The way you make me feel [Galadriel]

The way you make me feel

feat. Galadriel

L’affection de Melian envers Galadriel n’est pas de celles qu’il est possible d’expliquer d’une manière que d’aucuns estimeraient rationnelle, de même que Melian n’avait jamais pu expliquer tout à fait les raisons au nom desquelles elle s’était senti si puissamment attirée par son époux que le cours du temps lui-même s’en était vu bouleversé, quand ils s’étaient tous deux rencontrés. Dès l’instant, pourtant, où cette elfe fascinante, au caractère bien trempé, avait mis un premier pas en Doriath, Melian avait été convaincue de l’importance qu’elle revêtirait à ses yeux. Elle avait eu de l’avenir une vision imparfaite, mais qui avait accentué sa conviction, celle de leur proximité, de cette communication d’âme qu’elle n’avait jamais cherché à nier ou ignorer, qu’elle avait bien au contraire encouragée en proposant à la belle elfe nombre d’entretiens privés destinés à encourager ce qu’elle estimait être de l’ordre de la plus stricte fatalité. Le destin.

Au moment d’embrasser Galadriel pour la toute première fois, Melian n’a éprouvé aucun cas de conscience moral, elle ne s’est pas interrogée sur le bien-fondé de son action, elle n’a pas songé aux répercussions éventuelles d’un baiser dont elle avait tant eu envie. Sans oublier, bien sûr, toutes les étreintes qui y succédèrent. Elle n’avait pas un seul instant, non, pensé à Thingol ce temps durant. Elle aurait estimé cela insultant envers l’affection toute particulière qu’elle portait à Galadriel. Cela faisait-elle une épouse indigne ? Elle n’a rien caché  de sa liaison à son époux. Si ce dernier lui en tint rigueur, il n’en montra jamais rien. Thingol était un homme secret, il l’avait toujours soutenu dans tout ce qu’elle faisait, et pour cette raison, elle ne lui serait jamais suffisamment reconnaissante, mais sur ce point en particulier, et en dépit de tous ses efforts, elle ne fut jamais capable de percer les secrets de son cœur. Pour Melian, comparer sa tendresse envers Thingol et son amour pour Galadriel n’avait pas lieu d’être. Elle était capable d’aimer de mille façons, elle les aimait tous deux de manières bien distinctes, qui ne tolérait pas d’évoquer même la notion réelle de jalousie. Elle resterait pour toujours l’épouse dévouée de Thingol, puisqu’elle lui en avait fait la promesse solennelle le jour de leur mariage, mais elle aimerait toujours intensément, passionnément, Galadriel, d’une manière qui s’épargnait toute échelle de valeur.

Du moins était-ce la conviction de la Valar, ébranlée pourtant dans ses certitudes par une annonce qu’elle n’a su occulter, et à laquelle elle a encore moins su prêter attention. Bien sûr, les attentions de plus en plus nombreuses de Celeborn à l’adresse de sa protégée ne lui avait pas échappé, mais dans un premier temps, elle avait fait mine de ne pas s’en formaliser… Et pour peu qu’un semblant de contrariété lui effleure l’esprit, elle le rejetait et se recentrait sur ses certitudes les plus profondes, ses connexions les plus absolues : le murmure du vent, le chant des arbres, la mélodie des rivières. Pourquoi, alors, se retrouve-t-elle incapable, ce jour-là, tandis que Galadriel se retrouvent toutes deux dans les somptueux jardins du palais de Doriath, en vu de leur entretien quotidien.

