(Terminé) Eveillons notre imagination! [PV Henry]

Depuis qu’il n’était plus à l’orphelinat, Henry ressentait les choses différemment. Il était content d’avoir retrouvé sa maman, mais il ne pouvait s’empêcher de penser à tous ses camarades avec qui il avait sympathisé. Il avait beaucoup d’amis dans l’orphelinat, certains du même âge, d’autres plus jeunes ou plus vieux. Tous avaient une histoire et pour une raison qu’il ne connaissait pas, Henry s’imaginait bien des choses au sujet de leurs histoires et de leur passé. Ensuite, il discutait avec eux et il apprenait quelquefois qu’il était proche de la vérité et d’autre fois, qu’il en était beaucoup plus loin. Mais c’était toujours amusant.

Sur la plage, observant l’océan, il songeait à Regina. Comme pour les enfants de l’orphelinat, il se demandait quelle était son histoire et quels étaient ses secrets. Il ne savait pas pourquoi mais il trouvait qu’elle avait la prestance d’une reine. Il savait qu’il y avait des reines dans la ville et il se demandait quel genre de reine elle était. Sûrement très aimée, car elle était sévère d’apparence mais bienveillante et elle faisait tout son possible pour qu’il se sente bien chez elle. Elle pensait à ceux qui étaient dans sa maison. Il était en train de s’inventer une histoire quand une silhouette familière se profila à l’horizon.

« Anne ! »

Il se précipita dans sa direction. Anne, il l’aimait bien. Comme lui, elle aimait les histoires. Ils avaient imaginé des choses sur les autres enfants mais ils s’étaient aussi raconté leurs histoires. Henry ne trouvait pas la sienne très intéressante, une vie d’enfant ordinaire dans la ville moderne de New-York, mais elle avait voulu en savoir plus. Elle, Anne, avait une histoire palpitante à raconter, du moins le trouvait-il. C’était une belle histoire d’une enfant qui se trouvait des parents. Il était d’ailleurs triste qu’elle soit encore à l’orphelinat. C’était un bon orphelinat, mais ce n’était pas la plus jolie des expériences pour elle.

« Tu vas bien ? La mer est inspirante, pas vrai ? A l’instant, je m’imaginais une histoire de reine. »

Henry avait toujours cru que la magie existait quelque part. Ce n'était pas quelque chose de concret, plutôt quelque chose d'obscur dont on ne pouvait pas vraiment définir les règles mais qui existait forcément quelque part. Il adorait y penser et prétendre que tout ça était vrai. Une partie de lui le pensait d'ailleurs réellement sans qu'il comprenne vraiment pourquoi. Il ne se posait pas trop de questions. Après tout, il était un enfant et c'était de son âge. Mais la plage était un endroit qu'il trouvait privilégié pour ce genre de rêverie. Il adorait cet endroit et les histoires que cela lui inspirait.

Retrouver Anne dans ce lieu féerique, c'était simplement retrouver quelqu'un qui était à sa place. Il avait toujours pu partager son imagination avec la fillette. Même si elle était plus âgée que lui, elle était toujours ouverte à se raconter des histoires. C'était pour cette raison qu’il était tellement ravi de la retrouver, il était persuadé que sa promenade serait encore plus agréable s’il pouvait partir dans tous les sens en compagnie de l'adorable jeune fille. Il pouvait être curieux de choisir de se faire des amis plus âgés, mais c'était différent en ce qui concernait Anne.

« Ca va bien. J’ai passé une trop bonne journée hier. Ma mère et moi on a fait une compète de jeux vidéos. »

Il n'y avait pas de jeux vidéo à l’endroit où Anne avait vécu, mais il serait tout à fait prêt à partager cette expérience avec elle. Pour le moment, ce qui intéressait le plus la jeune fille, c'était l'histoire qu'il était en train de se raconter à propos d'une reine. Ce n'était pas la première fois que les deux enfants partageaient leurs rêveries et éveillaient ensemble leur imagination, et c'était quelque chose d'assez commun pour le garçonnet de partager avec elle ce qu'il était en train de s'imaginer. Il n'eut donc aucune hésitation lorsque vint le moment.

