle avait fait sa spécialité. Une bagarre éclate au milieu de la cuisine, une clémentine lancée par un des casse-pieds rebondit sur le haut de son crâne. Le temps qu'elle aille latter le petit merdeux responsable de cette attaque, c'est le drame. Les biscuits sont brûlés. Les catins de Noël viennent de se prendre un blackwashing digne des plus vieilles productions cinématographiques. Le goût sera atroce.

- Mais bordel de putain de merde, il faut que je vous latte tous pour que vous vous calmiez ?!!

Même pas la peine de compter sur les parents pour calmer le jeu. Les d'Estaing sont les gens les plus doux et compréhensifs qui puissent exister. Ils incarnent le degré zéro de l'autorité ce qui, pour une fois, ne fait vraiment pas les affaires se Chance ! Il est plus que temps que Chance aille prendre l'air ! Elle va finir par en étrangler un si elle reste plus longtemps dans cette maison de fous.

- Papa, maman, je me casse ! Bon courage avec les gnomes et avec les biscuits dégueux.

Indifférents à la colère de leur ainée, deux voix débordantes de jovialité et d'affection lui répondent.

- Bonne promenade mon poussin.
- Ne rentres pas trop tard !

Elle enfile son manteau, ses bottes et ses moufles, puis sort dans la froideur hivernale.

La forêt voisine offre un refuge paisible, mais même là, l'agitation persiste dans l'esprit de Chance. Elle décide de canaliser sa frustration en construisant des bonhommes de neige. L'effigie des frères fautifs prend forme sous ses mains agiles. Alors qu'elle commence à caillasser les faux-frangins avec ce qui lui tombe sous la main, un appel se fait soudain entendre.

Intriguée, elle s'arrête, un gros caillou en main, prêt à être lancé.

- Monsieur Eleven ... ?

Mais étrangement, ce n'est pas apercevoir son professeur de physique juché dans un arbre qui la choque le plus sur l'instant. C'est plutôt le PUTAIN DE GROS OURS qui est en train de courir vers elle qui la fait bondir ! Vive comme l'éclair quand il s'agit de fuir, elle prend appui sur la tête du plus grand bonhomme de neige et grimpe dans l'arbre à toute vitesse, laissant derrière elle l'ours affamé et déconcerté au pied du frère enneigé.

Parvenant tant bien que mal à s'agripper à une branche pas franchement prévue pour recevoir une démonette acrobate, elle s'agite et crie en direction du professeur perché (au sens littéral cette fois).

- Mais qu'est-ce que c'est que c'bordel m'ssieur Eleven ?!?

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

La bonne nouvelle, c'était que l'élève avait réussi à voir le danger. La mauvaise, c'est qu'elle ne semblait pas plus de taille que le Docteur face à un ours sauvage. Il n'eut pas le temps de répondre à sa première question, étant donné qu'elle n'était pas vraiment en état d'écouter la réponse, trop occupée qu'elle était à l’imiter en voulant fuir dans un arbre pour échapper à la créature. Frustré pour la seconde fois, celui-ci entama la réduction de l'arbre à l'état de brindille en grattant le tronc. Fort heureusement, il était puissant mais pas assez pour déraciner le refuge des deux fuyards. Ils étaient coincés jusqu'à ce que l'animal décide qu'il avait envie de changer d'air.

« Vous pouvez m'appeler Docteur », se contenta t-il de répondre à la question pourtant claire de la jeune fille. « C'est quoi votre nom déjà ? »

Non seulement il était incapable de retenir le nom de l'un de ses étudiants s'il n'avait pas vécu quelque chose de particulier récemment avec eux, mais en plus, quand il les croisait en dehors des cours, c'était pour les entraîner dans d'invraisemblables mésaventures. Il ne devait définitivement pas être le professeur préféré de l'université. Alors qu’il s’inquiétait au sujet du comportement du gros mammifère, il entendit un craquement et s'inquiéta quelque peu. Il ne s aperçut qu’au dernier moment de ce qui était en train de se passer.

« Attention ! » cria-t-il à l'adresse de la jeune fille.

Mais ce fut trop tard. La branche sur laquelle il se trouvait craqua complètement. Elle s'effondra sur la branche où se trouvait la jeune fille et en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, le duo malchanceux se retrouva les fesses par terre, tout à fait à disposition du gros ours qui n'avait pas encore renoncé à l'idée de les pourchasser. Le Docteur attrapa la main de son élève et l’entraîna dans une course folle à travers le bois. Ils se griffèrent le visage dans les fourrés et durent se baisser pour passer en dessous de petits obstacles, mais il était évident que l'ours ne pourrait pas les suivre à travers ce chemin là. Les grondements se firent plus sourds et quand on ne les entendit plus et qu'ils arrivèrent dans un endroit un peu moins sauvage, le Docteur lâcha sa compagne du moment et se redressa pour reprendre son souffle.

« Je crois qu'on l'a semé » présuma-t-il. « Il n'y a plus de dang… »

Sa supposition fut interrompu par une plaque de boue particulièrement glissante sous ses pieds. Il disparut instantanément du champ de vision de son élève, pendant que son arrière-train trempait dans la boue et que lui était surpris par une chute qu'il n'avait pas prévu. Il regarda un instant droit devant lui, hébété, avant de se relever précautionneusement. Il était probablement temps de commencer à faire attention à ce qu'il faisait, mais ce n'était pas vraiment dans le naturel du Docteur. Il y avait donc tout lieu de s’inquiéter de la suite, d’autant qu’il n’avait pas pensé à s’orienter en fuyant l’ours.

**Invité**

En deux temps, trois mouvements, Chance se retrouve perchée dans une position très similaire à celle de son professeur de Physique. Malgré le fait d'être à moitié pendue tête en bas avec un prédateur redoutable situé à quelques mètres sous sa tête et de commencer à retirer sa doudoune et son pull (?), Chance réagit aux paroles lancées par l'adulte.