« La rumeur dit-elle vrai ? » finit-elle par l’interroger, après un léger moment de silence, où toutes deux se contentèrent d’évoluer entre les parterres de fleurs multicolores, les doigts entrelacés. « Celeborn aurait demandé votre main… »

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Galadriel n’aurait en aucun cas pu mentir à Melian. Ce que cette dernière attend d’elle, ce n’est pas la confirmation ou non d’une rumeur dont elle sait déjà la véracité, ce qu’elle attend d’elle, c’est qu’elle partage son sentiment réel sur cette situation. Elle veut que l’Elfe se confie sur ses émotions, sur ce que lui inspire cette demande en mariage qui, en soi, n’avait peut-être rien d’inattendue mais avait tout de même pris la Maia par surprise. Melian éprouve une certaine appréhension à entendre ce que Galadriel lui dira… mais elle sait également qu’elle le doit. Elle le doit car elle veut que ce que renferme le cœur de celle qui lui fait face n’ait guère de secret pour elle, tout comme elle s’est toujours assuré de rendre son cœur le plus accessible possible pour celle qui sait le faire battre si fort.

La rumeur dit vrai, Galadriel confirme en quelques mots ce qui n’a guère besoin de l’être. Melian hoche simplement la tête sans, dans un premier temps, commenter réellement ce qu’elle en pense. Pour partager avec Galadriel le fond de sa pensée, encore faudrait-il qu’elle soit vraiment au clair avec ce dernier, et force lui est de constater qu’il n’en est rien… elle demeure confuse, face à des émotions qu’elle n’identifie pas réellement… bien qu’elle n’ait aucune difficulté à constater qu’elles n'ont définitivement rien d’agréable. Elle a besoin, pour mettre son esprit et ses sentiments au clair, d’en entendre plus sur ce qui lie Galadriel à Celeborn, sur ce qui les liera également dans l’avenir. Elle n'interférera pas, car elle n’estime pas qu’elle en ait le droit, mais elle veut en revanche tout entendre, quitte à sentir encore cet étau qui lui broie un peu trop sûrement le cœur.

« Ce que j’en pense n’a guère d’importance », répond Melian avec douceur, dissimulant son agacement derrière une façade sereine.

C’est bien la première fois que le visage que Melian présente à son interlocutrice diffère drastiquement du fond de sa pensée. En temps normal, elle ne se préoccupe pas de cela, mais en l’occurrence, elle ressent l’obligation de faire un pas de côté. Elle sait l’admiration et le respect de Galadriel à son égard, elle sait qu’un seul mot de sa part pourrait suffire à ce qu’elle rompe ses fiançailles, si elle les a acceptées en premier rôle, et ce n’est pas un rôle qu’elle veut jouer. Parfois, les choix de Galadriel lui briseront le cœur, elle doit se faire une raison, mais toujours, ses choix devront lui appartenir, à elle et elle seule. En aucun cas elle ne veut influencer son libre arbitre ou forcer un destin qu’il ne lui importe pas de contrôler.

« C’est ce que tu penses, ma chère, qui m’intéresse. » Elle interrompt ses pas en même temps que Galadriel, et plonge son regard dans le sien, consciente d’être capable de s’y perdre des heures durant, sans que ce temps ne soit jamais perdu. « Que lui as-tu répondu ? »

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Melian affiche un doux sourire qui, le pense-t-elle, ne trahit pas tant que cela le soulagement qu’elle éprouve à la pensée que ces fiançailles ne soient pas actées encore. Certes, ce n’est jamais là que repousser une échéance inévitable, mais cela lui fait tout de même du bien de constater que ce mariage n’est pas encore inscrit dans l’ordre du temps. Cela viendra, mais pour l’heure, il ne s’agit pas d’un projet, il s’agit d’une potentialité, ce qui signifie donc que Galadriel ne s’est pas précipitée d’office sur la possibilité d’épouser Celeborn. Lui aurait-elle reproché l’inverse ? Elle serait, évidemment, particulièrement injuste de le faire, compte tenu du fait qu’elle-même n’avait pas hésité même une seconde avant de dire « oui » à Thingol quand ce dernier lui avait demandé sa main. Certes, elle n’avait pas rencontré Galadriel encore… est-ce que sa présence dans sa vie à l’époque aurait bouleversé l’ordonnancement même des choses ? Il est probable que oui, mais elles ne le sauront jamais. La logique veut que Galadriel finisse par épouser Celeborn, mais Melian se satisfait bien de savoir que cette union n’a rien d’acté.