« Vois-tu, ma maman a une amie et je trouve qu'elle est belle comme une reine. Elle n'est pas comme une princesse, tu vois, douce et innocente. Elle, c'est une reine, forte et courageuse, prête à se battre pour protéger son peuple. C’est une reine qu'il ne faut pas mettre au défi et il ne faut surtout pas s'en prendre aux gens qu'elle aime. Mais pour les gens de son peuple, elle les protège et elle les aime. Elle veille à ce que personne ne souffre de la faim ou du froid et à ce que tout le monde soit en sécurité. Grâce à elle, la vie est belle dans le royaume. Bon je n'avais pas encore été plus loin que ça, mais on peut imaginer la suite ensemble si tu veux ! »

Ce n’était pas très difficile de laisser aller son imagination pour inventer des histoires sur les gens qui vous entouraient dans cette ville mystérieuse où les gens provenaient d’univers tellement variés. Mais Henry ne savait pas à quel point ses idées se rapprochaient ou pas de la vérité. Tout ce qu’il savait, c’était que les personnalités étaient propices à activer l’imagination et que celle de Henry démarrait au quart de tour. De plus, c’était aussi le cas de celle de Anne. Ce n’était pas pour rien que les deux adolescents s’entendaient aussi bien. Un jour, ils devraient écrire leurs histoires pour les partager.

Henry raconta à Anne ce qu’il s’était imaginé au sujet de Regina Mills, la protégée de sa mère dont celle-ci était amoureuse. Elle sembla adhérer à son histoire, cela fit, ce n’était pas difficile de faire adhérer Anne à une histoire. Il suffisait de se laisser aller à imaginer les choses les plus originales. Même la cohérence avec la personnalité des gens n’était pas complètement capitale aux yeux de Anne qui était capable de voir plus loin que cela. Le réalisme avait plus de raison d’être pour Henry qui désirait que les choses ait un ancrage, pour il ne savait quelle raison.

« C’est comme ça que je la vois en tout cas. »

Elle proposa de poursuivre ensemble cette histoire fascinante et cela fit plaisir à Henry. Il avait vraiment envie de savoir ce que Anne pourrait faire d’une telle histoire et d’une telle reine. Elle était tellement capable d’aller plus loin que lui. Il se demanda ce qu’elle allait lui sortir, mais il avait envie de lui laisser la main pour le moment. Il la reprendrait ensuite, c’était comme ça que l’on confectionnait les meilleures histoires à son avis. De son côté, il ne pouvait s’empêcher de se demander quelle était la véritable histoire de cette femme si mystérieuse qui partageait sa vie et celle de sa maman.

« Raconte-moi ! Tu imagines quoi à-propos de cette reine ? »

Henry aimait beaucoup imaginer des choses en compagnie de Anne, parce que cela lui donnait toujours beaucoup d'idées et celles qu'ils partageaient allaient généralement dans le même sens féerique. Henry ne s'était jamais vraiment posé la question de savoir pourquoi il aimait autant les histoires alors que normalement, ce n'était pas vraiment un truc de garçon, mais le fait était qu'il adorait ça. Il avait une imagination fertile et il adorait en faire profiter ses camarades. Même s'il ne savait pas d'où cela lui venait, il était toujours enchanté de partager ses histoires et tout ce qu'elles contenaient avec des gens qui savaient en profiter.

Anne se prit au jeu. Elle commença à parler d'une menace sur le Royaume que cette reine mystérieuse pourrait combattre. Un dragon lui semblait étonnamment familier comme s'il avait eu en mémoire le combat entre Regina et un éventuel dragon. C’était sûrement son imaginaire qui s’emballait. Elle n’avait jamais fait ce genre de choses. Elle ne devait même pas savoir ce que pouvait bien être un dragon. Mais l’idée de la voir le combattre lui allait bien et il approuva fermement la suggestion de Anne. Après tout, il fallait construire ensemble l’histoire. C’était donc son tour de poursuivre les choses.