- J'y crois pas, vous vous souvenez pas de moi ! Chance d'Estaing. Je suis votre meilleure élève !

C'est un mensonge mais perché comme le professeur est, aucune chance pour qu'il s'en rappelle.

- Vous êtes sûr que vous préferez "Docteur" ? J'ai cru comprendre que dans une université "Professeur" c'était genre plus fort.

Mais le moment est mal choisi pour ergoter sur des questions de sémantique. Le perchoir du doc/prof s'effondre sur celui de Chance qui avait (on ne sait pas trop pourquoi) terminé d'oter ses deux hauts les plus volumineux.
Juste à temps pour qu'un claquement retentisse et que deux belles ailes de chauve-souris émergent de son dos et lui permettent de planer jusqu'au pied de l'arbre, presque sans dommage. Une fois encore et en dépit de toute logique, la promptitude de Chance à se dévêtir à la première difficulté et sans le moindre instant d'hésitation aura été salvatrice ...

Mais la chute n'est pas le danger le plus immédiat ni le plus menacant. Ses précieux vêtements dans les bras, elle crie.

- HEY ATTENDEZ MOI VOUS ALLEZ OU ???

Sitôt posée, la voilà qui suit le mouvement amorcé par le Docteur, courant comme une dératée. Ses ailes frissonnantes de froid commencent déjà à prendre une belle teinte bleutée.

- Sa mère la nitouche, on se le pèle de ouf !

On a pas idée de promener en débardeur et en brassière dans la forêt en plein hiver me direz vous. Chance l'ignore, mais ses origines la prédisposent bien davantage à la fournaise infernale qu'au froid glacial.

Pas vraiment pro de la course, elle a plusieurs mètres de retard sur le prof en tête de peloton. Un manque de célérité qui s'avère salvateur puisqu'il lui laisse le temps de brutalement écarter les ailes et de piler net juste avant de se vautrer à son tour dans la flaque gelée.

- Ah merde. Pas de bol.

Elle se retourne et regarde derrière eux, plus inquiète à l'idée de voir le prédateur poindre à l'orée du regard que de voir son prof chuter dans une flaque de merdasse gelée.

Mais après plusieurs secondes d'un silence inquiet ... rien ... La démonette pousse un soupir de soulagement. Elle replie ses ailes et se remet à enfiler les couches de vêtement chauds dont l'absence la fait grelotter.

- Un ours dans les bois de la Ville. On aura tout vu ...

Elle aurait mille fois préféré tomber sur un loup garou à choisir. Il parait qu'ils sont pas si mauvais bougres qu'on veut bien le dire. Rhabillée, elle se retourne vers le professeur et demande.

- Vous avez besoin d'un coups de main ?

Probablement pas. Il n'est pas vraiment en danger et elle ne s'est pas pressée pour lui proposer de l'aide, il a sans doutes eu le temps de se remettre d'aplomb de lui même.

- On ferait mieux de retourner vers les habitations je crois !

Elle regarde à gauche. Puis à droite. C'est forcément dans une de ces deux directions. Ou dans l'autre ? Allez savoir !

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

Le Docteur n'avait pas la moindre idée de la force de son nom dans une université. Mais dans l'univers, le Docteur avait une sacrée réputation. Dans tous les cas, autant l'appeler par son nom véritable plutôt que par un statut. Après tout, c'était le statut qu'il s'était choisi quand il était devenu officiellement un Seigneur du Temps. C'était pour cette raison qu'il avait choisi de se faire appeler comme ça tout comme le Maître avait choisi de se faire appeler Maître. D'ailleurs, il aimait un peu trop cette dénomination au goût du Docteur, mais ce n'était pas le propos du moment.

« Je ne sais pas du tout si mon nom est le plus fort dans cette université, mais c'est mon nom. Je ne vois pas ce qui pourrait faire que j'en change. Enfin bref, appelez-moi comme vous voudrez, mais ne vous laissez pas manger par un ours, s'il vous plaît. »

Le Docteur n'avait même pas eu le temps de remarquer que son élève se retrouvait à moitié nue et avec des ailes dans le dos, puisqu'il avait préféré courir comme un dératé en lui intimant de le suivre. Résultat des courses, il avait des fesses frigorifiées et elle, c'était plutôt le haut qui commençait à bleuir. Il la regarda avec stupeur en constatant la présence des ailes, mais il supposa que ce ne serait pas poli de lui demander d'où elle venait. Il se releva en se massant un peu le postérieur douloureux et en entendant la demoiselle faire un commentaire au sujet de l'ours. Elle semblait étonnée qu'il puisse être dans la forêt de la ville.

« Il y a bien un dragon, alors pourquoi pas un ours ? Pas vous », se reprit-il soudain en se rendant compte de sa maladresse. « Je parle d'un véritable dragon que j'ai rencontré il y a quelques temps. Et si vous le croisez, je vous déconseille de lui lancer de la poussière dans les yeux, ça ne va pas marcher. »

Quand il posa à nouveau son regard sur elle, il était debout sur ses jambes et elle était rhabillée. La priorité allait maintenant être de se sortir de là, parce que cet endroit ne semblait clairement pas fait pour y traîner trop longtemps, surtout avec des ours et des dragons dans le coin. Au moins, le Docteur avait pu vérifier quelques temps auparavant qu'il n'y avait pas de Vashta Nerada. Cela dit, certaines bêtes sauvages pouvaient vous dévorer tout autant que ces créatures qui avaient peuplé la Bibliothèque des Ombres.

« Vous avez probablement raison. Avez-vous la moindre idée de l'endroit où cela se trouve ? »

**Invité**

- Un Dragon ... !? Ah ben putain.

La prochaine fois qu'elle voudra aller prendre l'air, Chance ira plutôt au centre commercial dépenser de l'argent et regarder les gens se faire mal au skatepark. Une activité tordante. Surtout pour eux, leurs membres finissent parfois par se tordre dans des angles bizarres.