Son sourire se dissipe sans s’effacer quand Galadriel ajoute aimer son prétendant d’un amour tendre et sincère. Elle sait que c’est le cas, et que cet amour et réciproque, que si les deux venaient à devenir mari et femme, l’époux saurait prendre soin de son épouse, et la respecter à la hauteur de la femme merveilleuse qu’elle sait si bien être, mais Melian se découvre, chaque jour qui passe, une possessivité toujours plus grande envers Galadriel, contre laquelle elle n’a de cesse que de lutter… Personne n’appartient à personne, pas même au nom des liens sacrés du mariage. Elle se le répète au moment d’envisager la possibilité que Celeborn ne la dérobe à son affection, alors que cela n’a jamais été le cas – cela ne sera jamais le cas. Les relations humaines sont bien plus complexes et profondes que cela, et cela, elle le sait aussi. Malgré tout, il lui est difficile de se réjouir du bonheur marital de celle qu’elle aime si profondément avec un autre, qu’elle ne sait pas aimer tout autant.

« Alors pourquoi attendre ? » demande doucement Melian à l’Elfe blonde quand cette dernière finit par reconnaître qu’elle acceptera tôt ou tard cette demande en mariage.

Il y a quelque chose qui ressemble à de l’évidence pure dans la voix de Galadriel, pourtant, ce qu’elle affirme n’a pas forcément grand-chose d’évident… Ou de si évident que cela, disons. Car si tout ceci doit être à ce point certain, pourquoi cette attente ? Au fond d’elle, Melian devine en être responsable. C’est un rôle qu’elle aime avoir tout en ne désirant pas le tenir. Cela la place dans une situation d’insurmontable dualité, qu’elle serait bien en peine d’expliquer ou de justifier.

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Melian accueille les propos de Galadriel avec un sourire conciliant, mais son regard trahit une déception qu’elle peine à étouffer. Elle déplore, oui, elle aussi, d’avoir appris par d’autres bouches que la sienne l’éventualité de ses noces futures. Elle aurait probablement eu plus de facilités à accepter la nouvelle si l’Elfe avait eu l’occasion de la lui annoncer en personne, sans que les rumeurs ne la devancent. Est-ce pour autant qu’elle aurait mieux réagi ? Qu’elle l’aurait accueilli moins sévèrement ? La Maia serait bien en peine de le dire. Elle se reconnaît à peine dans la manière qu’elle peut avoir d’accueillir une nouvelle qu’elle devrait pourtant savoir accepter pour ce qu’elle est… Elle n’arrive pas à faire preuve de la distance émotionnelle nécessaire qui conviendrait à cette situation. En elle bataille la raison, qui devrait l’encourager à accepter ses fiançailles, et le cœur, qui l’initie à des tourments d’une rare violence, et qu’elle n’avait certainement jamais connus avant que Galadriel n’entre dans sa vie.

Cette dernière lui confesse alors que Melian est bel et bien la cause de ses hésitations. Si elle l’épouse, ce sera par amour, mais pas celui qui attache vraiment le cœur d’un individu à celui d’un autre. Cet amour-là, d’une puissance rare, n’appartient qu’à elles. La Maia ne devrait pas avoir besoin des propos de l’Elfe pour en avoir la confirmation, cette certitude est ancrée en elle, contenue dans chaque fibre de leur être, et pourtant, oui, pourtant, elle avait définitivement eu besoin que Galadriel le lui dise. Elle se sentira plus légère, qu’importe la décision que sa douce amie prendra, à présent qu’elle sait que ses sentiments sont inchangés.