« Oh oui, un dragon féroce qui menaçait de manger toute la population, mais elle n'allait pas le laisser faire. Alors elle le combattit bravement et en vint à bout. »

Il ne savait pas pourquoi, mais la charmante rouquine qui aimait tellement inventer des histoires avec lui lui faisait éminemment penser à une princesse. Si elle avait vécu dans un conte de fées, nul doute qu’un prince l'aurait emmenée sur son cheval blanc vers plein d'aventures. C'était comme ça qu'il voyait l'adolescente rouquine avec laquelle il partageait son imagination. De son côté, il ne savait pas trop à quoi il ressemblerait. Il aurait aimé être courageux comme un prince, mais il ne savait pas s'il en aurait la force. Cela dit, en imaginaire, on pouvait être absolument tout ce qu'on voulait.

Il ne fallait pas commencer à entraîner Anne dans une histoire, on ne savait pas jusqu’où cela pourrait aller. Mais c’était bien pour cela que Henry l’avait fait. Elle était typiquement le genre de personne avec qui il appréciait de voler sur les ailes de l’imagination et qu’il l’accompagnait dans ses rêveries. C’était évident qu’ils avaient tout ce qu’il fallait pour construire des aventures ensemble. Pour le moment, le sujet était ce qu’il pouvait imaginer en voyant Regina, mais il y avait tellement de possibles. Henry ne se fermait aucune porte. Après tout, la puissance de l’imagination ne dépendait que de son créateur.

Il voyait très bien la femme brune en tueuse de dragon. Elle semblait prête à dévorer elle-même tout ceux qui la menaceraient. Henry ne savait pas pourquoi mais il aimait bien cette puissance et cette force qui émanaient d’elle. Elle semblait pouvoir tout affronter et réussir, il ne savait pas comment elle faisait mais c’était évident qu’elle était douée pour ça. Anne ne l’avait jamais vue, mais elle semblait avoir bien cerné le personnage, car elle le suivait avec une facilité déconcertante. Elle regarda la mer et Henry en fit de même en l’écoutant révéler la suite de ce qu’elle imaginait.

Il ne la voyait pas enceinte. Il ne savait pas pourquoi. Rien ne lui disait qu’elle ne pouvait pas avoir d’enfant, mais il avait l’impression qu’elle ne pouvait pas être enceinte. Ce n’était qu’une impression et il voulait jouer le jeu. Pas question de repousser la proposition d’Anne, il allait suivre le mouvement. C’était ce qui se produisait quand on créait une histoire à plusieurs, il fallait jouer avec l’imagination des autres, mais ça ne dérangeait pas tellement Henry. Même quand une option le déroutait un peu, il trouvait toujours une bonne raison de continuer. Cette fois, il décida de l’inviter à poursuivre.

« Et comment ce prince a-t-il su conquérir son cœur s’il n’était pas encore capable d’accomplir de grandes choses ? »

Leur histoire était en train de s'emballer et de partir dans tous les sens. Anne venait de lui sortir du chapeau un prince qui n'avait encore rien accompli d'extraordinaire, mais dont elle serait quand même amoureuse. Cela avait surpris le jeune garçon qui n'avait pas bien compris comment le cœur de la reine aurait pu être conquis par un garçon qu'elle ne connaissait pas et qui n'avait rien fait de particulier. Mais Anne était futée. Elle avait aussitôt mentionné que lui et la reine était amis d'enfance et amoureux de longue date sans se l'être avoué. Il était donc logique qu'ils se retrouvent.

« C'est très romantique qu'ils aient pu se retrouver et savourer leur amour pour être enfin heureux. »

Même s'il était un garçon, Henry n'avait rien contre les histoires d'amour. Il savait que ça faisait partie de la vie. Quand on devenait grand, on tombait amoureux et on pouvait alors se marier et construire une famille. Henry ne put s'empêcher de se demander quel genre de mère Sarah serait avant de rougir fortement à cette pensée. Sarah était vraiment la plus mignonne des filles de l'orphelinat et il devait bien admettre qu'il ne lui était pas complètement indifférent. Mais il était un peu tôt pour avoir de telles perspectives, surtout compte-tenu du fait qu'il ne lui avait jamais dit combien il la trouvait jolie.