- J'espère que c'est le dragon de Shrek. Au moins ca vous laissera une chance de vous "sacrifier" pour la bonne cause.

Il y a peu de chance pour que le docteur saisisse la référence. Elle ne lui soufflera pas que dans l'histoire, le sacrifié est un âne (jusque là ca fait un point commun) et qu'il finit par foutre en cloque le dragon. Inutile de vous faire un dessin (des gens sur internet l'ont déjà fait bien avant moi de toutes façons). C'est un final plus sympathique et davantage dans le style de Chance que de voir tout le monde se faire dévorer.

Chance avait fini de se rhabiller. Elle se frictionne vigoureusement les bras et sautille sur place pour essayer de se réchauffer. Elle a eu froid mais ce n'est pas la plus à plaindre. Au moins elle a pas le cul gelé.

Visiblement le docteur ne sait pas dans quelle direction aller. Leur petite course leur a fait (très provisoirement) perdre le sens de l'orientation.

- Haha, vous inquietez pas !

Triomphante, Chance sort de sa poche son téléphone portable.

- Le peuple humain a inventé le GPS, professeur ! ... heu ... docteur !

En deux temps, trois mouvements, elle déverrouille l'objet et se met à énoncer distinctement dans l'appareil.

- Ok gougoule, fais nous rentrer chez moi !

Elle se tourne vers le prof et sourit de toutes ses dents, le temps que l'application tourne et se connecte à tout ce qu'il faut de gépéhesse et tout.

- Je vous inviterai bien à prendre un chocolat chaud pour vous réchauffer mais si vous voulez éviter les dragons, je vais peut être pas vous présenter à ma mère.

Son sourire s'élargit alors que sur son écran, le résultat de la recherche s'affiche.

- Je déconne, elle est pas si terrible.

C'est même tout l'inverse. Il y a pas plus aimant et doux avec leurs enfants que les d'Estaing. Certains les qualifieraient même de laxistes.

- Vous êtes le bienvenue. On doit pouvoir trouver un bas de survêt à vous prêter. Ce sera l'occasion de dire à ma maman à quel point je suis une élève sérieuse, ca lui fera plaisir. Pas vrai ... ?

Une question en apparence anodine mais ... a t'on vraiment envie, quand on est perdu en pleine forêt le postérieur gelé, de refuser quelque chose de si anodin à la personne qui détient votre clef de sortie ... ? C'est pas comme si Chance faisait exprès de ne pas montrer l'écran pour garder la direction de sortie pour elle en plus, non non !

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

Le Docteur n'avait pas la moindre idée de ce que ce dragon de Shrek avait de particulier. Mais s'il était sympathique à son élève, alors il était sans doute plus intéressant que la moyenne des dragons. En l'occurrence, il ne savait absolument pas où se trouvait présentement celle qui était en fait une femelle et qui avait l'honneur d'avoir rencontré le grand Albus Dumbledore, en même temps que le Docteur lui-même, mais il ne pensait pas qu'elle soit dans le coin. Quoi qu'il n’en savait rien en fin de compte. Il avait un peu perdu le sens de l'orientation, si tant est qu’il ne l’ait jamais eu dans cette forêt depuis que c'était le TARDIS qui le faisait voyager.

« Je ne suis pas certain qu'il y ait un dragon qui m'amuse plus que les autres », répliqua-t-il. « Tout ce que je peux vous dire, c'est que c'est une demoiselle, et que cette demoiselle dort tranquillement dans une grotte du coin. Mais je ne saurais même pas vous dire où exactement. »

En quatre ans dans cette ville, il avait pensé à acquérir pas mal de choses. Mais il n'avait même pas pensé à un GPS portatif. C’était pourtant l'évidence même quand on avait besoin de s'orienter dans un endroit inconnu. Et autant ce n'était pas forcément quelque chose d'utile à avoir sur un TARDIS qui voyageait à travers le temps et l'espace, autant quand on était coincé dans une petite ville, ça pouvait avoir son utilité. Bien-sûr, ce n'était pas forcément sa faute s'il n'y avait pas pensé. Il n'avait pas les mêmes réflexes que les êtres humains ici.

En tout cas, il n'avait pas de GPS et il dépendait donc de son élève pour ce qui était de rentrer chez lui. Il pourrait évidemment se laisser raccompagner aux abords de la ville et lui fausser compagnie. Il n'avait jamais eu beaucoup de chance avec les mères. Mais ce ne serait guère poli. En plus, c’était quelque chose de plutôt naturel qu'un professeur qui rencontre les parents de ses élèves. En général, c'était plutôt au lycée mais après tout, cela ne lui semblait pas complètement dénué de sens pour quelqu'un qui allait à la fac.

« Bien entendu… une excellente élève… excellente… », marmonna le Docteur qui aurait été bien incapable de dire honnêtement ce qu'il pensait du niveau de Chance ou de n'importe laquelle de ses autres étudiants, d'ailleurs. « Eh bien, je vous suis dans ce cas. »

**Invité**

Sans surprise, le Docteur passe complètement à côté de la plaisanterie. Le contraire aurait été embétant pour Chance ! Que son interlocuteur précise par le plus grand des hasards qu'il s'agisse d'une demoiselle amuse chance encore plus encore. Elle se retient à grand peine de lancer quelque chose de recherché et spirituel tel que "Vous devriez tenter votre chance alors" voire un "Hahaaaa ?" sur un ton entendu et grivois. Mais non, elle se retient ! Elle sait parfois être sage et raisonnable, vous voyez.

Le prof accepte son invitation de venir se réchauffer dans le foyer d'Estaing. Pauvre homme, s'il savait à quoi il vient de s'engager ...