Car les sentiments ne suffisent pas à un mariage réussi. Il y a quelque chose d’infiniment juste et raisonnable à ce que Galadriel épouse Celeborn. Des raisons justes, et qui inviteraient naturellement Melian à pousser son amante dans sa direction. Mais la précipiter dans les bras d’un autre, c’est redouter qu’elle ne se détache définitivement des siens, et cette possibilité la fait frissonner.

« Tu n’as jamais menti à Celeborn, n’est-ce pas ? » demande Melian après s’être laissé un temps de réflexion afin de confier à Galadriel la réponse la plus honnête et la plus impatiale possible. « Ton amour pour moi n’efface rien à la tendresse que tu ressens pour lui, tout comme mon affection pour Thingol ne s’est jamais vu affecter par l’amour profond que je te voue. » Elle lui adresse un sourire, le plus sincère qu’elle ait su lui accorder depuis le début de cette conversation. « Si Celeborn a su trouver dans cette tendresse que tu lui accordes tout ce qu’il désirait, alors l’épouser n’est pas un mensonge, ni une injustice. » Elle marque une pause. « Je savais bien que cela arriverait tôt ou tard, et j’attendais le moment de savoir me réjouir… » Elle l’observe un instant. « Les sentiments qui m’habitent à cette perspective sont encore trop sombres pour que je les partage avec toi, mais ils n’ont rien de justes ou de sensés. Toi comme moi savons ce que tu dois faire. »

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Melian hoche simplement la tête, avec la plus grande douceur, quand son interlocutrice vient observer à juste titre que personne ici n’est sans savoir ce qui les lie. C’est en effet le cas. Les détails ne sont pas de ceux qu’elle estime d’adresser y compris au plus curieux, mais quiconque les aura un jour vues ensemble ne saurait avoir le moindre doute quant à la sincérité et l’intensité de leurs sentiments mutuels. Thingol lui-même a bien dû se faire une raison… Melian ne saurait trop dire s’il en a souffert ou non, elle n’a jamais interrogé son époux à ce sujet…

Elle s’est réfugié derrière de remarquables prétextes dans lesquels elle était parvenue à croire, au point de considérer la jalousie éventuelle de son époux comme naturellement infondée, si cette dernière devait simplement exister tant il n’y a rien de comparable entre ses sentiments pour lui et ceux qu’elle ressent pour Galadriel… Cette pensée est mise à rude épreuve à présent qu’il faut à Melian faire face au sentiment de jalousie qui l’habite elle-même vis-à-vis de potentielles fiançailles entre Galadriel et Celeborn. Si elle doit appliquer à elle-même des observations qu’elle a tant de fois rationnalisées pour d’autre, elle devrait admettre que tout ceci n’a au fond rien de grave. Elle espère dépassé ce sentiments, si Galadriel sait trouver ce qu’il y a de plus sombre en ses pensées attirant, ce n’est pas le cas de Melian, qui se voudrait capable de s’en préserver.

« Je voudrais m’en prétendre surprise », répond doucement Melian en caressant du bout des doigts le visage de son amante.

Elle connaît l’attirance de Galadriel pour l’obscurité… pas seulement celle qu’elle renferme, mais pour ce qu’elle est en elle-même. Cela n’a jamais été pour déranger Melian, qui admire d’autant plus Galadriel qu’elle a toujours su faire de ceci une force remarquable. Il est plaisant par ailleurs de savoir être aimée y compris dans ce que l’on se découvre d’imperfections, au moment de réaliser que l’on ne sait pas toujours se conforme aux valeurs que l’on voudrais défendre.

Galadriel n’est pas en mesure, en effet, d’apaiser sa contrariété… Elle y parvient en partie, car sa présence est capable de calmer n’importe lequel de ses maux, y compris ceux qu’elle aura indirectement créés. Mais ce n’est évidemment pas assez. Cela ne peut pas l’être. Le rôle de Galadriel, en cet instant, n’est pas de la rassurer, uniquement de l’informer. D’un hochement de tête, elle consent à la mener où elles ont toujours pu se retrouver dans la plus parfaite intimité, à l’abri des regards, sous le couvert des arbres et de la faune environnante.