Anne le sortit de ses pensées en lui donnant la main sur le déroulement de l'histoire et en suggérant d’y ajouter du drama. Il était vrai que tout était un peu trop facile pour cette reine et qu'il fallait affronter des dangers pour qu'une histoire prenne totalement son envol. Le jeune garçon ne tarda pas à trouver une solution pour ajouter un peu de piment dans l'histoire romantique imaginée par Anne. Il y avait toujours du plaisir à faire subir aux héros un peu de difficulté pour pouvoir exprimer leur amour. Sinon, il était difficile de savoir s'ils étaient sincères. Henry allait donc éprouver cet amour.

« Elle était donc enceinte de ce prince, mais il y avait un problème. La mère de la reine était une femme méchante et jalouse qui en voulait au père du prince d'avoir choisi une autre femme qu'elle pour l'épouser. Même si sa fille était enceinte du prince qu'elle aimait, sa mère ne voulait surtout pas qu'elle se marie avec lui et lui avait choisi un autre prince pour agrandir leur royaume et devenir plus puissante que l’homme qui l’avait rejetée. Mais comme la reine ne voulait pas se marier à celui que sa mère avait choisi, la mère l'emprisonna jusqu'au moment où elle pourrait lui imposer le mariage qu'elle voulait, le temps que le prince qu'elle avait choisi pour elle arrive. »

Il voyait bien que sa façon d'ajouter de la tristesse dans toute cette histoire plaisait à Anne. Elle semblait vivre ce qu'il racontait intensément et intérieurement et savourait le drame qui se jouait dans la vie de cette reine. Henry était content de réussir à l'entraîner dans son monde chimérique parce qu'il était de notoriété publique que Anne était une excellente conteuse et il était difficile d'en arriver à sa hauteur. Mais visiblement, il s'en sortait bien. Puisque ça se déroulait bien, il fallait maintenant que la reine soit sauvée. On ne pouvait laisser le drama gagner même s'il permettait de donner un tour très intéressant à une histoire. Il fallait bien que tout finisse bien à la fin.

Anne se mit alors à raconter la suite de l'histoire. Elle prévoyait un combat entre les deux prétendants de la reine. Évidemment, le prince amoureux et père du bébé n'allait pas partir sans avoir une chance de vaincre son adversaire. S'il fallait qu'il enlève sa belle à sa vilaine mère, alors il le ferait. C'était ce qu'on attendait d'un prince charmant, après tout, et peu importait que la reine soit capable de défier elle-même en duel celui qu'elle ne voulait pas épouser. Elle avait beau être puissante et très forte, elle devait apprécier qu'on se batte pour elle de temps en temps. Après tout, c'était plutôt flatteur.

« Oh raconte moi ce combat ! Le prince dont la reine est amoureux va gagner, n'est-ce pas ? Il faut qu'il gagne. Pour sa reine. »

Henry savait que Anne pouvait aimer les histoires un peu dramatiques qui se finissaient avec des larmes et la mort des héros à l'image de Roméo et Juliette. Mais le jeune garçon plein d'optimisme avait une préférence pour les histoires qui se terminaient bien. En général, ils trouvaient un moyen de s'entendre et profitaient même des versions différentes d'une même histoire. Cela pouvait être très rigolo d'imaginer des fins alternatives. Vu leur imaginaire, Henry se disait parfois qu'il devrait écrire des livres et que ceci aurait sûrement un grand succès.