Armée de son GPS et ravie que le prof ait décidé de raconter à ses parents qu'elle est bonne élève, Chance ne tarde pas à trouver un chemin en direction des sous bois puis des abords du quartier résidentiel. Il leur faut marcher plusieurs dizaines de minutes mais rapidement, la zone devient plus sûre et surtout, mieux connue de Chance qui reconnaît le trou dans le grillage par lequel elle et ses frères passent depuis des années pour visiter les bois. Il ne faut pas marcher beaucoup davantage pour arriver devant la maison de la famille d'Estaing où déjà de l'extérieur, on devine une activité débordante. Des cris, du chahut et des bruits de choc se font entendre à l'intérieur du pavillon résidentiel dont l'extérieur à entièrement été recouvert de guirlandes et de décorations. Le jardin enneigé est le lieu de rendez vous de nains de jardins dont certains d'un goût très douteux sont typiquement l'oeuvre de Chance. (TW Nains de mauvais goûts : Je vous déconseille vraiment de cliquer ici, ici ou ici pour voir à quoi ils ressemblent. Vous êtes prévenus).

Un joyeux carillon de Noël retentit alors que Chance ouvre le portail et s'engage sur le petit chemin qui mène jusqu'à une porte d'entrée proprette. Prête à entrer dans la maison comme chez elle (sans surprise), Chance pose la main sur la poignée de la porte et s'arrête pour livrer une ultime consigne à l'adulte sur le point de connaître l'expérience de la horde sauvage d'Estaing.

- Ah oui ... Ne dites pas qu'on s'est fait attaquer par un Ours, on aurait des problèmes !

La mère d'Estaing est pas un archétype de mère surprotectrice avec ses enfants, mais il y a des limites. Peu de parents apprendraient avec sang froid que leur progéniture a manqué de se faire croquer par un ours au détour du bois derrière la maison.

Un sourire et Chance pousse la porte, s'époumonant aussitôt pour se faire entendre au milieu du chaos qu'est le salon.

- MAMAN, PAPA JE SUIS RENTREE. J'AI UN INVITE !

Immédiatement, l'attention de la horde se tourne vers le nouveau venu alors que deux parents surpris cessent leurs occupations pour venir voir qui est le drôle d'oiseau que leur fille a ramené cette fois.

- C'est mon prof de Physique. On s'est croisés par hasard, il a glissé dans une flaque. Alors je lui ai dit de venir se réchauffer ici.

Si on peut reprocher quelque chose aux parents d'Estaing, ce n'est pas de manquer d'hospitalité. Car sitôt les présentations faites, les deux adultes semblent positivement ravis par la visite impromptue, ils acceuillent l'inconnu avec chaleur et spontanéité.

- Bonjour !
- Bienvenu !
- Dites bonjour les enfants.
- Vous prendrez du chocolat chaud ? Du thé plutôt ?
- Oh oui vous êtes mouillé. Hum hum, vous allez prendre froid. Il faut pas rester comme ça.
- Il y avait des biscuits mais Chance les a brûlés
- Maman ! C'est de la faute à la bande de merdeux !
- Langage !
- Entrez, ne restez donc pas là !

De gré ou de force, voilà le pauvre Docteur entrainé dans une embuscade bien plus redoutable et dangereuse qu'une flaque ou qu'un ours mal léché. Le piège se referme sur lui alors que la horde sauvage de frères de Chance avait arrêté ses jeux et se mettait maintenant à faire des commentaires inspirés tels que "T'as vu, il a le cul trempé" ou "J'ai cru que c'était son boyfriend" ou encore "T'avais remarqué que Chance était sortie, toi ?"

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

Demander au Docteur de ne pas mettre les pieds dans le plat, c'était un peu comme demandé à Chance d'être douce et raffinée. Mais en cet instant précis, au moment de franchir la porte, il se promit de faire un effort pour ne pas oublier de ne pas mentionner les événements un peu perturbants qui s'étaient produits dans la forêt. Il était difficile à dire s’il s'en souviendrait d'ici quelques minutes mais de toute façon, la demoiselle ne lui laissa aucune chance de le savoir car elle poussa la porte et s’annonça aussitôt en compagnie du Docteur. Et le sort en était jeté.

Le Docteur fut aussitôt entraîné dans la folie d'un accueil bienveillant, mais pleins d'une énergie dont la plupart des gens n'avaient pas l'habitude. Pour le Docteur, c'était un peu différent. Il avait tendance à partir au quart de tour plus vite que n'importe qui. Ce genre de choses n'était donc pas pour lui faire peur. Il jeta un coup d'œil aux enfants. Il n'avait rien contre les enfants et il s'était même occupé de plusieurs, mais en si grand nombre, ils avaient quelque chose d'un peu intimidant. Cela dit, ils restèrent à bonne distance et le Docteur ne s'estima pas en danger pour l'instant.

« Je suis ravi de vous rencontrer. Je suis le Docteur. Je suis désolé de me présenter avec un pantalon mouillé. J'en avais des secs dans le TARDIS mais je ne savais plus où il était. Il faudra quand même que je le retrouve, mais je finirai bien par y arriver. Oh merci ! » dit-il en réceptionnant une boisson chaude dont il ne songea même pas à demander si c'était du thé ou du chocolat et dans laquelle il plongea immédiatement les lèvres.

Il avait oublié quelque chose. À cet instant, il en était absolument sûr. Mais il ne savait absolument pas ce que c'était. Cela avait un rapport avec son élève, avec un ours et avec les études qu'elle faisait dans sa classe. Mais il était incapable de remettre les choses en place et de savoir ce qu'il fallait dire ou ne pas dire. Il essaya donc de remettre ses pensées en ordre, sans que le résultat ne soit très probant, ce qui donna un discours assez perturbant qui paraissait pourtant logique à celui qui le formulait. Mais c'était à peu près toujours le cas quand il s'agissait du Docteur.