« Je vais te demander quelque chose de profondément égoïste, et par avance je m’en excuse », fait-elle après un moment de silence. « Je veux obtenir de toi quelque chose qu’il n’aura jamais, un engagement qui transcendera celui que tu t’apprêtes à prendre auprès de lui. »

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Que peut-être obtenir de Galadriel qu’elle ne lui ait pas déjà offert ? La question se pose réellement, car Melian sait faire preuve, en cet instant, d’une avidité et d’une gourmandise, d’une possessivité et d’une jalousie qu’elle ne devrait se permettre. Melian a toujours aimé les êtres libres, et pour cette raison, elle n’a jamais voulu que qui que ce soit se retrouve sous son emprise. Mais les élans de cœur ont ceci de fascinant et même temps que de douloureux qu’ils n’attendent pas réellement après la moindre interprétation rationnelle. Lorsque l’on ressent, on ressent, c’est tout. Il n’y a rien de plus à en dire, il n’y a rien à faire, rien si ce n’est l’accepter autant que possible et faire du mieux que l’on peut afin d’apprécier ce moment à sa juste valeur.

Oui, elle n’a aucun contrôle sur ce qu’elle ressent, et elle ne voudrait pas avoir vraiment de contrôle là-dessus, en réalité. Elle ne veut pas enchaîner Galadriel aux sentiments qu’elle éprouve à son sujet, mais elle ne veut pas nier ces sentiments non plus. La Maia s’efforce de trouver quelque chose qui ressemblerait un tant soit peu à un compromis. Est-elle convaincue par ce qu’elle a finalement trouvé ? Pas vraiment, en réalité. Elle essaie de faire au mieux, afin d’être autant en accord avec elle-même qu’avec son intention, pure et sincère, de toujours laisser la femme qu’elle aime libre de ses propres choix et de ses décisions.

Dans le regard de Galadriel, Melian voit bien qu’elle pourrait bien lui demander absolument n’importe quoi… Quoi qu’elle exige de sa part, même la requête la plus inconsidérée, Melian y consentirait, par amour pour elle. Et c’est aussi beau que cela est inquiétant, car c’est là un pouvoir qu’elle ne veut pas s’approprier, et dont elle ne veut surtout pas abuser. Bien sûr qu’il serait tentant, plus que tentant, même, de lui demander de quitter Celeborn, de n’être dévouée qu’à elle, de simplement être à ses côtés, toujours. Mais l’amour qu’elles partagent transcende de telles considérations et serait tout naturellement affecté par des bassesses telles que celle-ci : toutes deux valent bien mieux que cela, et elles le savent, leur histoire a plus de valeurs que celles qui se jouent sur le champ plus strict d’un rapport d’exclusivité ou d’appropriation de l’autre, qui ne serait jamais rien d’autre qu’une diminution de toi.

« Que dirais-tu d’une promesse ? » suggère-t-elle finalement après un temps de réflexion. « Celle de m’aimer toujours, celle de ne jamais m’oublier, peu importe si des années ou des siècles doivent un jour nous éloigner l’une de l’autre. » Car l’une comme l’autre savent qu’elles ne pourront présumer de ce dont seront faits leurs avenirs respectifs. « Offre-moi une chanson. Une chanson qui parlera de nous. Que tu chanteras à tout instant, pour ne jamais m’oublier et ne jamais me perdre. »

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« Ai-je prétendu douter ? Ne puis-je souhaiter cette promesse de ta part sans qu’elle remette en question tout ce que nous avons construit ? Elle me sera douce à l’oreille, elle apaisera un cœur qui souffre déjà de ton absence et de te savoir en d’autres bras. Je n’attends pas que tu me rassure, je veux seulement ces quelques mots de ta part. »

