(abandonné) Never forgive, never forget [Joker]

Never forgive. Never forget

feat. Mr J

« Ivy… S’il te plaît… Réponds-moi… Je t’en prie… »

Ses paroles sont entrecoupées de sanglots qu’il est difficile d’entendre les mots qu’elle articule avec un mélange de douceur et de désespoir. Sa vue se brouille en même temps que les larmes font couler son maquillage le long de son visage déformé d’une douleur vive, telle qu’elle ne se souvient pas en avoir ressenti depuis bien longtemps. Le corps inerte d’Ivy lui apparaît à la fois léger comme une plume et en même temps terriblement rigide, ignoblement froid… Les yeux d’Ivy se sont fermés pour de bon… Et c’est une partie d’elle-même qui disparaît avec elle. Comment survivra-t-elle à l’absence de la belle empoisonneuse ? Elle l’a sauvée de tant de manières ? Comment pourrait-elle tolérer de ne plus l’avoir dans sa vie ? C’est bien simple… Elle ne se sent pas capable d’y arriver… On lui a arraché une partie d’elle-même. Plus rien ne sera jamais comme avant… et elle sera bien incapable de le supporter. Harley ne sera pas intervenue à temps. Le Joker ne voulait pas lui donner l’occasion de la sauver, ou même lui suggérer de faire un choix entre eux, comme il avait parfois pu le faire par le passé… Sans doute parce qu’il avait compris. Il avait compris que cette fois, le parfait Harlequin qu’il avait façonné à son image ne se rangerait pas de son côté.

Harley ne s’était peut-être pas totalement libérée de l’influence néfaste et toxique que le Joker pouvait avoir sur elle, mais elle avait fait, néanmoins, de sérieux progrès, et surtout, elle avait appris, auprès d’Ivy, ce que l’amour véritable pouvait être… Il n’y avait pas de retour en arrière possible… S’il voulait la récupérer, le Joker devait se débarrasser d’Ivy et de l’influence qu’elle avait su gagner sur son pantin préféré. Il avait brillamment réussi. Il avait transmis à Harley une photographie particulièrement graphique, accompagné d’un message particulièrement alarmant. Le tout accompagné d’une adresse, à laquelle Harley n’avait pas su arriver suffisamment vite. Le Joker avait probablement porté le coup fatal quelques instants à peine après avoir tué de sang froid celle qui baigne à présent dans son propre sang, sous les suppliques douloureuses et désemparées d’Harley, qui ne peut rien faire contre l’horreur en marche.

Quand elle entend du mouvement, non loin, Harley ne se redresse pas. Elle ne se sent pas encore prête à laisser Ivy… Elle ne pense pas qu’elle y sera prête un jour, à aucun moment. Tremblante des larmes qu’elle n’a pas encore fini de verser, elle jette un regard circulaire autour d’elle, cherchant à identifier la provenance de ce bruit. Dans la semi-pénombre, elle voit progressivement se découper cette silhouette ô combien familière, qu’elle reconnaît immédiatement pour être celle de l’homme qui l’aura tant tourmentée, et qui vient très probablement d’accomplir son plus grand coup d’éclat, en cet instant.

« Ne t’approche pas d’elle… » Avec ce qu’il lui reste de force, dans cet instant dramatique, Harley tire son pistolet de sa ceinture pour le pointer en direction du clown machiavélique. « Ne fais pas un pas de plus ou je te tue. Je te jure que je te tue. »

Never forgive. Never forget

feat. Mr J

Un long frisson glisse le long de la colonne vertébrale de la jeune femme quand le Joker ose affirmer, d’un ton plein d’assurance, que c’est pour elle qu’il a agi comme il l’a fait. Elle le sait, elle est responsable de ce qui s’est passé. Le Joker avait voulu lui donner une leçon, lui prouver qu’elle ne serait en aucun cas capable d’échapper à son emprise, et ce peu importe l’énergie qu’elle déploierait à ce titre. Ivy n’est pas morte de sa main, mais elle est morte par sa faute. C’est un fait que la blonde ne peut ni ignorer, ni constater. C’est une réalité avec laquelle elle devra vivre toute sa vie, si douloureux cela lui semble-t-il être. Et douloureux, ça l’est effectivement. La jeune femme a le sentiment qu’on l’a privé pour toujours d’une partie si nécessaire d’elle-même qu’elle ignore seulement comment elle sera capable de vivre sans elle. Elle doit endosser la responsabilité de sa mort, en même temps que d’affronter celui qui s’adresse à elle avec trop de douceur pour qu’elle soit réellement dupe.