« Comme l'a dit votre fille, j'enseigne la physique et elle est dans ma classe. À vrai dire, la forêt peut être un endroit idéal pour étudier la physique de manière réaliste. Il faut juste faire attention a l'endroit où on va, et surtout au dragon. »

Il but à nouveau dans la tasse et décida que c'était du chocolat. Mais ça lui allait bien. Il avait, sans le savoir, respecté la consigne de Chance de ne pas parler de l'ours, mais mentionner un dragon n'était pas forcément une meilleure alternative. Mais au moins, il n'avait pas prétendu que lui et la jeune fille avait rencontré la petite concernée. D'ailleurs, ce n'était pas le cas de Chance et il n'y avait aucune raison pour qu'il raconte des histoires à ce sujet. En revanche, on ne pouvait pas vraiment dire qu'il avait fait preuve de la prudence élémentaire en présence de parents.

« Il ne faut jamais utiliser de poussière pour essayer d'aveugler un dragon, ça ne marchera pas, vous savez », leur révéla-t-il sans se rendre compte qu'ils allaient sûrement se demander s'il était prof de physique ou de sciences naturelles.

**Invité**

Les parents d'Estaing réservent ainsi un accueil chaleureux à l'excentrique professeur. L'un place une tasse d'un thé noir à la cannelle entre ses mains alors que l'autre invite d'un geste insistant l'homme de sciences à s'installer devant une table qui ne tardera pas à se couvrir de pots de sucre, de miel, de lait, de petites assiettes couvertes de biscuits, de pain d'épice et autres confiseries. Dont les biscuits brûlés au 28e degré que Chance avait sortis du four quelques heures plus tôt et qui ont de bonnes chances d'être immangeables. Mais il faut rien gâcher, vous comprenez, ma bonne dame ? Ce ne serait pas très éthique. C'est du moins ce que déclarent les parents parce que la horde de garçons se fera une joie d'oblitérer les biscuits à coups de pétards ou à déclencher une bagarre de projectiles ninja quand plus tard les biscuits seront glissés dans leurs boîtes à goûters ...

- Ouais, on a eu une galère. Je me demandais si ...
- ... nous allons vous prêter un pantalon ! Chéri vas donc chercher ...
- ... tout de suite !
- ... j'ai même pas eu le temps de finir ma ph...
- ... Docteur ? Je pensais que vous étiez professeur de physique.
- Ils emploient des doctorants dans les universités ! Pour donner les cours ! Les enseignants chercheurs, tu connais ?
- Oh vraiment ?

La mère de famille parait en toute sincérité impressionnée alors que de son côté le père de famille avait pris la direction des escaliers.

Ce n'est sans doutes pas tous les jours que les d'Estaing reçoivent un notable d'une telle qualité dans leur très modeste demeure. L'occasion mérite que la maman éloigne l'assiette de gâteaux brûlés et présente à la place celle emplie des cookies les plus frais, imposant presque la présence des pâtisseries sous le nez du professeur.

- Prenez donc un biscuit !

Et puis quelques secondes plus tard, comme si son cerveau avait pris un peu trop de temps à analyser la situation, elle répète, les yeux ronds de surprise.

- Un dragon ... ?
- Un Dagon !

Dit Chance précipitamment en faisant les gros yeux au Docteur et des gestes désespérés dans le dos de sa mère. Un geste qu'elle arrête immédiatement quand cette dernière se retourne, la regardant avec surprise.

- Un Dagon ?
- Tu ne connais pas ? C'est une nouvelle particule physique, propre à notre île. Tu as déjà entendu parler des protons, gluons, électrons, gluons ? Ben maintenant il y a les dagons.

Elle part en roue libre, improvisant avec un certain talent une explication totalement foireuse mais que la maman semble gober. La mère de famille semble même ravie.

- Comme nous sommes fiers que tu fasses des études ! Regardes comme tu es intelligente ma chérie ...

Elle retourne un regard de connivence vers l'invité et lui dit sur un ton de connivence.

- Vous devriez dire à Chance à quel point poursuivre de longues études est important !
- Maman sérieux ...
- Elle ne rêve que d'une chose : arrêter les études pour faire on ne sait quoi avec son camion. Vendre des sandwichs, vous pensez que c'est une carrière ... ?
- Colonel Sanders est milliardaire ...

Un argument qui ne semble pas porter beaucoup aux yeux de Maman d'Estaing qui regarde sa fille avec un sourire indulgent et se hâte d'ajouter avec tout l'amour et la mièvrerie que sont capables de déverser des parents trop aimants.

- Même si on est très fiers de ce que tu fais mon poussin. Tu es incroyablement débrouillarde, on dirait ton père.

Paternel dont on entend d'ailleurs l'appel du haut de l'escalier.

- Chérie, où est mon bas de survêtement gris ?
- A sécher en bas !
- Les débiles ont fait une bataille d'eau avec.
- Langage !
- Merde, ils sont un QI à la température de la pièce et ...
- Langage !

Avec un soupir, Chance lâche l'affaire et lance au professeur un regard désespéré alors qu'on entends déjà les pas du paternel qui descendent les escaliers avec l'intention de se diriger dans la buanderie.

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

Il fallait reconnaître que le couple ne manquait pas de générosité. Le Docteur ne s'était pas attendu à ce que le père de son élève se précipite tout de suite pour aller lui chercher un vêtement sec. C'était faire preuve d'un accueil au-delà de toute mesure. Le Docteur en était sacrément reconnaissant parce qu'il fallait bien avouer que son arrière-train n'était pas très agréable avec cette sensation humide constante. Mais ce n'était pas pour cette raison qu'il avait l'intention de réfléchir avant de parler avant d'agir, pas plus qu'il ne l'avait fait jusqu'à présent. Il ne se rendait pas compte à quel point sa mauvaise journée risquait de devenir celle de Chance.