Elle est peut-être trop insistante, peut-être aussi sur la défensive, en réalité, car Melian, si douce, si bienveillante, si compréhensive, ne tolère par elle-même de se découvrir à ce point sujette à une jalousie qu’elle penser ne convenir qu’aux autres. Elle n’a pas voulu le moins du monde éprouver ce qu’elle éprouve, elle se sent dépassée par la force d’émotions qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant, ceux-là même qui font que sa relation avec Galadriel est si unique… Au fond, l’Elfe a probablement raison de la trouver trop exigeante, ou de lui reprocher ses doutes qu’elle n’accepte pas de nommer ainsi, mais Melian se sent l’obligation de légitimer ce qui ne peut pas l’être, quitte à faire preuve de mauvaise foi… Son amour pour elle fait naître en son sein la plus pure possessivité. Elle n’en est pas fière, mais elle est obligée malgré tout de l’assumer.

Ce n’est pas, au fond, de Galadriel qu’elle doute, cette dernière n’a jamais eu de cesse que de lui témoigner la force de ses sentiments en n’importe quelles circonstances, et ce en dépit de la présence de Celeborn comme celle de Thingol ne l’a jamais empêché d’aimer l’Elfe aussi intensément qu’elle le désirer, c’est contre ses propres émotions, ces émotions beaucoup trop sombres et dangereuses qu’elle est en lutte. Tout ce qui pourrait être susceptible d’apaiser son cœur lui semble dès lors bon à prendre. Oui, elle a besoin d’entendre que l’amour de Galadriel est sien, et depuis le commencement. Et que cela ne changera pas, même si des siècles doivent s’écouler sans qu’elles se voient, même si des lieues et des lieues doivent les séparer. Cela passera probablement pour un caprice, cela en est probablement un, mais cela n’empêche pas Melian de le vouloir, et surtout d’en ressentir le besoin le plus certain et le plus évident.

Elle accueille ses mots avec un sourire de gratitude, au fond, ses incertitudes qui n’ont pas lieu d’être pourraient peut-être transmettre à Galadriel l’inverse même du message qu’elle voudrait lui communiquer. Elle espère néanmoins qu’elle comprendra sa requête, et l’Elfe lui fait silencieusement comprendre qu’elle est capable de l’entendre. Alors, à l’abri d’un arbre, elle lui chante la force de son amour, tout en parcourant de ses doigts fins sa longue chevelure brune. Quand Melian l’entend chanter, ses doutes s’évaporent presque aussitôt pour ne laisser de place qu’au seul plaisir de ce moment de partage qui n’appartient qu’à elles. L’intensité de leur amour est au-delà d’évidente, alors… elle serait presque palpable, en réalité.

« Je chérirai ce chant pour toujours. »

Et elle le chantera souvent, si souvent que tout le royaume de Doriath en saura la mélodie sans comprendre sa signification profonde.

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Melian adresse à Galadriel son sourire le plus tendre quand cette dernière lui assure qu’à compter de ce jour, ce chant qu’elle vient de lui adresser est sien. Elle pourra en fait tout ce qu’il lui plaira… Melian ne demande à la vérité pas grand-chose, elle veut seulement pouvoir apprécier de le chanter à son tour, en se concentrant suffisamment pour entendre la voix de celle qu’elle aime se joindre à la sienne pour peu qu’elle se concentre suffisamment. C’est ce qu’elle voulait.

En lui confiant ce chant, elle lui confie une part d’elle-même, que Melian gardera probablement jalousement, au risque d’entendre quelqu’un d’autre dénaturer ce même chant faute d’en comprendre la raison ou la teneur. Ce qu’elle en fera, c’est le chérir, le chérir pour toujours, et en faire son compagnon de pensée, quand le temps lui paraîtra trop long, ou la solitude trop pesante. Elle n’a guère besoin de le dire, tant c’est une évidence, elle chérira ce chant précieusement, tout comme elle n’a cessé de chérir celle qui le porte si délicieusement, depuis le jour même de leur rencontre.