« Ou alors la mère pourrait être une sorcière en secret et utiliser sa magie pour leur créer encore plus de problèmes. Tu imagines ? Elle pourrait changer son favori en dragon pour qu'il mange son rival. »

Le problème avec les idées de Anne et de Henry, c'était qu'elles étaient toutes excellentes. À deux, ils pouvaient partir dans des délires à la fois surprenants et passionnants. Quand il commençait une histoire, les péripéties ne se déroulaient jamais à moitié et il était fréquent qu'ils en viennent à ne plus savoir quoi choisir entre deux options. Le résultat était alors assez simple, ils utilisaient les deux et les combinaient pour qu'elles deviennent compatibles. Ça ne semblait pas compliqué et ça ne semblait pas exceptionnel à Henry, mais plutôt extrêmement naturel. C'était pour cette raison qu'il se laissait généralement aller et qu'il disait tout ce qui lui passait par la tête.

Pour ce qui était les deux rivaux et de la sorcière, ce fut ce qui se passa. Anne décida de prendre les deux idées et de les combiner pour en faire quelque chose de cohérent et même de formidable. Henry ne pouvait pas dire le contraire, l'histoire était proprement passionnante. Anne abandonna le pauvre prince face à la méchante sorcière et refila le tout Henry, dubitatif, qui ne put retenir un sourire un peu moqueur. Après tout, cela faisait aussi partie du jeu de ne pas laisser trop de facilité à l'adversaire ou aux partenaires selon comment ont visualisé la situation. Et celle du chevalier était plutôt coriace.

« Tu ne me laisses pas dans une situation facile. Voyons voyons… »

Il avait deux solutions. Soit il sortait le prince d'affaires et l'envoyait rejoindre sa belle, soit il trouvait une situation pour mettre à nouveau Anne dans une situation où elle devrait gérer un autre souci et lui permettre d'avoir sa victoire malgré tout. Serait-il gentil ? Là était toute la question. Mais il était plutôt d'un naturel gentil d'habitude. Pourtant, il n'est pas envie d'être gentil avec celui qui était le prince de l'histoire. Cela manquait encore un peu de drama. Il réfléchit pendant un instant et décida de s'inspirer de l'une des histoires qu'il avait lues dans un livre.

« La sorcière le transforma en monstre pour s'assurer que jamais il ne puisse retrouver la belle jeune femme et se marie avec elle. Si jamais il croisait encore son chemin, il ne faisait nul doute que son instinct de bête lui ferait la dévorer. Elle s'assura que personne ne pourrait comprendre les suppliques du prince, mais comme elle était celle qui l'avait transformée, elle pouvait l'entendre. Le prince la supplia de renoncer à son sort et de lui permettre d'épouser sa fille. Après tout, ils s'aimaient et elle était enceinte de lui. La sorcière fut sensible à sa supplique mais elle ne voulut pas lui rendre les choses trop faciles en le libérant. Elle décida donc de le mettre à l'épreuve. Il allait devoir trouver une personne au cœur si pur quelle serait capable de voir dans ses yeux autre chose que le monstre sous la forme duquel il apparaissait. Si un jour, un être au cœur assez pur lui disait qu'il n'était pas une bête, il cesserait de l'être. Elle promit aussi de ne plus garder la tour et s'il devenait humain, alors il pourrait revenir chercher celle qu’il aimait tant. »

Anne pouvait parfois être bien cruelle avec les personnages de ses histoires. Henry aussi ajoutait souvent un peu de drama mais ce n'en était pas au point de la rouquine. Il avait un peu forcé la dose parce qu'elle lui avait demandé, mais c'était sans importance. C'était maintenant son tour et il l'avait laissée avec une difficulté d'envergure car le prince était en exil. Pour autant, ça ne l'empêchait pas de faire en sorte qu'il réussisse sa quête si c'était ce qu'elle souhaitait. Il n'avait absolument rien figé dans le marbre. Il avait juste rajouté une difficulté supplémentaire.

Cela dit, par exemple, le jeune garçon ne l'aurait jamais forcé à errer pendant dix ans. Le fait que le bébé n'ait pas pu connaître son père avant cet âge là, il trouvait ça terrible comme destin. Mais les histoires pouvaient être faites de ce genre de choses et il avait conscience que c'était le genre de situation que Anne aimait beaucoup. Elle adorait pleurer en écrivant ou en lisant une histoire. Elle respectait au moins le fait que Henry voulait que les choses se terminent bien. Mais entre deux, il pouvait y avoir tellement de choses. Sans se mentir, il pouvait clairement dire qu'elle était à la hauteur du défi.