A une époque, l’entendre s’exprimer ainsi, d’un ton mielleux, l’entendre l’appeler « ma chérie », aurait probablement suffi à lui faire tout oublier. Elle aurait même trouvé particulièrement romantique le fait qu’il ait fait le choix d’éliminer sa rivale pour qu’elle ne soit qu’à lui. Mais quelque chose a changé, en elle. Définitivement, radicalement. Ivy lui a permis de voir la vie sous un angle différent, de cesser de se dévaluer, de faire face à la toxicité de sa relation passée. Elle lui a aidé à comprendre ce qu’était l’amour véritable, un amour qu’elle pensait goûter auprès du Joker, alors qu’il n’en était rien, absolument rien. Il était le poison, Ivy était, contradictoirement, l’antidote. Et maintenant… Maintenant…

« Tu te trompes. Elle me rendait heureuse. Elle se souciait de moi. Elle m’aimait. Elle me comprenait ! C’est toi qui m’a coupé les ailes, c’est toi qui me rendait malheureuse ! Elle m’a aidé à comprendre ça », réplique Harley en s’écartant par réflexe au moment de sentir les doigts du Joker contre sa joue. « Je ne peux pas briser un cœur qui n’existe pas. »

Elle sait qu’elle prend des risques, en s’opposant à lui, mais elle est déterminée. Elle ne replongera pas dans ses anciens travers, pas alors qu’Ivy les a payés de son existence. En son nom, au nom de l’amour profond et total qu’Harley ressent pour elle, elle ne sera plus jamais prisonnière de ses anciens démons. Elle se battra contre lui. Elle ne le laissera plus exercer la moindre influence sur sa vie. Elle vengera la mort d’Ivy. Cette fois, elle survivra, et elle ne se laissera plus contrôler.

« Tu as raison sur un point. C’est fini. C’est fini depuis longtemps. »

Never forgive. Never forget

feat. Mr J

Non. Non. Non. Harley se répète ces mots en pensées, à la manière d’une litanie angoissée. Non, Ivy ne la manipulait pas. Ivy avait toujours été honnête avec elle. Ivy l’aimait pour ce qu’elle était. Ivy l’aimait. Elle pouvait tout faire avec elle parce qu’elle n’était pas le sbire d’un psychopathe chaotique et mégalomane qui se servirait d’elle pour mieux l’abandonner quand elle aurait besoin de lui. Il l’avait privée de l’amour de sa vie, comment peut-il s’imaginer qu’elle lui retombera dans les bras ? Pourtant, elle a de bonnes raisons de le croire, au fond… Parce qu’il la connaît…. Parce qu’elle n’a jamais été plus fragile, et qu’elle n’avait déjà pas besoin de l’être autant pour succomber à ses sirènes. Il savait, dans les moments les plus terribles, lui donner le sentiment d’être forte et importante… Et elle a tant besoin de se sentir forte. D’être importante… d’avoir l’impression de compter…

Non, Harley, non. Tu ne comptes pas pour lui. Il se joue de toi. Il ne trouve de satisfaction dans cette situation que parce que tu lui donnes une occasion en or de t’humilier… Il a tué Ivy. Il a tué Ivy… Plus jamais elle ne le verra, plus jamais elle ne la prendra dans ses bras, plus jamais elle ne lui dira ces mots qu’elle a tant besoin d’entendre. Elle a l’impression de se sentir comme au bord du précipice.

« Non. Elle était la seule à me comprendre. A me voir telle que j’étais réellement. »

Elle le croit. Elle veut absolument le croire… Elle était elle-même, elle était sa propre personne en compagnie d’Ivy. Elle n’était plus dépendante de qui que ce soit, elle existait pour elle-même. Avec Mr J, elle avait toujours été l’ombre du Joker, elle avait toujours été l’ombre d’elle-même, en réalité. Elle ne s’était pas sentie… forte, heureuse, complète… Elle ne vivait que pour lui plaire et pour exister dans ses yeux seuls. Elle a changé. Elle n’est plus la femme que le Joker veut voir en elle. Et elle ne veut clairement pas être cette personne, sans l’ombre d’un doute.

« Tu n’as pas la moindre idée de qui je suis. Et tu t’en moques. Ce que tu veux, c’est me façonner à ta manière, à ton image, mais ce n’est pas moi. Ça n’a jamais été moi, et tu le sais parfaitement. Tu ne saurais même pas dire qui je suis, en dehors de cette image fabriquée que tu as voulu donner de moi. »

Non, ce n’est pas elle, ça ne saurait certainement pas être elle, en aucun cas… Et si elle devait lui ressembler un tant soit peu, elle ferait tout pour qu’il n’en soit plus rien. Elle ne veut plus rien avoir affaire avec lui… Elle veut se détacher de lui et de son image… Elle veut si fort ne pas sombrer dans ces travers dangereux… Et elle sait pourtant que leur appel sera probablement irrésistible.

« Il n’y rien à réparer, rien à sauver, chez toi », ajoute-t-elle en le regardant dans le blanc des yeux, frissonnant au contact de ses doigts, prenant son menton en otage. « Tu es pourri jusqu’à la moelle. »