« Oh merci c'est gentil. Je vous le rapporterai. »

Chance avait vraiment été sympa de la ramener chez elle et pour la remercier, le Docteur n'était même pas capable de comprendre qu'il y avait des choses à ne pas dire, mentant systématiquement pour certaines choses et jamais pour d'autres. Il croyait avec une véritable et profonde sincérité que son élève était dans l'erreur. Il ne trouvait pas ça spécialement étonnant, puisque c'était lui le professeur et elle l'élève. Il était donc évident qu'il comprenait les choses mieux qu'elle. Il ne se rendait pas compte à quel point il était dans l'erreur. Et pourtant, elle avait essayé de le lui faire comprendre, nul ne pourrait dire le contraire.

« Non, non, vous vous trompez, Miss. Il s'agit bien d'un dragon. Mais vous n'avez aucune chance de le voir », précisa-t-il à l'adresse des parents inquiets dont il était persuadé qu'il serait ravi de rencontrer un dragon. « Il vit à l'autre bout de la forêt. »

Basiquement, le Docteur ne pouvait pas nier que les études étaient importantes dans la vie mais il n'y avait pas que ça et il était bien placé pour le savoir puisqu'il avait passé des siècles à voyager et à entraîner des personnes comme Chance dans ses voyages en les sortant de leur travail ou de leur étude. Il ne pouvait donc revendiquer clairement que les études étaient plus importantes que tout le reste. Mais il pouvait dire quelque chose qui avait du sens pour la petite, même si cela allait sûrement être un peu surprenant à entendre pour ses parents.

« Bien-sûr, il y a plein de raisons pour lesquelles il vaut mieux être étudiante. Par exemple, il y a pas mal de boutiques ou de restaurants qui font des prix pour les étudiants. Les locations sont moins chères aussi. Et si vous avez un truc comme vous dites , le campus vous offre des clients. »

**Invité**

Chance aurait du s'en douter. Elle commence à pratiquer le professeur depuis un moment et elle voit bien qu'il ne se rend même pas compte qu'il est en train de la jeter sous le bus. Maman d'Estaing écoute bouche bée les rectifications apportées par leur invité. Elle reste plusieurs secondes ainsi, interdite. Quelque chose semble s'être grippé dans son processus mental et puis soudain, elle s'exclame en direction de la buanderie dans laquelle son mari venait de disparaître.

- Tu as entendu, nounours ? Un dragon ! Je te l'avais dit que le quartier était de moins en moins sûr !

Un vague grognement lui répond depuis la petite pièce dans laquelle une fouille méthodique semble avoir commencé. Et voilà comment le monde finit par retrouver son équilibre au sein de la famille d'Estaing. Il suffit de prendre à témoin son mari et de s'offusquer sur un fait de société plus ou moins signifiant pour que tout rentre dans l'ordre. Généralement ces discours là se terminent en "c'était différent de notre temps" et "on se demande bien ce que fait le gouvernement avec tout l'argent qu'ils nous prennent".

Poursuivant donc sur cette lancée, Maman d'Estaing énumère.

- D'abord les pigeons parce que cette bique de madame Piment les nourrit ... et maintenant des dragons. C'est un monde. A ce rythme là on aura bientôt des rou... MAMAN !, intervient soudain Chance Monsieur le professeur n'a plus de thé !

- Oh oui ! Où ai-je la tête. Vous reprendrez un peu de thé, Docteur ?

La question est doucereuse, accompagnée évidement d'un geste aimable qui vient lui présenter poliment la théière.

- Et reprenez donc un biscuit.

Et cette fois ce n'est plus une question. Maigre comme il est, il est évident que personne ne prend suffisamment soin du pauvre homme. Aux yeux de l'honnête et très traditionnelle matrone, un homme marié et heureux dans sa vie se doit d'avoir un petit ventre. C'est ca qui le rend heureux et fidèle. Il faut commencer à s'inquiéter quand il lui prend la lubie d'essayer de perdre cette bedaine.

Entre temps, papa d'Estaing est revenu. Il confie au professeur le pantalon qu'il espère lui prêter. Un peu plus large de base que ce qu'il faudrait pour la carrure du Docteur (vous aurez compris pourquoi) mais doté d'un solide elastique qui fera bien l'affaire.

- Je n'en doute pas !

Avait il répondu quand il avait dit qu'il le rendrait.

- Vous le confierez à Chance.

Les deux sont supposés se croiser au moins une fois par semaine après tout. C'est du moins ce que la jeune femme affirme main sur le coeur quand elle leur assure de toujours aller en cours.

Il reprend place aux côtés de son épouse (quoique subtilement décalé par rapport à elle pour ne pas occuper le devant de la scène) et tous deux écoutent les commentaires que le professeur fait sur l'importance de poursuivre des études. Les deux tombent des nues après le discours qui tombe ... un petit à côté de ce qu'ils espéraient entendre. Ils se regardent un instant avant d'oser d'un ton poli mais ferme apporter des commentaires.

- Mais ... hmm ... vous oubliez de préciser que l'éducation est importante Docteur, non ?
- Qu'il est nécessaire d'avoir des diplômes pour devenir quelqu'un d'important dans cette société et décrocher un emploi.
- Devenir quelqu'un de respectable
- Et instruit.

Il est manifeste que ce qu'a dit le professeur contrarie le couple. Il en faut pour preuve l'assiette de biscuit (toujours entre les mains de maman d'Estaing) qui subtilement s'éloigne de la portée du professeur. Quant à Chance ? Celle ci irradie d'un sourire qui transpire le "je vous l'avais bien dit". Elle ne se risque bien sûr à aucun commentaire direct, préférant de loin laisser l'argument d'autorité faire son oeuvre. En revanche, elle se dit que c'est le meilleur moment possible pour déclarer tout soudain.

- Vous pouvez aller dans la salle de bain si vous voulez pour vous changer, Docteur !