« Waouh, je ne l'aurais pas obligé à rester dix ans loin de sa famille. Je dois avouer que je n'aimerais pas être un personnage d'une de tes histoires, j'aurais très peur de ce que tu pourrais me faire subir », dit-il en riant. « Mais c'est une belle façon de poursuivre. Voyons ce que je peux en faire. »

Il commença à réfléchir et décida de poursuivre sur le thème de la sorcière qui se repent de ses méfaits. Il aimait beaucoup l'idée de rédemption, il trouvait que c'était bien mieux une personne méchante qui revenait à la raison plutôt que quelqu'un qui n'avait jamais été méchant du tout. C'était tellement plus réaliste. Il était persuadé que tout le monde pouvait avoir droit à une seconde chance s'il avait vraiment envie de changer. Henry avait toujours été décidé à croire en les gens, et il trouvait que c'était une bonne façon de vivre sa vie. En attendant, il fallait conclure.

« Ce qu'il ne savait pas, c'était que la sorcière avait beaucoup appris au contact de sa fille et se repentait de ses malheurs passés. Elle s'était donc assurée que la fille de la reine reconnaîtrait son père au moment où elle le verrait. Elle lui avait en effet donné un portrait de lui pour être certaine que ce serait le cas. Quand le prince entra dans le château, ce ne fut pas sa femme mais sa fille qui lui courut dans les bras la première. Ils se sentir rempli d'une affection toute paternelle et sourit à sa bien-aimée qui lui offrit aussi le plus tendre des sourires. Ils étaient prêts en former une famille unie et plus rien ne pourrait les empêcher d'être ensemble. Fin », annonça-t-il avec une sensation de sérénité.

On ressentait une certaine émotion au moment de terminer une histoire qui nous tenait particulièrement à cœur. C'était un sentiment mêlé de tristesse pour quelque chose de joli qui était déjà fini et d'apaisement parce qu'on était arrivés à trouver la fin idéale pour ce qu'on avait envie de faire. Quand Henry prononça les derniers mots, il espérait que le final plairait autant Anne que ça lui plaisait à lui et qu’elle ressentirait tout autant cette impression d'accomplissement qu'il ressentait lui-même en criant le mot fin. Une histoire partagée se devait de l'être dans tous ses aspects.

Mais quand il la vit, appréciant la fin de l'histoire avec la main sur son cœur, les yeux fermés comme si elle la vivait pleinement elle-même, comme si elle était cette reine maman d'une petite fille de dix ans qui venait de retrouver l'homme de sa vie alors qu'elle n'y croyait plus, il sut aussitôt que sa façon de raconter l'histoire lui avait parfaitement plu. Il avait réussi à la conclure d'une manière qui leur plaisait à tous les deux et à créer ce sentiment d'accomplissement chez lui comme chez sa partenaire du moment. Il n'était pas peu fier du résultat obtenu. Il avait même le sentiment que ce n'était que le commencement d'une nouvelle histoire pour son héroïne et sa petite famille.

La fin de l'histoire prononcée, Anne s'enthousiasma du succès des héros comme si c'était celui de leurs deux auteurs. On pouvait penser qu’un auteur pouvait choisir de voir ses héros réussir ou pas. Mais beaucoup diraient que les personnages faisaient, en fait, ce qu'ils voulaient vraiment et échappaient à leur contrôle. Ils ne pouvaient plus que retranscrire les paroles comme elles venaient en ayant l'impression que ce n'était plus leur créativité qui agissait, mais bien les choix d'une entité à part, le personnage, comme un parent qui donnait la vie et qui laissaient ensuite son enfant faire ses propres choix.

« Ce sera quand tu voudras. J'aime beaucoup inventer des histoires avec toi. Il faudrait le faire en plus grand nombre. Avec mon amie Sarah, par exemple. Elle aussi aime beaucoup les histoires, et elle a énormément d'imagination. Je suis sûr que tu l'adorerais. »