Melian savoure avec le plus grand plaisir la caresse tendre, un peu possessive aussi (et ça ne lui déplaît pas) de ces lèvres tout contre son épaule, puis sa gorge. Le moindre de ses baisers a le don de la faire frémir. Et c’est absolument délicieux. Elle ne veut plus vraiment entendre le nom de Celeborn, mais il le faut bien, alors elle accepte d’entendre chacune des paroles que son amante lui adresse. Celeborn n’a que son respect et son affection. Melian en dispose également, et de bien davantage. De Galadriel, elle possède absolument tout. Ce constat pourrait être pour le moins dangereux, mais la Maia n’a pas la moindre intention d’en abuser, bien en contraire. Elle a conscience de combien leur relation est précieuse et unique pour cette raison bien précise. Elles sont tout l’une pour l’autre… Et ne cesseront probablement jamais de l’être.

« Je te donne l’impression du contraire, mais tu n’as aucun besoin de te justifier de tes sentiments pour moi. Je les connais. Je sais leur force et leur sincérité. Et je t’aime, te désire et te respecte tout aussi profondément, Galadriel. Tu as mon amour. Tu as ma dévotion. Tu as mon obéissance. Tu as chacune de mes pensées… Et cette possessivité qui me dépasse bien souvent car personne d’autre au monde n’est capable de me l’inspirer avec tant de puissance. »

Melian complète ces paroles d’un baiser puissant, qu’elle dépose sur ses lèvres, preuve ultime de la force violente de sentiments qui ne la quitteront jamais. Jamais quand il est question de Galadriel.

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Melian sourit doucement, à quelques centimètres seulement de ces lèvres que pour rien au monde elle ne se lasserait d’embrasser, alors que Galadriel, dans sa sagesse infinie, lui fait remarquer qu’elle n’a guère besoin de justifications pour lui exprimer son amour… Sans doute pas, en effet, mais la Maia est loin d’être sereine avec ses propres émotions à l’heure actuelle, et c’est pour cette raison, probablement, que ses réactions la dépassent, tandis qu’elle les découvre allant bien au-delà de ce qu’elles devraient être, sans comprendre véritablement les raisons d’un tel revirement de cœur… Ou sans le vouloir plutôt, tant la jalousie est une émotion déplaisante, et qu’elle voudrait n’avoir pour rien au monde à éprouver.

Pourquoi être jaloux quand on peut simplement aimer, librement, profondément, viscéralement. La jalousie érige des barrières autour du sentiment le plus pur qui soit au monde, et elle refuse de voir son cœur entravé quand il ne lui a jamais semblé plus libre qu’au moment de battre pour la merveilleuse Galadriel. Non, il ne saurait être question de se refuser à sa tendresse, à sa chaleur, pas plus qu’à la pureté de ses déclarations… Elle n’a que trop besoin de chacune d’entre elles. Il est vrai, elles n’ont guère besoin de raisons pour se dire leur amour, et d’ailleurs, elles devraient probablement se garder de s’en donner… Mais se le rappeler constamment, puisqu’elles ne peuvent, quoi qu’il en soit, décemment pas respirer le même air toutes deux sans s’aimer dans le même temps, l’un tout aussi naturel que l’autre, d’un ordre tout aussi essentiel et puissant.

« J’ai aimé l’entendre », confirme Melian sans perdre son doux sourire alors que Galadriel lui fait avouer qu’il n’a pas dû lui déplaire que d’entendre Galadriel se répandre sur ses sentiments.

C’est le cas en effet, la Maia a pris le plus grand des plaisirs à entendre l’Elfe exprimer son sentiment le plus vif et le plus profond à ce sujet. Elle avait véritablement eu besoin de se savoir compter à ce point pour elle, elle avait véritablement eu besoin d’entendre chacun de ces mots, quand bien même elle prétendra qu’il n’en est rien. L’amour le plus pur et le plus évident ne s’épargne pas des déclarations tout aussi pures et évidentes… Les deux ne sont jamais que les deux facettes d’une même pièce, qu’il faut savoir apprécier l’une et l’autre avec une égale douceur et une égale reconnaissance.