Une offre qu'evidemment aucun des deux parents d'Estaing n'irait désavouer. La salle de bain du rez de chaussée (il le découvrira) est à l'image de ce qu'on peut imaginer en voyant la famille. La décoration y est kitchissime. Moineaux en porcelaine cotoient châtons porte-serviettes. Un diffuseur à huiles essentielles pourrait donner une allure distinguée aux lieux si des affaires de toilettes éparses des 10 membres de la maisonnée n'étaient pas rangées au petit bonheur en dépit de tiroirs soigneusement étiquetés supposées instaurer un peu d'ordre dans ce chaos ambiant. Il faut dire qu'il s'agit officiellement de la "salle de bain des hommes", à la différence de la salle de bain de l'étage réservée supposément aux deux seules femmes de la maison. Une répartition évidemment décidée par maman d'Estaing qui impose aux 8 hommes de la maison de partager cet espace réduit.

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

Le Docteur ne voyait pas bien quel était le problème de la présence de ce dragon dans la forêt puisqu'il n'attaquait pas la ville et il ne se rendait pas compte non plus à quel point cela pouvait être quelque chose de déplaisant pour la famille. Mais il avait tellement l'habitude d'être à côté de la plaque qu’il ne cherchait généralement pas à en savoir plus. Il se contentait de hocher la tête et d'approuver ce que les gens disaient dans la mesure où ce n'était pas quelque chose sur lequel il avait une information ou un avis factuel tranché. Quand il s'agissait d'opinions, le Docteur pouvait en avoir sur tout, ça ne voulait pas dire qu’il la donnait pour autant.

« Oh merci », dit-il en la laissant lui reprocurer du thé et en prenant un biscuit. « Vous n'aimez pas les pigeons ? Il me semble avoir entendu dire quelqu'un que cela se mangeait avec des petits pois. Remarquez, je n'ai jamais eu l'occasion de manger du pigeon avec quoi que ce soit. Le dernier repas que j'ai fait sur terre contenait de la dinde, je crois. Clara m'avait demandé de le faire cuire dans le TARDIS. »

Il avait tourné la tête vers Chance et lui avait annoncé ça comme une chose magnifique, sans se souvenir le moins du monde qu'elle n'avait aucun moyen de savoir qui était Clara. Il ne remarqua absolument pas que la façon qu'il avait de présenter l'éducation et les avantages de l'université à leur fille avait eu pour conséquence l'éloignement de l'assiette de biscuits et il écoutait seulement d'un air distrait les commentaires des parents en ce qui concernait ce qu'ils avaient envie de lui entendre dire. Il haussa les épaules sans plus remarquer non plus le sourire victorieux de son élève dont il ne savait pas qu'il avait joué le jeu qu'elle voulait pour une fois.

« Vous avez sûrement raison. Je ne suis pas assez au fait de la société humaine et de ses règles pour en connaître les exigences au niveau social. Je ne sais même pas ce que peuvent bien fabriquer mes compagnons de route lorsque je les laisse momentanément chez eux. Quant aux leviers pour trouver du travail, je suppose que cela dépend du travail que l'on veut. Bien entendu, il n'est pas besoin d'étudier la science sous toutes ses formes pour devenir promeneur de chien, mais vous ne travaillez pas dans un laboratoire, si vous ne savez pas comment les éléments se combinent entre eux pour obtenir un résultat de fusion ou de fission et si vous ne comprenez pas les échanges énergétiques qui peuvent se produire durant ce genre de phénomène. Quelles sont vos emplois ? » s’informa-t-il sur le ton de la conversation.

Le pantalon qui lui fut apporté avait une taille assez conséquente et il ne ferait aucun doute que le Docteur ressemblerait à un clown dedans, en particulier en tenant compte de la présence de son habituel nœud papillon. Mais cela n'avait aucune espèce d'importance, puisque, de toute façon, il se trouvait toujours cool, quelle que soit la tenue qu'il porte. Ce n'était pas forcément l’avis de tout le monde, mais le Docteur n'avait pas forcément une considération très poussée pour l’avis des autres sur sa tenue. Il entendit seulement son élève lui proposer d'accéder à la salle de bain afin de se changer et il lui adressa un sourire.

« Je vous remercie, Miss. Je ne serai pas long », dit-il avant de se glisser vers la salle de bain des hommes.

**Invité**

Les d'Estaing sont des gens en tous points charmants. Mais ils ont également un petit côté Vieille France qu'ils emporté avec eux dans ce monde et qui ne les a jamais quittés. Les professeurs d'Université sont à leurs yeux des gens supposés être respectables ... mais là ils commencent à être pris d'un léger doute. Ils échangent des regards vaguement inquiets, alors que le professeur s'interroge sur l'amour des pigeons.

- Heum ... disons que ces volatiles mettent un bazar épouvantable, avec leurs fientes et les plumes qu'ils laissent partout ... Ca fait désordre dans le quartier.

Explique maman d'Estaing qui s'efforce de faire bonne figure, bien que ses réflexions soient occupées par des pensées plus grave. Ont ils eu raison de pousser leur fille à faire des études ... ? Ils n'avaient songé qu'au bien de leur fille, à sa position future dans la société. Bien éduquée, bien élevée, intelligente. Ils voulaient qu'elle ait tous les outils en main pour s'assurer un avenir brillant.

Ils n'avaient pas songé un seul instant que les Universités sont des lieux où un certain nombre d'idées avant-gardistes (donc dangereuses) sont brassées par des "penseurs" pas toujours bien intentionnés. N'est-ce pas à la Sorbonne que tout le tintamarre qu'avaient fait les étudiants en 68 a commencé ? Est-ce que l'esprit de leur pauvre petit ange innocent n'est pas en train de se faire malaxer par des individus aux idées peu recommendables ? C'est animés par ces pensées qu'ils écoutent, bouche bée, le professeur donner des recommendations sur l'avenir et les choix professionnels de Chance.

- Eh bien je ... heuh ... oui tout à fait ... je vois ...

Parviens à finalement balbutier papa d'Estaing sans trop y croire alors que son côté, Chance exulte.