« Je pense que je prendrais même un certain plaisir à t’entendre me le répéter, voire même à t’entendre te répandre plus longuement sur le sujet », observe-t-elle d’un ton joueur, amusé.

Elle ne prétendra pas savoir prendre à présent cette situation à la légère, avec facilité et décontraction, mais elle parvient, petit à petit, à l’apprivoiser, et c’est déjà bien assez après avoir eu vent d’une nouvelle qui l’a tant déroutée.

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Melian peut-être à la fois sage et pourtant joueuse, elle est bien souvent plus joueuse que sage quand elle se trouve en présence de Galadriel. Cette dernière sait lui inspirer des sentiments si puissants, si exceptionnels, si irrationnels… si humains, au fond, qu’ils abattent les barrières de défiance qu’elle s’impose au cours de la plupart de ses interactions. Elle dissimule ses appréhensions et sa jalousie derrière une certaine malice, ce n’est certainement pas très juste…. Mais ô combien elle a besoin d’entendre la belle elfe lui assurer qu’elle l’aime, qu’elle l’aime plus fort que quiconque, et qu’elle l’aimera toujours quoi qu’il advienne…

Elle sourit doucement quand Galadriel s’exécute et répond à ses exigences que l’on pourra aisément qualifier de capricieuses, elle affirme dès lors que les mots avec lesquels elle s’exprimera seront forcément incapable de retranscrire parfaitement ce que son cœur ressent. Elle le croit et le sait sans mal en effet, car elle sait combien le langage, et même le plus raffiné d’entre tous, peut manquer de nuances et de subtilités au moment de décrire très précisément le sentiment amoureux et ce qu’il nous inspire. Elle laisse à Galadriel le soin de poursuivre, et elle s’imprègne de chaque mot, et si elle doit trouver l’un ou l’autre mot insuffisant, elle sait combler ce vide verbale par la force de ses propres sentiments. Chaque parole prononcée par la belle blonde peut trouver immédiatement un écho en son propre cœur, et il devient aussitôt on ne peut plus simple de l’entendre et de la croire sans discuter. Elles sont la lumière l’une de l’autre, et elles chérissent de manière égale le moindre instant qu’il leur est donné de passer en la compagnie l’une de l’autre.

Oui, elle se retrouve souvent confrontée à la tourmente de sentiments qu’elle n’aurait pas cru éprouver un jour, car se découvrir un amour si profond pour Galadriel lui a également appris la jalousie, mais elle ne peut pas un seul instant douter de la force des sentiments de Melian à son égard. Elle ne répond pas, il n’y a rien à dire parce qu’elle sait bien que Galadriel est tout à fait sincère. Et s’il y a bien une chose par laquelle cette dernière ne pèchera absolument jamais, c’est pas sa sincérité. Melian sait qu’elle peut croire dans le moindre de ses mots sans redouter qu’ils ne reflètent pas très exactement une réalité dans laquelle elle a tant besoin de croire.

« La jalousie… » Elle soupire doucement. « Je n’aime pas du tout ce sentiment. » Il n’y a rien de plus bête et de plus simple à dire, mais c’est un fait néanmoins. « Je suis soulagée de savoir que tu ne le partages pas. »

Il ne manquerait plus qu’elles soient toutes deux à devoir faire face à ce sentiment ô combien indignant et désagréable. Non, ni l’une ni l’autre ne peuvent se souhaiter une chose pareille – en aucun cas.

« Tu me rends heureuse, tu ne dois jamais en douter. Même quand ces émotions que je maîtrise si mal parce que je les connais si peu m’assaillent, elles ne remettent pas en question ta sincérité, ton affection ou ta loyauté, c’est moi qu’elles remettent en question et qu’elles mettent à l’épreuve. »