- Tu vois, c'est exactement ce que je vous disais !
- Les études sont tout de même importantes ...

S'entête t'il alors que de son côté, son épouse intervient également.

- Mon mari occupe une excellente position dans l'administration de cette Ville ! N'est-ce pas Nounours ?

- Oui bien sûr, je ...

- Une position qu'il a atteinte car justement il a poursuivi des études brillantes.

- Brillantes ... ? Ah heuh oui, effectivement ...

Des études qui, bien sûr, ont peu de choses à voir avec le travail de bureau qu'il mène aujourd'hui, mais n'empêche. Ca reste important sur le principe. Il est heureux d'avoir étudié les courants de pensée géopolitiques dans l'Europe entre les années 60 et 70 et d'en avoir rédigé un mémoire. C'est forcément utile aujourd'hui d'avoir étudié ça, d'une façon ou d'une autre, pendant qu'il trie des dossiers, signe des papiers et assiste à des réunions à tour de bras ...

Est-ce que ca suffira à convaincre le professeur distrait ? Allez savoir. Puisqu'on le lui avait proposé, leur invité finit par s'éloigner pour changer de tenue. De l'endroit où il se retrouve isolé, il ne peut qu'entendre des chuchottements étouffés s'échanger, et parfois Chance répondre, plus fort.

(.... .... ...)

- Bouah non, j'vous le répète d'puis des années ...

(.... .... ...)

- Ouais pour le diplôme ...

(.... .... ...)

- Heu ... non je crois pas qu'il ait de problèmes d'alcool ... il est toujours comme ça ...

Et c'est ainsi que bien des minutes plus tard, le Docteur se retrouve en face d'une maman d'Estaing, au sourire figé en un rictus de fausse amabilité.

- Oh ca vous va à ravir.

Affirme t'elle sans jeter un coup d'oeil au dit pantalon.

- Puisque les choses sont réglées, nous ne voudrions pas vous retarder davantage, n'est-ce pas ... ? Nous avons aussi un réveillon à préparer.

Elle ajoute en tendant l'assiette des œuvres ratées de Chance.

- Prenez donc un biscuit.

Et disparaissez pourrait t'on presque l'entendre penser. Elle poursuit, réalisant l'exploit de continuer à sourire sans desserrer les dents.

- Chance va vous raccompagner, n'est-ce pas mon poussin ... ?

- Ouais m'man ...

Image même de la fille docile, mains dans le dos, elle arbore un franc et clair sourire. On pourrait presque imaginer une auréole de sainte au dessus de ses petites cornes, alors qu'elle s'apprête à devancer le Docteur pour l'aider à trouver le chemin vers l'entrée. L'occasion rêvée pour échanger par la suite quelques mots ! Elle bout d'impatience de le remercier pour le si sage discours tenu devant ses parents. Même si, elle le craint, il soit tellement à l'ouest qu'il ne sera même pas rendu compte de la bizarrerie de ses propos depuis l'évocation du dragon jusqu'aux commentaires sur l'importance des études dans la vie ...

▿ Date de naissance : 13/05/1984

Ya des jours comme ça

La subtilité de la façon dont fonctionnaient les comportements humains n'était pas évidente aux yeux du Docteur qui ne savait toujours pas concrètement qu'il avait déplu aux parents de la rouquine. Il n'avait jamais eu un franc succès avec les parents, ce qui ne l'avait jamais étonné puisque les voyages dans le TARDIS n'avaient jamais été sécurisés et exempts de tout danger. Il avait quand-même eu certains parents dans la poche comme le père de Rory avec qui il s'entendait bien. Mais c'était quelque chose de plutôt exceptionnel. Généralement, les parents n'approuvaient pas la prise de risque que constituaient les voyages dans le TARDIS.

Mais il n'avait jamais fait voyager Chance. Elle était simplement son élève et il n'y avait aucune raison de lui en vouloir sur l'enseignement qui lui prodiguait. Cela dit, il ne se rendait pas compte de l'influence qu'il était censé représenter auprès de ses élèves, pas plus que des conventions qu'il fallait avoir dans le domaine des diplômes et des notes. Il ne s'était pas rendu compte que sa méconnaissance de ce qu'il aurait dû faire en tant qu’humain venait de lui écouter un peu de l'opinion du couple et surtout de la mère envers lui. Il s'était contenté de suivre la suggestion d'aller se changer.

Une fois habillé, il remonta et trouva Chance en grande discussion avec ses parents. Il n'avait pas la moindre idée de la nature de leur discussion et il n'aurait certainement pas soupçonné que cela pouvait avoir un rapport avec sa façon de considérer les études. C'était que pour le Docteur, il n'y avait pas de mauvais métier, dans la mesure où celui qu'on exerçait ne vous empêchait pas de respecter la vie des autres. Le Docteur mentait sur bien des choses mais il ne voyait absolument pas la nécessité de mentir aux parents sur ce qu'il ressentait à-propos de la nécessité des études supérieures. C’eut pourtant été parfois préférable.

« Je peux peut-être me tromper, malgré l'offre de ce biscuit, mais j'ai l'impression que je n'ai pas tout à fait dit ce qu'il fallait. J'en suis désolé. Je ne suis pas toujours… pas souvent très diplomate avec les parents. Quelquefois, je me dis qu'il est mieux que mes élèves soient majeurs. »

Il sourit maladroitement avec un air d'excuse. Il ne voulait surtout pas lui créer de problème avec sa famille mais il devait bien admettre qu'il était peu probable qu'il puisse un jour se montrer efficace dans le domaine de la sociabilisation au quotidien, surtout en ce qui concernait les conventions sociales. Dans ce domaine, cela se voyait qu'il était un étranger à la planète Terre. Le pire, c'était encore qu'il passe énormément de temps à épiloguer sur les comportements humains alors qu'il y avait tant de choses qu'il ne maîtrisait pas à leur sujet.

**Contenu sponsorisé**